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27/05/2019 | FRANCE | N°18MA04390

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 5ème chambre - formation à 3, 27 mai 2019, 18MA04390


Vu la procédure suivante :

Par une requête enregistrée le 4 mars 2016, la société LIDL, représentée par la société d'avocats Baker et McKenzie, demande à la Cour :

1°) d'annuler l'arrêté du 7 janvier 2016 par lequel le maire de la commune de Bessan a délivré à la SNC Bessan Développement un permis de construire en vue de la construction d'un centre commercial valant autorisation d'exploitation commerciale ;

2°) de mettre à la charge de la commune de Bessan une somme de 5 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. <

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Vu la procédure suivante :

Par une requête enregistrée le 4 mars 2016, la société LIDL, représentée par la société d'avocats Baker et McKenzie, demande à la Cour :

1°) d'annuler l'arrêté du 7 janvier 2016 par lequel le maire de la commune de Bessan a délivré à la SNC Bessan Développement un permis de construire en vue de la construction d'un centre commercial valant autorisation d'exploitation commerciale ;

2°) de mettre à la charge de la commune de Bessan une somme de 5 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- elle dispose d'un intérêt lui donnant qualité à demander l'annulation de l'arrêté en litige ;

- l'arrêté contesté ne fait pas mention de la nécessaire obtention ultérieure de l'autorisation requise au titre de l'article L. 111-8 du code de la construction et de l'habitation, en méconnaissance de l'article L. 425-3 du code de l'urbanisme ;

- la notice du projet architectural est insuffisamment précise, notamment en ce qui concerne l'insertion du projet dans son environnement ;

- la galerie marchande composée de 6 boutiques prévue dans le dossier de demande de permis de construire n'était pas mentionnée dans la demande d'autorisation d'exploitation commerciale et n'a pas été comptabilisée au titre de la surface de vente autorisée par décision de la CDAC ;

- le projet ayant évolué, le permis de construire ne pouvait être délivré sans avoir fait l'objet d'un nouvel avis de la CDAC ;

- le projet ne respecte pas les exigences posées par l'article L. 111-6-1 du code de l'urbanisme en matière d'emprise au sol des aires de stationnement ;

- la distance entre l'alignement de l'autoroute A9 et le bâtiment abritant la surface alimentaire au nord du terrain d'assiette du projet est inférieure à la distance de 75 m exigée par l'article AUZ6 du règlement du PLU ;

- le projet méconnaît l'article AUZ10 du règlement du PLU et l'article E.1 du CPAUP en ce qui concerne l'implantation des locaux techniques au sommet du bâtiment ;

- le projet ne respecte pas l'article AUZ11 du règlement du PLU et l'article E2 du CCAUP en ce qui concerne la teinte des bâtiments ;

- le projet ne décrit pas les dispositifs d'enseigne qui seront mis en place, de sorte que le service instructeur n'a pu vérifier le respect des exigences posées par l'article AUZ11 du règlement du PLU et E.3 du CPAUP ;

- le projet méconnaît les exigences posées par l'article 4 du CPAUP à défaut de prévoir la création de locaux de stockage de déchets clos et ventilés.

Par un mémoire en défense, enregistré le 31 mai 2016, la commune de Bessan, représentée par la SCP CGCB et associés, conclut au rejet de la requête et demande de mettre à la charge de la société requérante la somme de 3 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- la société requérante ne dispose d'aucun intérêt à demander l'annulation du permis contesté ;

- la circonstance que l'arrêté ne rappelle pas à la société bénéficiaire les exigences concernant le respect de la réglementation relative à l'accessibilité et la sécurité de son établissement au moment de la réalisation des aménagements du second oeuvre n'est pas substantielle ;

- à défaut, la commune sollicite le bénéfice de l'application de la jurisprudence Hallal pour ajouter au permis une mention supplémentaire relative à cette exigence ;

- les éléments contenus dans la notice architecturale sont complets et suffisants ;

- l'avis de la CNAC porte bien sur la réalisation d'une galerie marchande de 6 boutiques ;

- elle sollicite le bénéfice de l'application de l'article L. 600-5 du code de l'urbanisme s'agissant du léger dépassement de la surface autorisée des places de stationnement ;

- les règles de distance par rapport à l'axe des voies publiques ne sauraient concerner des ouvrages destinés à l'accueil des ordures ménagères ;

- les constructions projetées sont conformes à l'article AUZ10 du règlement du PLU ;

- la teinte choisie pour les constructions respecte les exigences de l'article AUZ11 du règlement du PLU ;

- l'article E.3 du CPAUP ne saurait s'interpréter comme imposant au pétitionnaire d'un permis de construire de joindre une description des enseignes et des éléments signalétiques ;

- les bâtiments projetés de stockage des déchets satisfont aux exigences prévues par l'article 4 du CPAUP.

