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15/09/2017 | FRANCE | N°16MA02155

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 7ème chambre - formation à 3, 15 septembre 2017, 16MA02155


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A... B...a demandé au tribunal administratif de Nice d'annuler pour excès de pouvoir, d'une part, la décision implicite par laquelle le préfet des Alpes-Maritimes a rejeté sa demande de délivrance d'un titre de séjour, d'autre part, l'arrêté du 29 janvier 2016 par lequel le même préfet a refusé de lui délivrer un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays à destination duquel il pouvait être éloigné.

Par un

jugement n° 1600523, 1600883 du 13 mai 2016, le tribunal administratif de Nice a annulé ...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A... B...a demandé au tribunal administratif de Nice d'annuler pour excès de pouvoir, d'une part, la décision implicite par laquelle le préfet des Alpes-Maritimes a rejeté sa demande de délivrance d'un titre de séjour, d'autre part, l'arrêté du 29 janvier 2016 par lequel le même préfet a refusé de lui délivrer un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays à destination duquel il pouvait être éloigné.

Par un jugement n° 1600523, 1600883 du 13 mai 2016, le tribunal administratif de Nice a annulé l'arrêté du 29 janvier 2016, enjoint au préfet des Alpes-Maritimes de délivrer à M. B... un titre de séjour portant la mention " vie privée et familiale " et rejeté le surplus des conclusions de sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête, enregistrée le 1er juin 2016, le préfet des Alpes-Maritimes demande à la Cour d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Nice du 13 mai 2016 et de rejeter la demande de M. B... devant ce tribunal.

Il soutient que :

- le tribunal a pris en considération des éléments communiqués au cours de l'audience par le requérant en méconnaissance du contradictoire ;

- c'est à tort que les premiers juges ont estimé que sa décision était entachée d'une erreur de droit ou d'une erreur d'appréciation ;

- le refus de séjour est régulièrement motivé ;

- la commission du titre de séjour n'avait pas à être saisie de la demande ;

- l'intéressé ne justifie pas de considérations humanitaires ou d'un motif exceptionnel permettant la régularisation de sa situation ;

- le refus de séjour n'a pas porté une atteinte disproportionnée à son droit au respect de sa vie privée et familiale.

Par des mémoires, enregistrés le 2 janvier 2017 et le 21 juin 2017, M. B..., représenté par Me C..., conclut au rejet de la requête, à ce qu'il soit enjoint au préfet des Alpes-Maritimes de lui délivrer un titre de séjour portant la mention " vie privée et familiale " dans le délai d'un mois à compter de la notification de l'arrêt à intervenir et à ce que soit mise à la charge de l'Etat la somme de 3 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient qu'aucun des moyens soulevés par le préfet des Alpes-Maritimes n'est fondé.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- l'accord du 17 mars 1988 entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement de la République de Tunisie en matière de séjour et de travail ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le code des relations entre le public et l'administration ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Guidal, président,

- et les observations de Me C..., représentant M. B....

1. Considérant que M. B..., ressortissant tunisien né le 26 septembre 1980, est entré en France en 2005 selon ses déclarations ; qu'après s'être vu refusé à deux reprises, en 2008 et 2013, l'admission au séjour sur le territoire français, il a sollicité de nouveau, le 3 juin 2015, la délivrance d'un titre de séjour portant la mention " vie privée et familiale " sur le fondement du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; qu'après avoir laissé naître une décision implicite de rejet de cette demande, le préfet des Alpes-Maritimes a, par un arrêté du 29 janvier 2016, refusé de lui délivrer le titre de séjour sollicité, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de destination ; que le préfet des Alpes-Martimes relève appel du jugement du 13 mai 2016 par lequel le tribunal administratif de Nice, après avoir rejeté comme irrecevables les conclusions dirigées contre la décision implicite, a annulé l'arrêté du 29 janvier 2016 et lui a enjoint de délivrer à M. B... un titre de séjour portant la mention " vie privée et familiale " ; que le préfet des Alpes-Martimes doit être regardé comme demandant l'annulation des articles 1 à 3 du jugement attaqué ;

2. Considérant qu'aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale (...)/ 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui " ; qu'aux termes du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention "vie privée et familiale" est délivrée de plein droit :/ (...) 7° A l'étranger (...) dont les liens personnels et familiaux en France, appréciés notamment au regard de leur intensité, de leur ancienneté et de leur stabilité, des conditions d'existence de l'intéressé, de son insertion dans la société française ainsi que de la nature de ses liens avec la famille restée dans le pays d'origine, sont tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus (...) " ;

3. Considérant que s'il ressort des pièces du dossier que M. B... vit auprès de ses parents qui sont titulaires d'une carte de résident, que son oncle et son cousin sont de nationalité française, et s'il est titulaire d'une promesse d'embauche dans une pizzeria, il en résulte également qu'il est célibataire et sans charge de famille, qu'il n'établit pas la date de son entrée sur le territoire français, mais seulement la date de son entrée aux Pays-Bas en 2005, qu'il ne justifie pas davantage avoir résidé habituellement en France au cours de la période antérieure au mois d'août 2008 ; qu'il s'est soustrait à l'exécution d'une précédente mesure d'éloignement prise à son encontre en 2013 et n'est pas dépourvu de toute attache dans son pays d'origine où il a vécu au moins jusqu'à l'âge de 25 ans ; que, dans ces conditions, l'arrêté du 29 janvier 2016 du préfet des Alpes-Martimes n'a pas porté au droit de l'intéressé au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels il a été pris et n'a ainsi pas méconnu ni les dispositions du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, ni les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; que, par suite, le préfet des Alpes-Martimes est fondé à soutenir que c'est à tort que le tribunal administratif de Nice s'est fondé la méconnaissance de ces dispositions et stipulations pour en prononcer l'annulation ;

