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09/02/2018 | FRANCE | N°17MA02453

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 7ème chambre - formation à 3, 09 février 2018, 17MA02453


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme A... B...a demandé au tribunal administratif de Marseille d'annuler l'arrêté du 21 décembre 2016 par lequel le préfet des Bouches-du-Rhône a refusé de lui délivrer un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans le délai de trente jours et a fixé le pays à destination duquel elle pourrait être reconduite d'office à l'expiration de ce délai.

Par un jugement n° 1700436 en date du 10 mai 2017, le tribunal administratif de Marseille a rejeté cette demande.



Procédure devant la Cour :

Par une requête, enregistrée le 12 juin 2017, Mme B......

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme A... B...a demandé au tribunal administratif de Marseille d'annuler l'arrêté du 21 décembre 2016 par lequel le préfet des Bouches-du-Rhône a refusé de lui délivrer un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans le délai de trente jours et a fixé le pays à destination duquel elle pourrait être reconduite d'office à l'expiration de ce délai.

Par un jugement n° 1700436 en date du 10 mai 2017, le tribunal administratif de Marseille a rejeté cette demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête, enregistrée le 12 juin 2017, Mme B..., représentée par Me C..., demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de Marseille du 10 mai 2017 ;

2°) d'annuler l'arrêté du préfet des Bouches-du-Rhône en date du 21 décembre 2016 ;

3°) d'enjoindre au préfet des Bouches-du-Rhône de lui délivrer un titre de séjour provisoire à compter de la notification de l'arrêt à intervenir sous une astreinte de 150 euros par jour de retard ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 200 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- elle justifie de sa résidence habituelle en France depuis son entrée sur le territoire français le 29 juillet 2011 ;

- l'arrêté contesté porte une atteinte disproportionnée à son droit au respect de sa vie privée et familiale en violation des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- elle remplit les critères de régularisation énoncés par la circulaire ministérielle du 28 novembre 2012, dès lors qu'elle a des enfants scolarisés en France, qu'elle y justifie de cinq années de présence, qu'elle et son époux sont intégrés dans la société française, et qu'elle est assidue dans l'apprentissage de la langue française.

Par un mémoire en défense, enregistré le 12 septembre 2017, le préfet des Bouches- du-Rhône conclut au rejet de la requête.

Il soutient que les moyens développés par Mme B... ne sont pas fondés.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Guidal, président,

- et les observations de Me C..., représentant Mme B....

1. Considérant que Mme B..., née le 1er novembre 1989 et de nationalité arménienne, relève appel du jugement en date du 10 mai 2017 par lequel le tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du préfet des Bouches-du-Rhône du 21 décembre 2016 refusant de lui délivrer un titre de séjour, lui faisant obligation de quitter le territoire français dans le délai de trente jours et fixant le pays de destination ;

2. Considérant qu'aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. / 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui. " ; qu'aux termes de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " est délivrée de plein droit : (...) 7° A l'étranger ne vivant pas en état de polygamie, qui n'entre pas dans les catégories précédentes ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial, dont les liens personnels et familiaux en France, appréciés notamment au regard de leur intensité, de leur ancienneté et de leur stabilité, des conditions d'existence de l'intéressé, de son insertion dans la société française ainsi que de la nature de ses liens avec la famille restée dans le pays d'origine, sont tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus, sans que la condition prévue à l'article L. 311-7 soit exigée. L'insertion de l'étranger dans la société française est évaluée en tenant compte notamment de sa connaissance des valeurs de la République (...) " ; que pour l'application des stipulations et des dispositions précitées, l'étranger qui invoque la protection due à son droit au respect de sa vie privée et familiale en France doit apporter toute justification permettant d'apprécier la réalité et la stabilité de ses liens personnels et familiaux effectifs en France au regard de ceux qu'il a conservés dans son pays d'origine ;

3. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que Mme B..., née en Arménie, y a vécu au moins jusqu'au mois de juillet 2011, date à laquelle elle soutient être entrée en France afin d'y solliciter l'asile ; qu'en 2012, sa demande d'asile a été rejetée par l'Office français de protection des réfugiés et apatrides et en 2013 par la Cour nationale du droit d'asile ; qu'elle a fait l'objet, par voie de conséquence, d'une mesure d'éloignement prise le 6 février 2014, à l'exécution de laquelle elle s'est soustraite ; que son époux, de même nationalité a, pour sa part, fait l'objet d'une mesure d'éloignement en date du 4 juin 2016 sans délai de départ volontaire et assortie d'une interdiction de retour sur le territoire national d'une durée de deux ans, à l'encontre de laquelle il a exercé un recours rejeté par un jugement du tribunal administratif de Nîmes du 20 septembre 2016, confirmé par un arrêt de la cour administrative d'appel de Marseille du 2 octobre 2017 ; que si Mme B... fait valoir que ses deux jeunes fils Mushegh et Alex, nés respectivement le 9 avril 2009 en Arménie et le 9 août 2012 en France, sont inscrits à Marseille, l'un en cours élémentaire première année et l'autre en moyenne section de maternelle, il n'est pas établi que ces derniers ne pourraient pas poursuivre leur scolarité en Arménie, pays dont ils ont la nationalité, et dans lequel la requérante a toujours vécu jusqu'à son arrivée en France ; que par ailleurs, si Mme B... a suivi durant les années 2012 et 2013, des cours de français dispensés par la Ligue de l'enseignement des Alpes de Haute-Provence et l'Université populaire rurale ouverte de Digne-les-Bains et a occasionnellement exercé des fonctions d'interprète à titre bénévole, elle ne justifie pas, au regard de ses conditions d'existence, d'une intégration particulière dans la société française par la seule production d'un bulletin de salaire du mois de février 2016 ainsi que d'une promesse d'embauche en date du 12 octobre 2016 pour un emploi d'agent d'entretien en contrat à durée indéterminée ; que, dans ces conditions, malgré la présence en France depuis l'année 2011 de l'intéressée, et les liens amicaux qu'elle y a noués, l'arrêté contesté n'a pas porté au droit de Mme B... au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels il a été pris ; que, par suite, le préfet des Bouches-du-Rhône n'a méconnu ni les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, ni les dispositions du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

