La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

11/04/2017 | FRANCE | N°15MA01014

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 9ème chambre - formation à 3, 11 avril 2017, 15MA01014


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme A... D...a demandé au tribunal administratif de Montpellier :

- d'annuler la décision du 20 juin 2013 par laquelle le principal du collège Via Domitia de Poussan a décidé de ne pas renouveler son contrat à durée déterminée d'assistante d'éducation, ensemble la décision rejetant son recours administratif, formé le 16 juillet 2013 ;

- d'ordonner sa réintégration sur son emploi ou sur tout emploi équivalent ainsi que la reconstitution de sa carrière et la régularisation de sa situat

ion auprès des organismes sociaux ;

- de condamner le collège Via Domitia à lui payer la s...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme A... D...a demandé au tribunal administratif de Montpellier :

- d'annuler la décision du 20 juin 2013 par laquelle le principal du collège Via Domitia de Poussan a décidé de ne pas renouveler son contrat à durée déterminée d'assistante d'éducation, ensemble la décision rejetant son recours administratif, formé le 16 juillet 2013 ;

- d'ordonner sa réintégration sur son emploi ou sur tout emploi équivalent ainsi que la reconstitution de sa carrière et la régularisation de sa situation auprès des organismes sociaux ;

- de condamner le collège Via Domitia à lui payer la somme de 15 000 euros, assortie des intérêts au taux légal à compter du 16 juillet 2013 et les intérêts étant capitalisés, en réparation des préjudices subis, sous astreinte de 100 euros par jour de retard.

Par un jugement n° 1304904 du 31 décembre 2014, le tribunal administratif de Montpellier a annulé la décision du 20 juin 2013, enjoint au collège Via Domitia de réintégrer juridiquement Mme D... à compter du 1er septembre 2013 et jusqu'au 31 août 2014, avec reconstitution de sa carrière sur cette période, et a condamné le collège Via Domitia à verser à l'intéressée la somme de 9 000 euros en réparation des préjudices subis.

Procédure devant la Cour :

Par un recours, enregistré le 6 mars 2015, la ministre de l'éducation nationale, de l'enseignement supérieur et de la recherche demande à la Cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Montpellier du 31 décembre 2014 ;

2°) de rejeter la demande présentée par Mme D... devant le tribunal administratif de Montpellier ;

3°) subsidiairement, d'annuler les articles 3 et 4 du jugement attaqué et de rejeter la demande indemnitaire présentée par Mme D..., ou de ramener ses prétentions indemnitaires à de plus justes proportions.

Elle soutient que :

- le contrat à durée déterminée de Mme D... n'a pas été reconduit pour un motif tiré de l'intérêt du service ;

- Mme D... ne justifie pas de la réalité des préjudices dont elle a demandé et obtenu réparation devant le tribunal administratif de Montpellier.

Par des mémoires en défense, enregistrés le 14 septembre 2015 et les 12 octobre, 22 novembre et 14 décembre 2016, Mme D..., représentée par Me B..., conclut au rejet de la requête et à ce qu'une somme de 1 800 euros soit mise à la charge de l'Etat en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- le recours a été enregistré après l'expiration du délai d'appel ;

- les moyens du recours ne sont pas fondés.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires ;

- la loi n° 84-16 du 11 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique de l'Etat ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Portail,

- et les conclusions de M. Roux, rapporteur public.

1. Considérant que Mme D... a été recrutée en qualité d'assistante d'éducation par le collège Via Domitia de Poussan par contrat à durée déterminée à compter du 1er février 2011 ; que ce contrat a été renouvelé pour une durée d'un an en septembre 2011 et en septembre 2012 ; que, le 20 juin 2013, le principal du collège Via Domitia a décidé de ne pas renouveler le contrat de Mme D..., arrivé à son terme le 31 août 2013; que celle-ci a demandé au tribunal administratif de Montpellier d'annuler cette décision, ensemble la décision rejetant son recours gracieux, formé le 16 juillet 2013, d'enjoindre au collège Via Domitia de la réintégrer dans son emploi, de reconstituer sa carrière ainsi que ses droits sociaux et de condamner le collège Via Domitia à l'indemniser des préjudices résultant du non renouvellement de son contrat à durée déterminée ; que, par un jugement du 31 décembre 2014, le tribunal administratif de Montpellier a annulé ces décisions, a enjoint au collège Via Domitia de réintégrer juridiquement Mme D... à compter du 1er septembre 2013 jusqu'au 31 août 2014 et de reconstituer ses droits sociaux et a condamné le collège Via Domitia à verser à Mme D... la somme de 9 000 euros en réparation des préjudices subis ; que la ministre de l'éducation nationale, de l'enseignement supérieur et de la recherche relève appel de ce jugement ;

