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15/07/2020 | FRANCE | N°19MA00227

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 9ème chambre, 15 juillet 2020, 19MA00227


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. D... A... a demandé au tribunal administratif de Montpellier d'annuler l'arrêté du 9 octobre 2017 par lequel le maire d'Elne l'a, au nom de l'Etat, mis en demeure d'interrompre les travaux qu'il avait entrepris.

Par un jugement n° 1705930 du 13 novembre 2018, le tribunal administratif de Montpellier a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête et le mémoire, enregistrés le 16 janvier 2019 et le 17 février 2020, M. A..., représenté par la SCPA Vigo, demande à

la Cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Montpellier du 13 novembre ...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. D... A... a demandé au tribunal administratif de Montpellier d'annuler l'arrêté du 9 octobre 2017 par lequel le maire d'Elne l'a, au nom de l'Etat, mis en demeure d'interrompre les travaux qu'il avait entrepris.

Par un jugement n° 1705930 du 13 novembre 2018, le tribunal administratif de Montpellier a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête et le mémoire, enregistrés le 16 janvier 2019 et le 17 février 2020, M. A..., représenté par la SCPA Vigo, demande à la Cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Montpellier du 13 novembre 2018 ;

2°) d'annuler l'arrêté du maire d'Elne, au nom de l'Etat, du 9 octobre 2017 ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat le versement d'une somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- le jugement attaqué méconnaît l'article R. 741-7 du code de justice administrative ;

- en estimant que le maire était en situation de compétence liée alors qu'une telle situation ne constituait pas le motif de la décision en litige et qu'aucune substitution de motif n'avait été demandée, les premiers juges ont d'office procédé à une substitution de motif et statué " ultra petita " ;

- il ne ressort pas des pièces du dossier, notamment de l'acte notarié d'acquisition que le bâtiment existant aurait été édifié sans autorisation de construire ;

- la procédure contradictoire préalable à l'édiction de l'arrêté en cause n'a pas été respectée ;

- cet arrêté est insuffisamment motivé ;

- les travaux entrepris n'étaient pas soumis à autorisation de construire.

Par un mémoire en défense, enregistré le 30 janvier 2020, le ministre de la cohésion des territoires et des relations avec les collectivités territoriales conclut au rejet de la requête.

Il soutient que les moyens soulevés par M. A... ne sont pas fondés, le maire était tenu de prendre l'arrêté en cause.

La présidente de la Cour a désigné par décision du 16 janvier 2020, Mme B..., présidente assesseure, pour assurer les fonctions de présidente par intérim la 9ème chambre, en application de l'article R. 222-26 du code de justice administrative.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code de l'urbanisme ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme E...,

- et les conclusions de M. Roux, rapporteur public,

Considérant ce qui suit :

1. Par l'arrêté du 9 octobre 2017, le maire d'Elne a, au nom de l'Etat, mis en demeure M. A... d'interrompre les travaux en cours. Par un jugement du 13 novembre 2018 dont il relève appel, le tribunal administratif de Montpellier a rejeté sa demande.

Sur la régularité du jugement attaqué :

2. D'une part, aux termes de l'article R. 741-7 du code de justice administrative : " Dans les tribunaux administratifs et les cours administratives d'appel, la minute de la décision est signée par le président de la formation de jugement, le rapporteur et le greffier d'audience ".

3. Il ressort des pièces du dossier que le jugement attaqué a été signé conformément aux prescriptions de l'article R. 741-7 du code de justice administrative. La circonstance que l'ampliation du jugement qui a été notifié à M. A... ne comporte pas ces signatures est sans incidence sur la régularité de ce jugement.

4. D'autre part, les premiers juges, après avoir examiné les pièces du dossier, ont estimé que le motif tiré de ce que les travaux avaient été réalisés sans autorisation de construire, était de nature à justifier l'arrêté en litige et, que, le maire d'Elne étant en situation de compétence liée, les moyens tirés de l'absence de procédure contradictoire et de l'insuffisante motivation de cet arrêté étaient dès lors inopérants.

