La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

04/06/2019 | FRANCE | N°18MA01074

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 8ème chambre - formation à 3, 04 juin 2019, 18MA01074


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme D... E...a demandé au tribunal administratif de Toulon d'annuler la décision du 15 décembre 2016 par laquelle le directeur du service local du contentieux de Toulon du ministère de la défense a refusé de se mettre en rapport avec le médiateur des assurances de France pour lui apporter la preuve que l'accident de la circulation ayant entraîné le décès de son concubin, M. C..., à Kuala Lumpur en Malaisie le 22 mars 2000 a bien été déclaré en temps voulu.

Par un jugement n° 1700724 du 8 jan

vier 2018, le tribunal administratif de Toulon a rejeté sa demande pour incompétence ...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme D... E...a demandé au tribunal administratif de Toulon d'annuler la décision du 15 décembre 2016 par laquelle le directeur du service local du contentieux de Toulon du ministère de la défense a refusé de se mettre en rapport avec le médiateur des assurances de France pour lui apporter la preuve que l'accident de la circulation ayant entraîné le décès de son concubin, M. C..., à Kuala Lumpur en Malaisie le 22 mars 2000 a bien été déclaré en temps voulu.

Par un jugement n° 1700724 du 8 janvier 2018, le tribunal administratif de Toulon a rejeté sa demande pour incompétence de la juridiction administrative.

Procédure devant la Cour :

Par une requête, enregistrée le 7 mars 2018, Mme E..., représentée par Me B..., demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de Toulon du 8 janvier 2018 ;

2°) d'annuler la décision du 15 décembre 2016 du directeur du service local du contentieux de Toulon du ministère de la défense ;

3°) de mettre à la charge de l'État la somme de 1 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

* les premiers juges ont rejeté à tort sa demande comme portée devant un ordre de juridiction incompétent pour en connaître ;

* le ministère des armées est compétent pour intervenir auprès de la compagnie d'assurance de l'un de ses agents.

Par un mémoire en défense, enregistré le 11 juin 2018, la ministre des armées conclut au rejet de la requête.

Elle fait valoir que :

* le litige entre la requérante et son assurance privée ne relève pas de la compétence de la juridiction administrative ;

* le ministère des armées n'est pas compétent pour intervenir auprès de la compagnie d'assurance de l'un de ses agents.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

* le code de la défense ;

* le code des assurances ;

* le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

* le rapport de M. Gonzales,

* les conclusions de M. Angéniol, rapporteur public,

* et les observations de Me A..., substituant Me B..., représentant Mme E....

Considérant ce qui suit :

1. M. C..., le concubin de Mme E..., second maître dans la marine, est décédé en service d'un accident de la circulation le 22 mars 2000, à Kuala-Lumpur, en Malaisie. La requérante conteste le refus de la compagnie d'assurance Allianz, ayant repris les obligations de la société AGF, assureur de son compagnon, de l'indemniser au motif que l'accident ayant causé le décès n'aurait pas été déclaré dans les deux années ayant suivi le décès. Mme E..., par courrier du 28 juin 2016, a sollicité l'intervention du service local du contentieux de Toulon pour qu'il se mette en relation avec le médiateur des Assurances ou avec la compagnie d'assurance Allianz afin de transmettre les documents prouvant que le sinistre avait bien été déclaré en temps voulu aux assurances AGF. Le directeur du service local du contentieux de Toulon, par courrier du 15 décembre 2016, a refusé de donner une suite favorable à sa demande et a indiqué à l'intéressée que le service n'avait en sa possession aucun document concernant l'accident en service de son compagnon ayant été transmis aux assurances AGF. Devant les premiers juges, Mme E... a attaqué la décision du 15 décembre 2016 du directeur du service local du contentieux de Toulon du ministère de la défense. Elle relève appel du jugement du 8 janvier 2018 par lequel le tribunal administratif de Toulon a rejeté sa demande pour incompétence de la juridiction administrative.