Par un mémoire en intervention, enregistré le 7 juin 2016, la communauté d'agglomération Hérault Méditerranée conclut au rejet de la requête.

Elle soutient que :

- le projet litigieux constitue le coeur de la ZAC de la Capucière réalisée à son initiative ;

- la société requérante ne dispose d'aucun intérêt pour agir.

Par un mémoire, enregistré le 20 septembre 2017, la SNC Bessan Développement, représentée par MeC..., conclut au rejet de la requête, à la condamnation de la société requérante à payer une somme de 10 000 euros pour recours abusif et demande de mettre à la charge de cette société la somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- la société requérante ne dispose d'aucun intérêt à demander l'annulation de l'arrêté du maire de la commune de Bessan ;

- aucun des moyens soulevés par la société LIDL n'est fondé ;

- le recours que cette dernière a introduit est abusif.

Par un mémoire, enregistré le 29 septembre 2017, la commune de Bessan persiste dans ses précédentes écritures, demande en outre la condamnation de la société LIDL à payer une somme de 10 000 euros pour recours abusif et ajoute que :

- la cour administrative d'appel de Marseille est compétente pour connaître du litige ;

- la société LIDL, qui relève de la catégorie des personnes énoncées à l'article L. 752-17 du code de commerce, n'a soulevé dans le délai de recours contentieux aucun moyen contre le permis de construire en tant qu'il vaut autorisation d'exploitation commerciale.

Par un mémoire, enregistré le 29 septembre 2017, la communauté d'agglomération Hérault Méditerranée, représentée par la SCP CGCB et associés, persiste dans ses précédentes écritures et ajoute que :

- la cour administrative d'appel de Marseille est compétente pour connaître du litige ;

- la société LIDL, qui relève de la catégorie des personnes énoncées à l'article L. 752-17 du code de commerce, n'a soulevé dans le délai de recours contentieux aucun moyen contre le permis de construire en tant qu'il vaut autorisation d'exploitation commerciale.

Par une ordonnance du 28 septembre 2018, la présidente du tribunal administratif de Montpellier a transmis le dossier de la requête de la société LIDL à la cour administrative d'appel de Marseille.

Par un mémoire enregistré le 15 mars 2019, la commune de Bessan persiste dans ses précédentes écritures et ajoute que :

- la société pétitionnaire a déposé un dossier de demande de permis de construire modificatif dont l'objet est de compléter son dossier de demande, de modifier les accès et de réduire l'emprise du parking ;

- aux termes de la dernière version du PLU issue de la 3ème modification simplifiée, les aires de présentation des ordures ménagères peuvent être implantées en limite de propriété.

Par un mémoire enregistré le 15 mars 2019, la communauté d'agglomération Hérault Méditerranée persiste dans ses précédentes écritures et ajoute que :

- la société pétitionnaire a déposé un dossier de demande de permis de construire modificatif dont l'objet est de compléter son dossier de demande, de modifier les accès et de réduire l'emprise du parking ;

- aux termes de la dernière version du PLU issue de la 3ème modification simplifiée, les aires de présentation des ordures ménagères peuvent être implantées en limite de propriété.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code de commerce ;

- le code de l'urbanisme ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Duran-Gottschalk, rapporteure,

- les conclusions de M. Revert, rapporteur public ;

- les observations de MeB..., représentant la commune de Bessan et la communauté d'agglomération Hérault Méditerranée et de MeA..., substituant MeC..., représentant la SNC Bessan Développement.

Considérant ce qui suit :

1. Le 7 janvier 2016, le maire de la commune de Bessan a délivré à la SNC Bessan Développement un permis de construire valant autorisation d'exploitation commerciale en vue de la construction d'un centre commercial de 3 bâtiments sur les parcelles cadastrées section BV n°s 1 à 5, BV n°s 7 à 11, BV n°s 14 à 29, BV n°s 33 et 34, BV n° 36, BV n° 38, BV n°s 99 à 101 et BV n° 110 à Bessan, incluses dans la zone d'aménagement concerté (ZAC) de la Capucière, portant sur une surface de plancher de 14 226 m². La société LIDL, dont le dossier de la requête a été transmis à la cour par la présidente du tribunal administratif de Montpellier, demande d'annuler ce permis en tant qu'il tient lieu d'autorisation de construire.

Sur l'intervention de la communauté d'agglomération Hérault Méditerranée :

2. Il ressort des pièces du dossier que le projet objet de la demande de permis de construire se situe au sein de la ZAC de la Capucière ayant vocation à accueillir notamment des entreprises artisanales, commerciales et industrielles et dont la création a été décidée par la communauté d'agglomération Hérault Méditerranée. Cette dernière a donc intérêt au maintien de l'arrêté du maire qui autorisation la création d'un centre commercial au coeur de cette zone. Il s'ensuit que son intervention en défense est recevable.

