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19/12/2016 | FRANCE | N°15MA01522

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 6ème chambre - formation à 3, 19 décembre 2016, 15MA01522


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La société Berthouly Travaux publics a demandé au tribunal administratif de Marseille, dans le dernier état de ses écritures, et à titre principal, de condamner la société d'économie mixte d'équipement du pays d'Aix (SEMEPA) à lui verser, à titre de dommages-intérêts, la somme de 533 816,85 euros hors taxes augmentée de la taxe sur la valeur ajoutée et assortie des intérêts moratoires capitalisés à compter du 28 octobre 2010 et, à titre subsidiaire, de condamner la SEMEPA à lui verser la somm

e de 326 892,75 euros hors taxes augmentée de la taxe sur la valeur ajoutée et assor...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La société Berthouly Travaux publics a demandé au tribunal administratif de Marseille, dans le dernier état de ses écritures, et à titre principal, de condamner la société d'économie mixte d'équipement du pays d'Aix (SEMEPA) à lui verser, à titre de dommages-intérêts, la somme de 533 816,85 euros hors taxes augmentée de la taxe sur la valeur ajoutée et assortie des intérêts moratoires capitalisés à compter du 28 octobre 2010 et, à titre subsidiaire, de condamner la SEMEPA à lui verser la somme de 326 892,75 euros hors taxes augmentée de la taxe sur la valeur ajoutée et assortie des intérêts moratoires capitalisés à compter du 28 octobre 2010.

Par un jugement n° 1006993 du 3 mars 2015, le tribunal administratif de Marseille a rejeté la demande de la société Berthouly travaux publics.

Procédure devant la Cour :

Par une requête et des mémoires complémentaires enregistrés le 14 avril 2015 et les 18 mai, 1er juillet, 10 octobre 2016 et 22 novembre 2016, la société Berthouly Travaux Publics, représentée par la SELARL Racine, agissant par MeB..., demande à la Cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Marseille du 3 mars 2015 ;

2°) de condamner la SEMEPA à lui verser, à titre principal, la somme de 415 598,90 euros augmentée de la taxe sur la valeur ajoutée et assortie des intérêts moratoires capitalisés à compter du 28 octobre 2010 et, à titre subsidiaire, la somme de 326 892,75 euros augmentée de la taxe sur la valeur ajoutée et assortie des intérêts moratoires capitalisés à compter du 28 octobre 2010 au titre de son préjudice ;

3°) de mettre à la charge de la SEMEPA la somme de 2 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- en l'absence de signature du décompte par la personne responsable du marché, le document qui a été établi ne peut valoir décompte général ;

- la réclamation, qui a été adressée, est recevable dès lors que le litige porte sur l'établissement du décompte du marché qui constitue un différend avec le maître d'ouvrage ;

- elle a exposé des dépenses supplémentaires du fait de l'allongement du délai global d'exécution qui résulte d'une faute commise par la SEMEPA ;

- elle est recevable et fondée à agir à l'encontre de la SEMEPA, compte tenu des missions dévolues à cette dernière dans le cadre de son mandat ;

- à défaut, elle est fondée à rechercher sa responsabilité sur un fondement quasi-délictuel.

Par des mémoires en défense, enregistrés le 28 octobre 2015 et le 17 juin 2016, la SEMEPA, représentée par MeA..., conclut au rejet de la requête de la société Berthouly travaux publics et à ce que la somme de 6 000 euros soit mise à la charge de cette dernière sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- le décompte général est devenu définitif ;

- la requérante n'établit pas la réalité du préjudice résultant du retard dans l'exécution du marché ;

- elle ne justifie pas de travaux supplémentaires ou de sujétions imprévues.

Par un courrier du 21 janvier 2016, les parties ont été informées, en application de l'article R. 611-7 du code de justice administrative, de ce que la Cour était susceptible de relever d'office un moyen d'ordre public tiré de ce que l'action formée contre la SEMEPA, maître d'ouvrage délégué, est mal dirigée.

