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15/12/2016 | FRANCE | N°16MA00573

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 7ème chambre - formation à 3, 15 décembre 2016, 16MA00573


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La société Routière du Midi a demandé au tribunal administratif de Marseille, d'une part, d'annuler l'arrêté du 29 mai 2013 par lequel le préfet des Hautes-Alpes lui a refusé l'autorisation d'exploiter une carrière en terrasses alluvionnaires sur la commune de Saint-André-d'Embrun (Hautes-Alpes) et, d'autre part, de l'autoriser à exploiter cette même carrière, conformément à la demande qu'elle a déposée le 15 juin 2011.

Par un jugement n° 1304847 du 19 novembre 2015, le tribunal administrat

if de Marseille a, d'une part, annulé l'arrêté du 29 mai 2013, d'autre part, délivré à...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La société Routière du Midi a demandé au tribunal administratif de Marseille, d'une part, d'annuler l'arrêté du 29 mai 2013 par lequel le préfet des Hautes-Alpes lui a refusé l'autorisation d'exploiter une carrière en terrasses alluvionnaires sur la commune de Saint-André-d'Embrun (Hautes-Alpes) et, d'autre part, de l'autoriser à exploiter cette même carrière, conformément à la demande qu'elle a déposée le 15 juin 2011.

Par un jugement n° 1304847 du 19 novembre 2015, le tribunal administratif de Marseille a, d'une part, annulé l'arrêté du 29 mai 2013, d'autre part, délivré à la société Routière du Midi l'autorisation sollicitée, et l'a enfin renvoyée devant le préfet des Hautes-Alpes pour la fixation des prescriptions applicables à l'installation projetée.

Procédure devant la Cour :

Par un recours, enregistré le 16 février 2016, la ministre de l'environnement, de l'énergie et de la mer, demande à la Cour :

1°) à titre principal, d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Marseille du 19 novembre 2015 ;

2°) à titre subsidiaire, d'annuler ce jugement en tant seulement qu'il délivre l'autorisation sollicitée et renvoie la société Routière du Midi devant le préfet des Hautes-Alpes pour la fixation des prescriptions applicables à l'installation projetée.

Elle soutient que :

- le jugement est entaché d'une insuffisance de motivation ;

- les risques induits par le trafic routier étaient légalement fondés au regard de l'autorité attachée à la chose jugée par un arrêt du 8 février 2016 de la cour administrative d'appel de Marseille ;

- à titre subsidiaire, il convient de substituer aux motifs de la décision deux nouveaux motifs tirés de l'interdiction de circulation des poids lourds de plus de 19 tonnes sur la seule voie desservant la carrière et de l'annulation du plan local d'urbanisme de la commune de Saint-André-d'Embrun faisant obstacle à la délivrance de l'autorisation sollicitée ;

Par une intervention et un mémoire complémentaire, enregistrés le 13 mai 2016 et le 10 novembre 2016, la Fédération des Hautes-Alpes pour la pêche et la protection du milieu aquatique, représentée par la société d'avocats Leca Sorensen Galmard et associés, demande que la Cour fasse droit aux conclusions du recours de la ministre de l'environnement.

Elle soutient que :

- la nécessité de préserver le milieu environnant faisait obstacle à la délivrance de l'autorisation sollicitée.

- le projet autorisé par le tribunal est incompatible avec les orientations n° 2 et n° 6 du schéma directeur d'aménagement et de gestion des eaux (SDAGE) du bassin Rhône-Méditerranée ;

- il est également incompatible avec les dispositions d'urbanisme en vigueur à la date de délivrance de l'autorisation ;

- les risques induits par le trafic routier justifiaient le refus d'exploitation opposé à la société Routière du Midi ;

Par un mémoire, enregistré le 26 octobre 2016, la société Routière du Midi, représentée par le cabinet Frêche et associés, conclut au rejet du recours et à ce que soit mise à la charge de l'Etat la somme de 5 000 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- le jugement est suffisamment motivé ;

