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12/12/2016 | FRANCE | N°15MA04439

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 5ème chambre - formation à 3, 12 décembre 2016, 15MA04439


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B...C...a demandé au tribunal administratif de Marseille d'annuler l'arrêté du 5 octobre 2015 par lequel le préfet des Bouches-du-Rhône l'a obligé à quitter le territoire français sans délai ainsi que l'arrêté du 5 octobre 2015 par lequel le préfet des Bouches-du-Rhône l'a placé en rétention administrative à Marseille ;

Par un jugement n° 1508002 du 9 octobre 2015, le tribunal administratif de Marseille, a rejeté la demande de M.C....

Procédure devant la Cour :

Par une req

uête et un mémoire complémentaire, enregistrés le 20 novembre 2015 et le 5 octobre 2016, M.C..., re...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B...C...a demandé au tribunal administratif de Marseille d'annuler l'arrêté du 5 octobre 2015 par lequel le préfet des Bouches-du-Rhône l'a obligé à quitter le territoire français sans délai ainsi que l'arrêté du 5 octobre 2015 par lequel le préfet des Bouches-du-Rhône l'a placé en rétention administrative à Marseille ;

Par un jugement n° 1508002 du 9 octobre 2015, le tribunal administratif de Marseille, a rejeté la demande de M.C....

Procédure devant la Cour :

Par une requête et un mémoire complémentaire, enregistrés le 20 novembre 2015 et le 5 octobre 2016, M.C..., représenté par Me A..., demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de Marseille du 9 octobre 2015 ;

2°) d'annuler l'arrêté du 5 octobre 2015 par lequel le préfet des Bouches-du-Rhône l'a obligé à quitter le territoire français sans délai ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat le versement de la somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, sous réserve de la renonciation au bénéfice de l'aide juridictionnelle en application de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991.

Il soutient que :

- le préfet n'a pas procédé à un examen de sa situation personnelle ;

- la commission du titre de séjour aurait dû être saisie dès lors qu'il réside depuis plus de dix ans en France ;

- les dispositions de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ont été ainsi méconnues ;

- la décision portant obligation de quitter le territoire français est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation et a été prise en violation des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- cette décision a également violé les stipulations du 1° de l'article 6-1 de l'accord franco-algérien modifié ;

- la décision refusant un délai de départ volontaire est entachée par une erreur manifeste d'appréciation.

Par un mémoire en défense, enregistré le 21 septembre 2016, le préfet des Bouches-du-Rhône conclut au rejet de la requête.

Il soutient que

- la requête est irrecevable ;

- les autres moyens de la requête ne sont pas fondés.

M. C...a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 29 février 2016.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- le règlement (CE) n°562/2006 du Parlement européen et du Conseil du 15 mars 2006 établissant un code communautaire relatif au régime de franchissement des frontières par les personnes (code frontières Schengen) ;

- l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 modifié ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 modifiée ;

- le décret n° 91-1266 du 19 décembre 1991 modifié ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Le rapport de M. Pecchioli a été entendu au cours de l'audience publique.

1. Considérant que par jugement du 9 octobre 2015, le tribunal administratif de Marseille a rejeté la demande de M.C..., né le 16 décembre 1965, de nationalité algérienne, tendant à l'annulation de l'arrêté du 5 octobre 2015 par lequel le préfet des Bouches-du-Rhône l'a obligé à quitter le territoire français sans délai ; que M. C...relève appel de ce jugement ;

Sur le bien-fondé du jugement attaqué :

En ce qui concerne la décision portant obligation de quitter le territoire français :

2. Considérant, en premier lieu, que la décision portant obligation de quitter le territoire français vise la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales du 4 novembre 1950, le règlement (CE) n°562/2006 du Parlement européen et du Conseil du 15 mars 2006 établissant un code communautaire relatif au régime de franchissement des frontières par les personnes (code frontières Schengen), l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 modifié et le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; que l'arrêté mentionne également notamment que l'intéressé, en situation irrégulière, ne peut justifier être entré régulièrement sur le territoire français et qu'il ne satisfait pas aux conditions requises pour prétendre à la régularisation de sa situation ; qu'il est précisé également qu'il n'entre dans aucune des catégories de plein droit définies aux articles 6 et 7bis de l'accord précité, ne justifiant pas des dix ans de présence sur le territoire ; qu'ainsi cet arrêté est suffisamment motivé et n'est pas entaché d'un défaut d'examen de sa situation personnelle ;

3. Considérant, en deuxième lieu, qu'aux termes de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " (...) L'autorité administrative est tenue de soumettre pour avis à la commission mentionnée à l'article L. 312-1 la demande d'admission exceptionnelle au séjour formée par l'étranger qui justifie par tout moyen résider en France habituellement depuis plus de dix ans. (...) " ; qu'en l'espèce, l'arrêté en litige ne se prononçant pas sur une demande d'admission exceptionnelle au séjour, l'appelant ne peut invoquer utilement, en tout état de cause, le vice de procédure tenant au défaut de consultation de la commission du titre de séjour ;