Par un courrier du 8 novembre 2016, les parties ont été informées, en application de l'article R. 611-7 du code de justice administrative, de ce que la Cour était susceptible de relever d'office un moyen d'ordre public tiré de l'irrecevabilité des conclusions de la société Berthouly travaux publics tendant à mettre en jeu la responsabilité de la société SEMEPA sur un fondement quasi-délictuel.

Des mémoires ont été enregistrés en réponse au second moyen d'ordre public, pour la société Berthouly travaux publics et pour la société SEMEPA, le 22 novembre 2016.

Vu :

- les autres pièces du dossier ;

- la loi n° 85-704 du 12 juillet 1985 ;

- le code des marchés publics

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Gautron,

- les conclusions de M. Thiele, rapporteur public,

- et les observations de Me A...représentant la SEMEPA.

1. Considérant que dans le cadre de l'opération de réhabilitation des infrastructures de la zone d'activités des Estroublans située à Vitrolles, menée par la société d'économie mixte d'équipement du pays d'Aix (SEMEPA) en qualité de maître d'ouvrage délégué de la commune de Vitrolles, la société Berthouly travaux publics s'est vu confier les lots 1 et 3 du marché de travaux ; qu'après réception des ouvrages, la société Berthouly travaux publics a sollicité, à l'appui du projet de décompte final, l'indemnisation du préjudice résultant de l'allongement de la durée d'exécution des travaux telle que prévue au marché ; qu'après avoir reçu le décompte général du marché, la société Berthouly travaux publics a adressé, le 10 mai 2010, un courrier au maître d'oeuvre puis a saisi, le 28 octobre 2010, le tribunal administratif de Marseille d'une demande tendant à la condamnation de la SEMEPA à l'indemniser du préjudice subi ; qu'elle relève appel du jugement du 3 mars 2015 par lequel le tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande ;

Sur le bien-fondé du jugement attaqué :

2. Considérant qu'aux termes de l'article 3 de la loi du 12 juillet 1985 relative à la maîtrise d'ouvrage publique et à ses rapports avec la maîtrise d'oeuvre privée : " Dans la limite du programme et de l'enveloppe financière prévisionnelle qu'il a arrêtés, le maître de l'ouvrage peut confier à un mandataire, dans les conditions définies par la convention mentionnée à l'article 5, l'exercice, en son nom et pour son compte, de tout ou partie des attributions suivantes de la maîtrise d'ouvrage : 1° Définition des conditions administratives et techniques selon lesquelles l'ouvrage sera étudié et exécuté ; 2° Préparation du choix du maître d'oeuvre, signature du contrat de maîtrise d'oeuvre, après approbation du choix du maître d'oeuvre par le maître de l'ouvrage, et gestion du contrat de maîtrise d'oeuvre ; 3° Approbation des avant-projets et accord sur le projet ; 4° Préparation du choix de l'entrepreneur, signature du contrat de travaux, après approbation du choix de l'entrepreneur par le maître de l'ouvrage, et gestion du contrat de travaux ; 5° Versement de la rémunération de la mission de maîtrise d'oeuvre et des travaux ; 6° Réception de l'ouvrage et l'accomplissement de tous actes afférents aux attributions mentionnées ci-dessus. / Le mandataire n'est tenu envers le maître de l'ouvrage que de la bonne exécution des attributions dont il a personnellement été chargé par celui-ci. / Le mandataire représente le maître de l'ouvrage à l'égard des tiers dans l'exercice des attributions qui lui ont été confiées jusqu'à ce que le maître de l'ouvrage ait constaté l'achèvement de sa mission dans les conditions définies par la convention mentionnée à l'article 5. Il peut agir en justice " ;

