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20/12/2016 | FRANCE | N°16MA00490

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 5ème chambre - formation à 3, 20 décembre 2016, 16MA00490


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme C... A...veuve D...a demandé au tribunal administratif de Marseille d'annuler l'arrêté du 22 avril 2015 par lequel le préfet des Bouches-du-Rhône a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligée à quitter le territoire français dans un délai de trente jours, et a fixé le pays à destination duquel cette mesure d'éloignement pouvait être exécutée d'office.

Par un jugement n° 1503425 du 6 juillet 2015, le tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande.

Procédure

devant la Cour :

Par une requête et un mémoire complémentaire enregistrés les 8 et 23 février...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme C... A...veuve D...a demandé au tribunal administratif de Marseille d'annuler l'arrêté du 22 avril 2015 par lequel le préfet des Bouches-du-Rhône a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligée à quitter le territoire français dans un délai de trente jours, et a fixé le pays à destination duquel cette mesure d'éloignement pouvait être exécutée d'office.

Par un jugement n° 1503425 du 6 juillet 2015, le tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête et un mémoire complémentaire enregistrés les 8 et 23 février 2016, Mme D..., représentée par Me E..., demande à la Cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Marseille du 6 juillet 2015 ;

2°) d'annuler les décisions du préfet des Bouches-du-Rhône du 22 avril 2015 ;

3°) d'enjoindre au préfet des Bouches-du-Rhône de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour puis une carte de séjour temporaire dans un délai de quinze jours sous astreinte de 100 euros par jour de retard à compter de la notification de l'arrêt à intervenir ou, à défaut, de réexaminer sa situation dans le même délai et sous la même astreinte ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 2 000 euros à verser à son conseil en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991.

Elle soutient que :

- l'exceptionnelle gravité de son état de santé justifie la délivrance d'un titre de séjour en application de l'article L. 313-11-11° du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le préfet a commis une erreur manifeste d'appréciation de sa situation à cet égard ;

- le préfet a méconnu l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.

Mme D... a été admise au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 14 décembre 2015.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Le rapport de Mme Hameline a été entendu au cours de l'audience publique.

1. Considérant que, par un arrêté du 22 avril 2015, le préfet des Bouches-du-Rhône a rejeté la demande de titre de séjour formée par Mme C... A...veuveD..., ressortissante tunisienne, à raison de son état de santé, a fait obligation à l'intéressée de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays à destination duquel cette mesure d'éloignement pouvait être exécutée d'office ; que Mme D... a saisi le tribunal administratif de Marseille d'une demande d'annulation de cet arrêté ; qu'elle interjette appel du jugement en date du 6 juillet 2015 par lequel le tribunal administratif a rejeté sa demande ;

Sur la légalité de l'arrêté du préfet des Bouches-du-Rhône :

En ce qui concerne le refus de titre de séjour :

2. Considérant, en premier lieu, qu'aux termes de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " est délivrée de plein droit : / (...) 11° A l'étranger résidant habituellement en France dont l'état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait entraîner pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité, sous réserve de l'absence d'un traitement approprié dans le pays dont il est originaire, sauf circonstance humanitaire exceptionnelle appréciée par l'autorité administrative après avis du directeur général de l'agence régionale de santé, sans que la condition prévue à l'article L. 311-7 soit exigée. (...) " ;

3. Considérant que si Mme D... fait valoir qu'elle est atteinte d'une pathologie anxio-dépressive évoluant depuis plusieurs années et nécessitant un traitement médicamenteux lourd, elle n'établit toutefois pas qu'un défaut de prise en charge médicale entraînerait pour elle des conséquences d'une exceptionnelle gravité, ni d'ailleurs qu'elle ne pourrait bénéficier d'un traitement approprié à son état de santé dans son pays d'origine, contrairement à ce qu'a estimé le médecin de l'agence régionale de santé dans son avis du 25 novembre 2014 au vu duquel le préfet des Bouches-du-Rhône a pris la décision contestée et que les pièces versées aux débats ne permettent pas de remettre en cause ; qu'en particulier, le nouveau certificat médical produit par Mme D... devant la Cour, établi le 4 février 2016, attestant de la nécessité de poursuivre un traitement médicamenteux pour une durée d'au moins deux ans, n'est pas susceptible de démontrer l'exceptionnelle gravité des conséquences d'un défaut de prise en charge médicale à la date de la décision contestée ; que, par suite, le moyen tiré de la méconnaissance par le préfet des dispositions du 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile doit être écarté ;

