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12/11/2020 | FRANCE | N°20MA01730

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 2ème chambre, 12 novembre 2020, 20MA01730


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Me B... D..., en qualité de liquidateur de la SAS Eugenia Gestion, la SARL Pearl Capital Management et M. C... G... ont demandé au tribunal administratif de Bastia d'annuler la décision du 14 août 2018 par laquelle la collectivité de Corse, venant aux droits et obligations du département de la Haute-Corse, a rejeté leur demande indemnitaire du 22 juin 2018 et de condamner la collectivité de Corse à verser les sommes de 5 157 040 euros à Me D..., 1 500 000 euros à la société Pearl Capital Management et

44 250 euros à M. G....

Par une ordonnance n° 1801040 du 28 février 2020, ...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Me B... D..., en qualité de liquidateur de la SAS Eugenia Gestion, la SARL Pearl Capital Management et M. C... G... ont demandé au tribunal administratif de Bastia d'annuler la décision du 14 août 2018 par laquelle la collectivité de Corse, venant aux droits et obligations du département de la Haute-Corse, a rejeté leur demande indemnitaire du 22 juin 2018 et de condamner la collectivité de Corse à verser les sommes de 5 157 040 euros à Me D..., 1 500 000 euros à la société Pearl Capital Management et 44 250 euros à M. G....

Par une ordonnance n° 1801040 du 28 février 2020, le président de la première chambre du tribunal administratif de Bastia a donné acte du désistement des requérants, a mis à la charge de M. G... au profit de la collectivité de Corse une somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et a rejeté le surplus des conclusions de la collectivité de Corse.

Procédure devant la cour :

Par une requête et des mémoires enregistrés les 28 avril, 15 mai et 29 septembre 2020, Me B... D..., en qualité de liquidateur de la SAS Eugenia Gestion et de la SARL Pearl Capital Management et M. G..., représentés par Me A..., demandent à la Cour, dans le dernier état de leurs écritures :

1°) d'annuler l'ordonnance du président de la première chambre du tribunal administratif de Bastia du 28 février 2020 ;

2°) d'annuler la décision du 14 août 2018 de la collectivité de Corse ;

3°) de condamner la collectivité de Corse à verser les sommes de 5 157 040 euros à Me D..., 1 500 000 euros à la société Pearl Capital Management et 44 250 euros à M. G... ;

4°) de mettre à la charge de la collectivité de Corse une somme de 7 000 euros chacun au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Ils soutiennent que :

- le premier juge a fait un usage abusif du désistement à défaut de production d'un mémoire récapitulatif dans un délai d'un mois ;

- la responsabilité pour faute de la collectivité de Corse est engagée ;

- leurs préjudices financiers en lien avec cette faute sont établis.

Par un mémoire en défense, enregistré le 28 août 2020, la collectivité de Corse, représentée par Me H..., demande à la cour :

1°) à titre principal, de rejeter la requête ;

2°) à titre subsidiaire, en cas d'annulation de l'ordonnance attaquée, de renvoyer l'affaire devant le tribunal administratif de Bastia ;

3°) à titre infiniment subsidiaire, en cas d'évocation, d'enjoindre à Me D... de verser aux débats son rapport remis au tribunal de commerce lors de l'audience du 28 mars 2017 en sa qualité de mandataire judiciaire de la société Eugenia Gestion et de rejeter la demande présentée devant le tribunal ou, plus subsidiairement encore, d'ordonner la réalisation d'une mesure d'expertise afin de déterminer le montant du préjudice subi ;

4°) en tout état de cause, d'opposer la prescription aux sommes réclamées pour la période antérieure au 1er janvier 2014 ;

5°) de mettre à la charge des requérants une somme de 3 000 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- les moyens soulevés par les requérants ne sont pas fondés ;

- certaines des sommes réclamées sont prescrites ;

- l'utilité d'une mesure d'expertise judiciaire est démontrée.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme I...,

- les conclusions de M. Gautron, rapporteur public,

- et les observations de Me A..., représentant Me D... et autres, et de Me E..., représentant la collectivité de Corse.

