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16/05/2019 | FRANCE | N°18MA00476

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 2ème chambre - formation à 3, 16 mai 2019, 18MA00476


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme F... D...A...a demandé au tribunal administratif de Marseille de condamner le centre hospitalier d'Aubagne à lui verser la somme de 17 473,40 euros en réparation des préjudices qu'elle estime avoir subis suite à une intervention le 26 février 2013.

Par un jugement n° 1509389 du 4 décembre 2017, le tribunal administratif de Marseille a condamné le centre hospitalier Edmond Garcin d'Aubagne à verser la somme de 1 756 euros à Mme D...A....

Procédure devant la cour :

Par une requêt

e, enregistrée le 1er février 2018, Mme D...A..., représentée par Me B..., demande à la cour ...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme F... D...A...a demandé au tribunal administratif de Marseille de condamner le centre hospitalier d'Aubagne à lui verser la somme de 17 473,40 euros en réparation des préjudices qu'elle estime avoir subis suite à une intervention le 26 février 2013.

Par un jugement n° 1509389 du 4 décembre 2017, le tribunal administratif de Marseille a condamné le centre hospitalier Edmond Garcin d'Aubagne à verser la somme de 1 756 euros à Mme D...A....

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 1er février 2018, Mme D...A..., représentée par Me B..., demande à la cour :

1°) de réformer le jugement du 4 décembre 2017 du tribunal administratif de Marseille en tant qu'il a limité à la somme de 1 756 euros le montant de l'indemnité au versement de laquelle il a condamné le centre hospitalier d'Aubagne ;

2°) de porter cette indemnité à la somme de 17 473,40 euros ;

3°) de mettre à la charge du centre hospitalier d'Aubagne la somme de 3 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- le tribunal administratif a omis de prendre en compte les frais d'assistance par un médecin conseil lors des opérations d'expertise ;

- la réparation de la faute commise par le centre hospitalier ne pouvait être limitée à une perte de chance ;

- la contribution pour l'aide juridique qu'elle a acquittée pour l'instance en référé doit être mise à la charge du centre hospitalier ;

- la responsabilité du centre hospitalier est également engagée du fait d'une promesse non tenue.

Par deux mémoires en défense, enregistrés le 7 décembre 2018 et le 10 avril 2019, le centre hospitalier d'Aubagne, représenté par MeE..., conclut au rejet de la requête.

Il soutient que les moyens soulevés par Mme D... A...ne sont pas fondés.

La requête a été communiquée à la caisse primaire centrale d'assurance maladie des Bouches-du-Rhône, à la commune d'Auriol et à la Mutuelle des municipaux, qui n'ont pas produit de mémoire.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code de la santé publique ;

- le code de justice administrative.

Après avoir entendu au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Merenne,

- et les conclusions de M. Argoud, rapporteur public.

Considérant ce qui suit :

1. Mme D...A...a subi le 26 février 2013 au centre hospitalier d'Aubagne une anesthésie générale suivie d'une coelioscopie en vue d'une ligature des trompes. L'intubation réalisée lors de l'anesthésie a provoqué la perte de la dent 11 et le déchaussement des dents 12 et 21.

2. Par un jugement du 4 décembre 2017 dont Mme D...A...fait appel, le tribunal administratif de Marseille a jugé que compte tenu de l'état bucco-dentaire de la patiente, le centre hospitalier avait commis une faute de nature à engager sa responsabilité en s'abstenant soit de lui conseiller de consulter son dentiste habituel afin de procéder à une stabilisation de son état dentaire, soit de privilégier d'autres techniques telles qu'une anesthésie locorégionale ou une fibroscopie avec intubation nasale. Le tribunal administratif, après avoir retenu un taux de perte de chance de 30 %, a condamné le centre hospitalier d'Aubagne à verser la somme de 1 756 euros à Mme D... A...en réparation des préjudices résultant de cette faute.

Sur l'application d'un taux de perte de chance suite à la faute médicale commise par le centre hospitalier :

3. Dans le cas où la faute commise lors de la prise en charge ou du traitement d'un patient dans un établissement public hospitalier a compromis ses chances d'obtenir une amélioration de son état de santé ou d'échapper à son aggravation, le préjudice résultant directement de la faute commise par l'établissement et qui doit être intégralement réparé n'est pas le dommage corporel constaté, mais la perte de chance d'éviter que ce dommage soit advenu. La réparation qui incombe à l'hôpital doit alors être évaluée à une fraction du dommage corporel déterminée en fonction de l'ampleur de la chance perdue.

4. En se bornant à citer un extrait du rapport de l'expert nommé par le juge des référés du tribunal administratif selon lequel l'anesthésie générale constitue la technique habituellement recommandée lors d'une opération de ligatures des trompes, mais une anesthésie locorégionale aurait pu être proposée, alors que ces éléments ont été pris en compte tant par l'expert que par le tribunal administratif pour évaluer à 30 % la chance perdue du fait de la faute commise par le centre hospitalier, Mme D...A...n'établit pas que le tribunal administratif aurait à tort retenu l'existence d'une perte de chance.