Sur l'intérêt à agir de la société LIDL :

3. Aux termes de l'article L. 600-1-2 du code de l'urbanisme : " Une personne autre que l'Etat, les collectivités territoriales ou leurs groupements ou une association n'est recevable à former un recours pour excès de pouvoir contre une décision relative à l'occupation ou à l'utilisation du sol régie par le présent code que si la construction, l'aménagement ou le projet autorisé sont de nature à affecter directement les conditions d'occupation, d'utilisation ou de jouissance du bien qu'elle détient ou occupe régulièrement ou pour lequel elle bénéficie d'une promesse de vente, de bail, ou d'un contrat préliminaire mentionné à l'article L. 261-15 du code de la construction et de l'habitation ".

4. Pour contester le permis de construire délivré le 7 janvier 2016 à la SNC Bessan Développement en tant qu'il autorise la construction d'un centre commercial, comprenant notamment un hypermarché " Intermarché " de 3 500 m², une galerie marchande de 526 m², 4 moyennes surfaces, 4 boutiques et une maison des terroirs de 950 m², la société LIDL, qui exploite un magasin à 1 km du terrain d'assiette du centre commercial envisagé, soutient que le projet, qui va conduire à une augmentation du trafic sur la route départementale 13 qui dessert son établissement, affectera gravement les conditions de desserte de ce dernier, et que le caractère inesthétique des constructions projetées aura un impact négatif sur la valorisation et la visibilité de son bâtiment. Elle ne démontre cependant pas que la construction projetée sera visible depuis son propre établissement, compte tenu notamment de la distance qui les sépare, tandis qu'il ressort des pièces du dossier, notamment de l'étude de trafic, que le projet n'aura pas d'incidence sensible sur le trafic de la route départementale 13 et partant sur les conditions d'accès à son établissement. Par suite, la société LIDL ne justifie d'aucun intérêt à demander l'annulation de l'arrêté du maire en tant qu'il vaut autorisation de construire.

5. Il résulte de ce qui précède que la société LIDL n'est pas recevable à demander l'annulation de l'arrêté du maire de la commune de Bessan du 7 janvier 2016 en tant qu'il tient lieu d'autorisation de construire.

Sur les conclusions tendant au prononcé d'une amende pour recours abusif :

6. Aux termes de l'article R. 741-12 du code de justice administrative : " Le juge peut infliger à l'auteur d'une requête qu'il estime abusive une amende dont le montant ne peut excéder 10 000 euros ". La faculté prévue par ces dispositions constituant un pouvoir propre du juge, les conclusions de la commune de Bessan et de la SNC Bessan Développement tendant à ce que la société requérante soit condamnée à une telle amende ne sont en tout état de cause pas recevables.

Sur les frais liés au litige :

7. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mis à la charge de la commune de Bessan, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, le versement d'une somme à la société LIDL, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de la société LIDL une somme de 1 500 euros à verser chacune à la SNC Bessan Développement et à la commune de Bessan sur le fondement des mêmes dispositions.

DÉCIDE :

Article 1er : L'intervention en défense de la communauté d'agglomération Hérault Méditerranée est admise.

Article 2 : La requête de la société LIDL est rejetée.

Article 3 : Les conclusions de la commune de Bessan et de la société Bessan Développement présentées en application de l'article R. 741-12 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 4 : La société LIDL versera une somme de 1 500 euros chacune à la commune de Bessan et à la société Bessan Développement en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à la société LIDL, à la commune de Bessan, à la société Bessan Développement, à la communauté d'agglomération Hérault Méditerranée et à la commission nationale d'aménagement commercial.

Délibéré après l'audience du 13 mai 2019, où siégeaient :

- M. Bocquet, président,

- M. Marcovici, président-assesseur,

- Mme Duran-Gottschalk, première conseillère.

Lu en audience publique, le 27 mai 2019.

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N° 18MA04390


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Marseille
Formation : 5ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 18MA04390
Date de la décision : 27/05/2019
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

Urbanisme et aménagement du territoire - Autorisations d`utilisation des sols diverses - Autorisation d`exploitation commerciale (voir : Commerce - industrie - intervention économique de la puissance publique).

Urbanisme et aménagement du territoire - Règles de procédure contentieuse spéciales - Introduction de l'instance - Intérêt à agir.


Composition du Tribunal
Président : M. BOCQUET
Rapporteur ?: Mme Karine DURAN-GOTTSCHALK
Rapporteur public ?: M. REVERT
Avocat(s) : SCP BAKER et MCKENZIE

Origine de la décision
Date de l'import : 04/06/2019
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.marseille;arret;2019-05-27;18ma04390 ?
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