4. Considérant, s'agissant de la délivrance des titres de séjour, qu'il appartient au législateur, sous réserve des conventions internationales, de déterminer les conditions dans lesquelles les étrangers sont autorisés à séjourner sur le territoire national ; que, si les dispositions du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile régissant la délivrance des titres de séjour n'imposent pas au préfet, sauf disposition spéciale contraire, de refuser la délivrance d'un titre de séjour à un étranger qui ne remplit pas les conditions auxquelles est subordonné le droit d'obtenir ce titre, la faculté pour le préfet de prendre, à titre gracieux et exceptionnel, une mesure favorable à l'intéressé pour régulariser sa situation relève de son pouvoir d'appréciation de l'ensemble des circonstances de l'espèce ; qu'il est loisible au ministre de l'intérieur, chargé de mettre en oeuvre la politique du Gouvernement en matière d'immigration et d'asile, alors même qu'il ne dispose en la matière d'aucune compétence réglementaire, d'énoncer des orientations générales destinées à éclairer les préfets dans l'exercice de leur pouvoir de prendre des mesures de régularisation, sans les priver de leur pouvoir d'appréciation ; que c'est toutefois au préfet qu'il revient, dans l'exercice du pouvoir dont il dispose, d'apprécier dans chaque cas particulier, compte tenu de l'ensemble des éléments caractérisant la situation personnelle de l'étranger, l'opportunité de prendre une mesure de régularisation favorable à l'intéressé ;

5. Considérant qu'en dehors des cas où il satisfait aux conditions fixées par la loi, ou par un engagement international, pour la délivrance d'un titre de séjour, un étranger ne saurait se prévaloir d'un droit à l'obtention d'un tel titre ; que s'il peut, à l'appui d'un recours pour excès de pouvoir formé contre une décision préfectorale refusant de régulariser sa situation par la délivrance d'un titre de séjour, soutenir que la décision du préfet, compte tenu de l'ensemble des éléments de sa situation personnelle, serait entachée d'une erreur manifeste d'appréciation, il ne peut utilement se prévaloir des orientations générales que le ministre de l'intérieur a pu adresser aux préfets pour les éclairer dans la mise en oeuvre de leur pouvoir de régularisation ;

6. Considérant que Mme B... ne peut ainsi utilement se prévaloir des énonciations de la circulaire du 28 novembre 2012 du ministre de l'intérieur et notamment de celles relatives à l'examen des demandes d'admission exceptionnelle au séjour des ressortissants étrangers en situation irrégulière ; qu'en outre, il ressort des termes de l'arrêté contesté que le préfet des Bouches-du-Rhône a porté une appréciation sur le droit au séjour de Mme B... au titre de sa vie privée et familiale au vu de l'ensemble des éléments relatifs à sa situation personnelle ; qu'il résulte de ce qui a été dit au point 3, qu'en refusant de régulariser la situation de l'intéressée par la délivrance d'un titre de séjour, le préfet des Bouches-du-Rhône n'a pas entaché son refus d'une erreur manifeste d'appréciation ;

7. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que Mme B... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande ; que par suite, les conclusions à fin d'annulation de ce jugement doivent être rejetées ; que par voie de conséquence, il y a lieu de rejeter également ses conclusions aux fins d'injonction et d'astreinte ainsi que celles tendant à ce que soit mise à la charge de l'Etat une somme au titre des frais d'instance non compris dans les dépens ;

D É C I D E :

Article 1er : La requête de Mme B... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme A... B...et au ministre de l'intérieur.

Copie en sera adressé au préfet des Bouches-du-Rhône.

Délibéré après l'audience du 26 janvier 2018 où siégeaient :

- M. Pocheron, président,

- M. Guidal, président-assesseur,

- M. Maury, premier conseiller,

Lu en audience publique, le 9 février 2018.

N° 17MA02453 2

bb


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Marseille
Formation : 7ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 17MA02453
Date de la décision : 09/02/2018
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-01-03 Étrangers. Séjour des étrangers. Refus de séjour.


Composition du Tribunal
Président : M. POCHERON
Rapporteur ?: M. Georges GUIDAL
Rapporteur public ?: M. CHANON
Avocat(s) : MERDJIAN

Origine de la décision
Date de l'import : 20/02/2018
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.marseille;arret;2018-02-09;17ma02453 ?
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