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24/06/2019 | FRANCE | N°19MA00314

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 5ème chambre - formation à 3, 24 juin 2019, 19MA00314


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B...C...a demandé au tribunal administratif de Marseille d'annuler l'arrêté du 11 juillet 2018 par lequel le préfet de la Côte d'Or lui a fait obligation de quitter le territoire français sans délai de départ volontaire, a fixé un pays de destination à la mesure d'éloignement et lui a interdit le retour sur le territoire français pour une durée d'un an, d'enjoindre au préfet de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour pendant la durée du réexamen de sa situation administrative dans un

délai de 15 jours à compter de la notification du jugement et de mettre à la ch...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B...C...a demandé au tribunal administratif de Marseille d'annuler l'arrêté du 11 juillet 2018 par lequel le préfet de la Côte d'Or lui a fait obligation de quitter le territoire français sans délai de départ volontaire, a fixé un pays de destination à la mesure d'éloignement et lui a interdit le retour sur le territoire français pour une durée d'un an, d'enjoindre au préfet de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour pendant la durée du réexamen de sa situation administrative dans un délai de 15 jours à compter de la notification du jugement et de mettre à la charge de l'Etat, au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, la somme de 1 000 euros à verser à son conseil en application de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991, sous réserve que son conseil renonce à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l'Etat en matière d'aide juridictionnelle.

Par un jugement n° 1805734 du 23 août 2018, le magistrat désigné du tribunal administratif de Marseille a rejeté la demande de M.C....

Procédure devant la Cour :

Par une requête, enregistrée le 18 janvier 2019, M.C..., représenté par Me A... D..., demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement rendu par le magistrat désigné du tribunal administratif de Marseille le 23 août 2018 ;

2°) d'annuler l'arrêté du préfet de la Côte d'Or en date du 11 juillet 2018 ;

3°) d'enjoindre au préfet de la Côte d'Or de lui délivrer un titre de séjour lui permettant de travailler, assorti d'une astreinte de 100 euros par jour de retard dans le délai de quinze jours suivant la notification du jugement à intervenir ;

4°) de mettre à la charge du préfet de la Côte d'Or le versement d'une somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que la décision en litige est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation sur l'ensemble de sa situation, dès lors qu'elle méconnait les stipulations de l'article 3-1 de la convention des droits de l'enfant et de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ainsi que les dispositions du 6° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.

Un mémoire en défense présenté par le préfet de la Côte d'Or a été enregistré le 4 juin 2019 à 17h26, soit après la clôture d'instruction intervenue le même jour à 12 heures. Il n'a pas été communiqué.

La demande d'aide juridictionnelle de M.C..., enregistrée le 3 octobre 2018, a été rejetée par une décision du 21 novembre 2018 du bureau d'aide juridictionnelle près le tribunal de grande instance de Marseille.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- la convention internationale relative aux droits de l'enfant ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le rapport de M. Pecchioli a été entendu au cours de l'audience publique.

Considérant ce qui suit :

1. M.C..., né le 12 mai 1986, de nationalité comorienne, demande l'annulation du jugement par lequel le magistrat désigné du tribunal administratif de Marseille a rejeté sa requête dirigée contre l'arrêté du préfet de la Côte d'Or du 11 juillet 2018 l'obligeant à quitter le territoire français sans délai de départ volontaire, fixant un pays de destination à la mesure d'éloignement et lui interdisant le retour sur le territoire français pour une durée d'un an.

Sur le bien-fondé du jugement attaqué :

2. Les stipulations de l'article 3-1 de la convention relative aux droits de l'enfant signée à New York le 26 janvier 1990 prévoient que : " Dans toutes les décisions qui concernent les enfants, qu'elles soient le fait d'institutions politiques ou privées de protection sociale, des tribunaux, des autorités administratives ou des organes législatifs, l'intérêt supérieur de l'enfant doit être une considération primordiale. ". Il résulte de ces stipulations, qui peuvent être utilement invoquées à l'appui d'un recours pour excès de pouvoir, que, dans l'exercice de son pouvoir d'appréciation, l'autorité administrative doit accorder une attention primordiale à l'intérêt supérieur des enfants dans toutes les décisions les concernant. Elles sont applicables non seulement aux décisions qui ont pour objet de régler la situation personnelle d'enfants mineurs mais aussi à celles qui ont pour effet d'affecter, de manière suffisamment directe et certaine, leur situation.