- les moyens tirés des risques induits par le trafic routier et de l'atteinte portée au milieu environnant ne sont pas fondés ;

- le plan local d'urbanisme de la commune n'a été annulé que pour des vices de légalité externe ;

- les deux nouveaux motifs invoqués ne se fondent pas sur la situation existante à la date de la décision contestée ;

- l'invocation de ces nouveaux motifs en cours d'instance ne lui permet pas de bénéficier de la procédure contradictoire instaurée par l'article R. 512-26 du code de l'environnement et fait obstacle à ce que les instances consultatives concernées par le projet émettent un avis, la privant ainsi d'une garantie ;

- ces nouveaux motifs ne fondent pas légalement la décision ;

Vu l'arrêt n° 16MA00667 du 16 juin 2016 par lequel la cour administrative d'appel de Marseille a prononcé le sursis à l'exécution du jugement n° 1304847 du 19 novembre 2015 du tribunal administratif de Marseille.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code de l'environnement ;

- le code de l'urbanisme ;

- la loi n° 2015-992 du 17 août 2015 ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Guidal, président,

- les conclusions de M. Salvage, rapporteur public,

- et les observations de Me A..., du cabinet Frêche et associés, représentant la société Routière du Midi, et Me B... de la société d'avocats Leca Sorensen Galmard et associés, représentant la Fédération des Hautes-Alpes pour la pêche et la protection du milieu aquatique.

1. Considérant que, par jugement du 19 novembre 2015, le tribunal administratif de Marseille a, sur la demande de la société Routière du Midi, d'une part, annulé l'arrêté du 29 mai 2013 par lequel le préfet des Hautes-Alpes lui a refusé l'autorisation d'exploiter une carrière en terrasses alluvionnaires sur la commune de Saint-André-d'Embrun (Hautes-Alpes), d'autre part, l'a autorisée à exploiter cette carrière, conformément à la demande qu'elle avait déposée le 15 juin 2011, et enfin l'a renvoyée devant le préfet des Hautes-Alpes pour la fixation des prescriptions applicables à l'installation projetée ; que la ministre de l'environnement, de l'énergie et de la mer relève appel de ce jugement ;

Sur l'intervention de la Fédération des Hautes-Alpes pour la pêche et la protection du milieu aquatique :

2. Considérant que la Fédération des Hautes-Alpes pour la pêche et la protection du milieu aquatique, qui intervient au soutien des conclusions du recours de la ministre, justifie, eu égard à son objet statutaire et à la nature du litige, d'un intérêt suffisant pour intervenir dans la présente instance ; que son intervention est, par suite, recevable ;

Sur l'appel de la ministre de l'environnement, de l'énergie et de la mer :

3. Considérant qu'aux termes de l'article L. 511-1 du code de l'environnement, dans sa rédaction applicable : " Sont soumis aux dispositions du présent titre les usines, ateliers, dépôts, chantiers et, d'une manière générale, les installations exploitées ou détenues par toute personne physique ou morale, publique ou privée, qui peuvent présenter des dangers ou des inconvénients soit pour la commodité du voisinage, soit pour la santé, la sécurité, la salubrité publiques, soit pour l'agriculture, soit pour la protection de la nature, de l'environnement et des paysages, soit pour l'utilisation rationnelle de l'énergie, soit pour la conservation des sites et des monuments ainsi que des éléments du patrimoine archéologique. / Les dispositions du présent titre sont également applicables aux exploitations de carrières au sens des articles L. 100-2 et L. 311-1 du code minier" ; que l'article L. 512-1 du même code dispose que : " Sont soumises à autorisation préfectorale les installations qui présentent de graves dangers ou inconvénients pour les intérêts visés à l'article L. 511-1. / L'autorisation ne peut être accordée que si ces dangers ou inconvénients peuvent être prévenus par des mesures que spécifie l'arrêté préfectoral. (...) " ;

