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30/03/2018 | FRANCE | N°16MA01964

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 7ème chambre - formation à 3, 30 mars 2018, 16MA01964


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. C...B...a demandé au tribunal administratif de Nice d'annuler la décision du 19 novembre 2013 par laquelle le directeur général de l'Office français de l'immigration et de l'intégration a mis à sa charge la somme de 17 200 euros au titre de la contribution spéciale prévue à l'article L. 8253-1 du code du travail et la somme de 2 124 euros au titre de la contribution forfaitaire représentative des frais de réacheminement prévue à l'article L. 626-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers e

t du droit d'asile, ensemble la décision implicite rejetant son recours gracieu...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. C...B...a demandé au tribunal administratif de Nice d'annuler la décision du 19 novembre 2013 par laquelle le directeur général de l'Office français de l'immigration et de l'intégration a mis à sa charge la somme de 17 200 euros au titre de la contribution spéciale prévue à l'article L. 8253-1 du code du travail et la somme de 2 124 euros au titre de la contribution forfaitaire représentative des frais de réacheminement prévue à l'article L. 626-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, ensemble la décision implicite rejetant son recours gracieux formé le 17 janvier 2014.

Par un jugement n° 1402064 du 29 mars 2016, le tribunal administratif de Nice a rejeté la demande de M.B....

Procédure devant la Cour :

Par une requête enregistrée le 13 mai 2016, M.B..., représenté par MeA..., demande à la Cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Nice du 29 mars 2016 ;

2°) d'annuler la décision précitée du 19 novembre 2013, ensemble la décision implicite rejetant le recours gracieux formé le 17 janvier 2014 ;

3°) de mettre à la charge de l'Office français de l'immigration et de l'intégration la somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, outre les entiers dépens.

Il soutient que :

- le procès-verbal d'infraction ne lui a pas été communiqué ;

- la décision contestée méconnaît les droits de la défense ;

- la présomption d'innocence est méconnue ;

- il n'a fait l'objet ni d'une enquête administrative, ni de poursuites pénales ;

- la décision contestée est entachée d'erreur de qualification juridique des faits.

Par un mémoire en défense, enregistré le 26 septembre 2017, l'Office français de l'immigration et de l'intégration conclut au rejet de la requête et à la mise à la charge de M. B... d'une somme de 2 800 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que les moyens soulevés par M. B...ne sont pas fondés.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le code du travail ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Féménia,

- les conclusions de M. Chanon,

- et les observations de MeA..., représentant M.B....

1. Considérant qu'à l'issue d'un contrôle routier effectué le 21 juin 2012, les services de la police nationale ont constaté que M.B..., artisan en bâtiment, employait un ressortissant tunisien en situation irrégulière sur le territoire national ; que, par une décision du 10 mars 2015, l'Office français de l'immigration et de l'intégration a mis à la charge de M. B...la somme de 17 200 euros au titre de la contribution spéciale prévue à l'article L. 8253-1 du code du travail et la somme de 2 124 euros au titre de la contribution forfaitaire de réacheminement prévue à l'article L. 626-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; que M. B... relève appel du jugement du 29 mars 2016 par lequel le tribunal administratif de Nice a rejeté sa demande d'annulation de cette décision, ensemble la décision implicite rejetant son recours gracieux formé le 17 janvier 2014 ;

Sur le bien fondé du jugement attaqué :

2. Considérant qu'en vertu de l'article L. 8253-1 du code du travail, dans sa rédaction applicable au litige, l'Office français de l'immigration et de l'intégration est chargé de constater et de liquider la contribution spéciale due par un employeur qui a employé un travailleur étranger en méconnaissance des dispositions du premier alinéa de l'article L. 8251-1 ; que selon l'article L. 8271-17 du code du travail, dans sa rédaction alors applicable : " Outre les inspecteurs et contrôleurs du travail, les agents et officiers de police judiciaire, les agents de la direction générale des douanes sont compétents pour rechercher et constater, au moyen de procès-verbaux transmis directement au procureur de la République, les infractions aux dispositions de l'article L. 8251-1 relatif à l'emploi d'un étranger sans titre de travail et de l'article L. 8251-2 interdisant le recours aux services d'un employeur d'un étranger sans titre. / Afin de permettre la liquidation de la contribution spéciale mentionnée à l'article L. 8253-1 du présent code et de la contribution forfaitaire mentionnée à l'article L. 626-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, le directeur général de l'Office français de l'immigration et de l'intégration reçoit des agents mentionnés au premier alinéa du présent article une copie des procès-verbaux relatifs à ces infractions. " ; qu'aux termes de l'article R. 8253-3 du même code dans sa rédaction alors applicable : " Au vu des procès-verbaux qui lui sont transmis en application de l'article L. 8271-17, le directeur général de l'Office français de l'immigration et de l'intégration indique à l'employeur, par lettre recommandée avec avis de réception ou par tout autre moyen permettant de faire la preuve de sa date de réception par le destinataire, que les dispositions de l'article L. 8253-1 sont susceptibles de lui être appliquées et qu'il peut présenter ses observations dans un délai de quinze jours. " ;

