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06/07/2020 | FRANCE | N°18MA01453

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 5ème chambre, 06 juillet 2020, 18MA01453


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. D... A... a demandé au tribunal administratif de Toulon d'annuler la délibération du 4 novembre 2015 par laquelle le conseil municipal de Saint-Julien-Le-Montagnier a adopté le budget primitif 2015.

Par un jugement n° 1502241 du 1er février 2018, le tribunal administratif de Toulon a annulé cette délibération.

Procédure devant la Cour :

Par une requête enregistrée le 30 mars 2018, la commune de Saint-Julien-Le-Montagnier, représentée par Me C..., demande à la Cour :

1

) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Toulon du 1er février 2018 ;

2°) de rejeter la ...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. D... A... a demandé au tribunal administratif de Toulon d'annuler la délibération du 4 novembre 2015 par laquelle le conseil municipal de Saint-Julien-Le-Montagnier a adopté le budget primitif 2015.

Par un jugement n° 1502241 du 1er février 2018, le tribunal administratif de Toulon a annulé cette délibération.

Procédure devant la Cour :

Par une requête enregistrée le 30 mars 2018, la commune de Saint-Julien-Le-Montagnier, représentée par Me C..., demande à la Cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Toulon du 1er février 2018 ;

2°) de rejeter la demande présentée par M. A... devant le tribunal administratif ;

3°) de mettre à la charge de ce dernier le versement de la somme de 2 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- elle n'a pas méconnu le droit à l'information des conseillers municipaux ;

- une réunion de travail, durant laquelle ont été présentés les comptes administratifs 2014 et le budget primitif 2015, s'est en effet déroulée le 8 avril 2015 ;

- le détail du budget primitif a été délivré aux élus lors de la séance du 13 avril 2015 ;

- elle a communiqué aux conseillers municipaux tous les documents utiles à leur réflexion et nécessaires à l'examen du budget ;

- il n'est pas démontré que tous les documents sollicités par M. A... étaient nécessaires au vote du budget ;

- une partie des documents demandés n'existait pas au jour de la demande, mais ont été élaborés au mois d'avril 2015 ;

- le nombre élevé de documents demandés, le fait que M. A... ait déjà eu accès à certains des documents sollicités et l'intention de nuire au bon fonctionnement de l'administration caractérisent le caractère abusif de la demande de M. A... ;

- le tribunal a inversé la charge de la preuve en exigeant d'elle qu'elle démontre que les documents sollicités avaient bien été transmis.

Par un mémoire en défense enregistré le 4 septembre 2019, M. A..., représenté par Me B..., conclut au rejet de la requête, à la suppression des passages injurieux, outrageants et diffamatoires et à la condamnation de la commune à lui verser la somme de 2 500 euros en réparation du préjudice en résultant, et demande de mettre à la charge de la commune la somme de 3 000 euros en application l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- la commune ne démontre pas avoir transmis les documents nécessaires à l'information des élus en temps utile ;

- sa demande ne revêt pas un caractère abusif ;

- le tribunal administratif n'a pas inversé la charge de la preuve, dès lors qu'il a apporté un commencement de preuve ;

- la délibération contestée souffre en outre d'autres irrégularités.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code général des collectivités territoriales ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme E...,

- les conclusions de M. Pecchioli, rapporteur public,

- et les observations de Me C..., représentant la commune de Saint-Julien-Le-Montagnier, et de Me B..., représentant M. A....

Considérant ce qui suit :

1. La commune de Saint-Julien-Le-Montagnier relève appel du jugement du 1er février 2018 par lequel le tribunal administratif de Toulon a annulé, à la demande de M. A..., conseiller municipal, la délibération du 15 avril 2015 par laquelle le conseil municipal a approuvé le budget primitif 2015.

Sur le bien-fondé du jugement attaqué :

2. Selon l'article L. 2121-13 du code général des collectivités territoriales : " Tout membre du conseil municipal a le droit, dans le cadre de sa fonction, d'être informé des affaires de la commune qui font l'objet d'une délibération ". En application de ces dispositions, le maire est tenu de communiquer aux membres du conseil municipal les documents nécessaires pour qu'ils puissent se prononcer utilement sur les affaires de la commune soumises à leur délibération. Lorsqu'un membre du conseil municipal demande, sur le fondement de ces dispositions du code général des collectivités territoriales, la communication de documents, il appartient au maire sous le contrôle du juge de l'excès de pouvoir, d'une part, d'apprécier si cette communication se rattache à une affaire de la commune qui fait l'objet d'une délibération du conseil municipal et, d'autre part, de s'assurer qu'aucun motif d'intérêt général n'y fait obstacle, avant de procéder, le cas échéant, à cette communication selon des modalités appropriées.