Considérant ce qui suit :

1. Me D..., en sa qualité de liquidateur des sociétés Eugenia Gestion et Pearl Capital Management et M. G... relèvent appel de l'ordonnance du 28 février 2020 par laquelle le président de la 1ère chambre du tribunal administratif de Bastia, faisant application de l'article R. 611-8-1 du code de justice administrative, a donné d'office acte du désistement de leur demande tendant à l'annulation de la décision du 14 août 2018 par laquelle la collectivité de Corse, venant aux droits et obligations du département de la Haute-Corse, a rejeté leur demande indemnitaire du 22 juin 2018 et à la condamnation de la collectivité de Corse à verser les sommes de 5 157 040 euros à Me D..., 1 500 000 euros à la société Pearl Capital Management et 44 250 euros à M. G....

2. L'article R. 611-8-1 du code de justice administrative dispose que : " Le président de la formation de jugement ou le président de la chambre chargée de l'instruction peut demander à l'une des parties de reprendre, dans un mémoire récapitulatif, les conclusions et moyens précédemment présentés dans le cadre de l'instance en cours, en l'informant que, si elle donne suite à cette invitation, les conclusions et moyens non repris seront réputés abandonnés. (...) Le président de la formation de jugement ou le président de la chambre chargée de l'instruction peut en outre fixer un délai, qui ne peut être inférieur à un mois, à l'issue duquel, à défaut d'avoir produit le mémoire récapitulatif mentionné à l'alinéa précédent, la partie est réputée s'être désistée de sa requête ou de ses conclusions incidentes. La demande de production d'un mémoire récapitulatif informe la partie des conséquences du non-respect du délai fixé ".

3. A l'occasion de la contestation en appel de l'ordonnance prenant acte du désistement d'un requérant en l'absence de réponse à l'expiration du délai qui lui a été fixé pour produire un mémoire récapitulatif, il incombe au juge d'appel, saisi de moyens en ce sens, de vérifier que l'intéressé a reçu la demande mentionnée par l'article R. 611-8-1 du code de justice administrative, que cette demande fixait un délai d'au moins un mois au requérant pour répondre et l'informait des conséquences d'un défaut de réponse dans ce délai, que le requérant s'est abstenu de répondre en temps utile et d'apprécier si le premier juge, dans les circonstances de l'affaire, a fait une juste application des dispositions de l'article R. 611-8-1.

4. Il ressort des pièces du dossier de première instance que la demande et les mémoires présentés pour Me D... et autres devant les premiers juges, enregistrés les 9 octobre 2018, 4 mars, 16 mai, 7 juin et 31 octobre 2019 ont été communiqués à la collectivité de Corse. Les mémoires produits pour celle-ci les 12 février, 1er mars, 12 avril, 17 mai, 11 juin et 12 juillet 2019 ont été communiqués au conseil des requérants. Par ordonnance du 19 novembre 2019, la clôture de l'instruction a été fixée au 27 décembre 2019. Par courrier du même jour, dont le conseil des requérants a accusé réception également ce même jour, le président de la première chambre du tribunal administratif de Bastia a demandé aux parties de produire, dans le délai d'un mois, en application du deuxième alinéa de l'article R. 611-8-1 du code de justice administrative, un mémoire récapitulatif reprenant les conclusions et les moyens qu'ils entendaient, à l'issue de l'instruction, soumettre au tribunal, en précisant qu'à défaut de production du mémoire récapitulatif dans le délai imparti, ils seraient réputés s'être désistés de leur requête ou de leurs conclusions incidentes.