4. Considérant, en second lieu, qu'il ne ressort pas des pièces du dossier que le préfet des Bouches-du-Rhône aurait commis une erreur manifeste dans l'appréciation des conséquences de sa décision sur la situation personnelle de Mme D... au regard notamment de son état de santé en refusant de délivrer à celle-ci un titre de séjour ;

En ce qui concerne l'obligation de quitter le territoire français :

5. Considérant qu'aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " -1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui. " ;

6. Considérant que Mme D..., dont l'époux est décédé en 2012, est entrée en France le 6 avril 2013 à l'âge de 47 ans après avoir vécu jusqu'alors en Tunisie ; qu'à supposer même qu'elle se soit maintenue sur le territoire français de manière continue depuis cette date, l'ancienneté de son séjour n'excédait pas deux années à la date de la mesure d'éloignement prise à son encontre ; que la requérante n'apporte pas davantage en appel que devant les premiers juges d'élément susceptible d'établir les liens familiaux dont elle se prévaut en France sans fournir aucune précision sur ce point ; que, par ailleurs, elle ne démontre ni même ne soutient qu'elle serait dépourvue d'attaches familiales ou privées dans son pays d'origine ; que l'intéressée vit hébergée chez un tiers et ne fait état d'aucune insertion professionnelle ou sociale particulière sur le territoire français ; que, dans ces circonstances, le préfet des Bouches-du-Rhône n'a pas porté au droit de Mme D... au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée en édictant l'obligation de quitter le territoire français en litige, et n'a dès lors pas méconnu l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

7. Considérant qu'il résulte de l'ensemble de ce qui précède que Mme D..., qui n'invoque par ailleurs aucun moyen au soutien de ses conclusions dirigées contre la décision fixant le pays de destination, n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que le tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du préfet des Bouches-du-Rhône en date du 22 avril 2015 ;

Sur les conclusions aux fins d'injonction et d'astreinte :

8. Considérant que le présent arrêt, qui rejette les conclusions à fin d'annulation présentées par Mme D..., n'implique aucune mesure d'exécution ; qu'il y a lieu, par suite, de rejeter les conclusions présentées par l'intéressée tendant à ce qu'il soit enjoint au préfet des Bouches-du-Rhône, sous astreinte, de lui délivrer un titre de séjour ou, subsidiairement, de réexaminer sa situation ;

Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 :

9. Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font en tout état de cause obstacle à ce que l'Etat, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, verse la somme réclamée au titre des frais exposés et non compris dans les dépens au conseil de Mme D..., bénéficiaire de l'aide juridictionnelle totale ; que les conclusions présentées à cette fin au bénéfice de Me E... sur le fondement de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 ne peuvent, dès lors, qu'être rejetées.

D É C I D E :

Article 1er : La requête de Mme A... veuve D...est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme C... A...veuveD..., à Me B... E... et au ministre de l'intérieur.

Copie en sera transmise au préfet des Bouches-du-Rhône.

Délibéré après l'audience du 12 décembre 2016, où siégeaient :

- Mme Erstein, président de la Cour,

- M. Marcovici, président assesseur,

- Mme Hameline, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 20 décembre 2016.

N° 16MA00490


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Marseille
Formation : 5ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 16MA00490
Date de la décision : 20/12/2016
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-01-03 Étrangers. Séjour des étrangers. Refus de séjour.


Composition du Tribunal
Président : Mme ERSTEIN
Rapporteur ?: Mme Marie-Laure HAMELINE
Rapporteur public ?: M. REVERT
Avocat(s) : VECCHIE-PEYRON

Origine de la décision
Date de l'import : 03/01/2017
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.marseille;arret;2016-12-20;16ma00490 ?
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