4. Considérant toutefois qu'il appartient à la cour administrative d'appel, saisi de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les autres moyens soulevés par M. B... devant le tribunal administratif de Nice et devant la Cour ;

5. Considérant, en premier lieu, que l'arrêté contesté comporte l'énoncé des considérations de fait et de droit qui en constituent le fondement ; qu'il satisfait ainsi à l'exigence de motivation prévue par l'article L. 211-5 du code des relations entre le public et l'administration en vigueur depuis le 1er janvier 2016 ;

6. Considérant, en second lieu, qu'aux termes de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile " La carte de séjour temporaire mentionnée à l'article L. 313-11 ou la carte de séjour temporaire mentionnée au 1° de l'article L. 313-10 peut être délivrée, sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, à l'étranger ne vivant pas en état de polygamie dont l'admission au séjour répond à des considérations humanitaires ou se justifie au regard des motifs exceptionnels qu'il fait valoir, sans que soit opposable la condition prévue à l'article L. 311-7. / L'autorité administrative est tenue de soumettre pour avis à la commission mentionnée à l'article L. 312-1 la demande d'admission exceptionnelle au séjour formée par l'étranger qui justifie par tout moyen résider en France habituellement depuis plus de dix ans (...) " ; qu'aux termes de l'article L. 312-1 du même code : " Dans chaque département est instituée une commission du titre de séjour (...) " ; que l'accord franco-tunisien du 17 mars 1988 n'a pas entendu écarter l'application des dispositions de procédure qui s'appliquent à tous les étrangers en ce qui concerne la délivrance, le renouvellement ou le refus de titres de séjour ; qu'au nombre de ces dispositions figurent notamment les dispositions des articles L. 312-1 et L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

7. Considérant, d'une part, que le requérant n'apporte pas la preuve qu'il résidait en France habituellement depuis plus de dix ans à la date de la décision contestée, dès lors que les documents qu'il produits relatifs aux années 2005 à 2007 ne permettent d'établir que sa présence ponctuelle en France au cours de cette période ; que, dans ces conditions, le préfet des Alpes-Martimes n'était pas tenu de saisir la commission du titre de séjour en application des dispositions de l'article L. 313-14 précité ;

8. Considérant, d'autre part, que M. B... n'établit ni même ne soutient que des considérations humanitaires ou des motifs exceptionnels, qui ne sauraient en tout état de cause résulter de sa seule présence sur le territoire français pour la durée alléguée, justifieraient son admission au séjour ; qu'il n'est, dès lors, pas fondé à soutenir que la décision contestée serait entachée d'une d'erreur manifeste d'appréciation de sa situation au regard des dispositions de l'article L 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

9. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que le préfet des Alpes-Martimes est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Nice a annulé son arrêté du 29 janvier 2016 refusant à M. B... la délivrance d'un titre de séjour et lui faisant obligation de quitter le territoire français ;

10. Considérant que le présent arrêt, qui annule le jugement du tribunal administratif annulant l'arrêté du 29 janvier 2016 du préfet des Alpes-Martimes, n'appelle aucune mesure d'exécution ; que, par suite, les conclusions de M. B... aux fins d'injonction doivent être rejetées ;

11. Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de l'Etat, qui n'est pas dans la présente instance la partie perdante, la somme que M. B... demande au titre des frais exposés et non compris dans les dépens ;

D É C I D E :

Article 1er : Les articles 1 à 3 du jugement du 13 mai 2016 du tribunal administratif de Nice sont annulés.

Article 2 : La demande présentée par M. B... devant le tribunal administratif de Nice tendant à l'annulation de l'arrêté du préfet des Alpes-Martimes du 29 janvier 2016 est rejetée.

Article 3 : Les conclusions de M. B... aux fins d'injonction et celles tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... B...et au ministre de l'intérieur.

Copie en sera adressée au préfet des Alpes-Maritimes.

Délibéré après l'audience du 1er septembre 2017, à laquelle siégeaient :

- M. Pocheron, président de chambre,

- M. Guidal, président assesseur,

- M. Chanon, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 15 septembre 2017.

2

N° 16MA02155

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Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Marseille
Formation : 7ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 16MA02155
Date de la décision : 15/09/2017
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-03 Étrangers. Obligation de quitter le territoire français (OQTF) et reconduite à la frontière.


Composition du Tribunal
Président : M. POCHERON
Rapporteur ?: M. Georges GUIDAL
Rapporteur public ?: M. MAURY
Avocat(s) : GARELLI

Origine de la décision
Date de l'import : 26/09/2017
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.marseille;arret;2017-09-15;16ma02155 ?
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