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25/09/2018 | FRANCE | N°18MA00157-18MA00280

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 9ème chambre - formation à 3, 25 septembre 2018, 18MA00157-18MA00280


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B...C...a demandé au tribunal administratif de Montpellier d'annuler l'arrêté du 30 novembre 2015 par lequel le maire de la commune d'Ouveillan a prononcé son licenciement pour insuffisance professionnelle à compter du 30 novembre 2015 et d'enjoindre au maire de cette commune de procéder à sa réintégration dans le délai de cinq jours à compter de la notification du jugement à intervenir.

Par un jugement n° 1600187 du 16 novembre 2017, le tribunal administratif de Montpellier a annulé l'arrê

té du 30 novembre 2015 du maire de la commune d'Ouveillan et a enjoint au maire de ...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B...C...a demandé au tribunal administratif de Montpellier d'annuler l'arrêté du 30 novembre 2015 par lequel le maire de la commune d'Ouveillan a prononcé son licenciement pour insuffisance professionnelle à compter du 30 novembre 2015 et d'enjoindre au maire de cette commune de procéder à sa réintégration dans le délai de cinq jours à compter de la notification du jugement à intervenir.

Par un jugement n° 1600187 du 16 novembre 2017, le tribunal administratif de Montpellier a annulé l'arrêté du 30 novembre 2015 du maire de la commune d'Ouveillan et a enjoint au maire de réintégrer M. C...dans le délai de trois mois à compter de la notification du jugement.

Procédure devant la Cour :

I. Par une requête, enregistrée le 11 janvier 2018 sous le n° 18MA00157 et par un mémoire, enregistré le 7 juin 2018, la commune d'Ouveillan, représentée par MeA..., demande à la Cour dans le dernier état de ses écritures :

1°) d'annuler ce jugement du 16 novembre 2017 du tribunal administratif de Montpellier ;

2°) de mettre à la charge de M. C...la somme de 2 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- les tâches qui étaient confiées à M. C...en tant que secrétaire de mairie relevaient de celles de son cadre d'emploi définies à l'article 3 du décret n° 2006-1690 du 22 décembre 2006 ;

- le seul motif tiré des manquements de son agent dans le suivi budgétaire et comptable de la commune suffit à caractériser son insuffisance professionnelle et à justifier son licenciement ;

- la matérialité des autres manquements reprochés est établie ;

- les attestations produites par l'agent sur sa capacité de travailler en équipe ne sont pas probantes ;

- l'ensemble des manquements reprochés caractérisent une insuffisance professionnelle.

Par des mémoires en défense, enregistrés les 12 avril 2018 et 22 juin 2018, M C..., représenté par la SCP d'avocats Magna-Bories-Causse-Chabbert, conclut au rejet de la requête et à ce qu'il soit mis à la charge de la commune d'Ouveillan la somme de 3 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il fait valoir que les moyens de la requête ne sont pas fondés.

II. Par une requête, enregistrée le 19 janvier 2018 sous le n° 18MA00280 et par des mémoires, enregistrés les 19 avril 2018, 7 juin 2018 et 3 juillet 2018, la commune d'Ouveillan, représentée par MeA..., demande à la Cour :

1°) d'ordonner, sur le fondement des articles R. 811-15 et R. 811-17 du code de justice administrative, le sursis à l'exécution du jugement du 16 novembre 2017 du tribunal administratif de Montpellier ;

2°) de mettre à la charge de M. C...la somme de 2 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- les moyens soulevés dans sa requête au fond sont sérieux ;

- l'exécution du jugement comporte des conséquences difficilement réparables.

Par des mémoires, enregistrés les 22 février 2018, 15 mai 2018 et 22 juin 2018, M. C..., représenté par la SCP d'avocats Magna-Bories-Causse-Chabbert, conclut au rejet de la requête et à ce qu'il soit mis à la charge de la commune d'Ouveillan la somme de 3 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que les moyens invoqués ne sont pas fondés.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 modifiée portant droits et obligations des fonctionnaires ;

- la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique territoriale ;

- le décret n° 2006-1690 du 22 décembre 2006 portant statut particulier du cadre d'emplois des adjoints administratifs territoriaux ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Carassic,

- les conclusions de M. Roux, rapporteur public,

- et les observations de Me D...représentant la commune d'Ouveillan

Considérant ce qui suit :

1. Les requêtes n° 18MA00157 et n° 18MA00280 présentées par la commune d'Ouveillan sont relatives à un même jugement et ont fait l'objet d'une instruction commune. Il y a lieu de les joindre pour statuer par un seul arrêt.