3. M. C... est le père de Imrane MohamedC..., de nationalité française, né à Marseille le 20 novembre 2016 qu'il a eu de sa relation avec une ressortissante française. Il ressort des différentes pièces produites au dossier notamment en cause d'appel, en particulier de l'acte de reconnaissance anticipée de l'enfant par M. C... en date du 1er septembre 2016, des justificatifs de contribution régulière aux besoins de l'enfant, entre le mois de mai 2017 et le mois de juin 2018, constitués d'une part, de factures portant sur des achats réguliers d'articles de puériculture, de vêtements, de médicaments et, d'autre part, de récépissés d'opérations financières, confirmées par la mère de l'enfant, que l'intéressé participe à l'entretien et à l'éducation de sa fille.

4. L'intérêt supérieur de l'enfant du requérant est d'avoir ses parents auprès de lui, même lorsque ceux-ci sont séparés. Par suite, l'arrêté en litige, portant obligation de quitter le territoire français sans délai, a nécessairement pour conséquence la séparation de l'enfant d'avec l'un de ses deux parents. Ainsi, dans les circonstances de l'espèce, M. C... est fondé à soutenir en appel que la décision litigieuse a été prise en méconnaissance des stipulations précitées de l'article 3-1 de la convention internationale des droits de l'enfant.

5. Il résulte de ce qui précède, que M.C..., dont la requête est recevable pour avoir été introduite dans les délais de recours, est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande. M. C...est, dès lors, fondé à demander l'annulation dudit jugement ainsi que celle de l'arrêté du préfet de la Côte d'Or du 11 juillet 2018.

Sur les conclusions aux fins d'injonction et d'astreinte :

6. Pour l'application des articles L. 911-1 et suivants du code de justice administrative, l'annulation prononcée par le présent arrêt, eu égard au motif qui la fonde, implique que, sous réserve d'un changement dans les circonstances de droit ou de fait, le préfet délivre à M. C... une autorisation provisoire de séjour et réexamine sa situation. Il y a lieu d'adresser au préfet de la Côte d'Or une injonction en ce sens et de fixer à deux mois le délai imparti pour son exécution. En revanche, il n'y a pas lieu d'assortir cette injonction d'une astreinte.

Sur les frais de l'instance :

7. Aux termes de l'article L. 761-1 du code de justice administrative : " Dans toutes les instances, le juge condamne la partie tenue aux dépens ou, à défaut, la partie perdante, à payer à l'autre partie la somme qu'il détermine, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Le juge tient compte de l'équité ou de la situation économique de la partie condamnée. Il peut, même d'office, pour des raisons tirées des mêmes considérations, dire qu'il n'y a pas lieu à cette condamnation. ".

8. Il y a lieu, en application des dispositions susmentionnées, de mettre à la charge de l'Etat une somme de 800 euros au titre des frais exposés par M. C...et non compris dans les dépens.

D É C I D E :

Article 1er : Le jugement rendu par le magistrat désigné du tribunal administratif de Marseille le 23 août 2018 et l'arrêté du préfet de la Côte d'Or du 11 juillet 2018 sont annulés.

Article 2 : Il est enjoint au préfet de la Côte d'Or de procéder au réexamen de la situation de M. C... dans un délai de deux mois à compter de la notification du présent arrêt et, dans l'attente de ce réexamen, de le munir d'une autorisation provisoire de séjour.

Article 3 : Le surplus des conclusions de la requête de M. C...est rejeté.

Article 4 : L'Etat (ministre de l'intérieur) versera une somme de 800 euros à M. C...en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à M. B... C...et au ministre de l'intérieur.

Copie en sera adressée au préfet des Bouches-du-Rhône et au préfet de la Côte d'Or.

Délibéré après l'audience du 12 juin 2019, où siégeaient :

- M. Bocquet, président,

- M. Pecchioli, premier conseiller,

- MmeE..., première conseillère.

Lu en audience publique, le 24 juin 2019.

4

N° 19MA00314


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Marseille
Formation : 5ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 19MA00314
Date de la décision : 24/06/2019
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-03 Étrangers. Obligation de quitter le territoire français (OQTF) et reconduite à la frontière.


Composition du Tribunal
Président : M. BOCQUET
Rapporteur ?: M. Jean-Laurent PECCHIOLI
Rapporteur public ?: M. REVERT
Avocat(s) : KHADIR CHERBONEL

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2019
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.marseille;arret;2019-06-24;19ma00314 ?
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