Sur la fin de non recevoir opposée par Mme Rugierio-Ciarlone au recours de la ministre de l'éducation nationale, de l'enseignement supérieur et de la recherche :

2. Considérant qu'il ne ressort pas des pièces du dossier que le jugement attaqué ait été notifié à la ministre de l'éducation nationale, de l'enseignement supérieur et de la recherche ; que, par suite, il n'est pas établi que le délai d'appel de deux mois ait couru à son encontre ; que la fin de non recevoir opposée par Mme Rugierio-Ciarlone, et tirée de la tardiveté du recours, doit donc être écartée ;

Sur la légalité de la décision contestée du 20 juin 2013 :

3. Considérant qu'un agent public qui a été recruté par un contrat à durée déterminée ne bénéficie pas d'un droit au renouvellement de son contrat ; que, toutefois, l'administration ne peut légalement décider, au terme de son contrat, de ne pas le renouveler que pour un motif tiré de l'intérêt du service ;

4. Considérant que le motif invoqué par le collège, pour justifier de l'intérêt du service à ne pas renouveler le contrat à durée déterminée de Mme D... , était " de pacifier le climat de travail dans le collège alourdi par des oppositions et revendications " ; que, d'une part, la circonstance qu'au cours d'une réunion de service du 22 février 2013, les assistants d'éducation en poste au collège Via Domitia ont émis des revendications concernant leurs horaires de travail auxquelles le principal du collège a refusé de faire droit, ne saurait à elle seule justifier dans l'intérêt du service le non renouvellement du contrat à durée déterminée de ces agents ; que, d'autre part, il ne ressort nullement des pièces du dossier que le comportement des assistantes d'éducation, et de Mme D...en particulier, dont le principal ne contestait pas les qualités professionnelles, ait été source de désordres au sein de l'établissement ; qu'enfin, si un tract, diffusé le 24 juin 2013 à la sortie des écoles de Poussan, a mis en cause la gestion du principal du collège Via Domitia, il est postérieur à la décision de ne pas renouveler le contrat de Mme D... ; qu'en tout état de cause, il ne ressort pas des pièces du dossier que Mme D... ait contribué à la rédaction ou à la diffusion de ce tract ; que, dès lors, c'est à bon droit que les premiers juges ont estimé que ni le comportement de Mme D... ni l'intérêt du service ne justifiaient la décision de ne pas renouveler le contrat à durée déterminée de l'intéressée ;

5. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que la ministre de l'éducation nationale, de l'enseignement supérieur et de la recherche n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Montpellier a annulé la décision du 20 juin 2013 portant refus de renouvellement du contrat à durée déterminée de Mme D... ;

Sur la responsabilité :

6. Considérant qu'en décidant illégalement de ne pas renouveler le contrat à durée déterminée de Mme D..., le principal du collège Via Domitia a commis une faute de nature à engager la responsabilité de cet établissement public à l'égard de l'intéressée ;

7. Considérant, en premier lieu, que Mme D..., ne bénéficiant d'aucun droit au renouvellement de son contrat d'un an au-delà du 31 août 2014, peut prétendre à l'indemnisation du préjudice financier correspondant à la perte de rémunération subie entre le 1er septembre 2013 et le 31 août 2014, déduction faite des revenus qu'elle a perçus durant cette même période ; qu'il résulte de l'instruction que Mme D... a perçu, entre le 1er septembre 2012 et le 31 août 2013, une rémunération d'un montant total de 7 005,54 euros ; que postérieurement au non renouvellement de son contrat, elle a perçu, entre septembre 2013 et août 2014, des salaires pour un montant de 9 520 euros et des allocations de retour à l'emploi pour un montant de 1 835 euros ; que, dès lors, elle ne justifie pas d'un manque à gagner en lien direct avec l'illégalité fautive ;

