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12/07/2018 | FRANCE | N°16MA03132

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 2ème chambre - formation à 3, 12 juillet 2018, 16MA03132


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. D...E...a demandé au tribunal administratif de Marseille d'annuler la décision implicite du 21 juillet 2013 de refus de la SA Electricité Réseaux de France (ERDF) de déplacer les trois câbles électriques de moyenne tension surplombant sa propriété et d'enjoindre à cette société de déplacer cet ouvrage public.

Par un jugement n° 1305506 du 20 juin 2016, le tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête, enregistrée le 1er

août 2016, M.E..., représenté par Me C..., demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribu...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. D...E...a demandé au tribunal administratif de Marseille d'annuler la décision implicite du 21 juillet 2013 de refus de la SA Electricité Réseaux de France (ERDF) de déplacer les trois câbles électriques de moyenne tension surplombant sa propriété et d'enjoindre à cette société de déplacer cet ouvrage public.

Par un jugement n° 1305506 du 20 juin 2016, le tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête, enregistrée le 1er août 2016, M.E..., représenté par Me C..., demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Marseille du 20 juin 2016 ;

2°) d'annuler la décision implicite de rejet d'ERDF ;

3°) d'enjoindre à ERDF de déplacer l'ouvrage public en dehors de sa propriété dans un délai de deux mois à compter du présent arrêt sous astreinte de 100 euros par jour de retard ;

4°) de mettre à la charge d'ERDF la somme de 5 000 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- l'emprise de la ligne électrique installée en 2011 en surplomb de sa parcelle est irrégulière dès lors qu'elle a été implantée sans autorisation sur sa propriété ni signature d'une convention instituant une servitude ;

- l'existence d'une ancienne ligne électrique ne vaut pas acceptation tacite de l'ouvrage ;

- la nouvelle ligne n'a pas été installée sur l'emprise de l'ancien ouvrage public ;

- cet ouvrage a été implanté en méconnaissance des articles 12 et 12 bis de la loi du 15 juin 1906 sur les distributions d'énergie ;

- cette implantation irrégulière lui cause de graves préjudices en raison, notamment, de coupures électriques et de l'abattage de quarante-deux arbres de haute tige ;

- le déplacement de l'ouvrage ou son enfouissement ne constituent pas une atteinte excessive à l'intérêt général.

Par un mémoire en défense, enregistré le 4 avril 2018, la SA ENEDIS, venant aux droits d'ERDF, représentée par MeA..., conclut au rejet de la requête et à ce qu'il soit mis à la charge de M. E...la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- l'impossibilité de régulariser l'implantation de l'ouvrage public en l'absence d'accord du propriétaire n'implique pas nécessairement son déplacement ;

- le passage de la ligne électrique en surplomb de la parcelle de M. E...ne constitue pas une atteinte grave à son droit de propriété dès lors que l'ouvrage existe depuis 1972 et qu'il n'a pas entrepris avant 2011 de démarche pour la faire déplacer ou supprimer ;

- les travaux effectués au mois de février 2011 ont uniquement consisté dans le changement du poteau électrique situé sur le domaine public au droit de la propriété du requérant ;

- les câbles électriques de moyenne tension surplombant la propriété du requérant et le tracé de la ligne n'ont pas été modifiés ;

- la destruction et le déplacement de l'ouvrage présentent des inconvénients supérieurs à l'avantage qui en sera retiré par M.E..., notamment en raison du coût de tels travaux.

Un mémoire présenté pour M. E...a été enregistré le 26 juin 2018, après la clôture de l'instruction.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code de l'énergie ;

- la loi du 15 juin 1906 sur les distributions d'énergie ;

- le décret du 6 octobre 1967 portant règlement d'administration publique pour l'application de la loi du 15 juin 1906 sur les distributions d'énergie ;

- le code de justice administrative.

La présidente de la Cour a désigné M. Alain Barthez, président assesseur, pour présider la formation de jugement en application de l'article R. 222-26 du code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Bourjade-Mascarenhas,

- les conclusions de Mme Chamot, rapporteure publique,

- et les observations de MeB..., représentant M.E..., et de MeA..., représentant la SA ENEDIS.

Considérant ce qui suit :

Sur le bien fondé du jugement attaqué :

1. Aux termes de l'article 12 de la loi du 15 juin 1906 sur les distributions d'énergie, aujourd'hui codifié à l'article L. 323-4 du code de l'énergie : " (...) La déclaration d'utilité publique confère, en outre, au concessionnaire le droit (...) 3° D'établir à demeure des canalisations souterraines, ou des supports pour conducteurs aériens, sur des terrains privés non bâtis, qui ne sont pas fermés de murs ou autres clôtures équivalentes (...) ". Aux termes de l'article 1er du décret du 6 octobre 1967 : " Une convention passée entre le concessionnaire et le propriétaire ayant pour objet la reconnaissance des servitudes d'appui, de passage, d'ébranchage ou d'abattage prévues au troisième alinéa de l'article 12 de la loi du 15 juin 1906 susvisée peut remplacer les formalités prévues au quatrième alinéa dudit article ". Il résulte de la combinaison de ces dispositions que les servitudes mentionnées par l'article 12 de la loi du 15 juin 1906, repris à l'article L. 323-4 du code de l'énergie, ne peuvent être instituées qu'après une enquête publique ou par la convention passée entre le concessionnaire et le propriétaire prévue par l'article 1er du décret du 6 octobre 1967.