5. En statuant ainsi, le tribunal, qui s'est fondé sur le motif mentionné par la décision contestée, n'a pas relevé d'office un moyen alors même que l'administration ne soutenait pas devant lui être en situation de compétence liée mais il s'est borné à exercer son office et à répondre aux moyens qui étaient soulevés devant lui. Dès lors, M. A... n'est pas fondé à soutenir que les premiers juges ont statué " ultra petita " entachant, pour ce motif, d'irrégularité le jugement attaqué.

Sur le bien-fondé du jugement attaqué :

6. Aux termes de l'article L. 480-1 du code de l'urbanisme : " Les infractions aux dispositions des titres Ier, II, III, IV et VI du présent livre sont constatées par tous officiers ou agents de police judiciaire ainsi que par tous les fonctionnaires et agents de l'Etat et des collectivités publiques commissionnés à cet effet par le maire ou le ministre chargé de l'urbanisme suivant l'autorité dont ils relèvent et assermentés. Les procès-verbaux dressés par ces agents font foi jusqu'à preuve du contraire. (...) Lorsque l'autorité administrative et, au cas où il est compétent pour délivrer les autorisations, le maire ou le président de l'établissement public de coopération intercommunale compétent ont connaissance d'une infraction de la nature de celles que prévoient les articles L. 480-4 et L. 610-1, ils sont tenus d'en faire dresser procès-verbal ". En outre, aux termes de l'article L. 480-2 du code de l'urbanisme : " L'interruption des travaux peut être ordonnée soit sur réquisition du ministère public agissant à la requête du maire, du fonctionnaire compétent ou de l'une des associations visées à l'article L. 480-1, soit, même d'office, par le juge d'instruction saisi des poursuites ou par le tribunal correctionnel. L'interruption des travaux peut être ordonnée, dans les mêmes conditions, sur saisine du représentant de l'Etat dans la région (...). / Dans le cas de constructions sans permis de construire ou d'aménagement sans permis d'aménager, ou de constructions ou d'aménagement poursuivis malgré une décision de la juridiction administrative suspendant le permis de construire ou le permis d'aménager, le maire prescrira par arrêté l'interruption des travaux ainsi que, le cas échéant, l'exécution, aux frais du constructeur, des mesures nécessaires à la sécurité des personnes ou des biens ; copie de l'arrêté du maire est transmise sans délai au ministère public. / Dans tous les cas où il n'y serait pas pourvu par le maire et après une mise en demeure adressée à celui-ci et restée sans résultat à l'expiration d'un délai de vingt-quatre heures, le représentant de l'Etat dans le département prescrira ces mesures et l'interruption des travaux par un arrêté dont copie sera transmise sans délai au ministère public. ".

7. Il résulte de ces dispositions que le maire est tenu de dresser un procès-verbal en application de l'article L. 480-1 du code de l'urbanisme lorsqu'il a connaissance d'une infraction mentionnée à l'article L. 480-4, résultant soit de l'exécution de travaux sans les autorisations prescrites par le livre IV du code, soit de la méconnaissance des autorisations délivrées. Si, après établissement d'un procès-verbal, le maire peut, dans le second cas, prescrire par arrêté l'interruption des travaux, il est tenu de le faire dans le premier cas.

8. Au vu du procès-verbal de constatation d'infractions au code de l'urbanisme dressé le 14 septembre 2017, par les agents verbalisateurs et sur le fondement de l'article L. 480-2 du code de l'urbanisme, le maire d'Elne a, par arrêté du 9 octobre 2017, au nom de l'Etat, mis en demeure M. A... d'interrompre les travaux engagés sur le bâtiment existant édifié sur la parcelle cadastrée section AL n° 65 au motif que ce bâtiment avait été construit sans permis de construire et que les travaux en cours étaient exécutés en violation du titre IV du plan local d'urbanisme approuvé le 20 juillet 2016 et sans autorisation.

