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03/04/2019 | FRANCE | N°17MA01899

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 8ème chambre - formation à 3, 03 avril 2019, 17MA01899


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme D... A... épouse F... a demandé au tribunal administratif de Toulon de condamner la commune de Saint-Maximin-la-Sainte-Baume à lui verser la somme totale de 22 000 euros en réparation des préjudices résultant de ses conditions de recrutement.

Par un jugement n° 1403386 du 10 mars 2017, le tribunal administratif de Toulon a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête et un mémoire enregistrés le 8 mai 2017 et le 18 février 2018, Mme F..., représentée par Me C

..., demande à la Cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Toulon du 10 m...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme D... A... épouse F... a demandé au tribunal administratif de Toulon de condamner la commune de Saint-Maximin-la-Sainte-Baume à lui verser la somme totale de 22 000 euros en réparation des préjudices résultant de ses conditions de recrutement.

Par un jugement n° 1403386 du 10 mars 2017, le tribunal administratif de Toulon a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête et un mémoire enregistrés le 8 mai 2017 et le 18 février 2018, Mme F..., représentée par Me C..., demande à la Cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Toulon du 10 mars 2017 ;

2°) de condamner la commune de Saint-Maximin-la-Sainte-Baume à lui verser la somme totale de 22 000 euros en réparation des préjudices résultant de ses conditions de recrutement, avec intérêts au taux légal à compter du 19 juillet 2014 ;

3°) de mettre à la charge de la commune de Saint-Maximin-la-Sainte-Baume la somme de 2 000 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

* le tribunal n'a pas tiré les conséquences de l'acquiescement aux faits par la défenderesse qui résultait de l'application de l'article R. 612-6 du code de justice administrative ;

* le changement d'affectation dont elle a fait l'objet et le non-renouvellement de son dernier contrat constituent des sanctions déguisées ;

* la commune de Saint-Maximin-la-Sainte-Baume a méconnu le délai prescrit à l'article 38 du décret du 15 février 1988 ;

* la commune de Saint-Maximin-la-Sainte-Baume a recouru abusivement à des contrats saisonniers pour pourvoir un emploi permanent ;

* le non-renouvellement de son dernier contrat n'est pas justifié par les besoins du service ;

* les fautes commises par la commune de Saint-Maximin-la-Sainte-Baume sont à l'origine d'un préjudice financier et d'un préjudice moral qui s'élèvent à 12 000 euros et à 10 000 euros.

Par des mémoires en défense enregistrés le 11 septembre 2017, le 2 octobre 2017 et le 17 janvier 2019, la commune de Saint-Maximin-la-Sainte-Baume, représentée par Me B..., conclut au rejet de la requête et à ce qu'une somme de 3 000 euros soit mise à la charge de Mme F... au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que les moyens soulevés par Mme F... ne sont pas fondés.

Par ordonnance du 8 janvier 2019, la clôture de l'instruction a été fixée au 31 janvier 2019 à 12 heures.

Un mémoire présenté pour Mme F... par Me C... a été enregistré le 30 janvier 2019.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

* le code du travail ;

* la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 ;

* le décret n° 88-145 du 15 février 1988 ;

* le décret n° 2006-1691 du 22 décembre 2006 ;

* le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

* le rapport de M. d'Izarn de Villefort,

* les conclusions de M. Coutel, rapporteur public,

* et les observations de Me E... substituant Me B..., représentant la commune de Saint-Maximin-la-Sainte-Baume.

Considérant ce qui suit :

1. Mme F... a été recrutée par la commune de Saint-Maximin-la-Sainte-Baume à compter du 16 février 2009 sur le fondement de deux contrats d'accompagnement dans l'emploi, jusqu'au 15 février 2010, puis d'une convention d'insertion, jusqu'au 15 août 2010. Elle a par la suite été recrutée par la commune du 16 août 2010 au 15 août 2012, en qualité d'agent saisonnier à temps non complet affecté au service d'entretien de la collectivité, sur le fondement de quatre arrêtés prévoyant quatre périodes successives de six mois. Ayant été informée oralement, le 13 août 2012, que son engagement ne serait pas renouvelé, elle a contesté cette mesure par un recours gracieux resté sans réponse explicite et a ultérieurement demandé au tribunal administratif de Toulon de condamner la commune à réparer le préjudice subi résultant de l'illégalité de ses conditions de recrutement et du non-renouvellement de son engagement. Elle relève appel du jugement du 10 mars 2017 par lequel le tribunal a rejeté sa demande.