2. Il résulte de l'instruction que trois câbles de moyenne tension appartenant à la SA ENEDIS et qui ont le caractère d'ouvrage public surplombent la parcelle dont M. E... est propriétaire. Aucune convention de servitude autorisant ce survol n'a été conclue avec le requérant. Par ailleurs, la SA ENEDIS ne justifie d'aucun titre qui,

en l'absence d'accord avec celui-ci, aurait été délivré à cette fin par l'autorité administrative. Enfin, elle ne peut utilement se prévaloir de la circonstance que le requérant ne s'est pas opposé au surplomb de sa propriété lors de l'installation de la ligne litigieuse. Par suite, c'est à bon droit que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif a constaté que cet ouvrage public constitue une emprise irrégulière sur la parcelle appartenant à M. E....

3. Lorsque le juge administratif est saisi de conclusions dirigées contre le refus de démolir un ouvrage public irrégulièrement édifié, il lui appartient, pour déterminer, en fonction de la situation de droit et de fait existant à la date à laquelle il statue, si l'exécution de cette décision implique qu'il ordonne la démolition de cet ouvrage, de rechercher, d'abord, si, eu égard notamment aux motifs de la décision, une régularisation appropriée est possible. Dans la négative, il lui revient ensuite de prendre en considération, d'une part, les inconvénients que la présence de l'ouvrage entraîne pour les divers intérêts publics ou privés en présence et notamment, le cas échéant, pour le propriétaire du terrain d'assiette de l'ouvrage, d'autre part, les conséquences de la démolition pour l'intérêt général, et d'apprécier, en rapprochant ces éléments, si la démolition n'entraîne pas une atteinte excessive à l'intérêt général.

4. D'une part, comme il a été dit au point 2, la SA ENEDIS n'est titulaire d'aucun droit ni titre pour survoler la parcelle appartenant à M. E.... En outre, il résulte de l'instruction, notamment des devis produits qui ne sont pas utilement contredits par le requérant, que le coût des travaux de déplacement de l'ouvrage public serait supérieur à 70 000 euros.

5. D'autre part, M. E...n'établit pas que le survol de la parcelle dont il est propriétaire par les trois fils électriques de moyenne tension a pour effet de créer des arcs électriques et des perturbations radioélectriques, entraîne de fréquentes coupures d'électricité ou nécessite l'abattage de nombreux arbres. Par ailleurs, la ligne en cause située en fond de parcelle est distante de son habitation et, si elle impose l'élagage des arbres situés à proximité de la ligne, n'entraîne pas de nuisance visuelle importante. Dans ces conditions, eu égard au coût du déplacement précédemment mentionné et ainsi que l'ont estimé à bon droit les premiers juges, le déplacement de la ligne de moyenne tension peut être regardé comme portant une atteinte excessive à l'intérêt général, eu égard à la faible gêne que sa présence cause à M.E....

6. Il résulte de tout ce qui précède que M. E...n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande.

Sur les frais liés au litige :

7. Dans les circonstances de l'espèce, il y a lieu de laisser à chacune des parties en litige la charge de ses propres frais de procédure et de rejeter les conclusions qu'elles ont présentées sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

D É C I D E :

Article 1er : La requête de M. E...est rejetée.

Article 2 : Les conclusions présentées par la SA ENEDIS en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. D...E...et à la SA ENEDIS.

Délibéré après l'audience du 28 juin 2018 où siégeaient :

- M. Barthez, président assesseur, présidant la formation de jugement en application de l'article R. 222-26 du code de justice administrative,

- Mme Bourjade-Mascarenhas, première conseillère,

- MmeF..., première conseillère.

Lu en audience publique, le 12 juillet 2018.

4

N° 16MA03132


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Marseille
Formation : 2ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 16MA03132
Date de la décision : 12/07/2018
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

29-04 Energie. Lignes électriques.


Composition du Tribunal
Président : M. BARTHEZ
Rapporteur ?: Mme Agnes BOURJADE
Rapporteur public ?: Mme CHAMOT
Avocat(s) : GASPARRI - LOMBARD - BOUSQUET

Origine de la décision
Date de l'import : 07/08/2018
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.marseille;arret;2018-07-12;16ma03132 ?
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