5. La collectivité de Corse a produit le 25 novembre 2019 un mémoire complémentaire et un mémoire récapitulatif qui ont été communiqués aux requérants le 26 novembre 2019, puis a sollicité le 10 décembre 2019 un report de la clôture de l'instruction afin de pouvoir répliquer au mémoire récapitulatif des requérants lorsqu'il serait produit, en tenant compte des fêtes de fin d'année. Me D... et autres ont formé le 16 décembre 2019 une demande de délai supplémentaire pour le dépôt de leurs conclusions, en précisant que le mémoire récapitulatif de la collectivité de Corse, de plus de 50 pages, comportait de très nombreux éléments de fait et de droit nouveaux, que cela ne leur permettait pas de notifier leur mémoire récapitulatif dans le délai imparti et qu'ils demandaient un report de la clôture de l'instruction afin de leur permettre de répliquer aux dernières écritures adverses dans le respect du principe du contradictoire. Cette dernière demande a reçu une réponse négative du greffier en chef du tribunal le 19 décembre 2019. Le mémoire récapitulatif présenté pour les requérants a été enregistré le 21 décembre 2019 et n'a pas fait l'objet d'une communication contradictoire. Un avis d'audience a été adressé aux parties le 17 janvier 2020. L'affaire a été appelée à l'audience du 13 février 2020 de la première chambre du tribunal administratif de Bastia. Le mémoire enregistré le même jour pour la collectivité de Corse a été communiqué également ce même jour aux requérants avec une lettre les informant du renvoi de l'affaire à une audience ultérieure. Un mémoire présenté pour les requérants a été enregistré le 18 février 2020 et n'a pas fait l'objet d'une communication contradictoire.

6. Si la circonstance que les requérants ont produit un mémoire récapitulatif avant la clôture de l'instruction ne faisait pas obstacle à l'application des dispositions de l'article R. 611-8-1 du code de justice administrative, dès lors que ce mémoire n'a pas été produit dans le délai imparti, il ressort toutefois des pièces du dossier de première instance qu'il n'a pas été fait en l'espèce, au vu de l'ensemble des circonstances de l'affaire, en particulier de la chronologie de l'instruction menée devant le tribunal telle que rappelée ci-dessus, de la nature des écritures échangées, de l'objet du litige, ainsi que de son absence d'évolution en cours d'instance, une juste application des dispositions de l'article R. 611-8-1 du code de justice administrative. Il suit de là que les requérants sont fondés à soutenir que cette ordonnance a été prise selon une procédure irrégulière et à en demander l'annulation.

7. Enfin, dans les circonstances de l'espèce, il y a lieu de renvoyer les requérants devant le tribunal administratif de Bastia afin qu'il y soit statué sur leur demande. Les conclusions présentées de part et d'autre sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative doivent être rejetées.

D É C I D E :

Article 1er : L'ordonnance du tribunal administratif de Bastia du 28 février 2020 est annulée.

Article 2 : L'affaire est renvoyée devant le tribunal administratif de Bastia.

Article 3 : Les conclusions des parties présentées sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à Me D..., représentant unique des requérants, et à la collectivité de Corse.

Délibéré après l'audience du 22 octobre 2020, où siégeaient :

- M. Alfonsi, président de chambre,

- Mme I..., présidente assesseure,

- M. Sanson, conseiller.

Lu en audience publique, le 12 novembre 2020.

La rapporteure,

signé

K. I...Le président,

signé

J.-F. ALFONSI

La greffière,

signé

M. F...

La République mande et ordonne au préfet de Corse en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

Pour expédition conforme,

La greffière,

5

N° 20MA01730

kp


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Marseille
Formation : 2ème chambre
Numéro d'arrêt : 20MA01730
Date de la décision : 12/11/2020
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

54-05-04-03 Procédure. Incidents. Désistement. Désistement d'office.


Composition du Tribunal
Président : M. ALFONSI
Rapporteur ?: Mme Karine JORDA-LECROQ
Rapporteur public ?: M. GAUTRON
Avocat(s) : SELARL NEVEU, CHARLES et ASSOCIES - AVOCATS

Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2020
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.marseille;arret;2020-11-12;20ma01730 ?
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