9. D'une part, il ne ressort pas des pièces du dossier, notamment tant de l'acte notarié du 6 février 2017 par lequel M. A... a acquis sa propriété que de celui du 19 avril 1989 que la construction existante sur laquelle le requérant a entrepris des travaux, aurait été édifiée avant l'entrée en vigueur de la loi du 15 juin 1943 relative au permis de construire. En outre, il résulte des mentions mêmes de ces actes et également de l'acte notarié établi le 18 juillet 1977 auquel les premiers se réfèrent que celui-ci précisait que, sur la parcelle en cause, constituée de terre en nature de champ et de vigne était " édifiée une maisonnette sans permis de construire, non desservie en eau et en électricité ". De plus, il n'est pas allégué qu'une autorisation de construire aurait été obtenue depuis l'entrée en vigueur de cette loi.

10. D'autre part, il ressort des pièces versées aux débats, notamment de l'acte notarié du 6 février 2017, du procès-verbal de constatations d'infractions du 14 septembre 2017 dont les constatations font foi jusqu'à preuve contraire en vertu de l'article L. 480-1 du code de l'urbanisme et du dossier de diagnostics techniques établi le 28 octobre 2016 y compris des photographies annexées à ces dernières pièces que sur la parcelle, est édifié, outre un studio et un garage indépendant, un bâtiment à destination d'habitation, implanté à l'ouest du terrain, clos et couvert dont notamment la toiture composée de panneaux ondulés en fibres-ciment et le revêtement de l'une des deux chambres présentaient de l'amiante. Contrairement à ce que soutient M. A..., les travaux entrepris sur la construction principale ont consisté notamment à rénover celle-ci par la dépose de la charpente et la couverture en vue d'en remplacer le toit et en changer toutes les ouvertures. A supposer même qu'ils n'aient pas emporté l'extension du bâtiment précité, ces travaux portant sur un immeuble édifié, comme il a été indiqué au point précédent, sans autorisation de construire, devaient faire l'objet d'une demande de permis de construire en application des articles L. 421-1 et R. 421-1 du code de l'urbanisme. Le motif tiré de travaux sur un immeuble construit sans autorisation de construire suffisait à lui seul à justifier l'arrêté contesté. Dès lors, en se fondant sur ce motif, le maire d'Elne n'a pas entaché d'illégalité l'arrêté en litige.

11. Dès lors que le maire, agissant au nom de l'Etat, avait compétence liée pour prendre l'arrêté interruptif de travaux en litige en application des dispositions précitées du dixième alinéa de l'article L. 480-2 du code de l'urbanisme, les moyens tirés de la méconnaissance de l'article 24 de la loi du 12 avril 2000 et de l'insuffisante motivation de l'arrêté en litige sont sans incidence sur la légalité de cet arrêté.

12. Il résulte de tout ce qui précède que M. A... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Montpellier a rejeté sa demande. Par voie de conséquence, les conclusions présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative doivent être rejetées.

D É C I D E :

Article 1er : La requête de M. A... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. D... A... et à la ministre de la cohésion des territoires et des relations avec les collectivités territoriales.

Copie en sera adressée au préfet des Pyrénées-Orientales et au maire d'Elne.

Délibéré après l'audience du 23 juin 2020, où siégeaient :

- Mme B..., présidente assesseure, présidente de la formation de jugement, en application de l'article R. 222-26 du code de justice administrative,

- Mme E..., première conseillère,

- Mme C..., première conseillère.

Lu en audience publique, le 15 juillet 2020.

5

N° 19MA00227


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Marseille
Formation : 9ème chambre
Numéro d'arrêt : 19MA00227
Date de la décision : 15/07/2020
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

68-03-05-02 Urbanisme et aménagement du territoire. Permis de construire. Contrôle des travaux. Interruption des travaux.


Composition du Tribunal
Président : Mme SIMON
Rapporteur ?: Mme Micheline LOPA-DUFRENOT
Rapporteur public ?: M. ROUX
Avocat(s) : SCP D'AVOCATS EMERIC VIGO

Origine de la décision
Date de l'import : 28/07/2020
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.marseille;arret;2020-07-15;19ma00227 ?
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