Sur la responsabilité du centre hospitalier du fait d'une promesse non tenue :

5. Par un certificat du 28 février 2013, le DrC..., praticien dentiste attaché au service d'oto-rhino-laryngologie et de chirurgie maxillo-faciale du centre hospitalier d'Aubagne, a indiqué que " l'assurance de l'hôpital s'engage à rembourser tous les frais occasionnés " suite à l'accident survenu le 26 février 2013. Si le Dr C...n'avait pas qualité pour prendre position au nom du centre hospitalier ou de son assureur, ce certificat est néanmoins susceptible d'engager la responsabilité du centre hospitalier du fait d'une promesse non tenue.

6. Le courriel du 3 juin 2013 par lequel le directeur adjoint du centre hospitalier indique au chirurgien-dentiste de la patiente que " je vous avais indiqué que ce dossier serait transmis à notre assureur, le centre hospitalier ne pouvant pas prendre en charge directement ce type de facture. Vous pouvez compter sur ma vigilance auprès de l'assureur " n'a pas été de nature à lever cet engagement apparent compte tenu de l'ambiguïté des termes dans lesquels il est rédigé.

7. Il résulte de l'instruction qu'en raison des assurances données par le DrC..., Mme D...A..., assistante territoriale spécialisée des écoles maternelles, mère de cinq enfants, a fait réaliser par son chirurgien-dentiste un bridge de dix dents, destiné à remédier au dommage causé lors de l'anesthésie, dont le coût a été fixé à 8 305 euros par un devis du 28 février 2013. Le montant restant à la charge de Mme D... A...après les prises en charge par la sécurité sociale et sa mutuelle s'élève à 4 673,40 euros. En l'absence de faute ou d'imprudence de la victime, le centre hospitalier doit être condamné à indemniser l'intégralité de ce préjudice, soit 4 673,40 euros.

8. En revanche, il ne résulte pas de l'instruction que cette promesse non tenue et l'introduction d'un recours indemnitaire devant la justice administrative auraient été à l'origine d'un préjudice moral pour Mme D...A....

Sur les frais divers :

9. Contrairement à ce que soutient Mme D...A..., le tribunal administratif n'a pas omis de prendre en compte les frais d'assistance par un médecin conseil, dont il a retenu l'indemnisation à hauteur de 456 euros au point 11 du jugement attaqué, pour déterminer le montant total de l'indemnité au versement de laquelle il a condamné le centre hospitalier d'Aubagne.

10. Par l'ordonnance n° 1304401 du 13 août 2013, le juge des référés du tribunal administratif de Marseille, après avoir ordonné une expertise médicale, a décidé de laisser la contribution pour l'aide juridique acquittée dans le cadre de cette instance à la charge de Mme D...A.... Cette appréciation exclut toute demande indemnitaire de ce chef sur un autre fondement juridique.

11. Il résulte de ce qui précède que Mme D...A...est seulement fondée à demander que l'indemnité au versement de laquelle le tribunal administratif de Marseille a condamné le centre hospitalier d'Aubagne soit portée à 6 429,40 euros.

Sur les frais exposés en appel :

12. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge du centre hospitalier d'Aubagne, en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, la somme de 2 000 euros au titre des frais non compris dans les dépens exposés par Mme D...A....

D É C I D E :

Article 1er : La somme que le centre hospitalier d'Aubagne a été condamné à verser à Mme D... A...par le jugement du 4 décembre 2017 du tribunal administratif de Marseille est portée 6 429,40 euros.

Article 2 : Le jugement du 4 décembre 2017 est réformé en ce qu'il a de contraire au présent arrêt.

Article 3 : Le centre hospitalier d'Aubagne versera à Mme D...A...la somme de 2 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 4 : Le surplus des conclusions de Mme D...A...est rejeté.

Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à Mme F... D...A..., au centre hospitalier d'Aubagne, à la caisse primaire centrale d'assurance maladie des Bouches-du-Rhône, à la Mutuelle des municipaux et à la commune d'Auriol.

Copie en sera adressée pour information à l'expert judiciaire.

Délibéré après l'audience du 2 mai 2019, où siégeaient :

- M. Vanhullebus, président de chambre,

- Mme Jorda-Lecroq, présidente-assesseure,

- M. Merenne, premier conseiller.

Lu en audience publique le 16 mai 2019.

5

N° 18MA00476


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Marseille
Formation : 2ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 18MA00476
Date de la décision : 16/05/2019
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

Responsabilité de la puissance publique - Faits susceptibles ou non d'ouvrir une action en responsabilité - Agissements administratifs susceptibles d'engager la responsabilité de la puissance publique - Promesses.

Responsabilité de la puissance publique - Responsabilité en raison des différentes activités des services publics - Service public de santé - Établissements publics d'hospitalisation.


Composition du Tribunal
Président : M. VANHULLEBUS
Rapporteur ?: M. Sylvain MERENNE
Rapporteur public ?: M. ARGOUD
Avocat(s) : CASTEL

Origine de la décision
Date de l'import : 04/06/2019
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.marseille;arret;2019-05-16;18ma00476 ?
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