3. Par courrier du 12 février 2015, quatre conseillers municipaux, dont M. A..., ont demandé communication de plusieurs documents, préalablement à la séance du conseil municipal tendant à adopter le budget primitif 2015, constitués par les balances générales 2014, le détail des dépenses et des recettes en section de fonctionnement et d'investissement 2014, l'état de la dette avec répartition par prêteurs 2014 et 2015, l'état des engagements donnés et reçus 2014 et 2015, le plan de financement des travaux de la maison de retraite en 2014 et 2015, l'état du personnel au 31 décembre 2014, le grand livre général 2014 en fonctionnement en ce qui concerne certains articles, le grand livre général 2014 en investissement sous les chapitres 20, 21 et 23, les budgets des associations subventionnées en 2014, les budgets des associations dont des subventions sont prévues en 2015, les arrêtés de décision d'attribution des subventions inscrites en 2014 et prévues en 2015 ainsi que les conventions signées avec les organismes extérieurs en 2014 et celles budgétées pour 2015.

4. Si la commune soutient que les documents demandés ont été communiqués le 8 avril 2015 lors d'une réunion de travail dont l'objectif était de présenter les comptes administratifs 2014 et le budget primitif 2015, que le détail du budget primitif a été délivré aux élus lors de la séance du 13 avril 2015 et qu'elle a adressé aux élus une série de documents budgétaires qu'elle produit à l'appui de sa requête, elle ne démontre par aucune pièce avoir communiqué aux élus concernés préalablement à la séance du conseil municipal les documents demandés, tous en rapport avec la délibération à voter, tandis qu'elle n'allègue pas non plus qu'un motif d'intérêt général y aurait fait obstacle. La preuve de cette communication ne saurait être apportée par les attestations peu précises qu'elle fournit en appel, rédigées trois ans après la tenue du conseil municipal, émanant du maire et de certains conseillers municipaux, par lesquelles ces derniers indiquent avoir " été informés en temps utile " et avoir " voté le budget en connaissance de cause ". Enfin, la demande de M. A... tendant à la communication des documents énumérés au point précédent ne revêt pas un caractère abusif.

5. Il résulte de ce qui précède que la commune de Saint-Julien-Le-Montagnier n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Toulon, qui n'a pas inversé la charge de la preuve, a annulé la délibération du 15 avril 2015.

Sur la demande de M. A... tendant à la suppression des discours injurieux, outrageants ou diffamatoires et à l'allocation de dommages et intérêts :

6. Aux termes de l'article L. 741-2 du code de justice administrative : " Sont également applicables les dispositions des alinéas 3 à 5 de l'article 41 de la loi du 29 juillet 1881 ci-après reproduites : " Art. 41, alinéas 3 à 5.-Ne donneront lieu à aucune action en diffamation, injure ou outrage, ni le compte rendu fidèle fait de bonne foi des débats judiciaires, ni les discours prononcés ou les écrits produits devant les tribunaux. Pourront néanmoins les juges, saisis de la cause et statuant sur le fond, prononcer la suppression des discours injurieux, outrageants ou diffamatoires, et condamner qui il appartiendra à des dommages-intérêts. Pourront toutefois les faits diffamatoires étrangers à la cause donner ouverture, soit à l'action publique, soit à l'action civile des parties, lorsque ces actions leur auront été réservées par les tribunaux et, dans tous les cas, à l'action civile des tiers ".

7. Il ressort des termes de la requête de la commune que celle-ci ne contient pas de passages injurieux, outrageants ou diffamatoires. Dès lors, les demandes de M. A... tendant à la suppression de tels passages et à l'allocation de dommages et intérêts en application de l'article L. 741-2 du code de justice administrative doivent être rejetées.

Sur les frais liés au litige :

8. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de M. A..., qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, la somme demandée par la commune de Saint-Julien-Le-Montagnier au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Il y a lieu de mettre à la charge de la commune la somme de 1 500 euros à verser à M. A... sur le fondement des mêmes dispositions.

D É C I D E :

Article 1er : La requête de la commune de Saint-Julien-Le-Montagnier est rejetée.

Article 2 : Les conclusions de M. A... formulées en application de l'article L. 741-2 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 3 : La commune de Saint-Julien-Le-Montagnier versera une somme de 1 500 euros à M. A... en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à la commune de Saint-Julien-Le-Montagnier et à M. D... A....

Délibéré après l'audience du 22 juin 2020, où siégeaient :

- M. Bocquet, président,

- M. Marcovici, président-assesseur,

- Mme E..., première conseillère.

Lu en audience publique, le 6 juillet 2020.

2

N° 18MA01453


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Marseille
Formation : 5ème chambre
Numéro d'arrêt : 18MA01453
Date de la décision : 06/07/2020
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

135-02-01-02-01-01 Collectivités territoriales. Commune. Organisation de la commune. Organes de la commune. Conseil municipal. Fonctionnement.


Composition du Tribunal
Président : M. BOCQUET
Rapporteur ?: Mme Karine DURAN-GOTTSCHALK
Rapporteur public ?: M. PECCHIOLI
Avocat(s) : SELARL MAUDUIT LOPASSO GOIRAND et ASSOCIES

Origine de la décision
Date de l'import : 28/07/2020
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.marseille;arret;2020-07-06;18ma01453 ?
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