La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

03/12/2020 | FRANCE | N°19MA04338

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 3ème chambre, 03 décembre 2020, 19MA04338


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La société à responsabilité limitée (SARL) Boss Boss a demandé au tribunal administratif de Marseille de prononcer la décharge, en droits et pénalités, des rappels de taxe sur la valeur ajoutée qui lui ont été réclamés pour la période du 1er janvier 2013 au 31 décembre 2014 et des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés auxquelles elle a été assujettie au titre des exercices clos en 2013 et 2014.

Par un jugement n° 1800027 du 4 juillet 2019, le tribunal administratif de

Marseille a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête, enregistrée l...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La société à responsabilité limitée (SARL) Boss Boss a demandé au tribunal administratif de Marseille de prononcer la décharge, en droits et pénalités, des rappels de taxe sur la valeur ajoutée qui lui ont été réclamés pour la période du 1er janvier 2013 au 31 décembre 2014 et des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés auxquelles elle a été assujettie au titre des exercices clos en 2013 et 2014.

Par un jugement n° 1800027 du 4 juillet 2019, le tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête, enregistrée le 10 septembre 2019, la SARL Boss Boss, représentée par Me C..., demande à la Cour :

1°) d'annuler ce jugement du 4 juillet 2019 du tribunal administratif de Marseille ;

2°) de prononcer la décharge, en droits et pénalités, des impositions en litige ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 3 000 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

Sur la régularité du jugement contesté :

- le tribunal administratif a commis une irrégularité en faisant droit à la fin de non-recevoir opposée par l'administration à sa demande tendant à la décharge des rappels de taxe sur la valeur ajoutée ainsi que des pénalités correspondantes qui lui ont été réclamés au titre de la période du 1er janvier 2013 au 31 décembre 2014 ; cette demande est parfaitement recevable ;

Sur les impositions en litige :

- l'administration, qui a indiqué se rallier à l'avis de la commission départementale des impôts et des taxes sur le chiffre d'affaires, a commis des erreurs de calcul ; en effet, le service n'a pas intégralement tenu compte de l'avis de cette commission s'agissant des rectifications opérées en matière de produits et de charges ;

- sa comptabilité n'est pas entachée de graves irrégularités ; la durée de la vérification a donc été irrégulièrement prolongée à six mois sur le fondement de l'article L. 52 du livre des procédures fiscales ; il convient pour la Cour de tirer les conséquences procédurales de cet usage abusif ;

- l'amortissement de l'ensemble " comptoir réfrigéré vitré " à hauteur de la valeur restant à amortir, soit 20 %, est justifié ;

- la licence IV, ayant donné lieu à rectification, a été acquise au prix de 10 000 euros et non de 9 000 euros ; il y a eu deux règlements distincts, l'un de 9 000 euros effectué par la société Boss Boss, et l'un de 1 000 euros assuré par Mme B..., associée ; en inscrivant à l'actif de son bilan que cet élément avait une valeur de 9 000 euros, elle a commis une simple erreur comptable qu'elle entend rectifier comme le lui permet la doctrine fiscale (BOI-BIC-BASE-40-10 du 12 septembre 2012, § 20 et § 80) ;

- c'est à tort que le service a rejeté les frais liés aux déplacements professionnels effectués en Egypte aux mois de janvier et octobre 2014 ;

- s'agissant des frais relatifs au véhicule Aixam, l'administration a estimé que les sommes reçues de l'assureur consécutivement à sa destruction constituaient une cession, et donc un produit imposable, alors qu'elle a refusé de considérer que les mensualités versées à l'établissement de crédit se rapportant au financement de ce véhicule relevaient des charges déductibles ;

- c'est à tort que le service a refusé de considérer que les frais d'architecte à hauteur de 2 500 euros étaient des charges déductibles.

Par un mémoire en défense, enregistré le 19 novembre 2019, le ministre de l'action et des comptes publics demande à la Cour de rejeter la requête de la SARL Boss Boss.

Il fait valoir que les moyens invoqués par l'appelante ne sont pas fondés.