2. M.C..., adjoint administratif territorial de deuxième classe, a demandé au tribunal administratif de Montpellier d'annuler l'arrêté du 30 novembre 2015 par lequel le maire de la commune d'Ouveillan a prononcé son licenciement pour insuffisance professionnelle à compter du 30 novembre 2015 et d'enjoindre au maire de cette commune de procéder à sa réintégration. Par le jugement attaqué, les premiers juges ont annulé cet arrêté du 30 novembre 2015 du maire de la commune d'Ouveillan et ont enjoint au maire de réintégrer M. C...dans le délai de trois mois à compter de la notification du jugement. Sous le n° 18MA00157, la commune d'Ouveillan relève appel du jugement du 16 novembre 2017 par lequel le tribunal administratif de Montpellier a annulé cet arrêté. Sous le n° 18MA00280, la commune d'Ouveillan demande qu'il soit sursis à l'exécution de ce jugement.

Sur les conclusions aux fins d'annulation :

3. Le licenciement pour insuffisance professionnelle d'un fonctionnaire ne peut être fondé que sur des éléments manifestant son inaptitude à exercer normalement les fonctions pour lesquelles il a été engagé ou correspondant à son grade et non sur une carence ponctuelle dans l'exercice de ces fonctions.

4. Il appartient au juge de l'excès de pouvoir de former sa conviction sur les points en litige au vu des éléments versés au dossier par les parties. S'il peut écarter des allégations qu'il jugerait insuffisamment étayées, il ne saurait exiger de l'auteur du recours que ce dernier apporte la preuve des faits qu'il avance.

5. Pour annuler l'arrêté du 30 novembre 2015 du maire de la commune d'Ouveillan prononçant le licenciement de M. C...pour insuffisance professionnelle, les premiers juges ont estimé que le motif de cette décision tiré des manquements, établis, de M. C...en sa qualité de secrétaire de mairie entre 2009 et 2011 dans le suivi budgétaire et comptable de la commune n'étaient pas suffisants à eux seuls pour caractériser une insuffisance professionnelle susceptible d'entraîner le licenciement de cet agent et que les autres faits qui lui étaient reprochés dans les fonctions qui lui ont été confiées ultérieurement au service technique de la ville et au syndicat d'initiative n'étaient pour certains, pas établis, et pour d'autres, pas de nature à caractériser une insuffisance professionnelle.

En ce qui concerne les manquements reprochés en qualité de secrétaire de mairie :

6. L'article 3 du décret du 22 décembre 2006 portant statut des adjoints administratifs territoriaux prévoit que : " I. - Les adjoints administratifs territoriaux sont chargés de tâches administratives d'exécution, qui supposent la connaissance et comportent l'application de règles administratives et comptables. (...) II. Lorsqu'ils relèvent des grades d'avancement, les adjoints administratifs territoriaux.(...) peuvent être chargés du secrétariat de mairie dans une commune de moins de 2 000 habitants ". L'article 10 de ce décret dans sa rédaction applicable prévoit que la première classe du grade d'adjoint administratif constitue le grade d'avancement des adjoints administratifs territoriaux.

7. Il ressort des pièces du dossier que M. C...est adjoint administratif territorial de 2ème classe et que la commune d'Ouveillan comptait, selon le recensement de l'INSEE en 2006, 2 111 habitants. Par suite, contrairement à ce que soutient la commune, M.C..., ainsi qu'il le fait valoir en défense, ne pouvait être légalement chargé du secrétariat de mairie en application de l'article 3-II du décret du 22 décembre 2006. Il ressort de la fiche de poste de secrétaire de mairie produite par la commune d'Ouveillan que les fonctions de M. C...consistaient notamment à "élaborer le budget, assurer le montage des dossiers relatifs aux opérations d'investissements avec recherche de subventions, assurer le montage des dossiers de marchés publics". Cette fiche indique "cadre statutaire : catégorie A, B ou C '". Ces fonctions ne peuvent être regardées comme des "tâches administratives d'exécution" au sens du I de l'article 3 du décret du 22 décembre 2006. La circonstance invoquée en appel par la commune que les agents qui auraient succédé sur ce poste avec succès appartiendraient au cadre d'emploi des agents administratifs territoriaux, que M. C...a suivi aux frais de la commune une formation sur le rôle de secrétaire de mairie en 2010 et début 2011 et que la formation universitaire en gestion comptable de M. C...aurait dû lui permettre d'éviter les erreurs de mandatements reprochées est sans incidence sur le fait que les missions confiées à M. C...ne relevaient pas de son cadre d'emploi et qu'il n'a pas pu dès lors montrer son aptitude professionnelle à exercer ses fonctions. Par suite, le maire n'a pas pu légalement se fonder sur les erreurs commises par M. C...dans le suivi budgétaire et comptable de la commune pour apprécier l'aptitude de son agent à exercer les fonctions de secrétaire de mairie. Dans ces conditions, la commune n'est pas fondée à soutenir que le seul motif de la décision en litige tiré des manquements de son agent dans ce suivi suffirait à justifier son licenciement pour insuffisance professionnelle.