4. Considérant que pour refuser l'autorisation d'exploitation sollicitée, le préfet des Hautes-Alpes a estimé que le projet de la société Routière du Midi aurait un impact négatif sur des espaces de grande qualité écologique et paysagère, que la zone concernée était exposée à des risques naturels et notamment de crues, que le trafic routier engendré par cette exploitation occasionnerait des nuisances pour les riverains et aurait un effet négatif sur les activités de tourisme, qu'il n'existait pas de parcours alternatif permettant une distribution allégée du trafic routier alors que l'absence de sondages géotechniques ne permettait pas de s'assurer de la compatibilité structurelle de la chaussée de la voie d'accès à la carrière avec le trafic routier de gros tonnage envisagé et, enfin, que le projet ne permettait pas de garantir la sécurité des pratiquants de sports d'eau vives contre les risques d'emportement des matériaux inertes dans le lit de la Durance ; que pour annuler cette décision, le tribunal administratif a considéré qu'aucun de ces motifs ne pouvait légalement fonder le refus opposé à la société Routière du Midi ;

5. Considérant qu'il résulte de l'instruction que par un arrêté du 9 juillet 2012 le maire de Châteauroux-les-Alpes a interdit à la circulation les véhicules dont le poids total roulant autorisé est supérieur à dix-neuf tonnes, sur la portion de la voie qui permet l'accès à la carrière litigieuse et qui débute à trente mètres après le passage à niveau pour se terminer au site de la Vague du Rabioux ; que par un jugement du 19 février 2015, le tribunal administratif de Marseille a rejeté la demande de la société Routière du Midi tendant à l'annulation de cet arrêté ; que par un arrêt n° 15MA01837 du 8 février 2016, la Cour, après avoir annulé ce jugement pour irrégularité et évoquer l'affaire, a rejeté la demande présentée par la société Routière du Midi devant le tribunal administratif ; qu'en l'absence d'identité de parties et d'objet cet arrêt n'est pas revêtu de l'autorité de la chose jugée dans le litige né du recours que la société Routière du Midi a introduit contre l'arrêté du 29 mai 2013 lui refusant l'autorisation d'exploiter cette carrière ; qu'il suit de là que le moyen présenté par la ministre de l'environnement, de l'énergie et de la mer, tiré de l'autorité de la chose jugée s'attachant aux motifs de cet arrêt, doit être écarté ;

6. Considérant que si la ministre de l'environnement, de l'énergie et de la mer ne critique pas le bien fondé de l'appréciation portée par les premiers juges sur les cinq autres motifs de l'arrêté litigieux, elle se prévaut toutefois pour la première fois en appel de ce que le règlement du plan d'occupation des sols en vigueur s'opposait à la délivrance de l'autorisation sollicitée et demande à la Cour que ce nouveau motif soit substitué aux motifs initiaux de la décision contestée ;

7. Considérant, d'une part, qu'aux termes de l'article L. 123-5 du code de l'urbanisme, dans sa rédaction en vigueur jusqu'au 31 décembre 2015 : " Le plan rendu public est opposable à toute personne publique ou privée pour l'exécution de tous travaux (...) et l'ouverture des installations classées appartenant aux catégories déterminées dans le plan (...) " ; qu'aux termes de l'article L. 152-1 du même code, dans sa rédaction résultant de l'ordonnance n° 2015-1174 du 23 septembre 2015, en vigueur à compter du 1er janvier 2016 : " L'exécution par toute personne publique ou privée de tous travaux, constructions, aménagements, (...) et ouverture d'installations classées appartenant aux catégories déterminées dans le plan sont conformes au règlement et à ses documents graphiques " ; qu'il résulte de ces dispositions que l'ouverture d'installations classées soumises à autorisation ne peut être autorisée que si elle est compatible et depuis le 1er janvier 2016 conforme, avec les dispositions d'un plan d'occupation des sols ou d'un plan local d'urbanisme ;