Sur la régularité du jugement :

2. Aux termes de l'article R. 612-6 du code de justice administrative : " Si, malgré une mise en demeure, la partie défenderesse n'a produit aucun mémoire, elle est réputée avoir acquiescé aux faits exposés dans les mémoires du requérant ". Si, lorsque le défendeur n'a produit aucun mémoire, le juge administratif n'est pas tenu de procéder à une telle mise en demeure avant de statuer, il doit, s'il y procède, en tirer toutes les conséquences de droit. Il lui appartient seulement, lorsque les dispositions précitées sont applicables, de vérifier que l'inexactitude des faits exposés dans les mémoires du requérant ne ressort d'aucune pièce du dossier. S'il résulte des termes du jugement attaqué que le tribunal administratif a considéré que la mutation d'office prononcée à l'encontre de la requérante devait être regardée comme un fait établi par application de ces dispositions, celles-ci ne préjugent pas de la réponse apportée par les premiers juges sur les moyens de droit qui étaient soulevés devant eux, s'agissant notamment de la qualification des faits de l'espèce. La critique du jugement soulevée sur ce point ne relève pas de la régularité de ce jugement mais du fond de l'affaire.

Sur les conclusions indemnitaires :

3. Il résulte des dispositions de l'article 3 de la loi du 26 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique territoriale que les collectivités territoriales et leurs établissements peuvent recruter des agents non titulaires pour exercer des fonctions correspondant à un besoin saisonnier pour une durée maximale de six mois pendant une même période de douze mois. Les dispositions du cinquième alinéa de cet article, reprises à l'article 3-3 de la même loi créé par la loi du 12 mars 2012 relative à l'accès à l'emploi titulaire et à l'amélioration des conditions d'emploi des agents contractuels dans la fonction publique, à la lutte contre les discriminations et portant diverses dispositions relatives à la fonction publique, prévoient que, par dérogation au principe énoncé à l'article 3 de la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983, des emplois permanents peuvent être occupés de manière permanente par des agents contractuels notamment lorsqu'il n'existe pas de cadre d'emplois de fonctionnaires susceptibles d'assurer les fonctions correspondantes, les agents ainsi recrutés étant engagés par contrat à durée déterminée d'une durée maximale de trois ans et ces contrats étant renouvelables par reconduction expresse, dans la limite d'une durée maximale de six ans.

4. Mme F... soutient qu'elle occupait non pas un emploi saisonnier mais un emploi permanent ne pouvant être pourvu par un cadre d'emplois de fonctionnaires, il est constant qu'elle a été affectée, après une formation de quatre jours dispensée au sein des services communaux, à la conduite d'engins de balayage puis à l'entretien des toilettes publiques. Il résulte des dispositions des articles 3 et 4 du décret du 22 décembre 2006 portant statut particulier du cadre d'emplois des adjoints techniques territoriaux que les fonctionnaires appartenant à ce cadre d'emplois exercent leurs fonctions dans le domaine notamment de l'environnement et de l'hygiène et peuvent être chargés de la conduite d'engins de traction mécanique ne nécessitant pas de formation professionnelle. Ainsi, elle n'est pas fondée à soutenir qu'elle était en réalité titulaire d'un contrat de recrutement renouvelable dans la limite d'une durée maximale de six ans.

5. Aux termes de l'article 38 du décret du 15 février 1988 pris pour l'application de l'article 136 de la loi du 26 janvier 1984 modifiée portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique territoriale et relatif aux agents contractuels de la fonction publique territoriale : " Lorsqu'un agent non titulaire a été engagé pour une durée déterminée susceptible d'être reconduite, l'administration lui notifie son intention de renouveler ou non l'engagement au plus tard : (...) 2° Au début du mois précédant le terme de l'engagement pour l'agent recruté pour une durée égale ou supérieure à six mois et inférieure à deux ans ; (...) Lorsqu'il est proposé de renouveler le contrat, l'agent non titulaire dispose d'un délai de huit jours pour faire connaître, le cas échéant, son acceptation. En cas de non-réponse dans ce délai, l'intéressé est présumé renoncer à son emploi. ".

6. Il résulte du motif énoncé au point 4 que l'engagement de l'intéressée, qui était fondé sur un besoin saisonnier et qui avait atteint la durée maximale de six mois pendant une même période de douze mois prévue par l'article 3 de la loi du 26 janvier 1984, n'était pas susceptible d'être reconduit. Par suite, le maire de Saint-Maximin-la-Sainte-Baume n'a commis aucune faute en s'abstenant d'informer Mme F... dans le délai indiqué par ces dispositions que son engagement ne serait pas renouvelé après son expiration le 15 août 2012.