3. Considérant que s'agissant des mesures à caractère de sanction, le respect du principe général des droits de la défense, applicable même sans texte, suppose que la personne concernée soit informée, avec une précision suffisante et dans un délai raisonnable avant le prononcé de la sanction, des griefs formulés à son encontre et puisse avoir accès aux pièces au vu desquelles les manquements ont été retenus, à tout le moins, avant l'entrée en vigueur du code des relations entre le public et l'administration, lorsqu'elle en fait la demande ;

4. Considérant que, si aucune des dispositions précitées du code du travail ne prévoit expressément que le procès-verbal constatant l'infraction aux dispositions de l'article L. 8251-1 relatif à l'emploi d'un étranger non autorisé à travailler en France et fondant le versement de la contribution spéciale soit communiqué au contrevenant, le silence de ces dispositions sur ce point ne saurait faire obstacle à cette communication, en particulier lorsque la personne visée en fait la demande, afin d'assurer le respect de la procédure contradictoire préalable à la liquidation de la contribution spéciale, qui revêt le caractère d'une sanction administrative ; qu'il appartient seulement à l'administration, le cas échéant, d'occulter ou de disjoindre, préalablement à la communication du procès-verbal, celles de ses mentions qui seraient étrangères à la constatation de l'infraction sanctionnée par la liquidation de la contribution spéciale et susceptibles de donner lieu à des poursuites pénales ;

5. Considérant qu'il résulte de l'instruction que M. B...a, par courrier du 30 septembre 2013, reçu par l'OFII le 4 octobre suivant, vainement sollicité la communication du procès verbal de police du 21 juin 2012 constatant l'infraction aux dispositions de l'article L. 8251-1 relatif à l'emploi d'un étranger non autorisé à travailler en France et fondant le versement de la contribution spéciale ; que dès lors, une telle carence, qui a privé M. B...d'une garantie, a entaché la procédure suivie d'irrégularité ;

6. Considérant qu'il résulte de ce qui précède, et sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens de la requête, que M. B...est fondé à soutenir que c'est à tort que le tribunal administratif de Nice a rejeté sa demande tendant à annuler la décision du directeur de l'OFII du 19 novembre 2013 et à être déchargé de l'obligation de payer la somme de 17 200 euros au titre de la contribution spéciale et la somme de 2 124 euros au titre de la contribution forfaitaire mises à sa charge ; qu'il y a lieu, par voie de conséquence, d'annuler le jugement attaqué et de décharger la société appelante de l'obligation de payer les sommes précitées ;

Sur les frais liés au litige :

7. Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mis à la charge de M.B..., qui n'est pas partie perdante dans la présente instance, le versement de la somme que demande l'OFII au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens ; qu'en revanche, il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'OFII la somme de 2 000 euros au bénéfice de M. B...sur ce même fondement ;

D E C I D E :

Article 1er : Le jugement n° 1402064 du tribunal administratif de Nice du 29 mars 2016, la décision du 19 novembre 2013 par laquelle le directeur général de l'Office français de l'immigration et de l'intégration a mis à la charge de M. B...la somme de 17 200 euros au titre de la contribution spéciale prévue à l'article L. 8253-1 du code du travail et la somme de 2 124 euros au titre de la contribution forfaitaire représentative des frais de réacheminement prévue à l'article L. 626-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et la décision implicite rejetant le recours gracieux formé par M. B...le 17 janvier 2014, sont annulés.

Article 2 : M. B...est déchargé de l'obligation de payer la contribution spéciale d'un montant de 17 200 euros et la contribution forfaitaire d'un montant de 2 124 euros.

Article 3 : L'OFII versera la somme de 2 000 euros à M. B...au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 4 : Les conclusions présentées par l'OFII au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à M. C...B...et à l'Office français de l'immigration et de l'intégration.

Délibéré après l'audience du 16 mars 2018, où siégeaient :

- M. Pocheron, président de chambre,

- M. Guidal, président assesseur,

- Mme Féménia, première conseillère.

Lu en audience publique, le 30 mars 2018.

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N° 16MA01964

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Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Marseille
Formation : 7ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 16MA01964
Date de la décision : 30/03/2018
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-06 Étrangers. Emploi des étrangers.


Composition du Tribunal
Président : M. POCHERON
Rapporteur ?: Mme Jeannette FEMENIA
Rapporteur public ?: M. CHANON
Avocat(s) : AYADI

Origine de la décision
Date de l'import : 10/04/2018
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.marseille;arret;2018-03-30;16ma01964 ?
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