4. Considérant, en troisième lieu, qu'aux termes de l'article 6 de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 susvisé : " (...) Le certificat de résidence d'un an portant la mention " vie privée et familiale " est délivré de plein droit : 1° au ressortissant algérien, qui justifie par tout moyen résider en France depuis plus de dix ans ou plus de quinze ans si, au cours de cette période, il a séjourné en qualité d'étudiant ; (...) " ; que ces stipulations, qui prescrivent que le ressortissant algérien remplissant les conditions prévues doit se voir attribuer de plein droit un titre de séjour, font obstacle à ce que l'intéressé puisse légalement faire l'objet d'une mesure d'éloignement ;

5. Considérant que le requérant n'établit pas par les pièces diverses et variées produites au dossier la réalité du caractère habituel de sa résidence en France depuis plus de dix ans ; que, dès lors, l'intéressé ne remplissait pas à la date de la décision attaquée, le 5 octobre 2015, les conditions prévues par les stipulations précitées pour se voir attribuer de plein droit un certificat de résidence d'un an et pouvait donc faire l'objet d'une mesure d'éloignement ;

6. Considérant, en quatrième et dernier lieu, qu'aux termes des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui " ;

7. Considérant que M.C..., célibataire et sans enfant, indique avoir de la famille en situation régulière en France, en particulier ses deux frères de nationalité française ; que, toutefois, il ne justifie ni ne plus avoir d'attaches familiales dans son pays d'origine, ni bénéficier d'une intégration particulière ; qu'il a passé la plus grande partie de sa vie dans son pays d'origine ; que, par suite, en lui faisant obligation de quitter le territoire français, le préfet n'a pas entaché sa décision d'une erreur manifeste dans l'appréciation des conséquences de sa décision sur la situation personnelle de M. C...et n'a pas porté au droit de ce dernier au respect de sa vie privée et familiale, garanti par les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales une atteinte disproportionnée au regard des buts poursuivis par cette décision ;

En ce qui concerne la décision refusant un délai de départ volontaire :

8. Considérant qu'aux termes de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " II. (...) l'autorité administrative peut, par une décision motivée, décider que l'étranger est obligé de quitter sans délai le territoire français : (...) 3° S'il existe un risque que l'étranger se soustraie à cette obligation. Ce risque est regardé comme établi, sauf circonstance particulière, dans les cas suivants (...) ; d) Si l'étranger s'est soustrait à l'exécution d'une précédente mesure d'éloignement ; (...) " ;

9. Considérant, d'une part, que la décision en litige, qui vise les articles L. 511-1 paragraphe II, L. 512-1 à L. 512-3, L. 551-1 à L. 551-2, L. 552-1 à L. 552-6 et L. 554-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et indique notamment que M. C...ne présente pas de garanties de représentation suffisantes, ne justifiant notamment pas d'un passeport en cours de validité, ni d'un lieu de résidence permanent, comporte les considérations de droit et de fait qui en constituent le fondement ; que, par suite, les moyens tirés de la motivation insuffisante de la décision et de l'absence d'examen particulier de la situation de l'intéressé ne peuvent qu'être écartés ;

10. Considérant, d'autre part, que s'il ressort des pièces du dossier que le requérant disposait d'une adresse stable à Marseille chez son frère, il est toutefois constant, ainsi que l'ont relevé à bon droit les premiers juges, que M. C...s'est soustrait à l'exécution d'une précédente mesure d'éloignement en date du 6 avril 2009 ; que, par suite, sa situation entrait dans le champ d'application des dispositions précitées du 3° d) du II de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile qui permettent à l'autorité administrative de priver l'étranger d'un délai de départ volontaire ; que, par conséquent, M. C...ne présentait pas de garanties de représentation suffisantes au sens des dispositions précitées, et le préfet n'a commis aucune erreur manifeste d'appréciation en refusant de lui octroyer un délai de départ volontaire ;

11. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que M. C...n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande dirigée contre l'arrêté du préfet des Bouches du Rhône en date du 5 octobre 2015 ;

Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

12. Considérant qu'il résulte des dispositions combinées de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique et de l'article L. 761-1 du code de justice administrative que l'avocat du bénéficiaire de l'aide juridictionnelle peut demander au juge de condamner la partie perdante à lui verser la somme correspondant à celle qu'il aurait réclamée à son client, si ce dernier n'avait pas eu l'aide juridictionnelle, à charge pour l'avocat qui poursuit, en cas de condamnation, le recouvrement de la somme qui lui a été allouée par le juge, de renoncer à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l'Etat à la mission d' aide juridictionnelle qui lui a été confiée ;

13. Considérant que les dispositions précitées de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que l'Etat, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance soit condamné à verser une quelconque somme à M. C...ou à son conseil, au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens ;

D É C I D E :

Article 1er : La requête de M. B...C...est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. B...C..., au ministre de l'intérieur.

Copie en sera adressée au préfet des Bouches-du-Rhône.

Délibéré après l'audience du 28 novembre 2016, où siégeaient :

- M. Bocquet, président,

- M. Marcovici, président assesseur,

- M. Pecchioli, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 12 décembre 2016.

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N° 15MA04439


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Marseille
Formation : 5ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 15MA04439
Date de la décision : 12/12/2016
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-03 Étrangers. Obligation de quitter le territoire français (OQTF) et reconduite à la frontière.


Composition du Tribunal
Président : M. BOCQUET
Rapporteur ?: M. Jean-Laurent PECCHIOLI
Rapporteur public ?: M. REVERT
Avocat(s) : ZAOUI

Origine de la décision
Date de l'import : 27/12/2016
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.marseille;arret;2016-12-12;15ma04439 ?
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