7. La commune de Saint-Maximin-la-Sainte-Baume fait valoir dans ses mémoires en défense que l'engagement de Mme F... n'a pas été reconduit dès lors que les dispositions de l'article 3 de la loi du 26 janvier 1984 en limitant la durée à la durée maximale de six mois pendant une même période de douze mois y faisaient obstacle. Un tel motif conforme à l'intérêt du service est de nature à justifier légalement la décision de ne pas renouveler cet engagement. Si la requérante soutient qu'elle a fait par là-même l'objet d'une sanction déguisée dans le contexte d'une mutation aux toilettes publiques et de reproches liés à ses absences pour maladie et à un accident de service, ne sont établies ni la matérialité de ces derniers faits, ni l'intention de l'administration de sanctionner des faits qui lui seraient imputables. Ainsi, la commune de Saint-Maximin-la-Sainte-Baume n'a pas davantage commis de faute qui serait liée à l'illégalité du motif pour lequel l'engagement de Mme F... n'a pas été reconduit.

8. Il résulte des premier et deuxième alinéas de l'article 3 de la loi du 26 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique territoriale que les collectivités territoriales de plus de 2 000 habitants ne peuvent recruter des agents non titulaires en vue d'assurer des remplacements momentanés ou d'effectuer des tâches à caractère temporaire ou saisonnier que par contrat à durée déterminée. Si ces dispositions offrent ainsi la possibilité à ces collectivités de recourir, le cas échéant, à une succession de contrats à durée déterminée, elles ne font cependant pas obstacle à ce qu'en cas de renouvellement abusif de tels contrats, l'agent concerné puisse se voir reconnaître un droit à l'indemnisation du préjudice éventuellement subi lors de l'interruption de la relation d'emploi, évalué en fonction des avantages financiers auxquels il aurait pu prétendre en cas de licenciement s'il avait été employé dans le cadre d'un contrat à durée indéterminée. Dans cette hypothèse, il incombe au juge, pour apprécier si le recours à des contrats à durée déterminée successifs présente un caractère abusif, de prendre en compte l'ensemble des circonstances de fait qui lui sont soumises, notamment la nature des fonctions exercées, le type d'organisme employeur ainsi que le nombre et la durée cumulée des contrats en cause.

9. En vertu de l'article L. 5134-24 du code du travail, le contrat d'accompagnement dans l'emploi est un contrat de travail de droit privé. Il résulte en outre des dispositions de l'article L. 5134-19-3 du même code que le contrat unique d'insertion conclu dans le cadre d'une convention d'insertion prend la forme, pour les employeurs du secteur non marchand tel qu'une commune, du contrat d'accompagnement dans l'emploi. Ainsi qu'il a été exposé au point 1, Mme F... a été employée par la commune de Saint-Maximin-la-Sainte-Baume dans le cadre de ces dispositifs d'insertion du 16 février 2009 au 15 août 2010. Le caractère de droit privé de ces contrats fait obstacle à ce que la responsabilité de la commune à raison de leur caractère abusif allégué soit recherchée devant le juge administratif. Eu égard à la nature des fonctions exercées, au nombre, à la nature et la durée cumulée de contrats saisonniers conclus jusqu'au 15 août 2012, le renouvellement de ceux-ci ne présente pas un caractère abusif. En conséquence, la commune de Saint-Maximin-la-Sainte-Baume n'a pas commis de faute à cet égard.

10. Il résulte de ce qui précède que Mme F... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Toulon a rejeté sa demande.

11. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de la commune de Saint-Maximin-la-Sainte-Baume, qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, la somme que Mme F... demande au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens. Dans les circonstances de l'espèce, il n'y a pas lieu de faire droit aux conclusions de la commune de Saint-Maximin-la-Sainte-Baume présentées sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

D É C I D E :

Article 1er : La requête de Mme F... est rejetée.

Article 2 : Les conclusions de la commune de Saint-Maximin-la-Sainte-Baume présentées sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à Mme D... A... épouse F... et à la commune de Saint-Maximin-la-Sainte-Baume.

Délibéré après l'audience du 20 mars 2019, où siégeaient :

* M. Gonzales, président,

* M. d'Izarn de Villefort, président assesseur,

* M. Jorda, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 3 avril 2019.

N° 17MA01899 3


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Marseille
Formation : 8ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 17MA01899
Date de la décision : 03/04/2019
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

36-13-03 Fonctionnaires et agents publics. Contentieux de la fonction publique. Contentieux de l'indemnité.


Composition du Tribunal
Président : M. GONZALES
Rapporteur ?: M. Philippe D'IZARN DE VILLEFORT
Rapporteur public ?: M. ANGENIOL
Avocat(s) : SÉNÉJEAN

Origine de la décision
Date de l'import : 16/04/2019
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.marseille;arret;2019-04-03;17ma01899 ?
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