8. Considérant, d'autre part, qu'aux termes de l'article L. 514-6 du code de l'environnement, les décisions prises sur le fondement de l'article L. 512-1, accordant ou refusant une autorisation d'exploiter une installation classée pour la protection de l'environnement, sont soumises à un contentieux de pleine juridiction ; qu'il appartient, dès lors, au juge de plein contentieux de ces installations d'apprécier le respect des règles de fond régissant l'installation au regard des circonstances de fait et de droit en vigueur à la date à laquelle il se prononce ; que, toutefois aux termes du 2ème alinéa du I du même article dans sa rédaction issue de la loi n° 2015-992 du 17 août 2015 applicable à l'instance en cours : " Par exception, la compatibilité d'une installation classée avec les dispositions d'un schéma de cohérence territoriale, d'un plan local d'urbanisme, d'un plan d'occupation des sols ou d'une carte communale est appréciée à la date de l'autorisation, de l'enregistrement ou de la déclaration " ; qu'il résulte de l'ensemble de ces dispositions que lorsque le juge de plein contentieux des installations classées pour la protection de l'environnement est régulièrement saisi d'une requête dirigée contre une décision refusant d'autoriser l'ouverture d'une telle installation ou lorsqu'il délivre lui-même cette autorisation, il lui appartient d'apprécier la compatibilité de l'installation classée avec les dispositions du plan local d'urbanisme ou du plan d'occupation des sols en vigueur à la date à laquelle il statue ;

9. Considérant, ensuite, que le juge du plein contentieux des installations classées pour la protection de l'environnement saisi d'un recours dirigé contre le refus d'autoriser l'exploitation d'une telle installation peut, en première instance comme en appel, substituer au motif sur lequel s'est fondée l'autorité administrative un autre motif de droit ou de fait relatif au même refus, sous les conditions que cette substitution ait été demandée par ladite autorité lors de l'instruction de l'affaire, que la substitution demandée ne prive pas le bénéficiaire de l'autorisation d'une garantie procédurale liée au motif substitué et sous réserve d'avoir mis à même le défendeur de présenter ses observations sur la substitution ainsi sollicitée ; que, dans un tel cas, lorsqu'il apprécie le respect des règles de fond, le juge du plein contentieux des installations classées n'a pas à se placer à la date de la décision contestée ; qu'il lui appartient seulement de tenir compte de la situation de fait et de droit en vigueur à la date à laquelle il se prononce, comme exposé au point 8 ;

10. Considérant, enfin, qu'aux termes de l'article L. 121-8 du code de l'urbanisme, dont les dispositions ont été reprises à l'article L. 600-2 du même code: " L'annulation ou la déclaration d'illégalité d'un schéma de cohérence territoriale, d'un plan local d'urbanisme, d'une carte communale, d'un schéma directeur ou d'un plan d'occupation des sols ou d'un document d'urbanisme en tenant lieu a pour effet de remettre en vigueur le schéma de cohérence territoriale, le schéma directeur ou le plan local d'urbanisme, la carte communale ou le plan d'occupation des sols ou le document d'urbanisme en tenant lieu immédiatement antérieur. " ; que, dès lors, il peut être utilement soutenu devant le juge des installations classées pour la protection de l'environnement que l'autorisation d'exploiter une carrière a été délivrée sous l'empire d'un document d'urbanisme illégal, à la condition que le requérant fasse en outre valoir que cette autorisation méconnaît les dispositions pertinentes ainsi remises en vigueur ; qu'est à cet égard sans incidence la circonstance que le document d'urbanisme aurait été annulé pour un vice de légalité externe ;