En ce qui concerne les autres manquements reprochés à M. C...:

8. Si la commune fonde aussi sa décision en litige de licencier M. C...sur les difficultés relationnelles de cet agent avec les autres agents de la commune, les attestations qu'elle produit, et notamment celle d'un conseiller municipal qui affirme que M. C...refuserait de reconnaître son incompétence ce qui créerait un "malaise" avec ses collègues et celle du trésorier de syndicat d'initiative qui dit avoir effectuer ses permanences pendant les absences de M. C...pour pouvoir utiliser le bureau et l'ordinateur ainsi accessibles, ne suffisent pas à établir que M. C...serait dans l'incapacité de travailler en équipe ce qui nuirait au bon fonctionnement des services municipaux.

9. Les autres manquements reprochés à M. C...dans la décision en litige tirés de sa "précipitation dans la réalisation du travail, sans réflexion préalable", de la "médiocrité du travail réalisé" et du "manque d'éthique professionnelle" au motif que M. C...n'aurait pas respecté son "engagement" pris auprès du maire de se séparer à l'amiable en demandant à quitter ses fonctions en contrepartie du versement par la commune d'une indemnité de départ volontaire et de l'absence d'engagement de la procédure de licenciement à son encontre, tel que cela ressort de la lettre du maire du 2 janvier 2013, ne sont pas établis.

10. Il résulte de ce qui précède que la commune d'Ouveillan n'est pas fondée à se plaindre de ce que les premiers juges ont annulé l'arrêté du 30 novembre 2015 du maire et ont enjoint au maire de réintégrer M. C...dans le délai de trois mois à compter de la notification du jugement attaqué.

Sur les conclusions aux fins de sursis à exécution :

11. Dès lors qu'elle se prononce sur les conclusions de la commune d'Ouveillan tendant à l'annulation du jugement contesté, il n'y a pas lieu pour la Cour de statuer sur les conclusions tendant à ce qu'il soit sursis à l'exécution de ce jugement.

Sur les frais liés au litige :

12. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce qu'une somme soit mise à la charge de M. C..., qui n'est pas la partie perdante dans les présentes instances. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de la commune d'Ouveillan une somme de 2 000 euros à verser à M. C... au titre des frais qu'il a exposés et non compris dans les dépens au titre des deux instances engagées.

D É C I D E :

Article 1 : Il n'y a pas lieu de statuer sur les conclusions à fin de sursis à l'exécution du jugement du 16 novembre 2017 du tribunal administratif de Montpellier.

Article 2 : Le surplus des conclusions des requêtes de la commune d'Ouveillan est rejeté.

Article 3 : La commune d'Ouveillan versera la somme de 2 000 euros à M. C...sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative au titre des deux instances engagées.

Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à la commune d'Ouveillan et à M. B...C....

Délibéré après l'audience du 11 septembre 2018, où siégeaient :

- Mme Buccafurri, présidente de chambre,

- MmeE..., première conseillère ;

- Mme Carassic, première conseillère,

Lu en audience publique, le 25 septembre 2018.

2

N°18MA00157 - 18MA00280


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Marseille
Formation : 9ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 18MA00157-18MA00280
Date de la décision : 25/09/2018
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : Mme BUCCAFURRI
Rapporteur ?: Mme Marie-Claude CARASSIC
Rapporteur public ?: M. ROUX
Avocat(s) : CABINET LABRY

Origine de la décision
Date de l'import : 02/10/2018
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.marseille;arret;2018-09-25;18ma00157.18ma00280 ?
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