Un avis d'audience portant clôture immédiate de l'instruction a été émis le 23 octobre 2020 en application des articles R. 611-11-1 et R. 613-2 du code de justice administrative.

Par lettre du 10 novembre 2020, la Cour a, en application des dispositions de l'article R. 611-7 du code de justice administrative, informé les parties de ce que l'arrêt était susceptible d'être fondé sur le moyen relevé d'office, tiré de l'irrecevabilité des conclusions tendant à la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés au titre de l'exercice clos en 2014, lesquelles sont inexistantes.

Une réponse à ce moyen d'ordre public a été présentée le 12 novembre 2020 par le ministre de l'économie, des finances et de la relance et n'a pas été communiquée.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme D...,

- les conclusions de Mme Courbon, rapporteur public,

- et les observations de Me C... pour la société Boss Boss.

Considérant ce qui suit :

1. La SARL Boss Boss, qui exploite trois établissements de restauration rapide à Marseille, a fait l'objet d'une vérification de comptabilité portant sur la période du 1er janvier 2013 au 31 décembre 2014 à la suite de laquelle l'administration lui a notifié, selon la procédure de rectification contradictoire, des rehaussements en matière d'impôt sur les sociétés et de taxe sur la valeur ajoutée. La SARL Boss Boss relève appel du jugement du 4 juillet 2019 par lequel le tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande tendant à la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés auxquelles elle a été assujettie au titre des exercices clos en 2013 et 2014 et des rappels de taxe sur la valeur ajoutée qui lui ont été réclamés pour la période 1er janvier 2013 au 31 décembre 2014, ainsi que des pénalités correspondantes.

I. Sur la recevabilité des conclusions tendant à la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés au titre de l'exercice clos en 2014 :

2. Si la SARL Boss Boss demande à la Cour la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés au titre de l'exercice clos en 2014, il résulte cependant de l'instruction que l'administration n'a assujetti la société à aucune imposition supplémentaire au titre de cet exercice. Dès lors que ces cotisations supplémentaires sont inexistantes, les conclusions aux fins de décharge de ces dernières sont, ainsi que la Cour en a informé les parties en application de l'article R. 611-7 du code de justice administrative, irrecevables.

II. Sur la recevabilité des conclusions tendant à la décharge des rappels de taxe sur la valeur ajoutée et sur la régularité du jugement :

3. Il résulte du deuxième alinéa de l'article R. 200-2 du livre des procédures fiscales que le demandeur ne peut contester devant le tribunal administratif des impositions différentes de celles qu'il a visées dans sa réclamation préalable.

4. La société appelante soutient que dans sa réclamation préalable du 4 août 2017, elle a contesté l'ensemble des impositions mises à sa charge et que la circonstance qu'elle ait acquitté les droits de taxe sur la valeur ajoutée qui lui étaient réclamés ne valait pas renonciation à sa contestation les concernant. Elle ajoute que le corps de la réclamation " sous-tend une opposition généralisée aux redressements portant sur la TVA ", les opérations d'un commerçant étant toutes concernées par cette taxe. Il ressort toutefois des termes de cette réclamation, qui n'était pas accompagnée de l'avis de mise en recouvrement des impositions contestées, que celle-ci a indiqué solliciter le sursis de paiement pour la partie des sommes dont le redressement est contesté et procéder au règlement des rappels de taxe réclamés, pour lesquels elle sollicitait la compréhension de l'administration " quant aux majorations et intérêts de retard ". La société faisait ensuite état de " points de divergences " sur l'analyse de sa comptabilité ayant entraîné " une rectification au titre de l'IS [impôt sur les sociétés] de 9 054 euros en principal ", ce qui correspond d'ailleurs, au seul montant, en droits, de la cotisation d'impôt sur les sociétés afférente à l'exercice 2013. Dès lors, les conclusions, présentées devant le tribunal administratif de Marseille, tendant à la décharge des rappels de taxe au titre de la période du 1er janvier 2013 au 31 décembre 2014, qui n'avaient pas fait l'objet d'une réclamation préalable, étaient irrecevables. Par suite, les premiers juges n'ont pas entaché leur jugement d'irrégularité en rejetant, pour ce motif, ces conclusions aux fins de décharge.