8. Considérant, en second lieu, que Mme D... a subi un préjudice moral et des troubles dans ses conditions d'existence du fait de la décision illégale de ne pas renouveler son engagement ; qu'il sera fait une juste appréciation de l'ensemble des préjudices subis par l'intéressée en ramenant à 5 000 euros la somme que le collège Via Domitia a été condamné à lui verser ;

9. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que la ministre de l'éducation nationale, de l'enseignement supérieur et de la recherche est seulement fondée à demander la réformation du jugement attaqué en tant qu'il a condamné le collège Via Domitia à verser à Mme D... une indemnité excédant la somme de 5 000 euros ; que, par suite, la somme que le collège via Domitia a été condamné à verser à Mme D... doit être ramenée à la somme de 5 000 euros et le jugement attaqué doit être réformé dans cette mesure ;

Sur les intérêts et la capitalisation des intérêts :

10. Considérant, d'une part, que Mme D... a droit aux intérêts au taux légal sur la somme de 5 000 euros visée au point précédent, à compter du 17 juillet 2013, date de la réception de sa demande préalable par l'administration ;

11. Considérant, d'autre part, que, pour l'application de l'article 1154 du code civil, la capitalisation des intérêts peut être demandée à tout moment devant le juge du fond ; que cette demande ne peut toutefois prendre effet que lorsque les intérêts sont dus au moins pour une année entière ; que, le cas échéant, la capitalisation s'accomplit à nouveau à l'expiration de chaque échéance annuelle ultérieure sans qu'il soit besoin de formuler une nouvelle demande ; qu'il résulte de l'instruction que Mme D... a demandé qu'il soit procédé à la capitalisation des intérêts dans sa demande introductive d'instance enregistrée au greffe du tribunal le 21 octobre 2013 ; qu'il y a lieu de faire droit à cette demande de capitalisation des intérêts, au 17 juillet 2014, date à laquelle il était dû plus d'une année d'intérêts puis, le cas échéant, à chaque échéance annuelle à compter de cette date ;

Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

12. Considérant que, dans les circonstances de l'espèce, il y a lieu de mettre à la charge de l'Etat, qui est dans la présente instance la partie perdant pour l'essentiel, une somme de 1 000 euros à verser à Mme D... au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ;

D É C I D E :

Article 1er : La somme de 9 000 euros que le collège Via Domitia a été condamné à verser à Mme Rugierio-Ciarlone est ramenée à la somme de 5 000 euros. Cette somme portera intérêt aux taux légal à compter du 17 juillet 2013. Les intérêts échus à la date du 17 juillet 2014 seront capitalisés à cette date et à chaque échéance annuelle ultérieure pour produire eux-mêmes intérêts.

Article 2 : Le jugement du 31 décembre 2014 du tribunal administratif de Montpellier est réformé en ce qu'il a de contraire à l'article 1er du présent arrêt.

Article 3 : Le surplus des conclusions du recours de la ministre est rejeté.

Article 4 : L'Etat versera la somme de 1 000 euros à Mme D... en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à la ministre de l'éducation nationale, de l'enseignement supérieur et de la recherche et à Mme A...D....

Copie en sera adressée au collège Via Domitia.

Délibéré après l'audience du 24 mars 2017, où siégeaient :

- Mme Buccafurri, présidente,

- M. Portail, président-assesseur,

- Mme C..., première conseillère.

Lu en audience publique, le 11 avril 2017.

2

N° 15MA01014


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Marseille
Formation : 9ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 15MA01014
Date de la décision : 11/04/2017
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

Fonctionnaires et agents publics - Agents contractuels et temporaires - Fin du contrat - Refus de renouvellement.

Fonctionnaires et agents publics - Contentieux de la fonction publique - Contentieux de l'indemnité.


Composition du Tribunal
Président : Mme BUCCAFURRI
Rapporteur ?: M. Philippe PORTAIL
Rapporteur public ?: M. ROUX
Avocat(s) : R. WEYL - F. WEYL - F. WEYL - S. PORCHERON - E. TAULET

Origine de la décision
Date de l'import : 25/04/2017
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.marseille;arret;2017-04-11;15ma01014 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award