11. Considérant qu'il résulte de l'instruction que par un jugement n° 1300607 du 29 décembre 2014, devenu définitif après le rejet de l'appel formé par la commune de Saint-André-d'Embrun par un arrêt de la Cour n° 15MA01005 du 12 mai 2016, le tribunal administratif de Marseille a annulé la délibération du 29 novembre 2012 par laquelle le conseil municipal a approuvé le plan local d'urbanisme de la commune ; que l'annulation ainsi prononcée par le tribunal administratif a eu pour effet, d'une part, de faire disparaître de l'ordonnancement juridique ce document d'urbanisme et, d'autre part, de remettre en vigueur les dispositions antérieures du plan d'occupation des sols approuvé le 15 octobre 1999, auxquelles les dispositions annulées s'étaient substituées ; qu'ainsi, contrairement à ce que soutient la société Routière du Midi, la ministre de l'environnement, de l'énergie et de la mer peut utilement soutenir que le classement, par ce plan d'occupation des sols, en zone NC a. et ND du terrain d'assiette de la carrière projetée justifie légalement le refus de la délivrance de l'autorisation sollicitée ;

12. Considérant que le règlement du plan d'occupation des sols approuvé le 15 octobre 1999 définit la zone ND comme correspondant à des espaces naturels " qu'il convient de protéger en raison de l'existence de risques naturels, de la qualité du paysage et du caractère des éléments naturels qui la composent, pouvant présenter un intérêt écologique " ; que sont autorisées dans cette zone, selon l'article ND1 du règlement, l'extension des constructions à usage agricole existantes lorsqu'elles sont nécessaires à l'activité des exploitations, les installations d'intérêt général telles que station de transformation d'électricité, station de pompage, réservoir d'eau et autres ouvrages techniques, ainsi que les installations et aménagements directement liées à l'exploitation pastorale et forestière ; qu'y sont interdites toutes les occupations et utilisation du sol qui n'y sont pas autorisées ; que les circonstances invoquées tenant à ce que le refus opposé aurait un impact sur le coût des granulats utilisés dans la fabrication des couches de roulement des chaussées, qu'il rendrait plus difficile pour l'intimée le recyclage de déblais stockés provenant de l'activité du secteur du bâtiment et des travaux publics dans les Hautes-Alpes ou encore qu'il aurait un impact sur le trafic routier et la sécurité routière, au demeurant nullement établies, ne sauraient à elles seules conférer au projet d'exploitation de carrière, tel qu'envisagé, le caractère d'une installation d'intérêt général au sens des dispositions précitées du plan d'occupation des sols ; que ce projet est ainsi au nombre des occupations interdites dans cette zone pour des raisons de protection des sites et des paysages ;

13. Considérant qu'il résulte de l'instruction que le terrain d'assiette du projet est aussi pour une petite partie situé en zone NC a. du plan d'occupation des sols dont le règlement autorise les exhaussements et affouillements de sol tels qu'ils sont définis à l'art R. 442-2 du code de l'urbanisme ; que, toutefois, l'autorisation sollicitée portant à la fois sur des parcelles exploitables et sur un tonnage d'exploitation, elle ne présente pas un caractère divisible devant conduire à distinguer la zone d'exploitation située en zone ND du reste du projet situé en zone NC a. ; que, par suite, est sans incidence la circonstance alléguée tenant à ce que l'exploitation pourrait également être poursuivie en zone NC a. ; qu'au surplus, l'exploitation d'une carrière ne saurait être regardée comme un affouillement ou un exhaussements de sol au sens des dispositions précitées ;

14. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que les dispositions du plan d'occupation des sols approuvé le 15 octobre 1999 faisaient, en tout état de cause, obstacle à ce que l'autorisation litigieuse soit délivrée dès lors que la carrière litigieuse se situait pour sa plus grande partie en zone en zone ND du plan d'occupation des sols ; que, dans ces conditions, le tribunal administratif ne pouvait, à la date à laquelle il a statué et eu égard à son office, délivrer l'autorisation sollicitée ; que les dispositions susmentionnées du plan d'occupation des sols de la commune de Saint-André-d'Embrun restant à ce jour opposable aux tiers, la Cour est tenue elle-même de faire application de ces dispositions en vigueur à la date de son arrêt ; que le motif invoqué par la ministre de l'environnement, tenant à l'incompatibilité de l'exploitation de la carrière avec les dispositions de ce plan d'occupation des sols, est de nature à lui seul à justifier légalement le refus d'autorisation ;