III. Sur le surplus des conclusions :

En ce qui concerne la régularité de la procédure d'imposition :

5. Il résulte de la combinaison des articles L. 52 du livre des procédures fiscales et de l'article 302 septies A du code général des impôts, alors applicable aux entreprises industrielles et commerciales dont le chiffre d'affaires n'excédait pas 783 000 euros, que " sous peine de nullité de l'imposition, la vérification sur place des livres ou documents comptables ne peut s'étendre sur une durée supérieure à trois mois " sauf " en cas de graves irrégularités privant de valeur probante la comptabilité. Dans ce cas, la vérification sur place ne peut s'étendre sur une durée supérieure à six mois. ". Aux termes du premier alinéa de l'article 54 du code général des impôts : " Les contribuables mentionnés à l'article 53 A sont tenus de représenter à toute réquisition de l'administration tous documents comptables, inventaires, copies de lettres, pièces de recettes et de dépenses de nature à justifier l'exactitude des résultats indiqués dans leur déclaration ". Il résulte de l'article L. 85 du livre des procédures fiscales, dans sa version applicable au litige, que : " Les contribuables soumis aux obligations comptables du code de commerce doivent communiquer à l'administration, sur sa demande, les livres, les registres et les rapports dont la tenue est rendue obligatoire par le même code ainsi que tous documents relatifs à leur activité ".

6. Il est constant que la SARL Boss Boss relevait d'un régime simplifié de liquidation au regard de son chiffre d'affaires sur les exercices en cause, inférieur à 783 000 euros. Le service vérificateur a poursuivi la vérification sur place au-delà de la durée de trois mois, par application du 4° du II de l'article L. 52 du livre des procédures fiscales, en raison des graves irrégularités entachant la comptabilité de la société appelante.

7. Pour écarter la comptabilité des exercices 2013 et 2014 comme étant non probante, l'administration s'est fondée, ainsi qu'il ressort du procès-verbal de défaut de conservation de données informatiques établi le 5 avril 2016, sur les circonstances que la société n'avait pas été en mesure de produire, pour toute la période vérifiée, dans chacun des établissements qu'elle exploite, les fichiers provenant de la caisse enregistreuse informatisée et qu'aucune sauvegarde n'avait été effectuée, concernant les opérations de vente et de prestations de service. Il a été également constaté que, pour cette même période, la société vérifiée n'a pas été en mesure de présenter les bandes de contrôle de ces caisses informatiques ou les copies sur papier des notes remises à la clientèle issues de ces caisses, ainsi que les tickets de remise à zéro (RAZ) des recettes enregistrées sur la journée. Il résulte ainsi de l'instruction, notamment de la proposition de rectification du 1er août 2016, que seuls les tickets " RAZ " mensuels sous format papier récapitulant les ventes par poste et par mois ont pu être apportés et que l'analyse de nombreux RAZ mensuels a révélé une absence totale de détails sur certains postes enregistrés sous les rubriques " Match Bar ", " Cuisine Bar " et " Divers ".

8. Si la société requérante soutient que les données informatiques ont bien été sauvegardées mais qu'à la suite d'un dégât des eaux important, elle a perdu l'ensemble de ses fichiers informatiques, le seul procès-verbal de constat dressé le 21 mai 2013 par un huissier dépêché dans les locaux sis 2 rue Teisseire, lequel au demeurant ne précise pas l'état de la caisse enregistreuse présente sur les lieux, n'est pas suffisant pour justifier de la perte de toutes les données informatiques sur les trois établissements exploités par la société et sur l'ensemble de la période vérifiée qui s'étend du 1er janvier 2013 au 31 décembre 2014. Il en est de même de la déclaration de sinistre effectuée par mél auprès de l'assureur de la société appelante.