Sur la compétence de la juridiction administrative :

2. Les premiers juges ont rejeté la requête de Mme E... comme portée devant un ordre de juridiction incompétent pour en connaître au motif que la décision litigieuse du 15 décembre 2016 ne relevait d'aucune prérogative de puissance publique attachée à la qualité d'employeur public et qu'elle avait été prise au demeurant dans le cadre d'un litige entre personnes privées. Il est constant que le litige qui oppose Mme E... à la compagnie d'assurance Allianz est un litige d'ordre privé et qu'aucun texte, contrairement à ce que soutient la requérante, ne contraint l'administration à s'immiscer dans ces relations de droit privé. Il ressort des dispositions du décret n° 2015-1535 du 25 novembre 2015 relatif à la prise en charge des frais liés au décès en service des militaires invoqué par l'intéressée que les dispositifs de soutien consistent principalement en la prise en charge des frais afférents au décès et non en la prise en charge des modalités de déclaration de décès auprès des assurances de l'agent décédé. En vertu de ce décret, l'administration était tenue de délivrer à la requérante le certificat de décès de son concubin, ce qui a été fait, à charge pour l'intéressée d'en informer les organismes d'assurance auprès desquels il avait souscrit des contrats. Il ne ressort d'ailleurs pas des pièces du dossier, contrairement à ce que soutient sans preuve Mme E..., que le ministère de la défense ait eu un contact avec la compagnie d'assurance AGF dans les deux années qui ont suivi son décès au titre du contrat automobile de M. C....

3. Toutefois, l'administration, saisie le 28 juin 2016 de la demande de Mme E... tendant à ce qu'elle se rapproche du médiateur des assurances aux fins de prouver que les documents déclarant le décès avaient été transmis en temps utile, était compétente pour se prononcer sur l'opportunité de faire droit à la demande de l'intéressée ou pour se prononcer sur sa propre compétence. Dès lors, le courrier du 15 décembre 2016 par lequel le directeur du service local du contentieux refuse de faire droit à la demande de Mme E..., eu égard à sa nature et à sa portée, présente le caractère d'une décision administrative faisant grief susceptible de faire l'objet d'un recours pour excès de pouvoir devant la juridiction administrative. Ainsi, c'est à tort que les premiers juges ont rejeté la demande d'annulation de la requérante dirigée contre cette décision comme portée devant une juridiction incompétente pour en connaître.

4. Il résulte de ce qui précède que le jugement du 8 janvier 2018 doit être annulé et qu'il y a lieu d'évoquer l'affaire et de statuer immédiatement sur la demande présentée par la requérante devant le tribunal administratif de Toulon.

Sur la recevabilité de la demande de première instance :

5. Il résulte de ce qui précède que, contrairement à ce que soutient Mme E..., aucun texte n'oblige le ministre de la défense à prendre en charge les modalités de déclaration de décès auprès des assurances de ses agents. Dès lors, le courrier du 28 juin 2016 de Mme E... adressé au directeur du service local du contentieux de Toulon tendant à ce que ce dernier se mette en relation avec le médiateur des assurances doit être regardé comme une demande effectuée à titre gracieux à laquelle a répondu le directeur du service local du contentieux par la décision de rejet du 15 décembre 2016 qui doit également être regardée comme une mesure gracieuse non susceptible d'être discutée par la voie contentieuse. Ainsi, les conclusions de première instance de Mme E... étaient irrecevables.

6. Dès lors, la demande de Mme E... doit être rejetée, y compris les conclusions présentées sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

D É C I D E :

Article 1er : Le jugement n° 1700724 du tribunal administratif de Toulon en date du 8 janvier 2018 est annulé.

Article 2 : La demande de Mme E... présentée devant le tribunal administratif de Toulon est rejetée.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à Mme D... E... et à la ministre des armées.

Délibéré après l'audience du 21 mai 2019, où siégeaient :

* M. Gonzales, président,

* M. d'Izarn de Villefort, président assesseur,

* M. Jorda, premier conseiller.

Lu en audience publique le 4 juin 2019.

N° 18MA01074 2


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Marseille
Formation : 8ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 18MA01074
Date de la décision : 04/06/2019
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

17-03-02-005-01 Compétence. Répartition des compétences entre les deux ordres de juridiction. Compétence déterminée par un critère jurisprudentiel. Actes. Actes administratifs.


Composition du Tribunal
Président : M. GONZALES
Rapporteur ?: M. Serge GONZALES
Rapporteur public ?: M. ANGENIOL
Avocat(s) : SELARL ABEILLE et ASSOCIÉS - AVOCATS

Origine de la décision
Date de l'import : 18/06/2019
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.marseille;arret;2019-06-04;18ma01074 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award