15. Considérant que la substitution demandée ne prive pas la société Routière du Midi d'une garantie procédurale liée au motif substitué, dès lors que les dispositions de l'article R. 512-26 du code de l'environnement qu'elle invoque n'établissent aucune garantie de procédure autre que le droit de l'entreprise à accéder au dossier et à présenter des observations et qu'elle a été mise à même de présenter ses observations sur le nouveau motif ainsi invoqué au cours de la procédure contradictoire devant la Cour ; que la consultation de la commission départementale de la nature, des paysages et des sites, appelée selon l'article R. 341-16 du code de l'environnement à se prononcer sur les projets de décision relatifs aux carrières au titre de la gestion équilibrée des ressources naturelles, a pour objet d'apporter au préfet l'éclairage de cette commission sur l'impact de leur exploitation sur de tels équilibres ; qu'une telle consultation ne présente pas le caractère d'une garantie pour l'entreprise qui sollicite une autorisation d'exploitation à ce titre ; qu'ainsi, si le nouveau motif invoqué devant la Cour n'a pas été préalablement soumis à cette commission, à supposer d'ailleurs qu'elle ait qualité pour formuler un avis sur ce motif, cette circonstance n'a privé la société Routière du Midi d'aucune garantie ; qu'il y a lieu, dès lors, de procéder à la substitution de motif demandée par la ministre de l'environnement, de l'énergie et de la mer et de confirmer la décision de refus opposée par le préfet des Hautes-Alpes à la demande d'autorisation présentée par la société Routière du Midi ;

16. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que la ministre est fondée à soutenir que c'est à tort que, par jugement attaqué, le tribunal administratif a annulé l'arrêté du 29 mai 2013 du préfet des Hautes-Alpes et a délivré à la société Routière du Midi l'autorisation d'exploiter une carrière sur la commune de Saint-André-d'Embrun ; que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce qu'une somme soit mise à la charge de l'Etat qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante ;

D É C I D E :

Article 1er : L'intervention de la Fédération des Hautes-Alpes pour la pêche et la protection du milieu aquatique est admise.

Article 2 : Le jugement n° 1304847 du tribunal administratif de Marseille du 19 novembre 2015 est annulé.

Article 3 : La demande présentée par la société Routière du Midi devant le tribunal administratif de Marseille est rejetée.

Article 4 : Les conclusions de la société Routière du Midi tendant au bénéfice des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à la ministre de l'environnement, de l'énergie et de la mer, chargée des relations internationales sur le climat, à la société Routière du Midi et à la Fédération des Hautes-Alpes pour la pêche et la protection du milieu aquatique.

Délibéré après l'audience du 6 décembre 2016, à laquelle siégeaient :

- M. Lascar, président de chambre,

- M. Guidal, président assesseur,

- M. Chanon, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 15 décembre 2016.

2

N° 16MA00573

bb


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Marseille
Formation : 7ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 16MA00573
Date de la décision : 15/12/2016
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

Nature et environnement - Installations classées pour la protection de l'environnement.

Procédure - Pouvoirs et devoirs du juge - Questions générales - Substitution de motifs.


Composition du Tribunal
Président : M. LASCAR
Rapporteur ?: M. Georges GUIDAL
Rapporteur public ?: M. SALVAGE
Avocat(s) : SCP LECA SORENSEN COURANT GALMARD et ASSOCIES

Origine de la décision
Date de l'import : 03/01/2017
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.marseille;arret;2016-12-15;16ma00573 ?
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