3. Considérant qu'il résulte de ces dispositions qu'il appartient aux constructeurs, s'ils entendent obtenir la réparation de préjudices consécutifs à des fautes du mandataire du maître d'ouvrage dans l'exercice des attributions qui lui ont été confiées, de rechercher la responsabilité du maître d'ouvrage, seule engagée à leur égard, et non celle de son mandataire, y compris dans le cas où ce dernier a signé les marchés conclus avec les constructeurs, dès lors qu'il intervient au nom et pour le compte du maître d'ouvrage, et n'est pas lui-même partie à ces marchés ; que, le cas échéant, le maître d'ouvrage dont la responsabilité est susceptible d'être engagée à ce titre peut appeler en garantie son mandataire sur le fondement du contrat de mandat qu'il a conclu avec lui ; que la responsabilité du mandataire du maître d'ouvrage à l'égard des constructeurs, qui ne peut jamais être mise en cause sur le terrain contractuel, ne peut l'être, sur le terrain quasi-délictuel, que dans l'hypothèse où les fautes alléguées auraient été commises en-dehors du champ du contrat de mandat liant le maître d'ouvrage et son mandataire ; qu'en revanche, les constructeurs ne sauraient rechercher la responsabilité du mandataire du maître d'ouvrage en raison de fautes résultant de la mauvaise exécution ou de l'inexécution de ce contrat ;

4. Considérant, en premier lieu, qu'il résulte de l'instruction que, par convention de mandat le 9 mars 2005 conclue avec la commune de Vitrolles, la SEMEPA a agi en qualité de mandataire de la commune de Vitrolles et pour le compte de cette dernière ; que les stipulations de ce contrat, notamment celles de l'article 5 n'ont pas entendu déroger à ce principe et donnent au maître d'ouvrage délégué la gestion du contrat de travaux tant administrative que financière et n'ont pas eu pour conséquence de faire perdre à la commune de Vitrolles sa qualité de maître d'ouvrage et de la décharger, vis-à-vis des entreprises, de la responsabilité qu'elle encourt en cette qualité ; que la responsabilité contractuelle du maître d'ouvrage délégué ne peut être engagée, quant à elle, que par le maître d'ouvrage et à raison des fautes commises dans l'exercice du mandat ; qu'il s'ensuit que la société Berthouly travaux publics, qui n'invoque aucune faute personnelle de la SEMEPA, détachable de son mandat, a mal dirigé son action en sollicitant la condamnation du maître d'ouvrage délégué, qui doit par suite être mise hors de cause ;

5. Considérant, en second lieu, que si la société Berthouly travaux publics soutient être fondée à rechercher la responsabilité quasi-délictuelle de la société SEMEPA, au titre de manquements de cette dernière à ses missions, telles que définies par le contrat de mandat la liant au maître d'ouvrage, elle n'a pas invoqué un tel fondement de responsabilité devant les premiers juges ; qu'ainsi, ses conclusions à ce titre sont nouvelles en appel et par suite, irrecevables ;

6. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que la société Berthouly travaux publics n'est pas fondée à se plaindre de ce que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande ;

Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

7. Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative s'opposent à ce que la somme réclamée au même titre par la société Berthouly travaux publics soit mise à la charge de la SEMEPA, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance ; que dans les circonstances de l'espèce, il n'y a pas lieu de mettre à la charge de la société Berthouly travaux publics la somme demandée par la SEMEPA au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ;

D É C I D E :

Article 1er : La requête de la société Berthouly travaux publics est rejetée.

Article 2 : Les conclusions présentées par la SEMEPA au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à la société Berthouly travaux publics et à la société d'économie mixte d'équipement du pays d'Aix (SEMEPA).

Délibéré à l'issue de l'audience du 5 décembre 2016, où siégeaient :

- M. Moussaron, président,

- Mme Steinmetz-Schies, président-assesseur,

- M. Gautron, conseiller.

Lu en audience publique, le 19 décembre 2016.

5

N°15MA01522


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Marseille
Formation : 6ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 15MA01522
Date de la décision : 19/12/2016
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

39-05-02 Marchés et contrats administratifs. Exécution financière du contrat. Règlement des marchés.


Composition du Tribunal
Président : M. MOUSSARON
Rapporteur ?: M. Sylvain OUILLON
Rapporteur public ?: M. THIELE
Avocat(s) : COURANT

Origine de la décision
Date de l'import : 03/01/2017
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.marseille;arret;2016-12-19;15ma01522 ?
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