9. Si l'appelante se prévaut, sur le fondement des dispositions de l'article L. 80 A du livre des procédures fiscales, du paragraphe 40 de la documentation administrative BOI|-BICDECLA-30-10-20-50, qui admet, pour tenir compte des conditions d'exercice du commerce de détail, " lorsque la multiplicité et le rythme élevé des ventes de faible montant font pratiquement obstacle à la tenue d'une main courante, que l'enregistrement global des recettes en fin de journée ne suffise à lui seul à faire écarter la comptabilité présentée à condition toutefois que celle-ci soit, par ailleurs, bien tenue et que les résultats - et notamment le bénéfice brut qu'elle accuse - soient en rapport avec l'importance et la production apparente de l'entreprise ", il résulte de ce qui vient d'être dit que la comptabilité de la société n'était pas, par ailleurs et en tout état de cause, bien tenue.

10. Par suite, la comptabilité de la SARL Boss Boss étant affectée de graves irrégularités la privant de valeur probante, l'administration fiscale a pu régulièrement faire application des dispositions du 4° du II de l'article L. 52 du livre des procédures fiscales et mener une procédure de vérification pendant une durée excédant trois mois.

En ce qui concerne le bien-fondé de l'imposition :

S'agissant de l'amortissement de l'ensemble " comptoir réfrigéré vitré " :

11. En application de l'article 39 du code général des impôts, applicable en matière d'impôt sur les sociétés en vertu de l'article 209 du même code : " 1. Le bénéfice net est établi sous déduction de toutes charges, celles-ci comprenant, sous réserve des dispositions du 5, notamment : 1° les frais généraux de toute nature, les dépenses de personnel et de main d'oeuvre, le loyer des immeubles dont l'entreprise est locataire (...) 2° (...) les amortissements réellement effectués par l'entreprise, dans la limite de ceux qui sont généralement admis d'après les usages de chaque nature d'industrie, de commerce ou d'exploitation et compte tenu des dispositions de l'article 39 A, sous réserve des dispositions de l'article 39 B. ". Il résulte en outre de l'article 39 A du même code que : " 1. L'amortissement des biens d'équipement, autres que les immeubles d'habitation, les chantiers et les locaux servant à l'exercice de la profession, acquis ou fabriqués à compter du 1er janvier 1960 par les entreprises industrielles, peut être calculé suivant un système d'amortissement dégressif, compte tenu de la durée d'amortissement en usage dans chaque nature d'industrie. Un décret en Conseil d'Etat fixe les modalités de l'amortissement dégressif. / Les taux d'amortissement dégressif sont obtenus en multipliant les taux d'amortissement linéaire par un coefficient fixé à : a. 1,75 lorsque la durée normale d'utilisation est de trois ou quatre ans ; / : b. 2,25 lorsque cette durée normale est de cinq ou six ans ; /c. 2,75 lorsque cette durée normale est supérieure à six ans. / L'amortissement dégressif s'applique annuellement, dans la limite des plafonds, à la valeur résiduelle du bien à amortir. / Ces modalités d'amortissement correspondent à une utilisation quotidienne traditionnelle quant à la durée ; dans le cas d'utilisation continue des matériels considérés, les taux d'amortissement sont majorés (...) ".

12. Il résulte de l'instruction que la rectification en litige n'a porté que sur la dotation supplémentaire d'un montant de 13 414,03 euros pour usure prématurée d'un ensemble " comptoir réfrigéré vitré " que la société Boss Boss a comptabilisée en 2013, en plus de la dotation d'amortissement de 15 167,89 euros régulièrement pratiquée. L'intéressée ne justifie pas d'une modification de la durée d'amortissement opérée sur ce bien immobilisé, en se bornant à soutenir, sans toutefois en justifier, que cet équipement a été mis au rebut après avoir entrepris des travaux de rénovation et de transformation des locaux concernés. En particulier, il n'est pas contesté que le bien devait être cédé à un tiers en octobre 2013, même si l'acheteur s'est désisté après versement d'un acompte de 5 000 euros, et que la facture datée du 30 octobre 2013, présentée au demeurant à la commission départementale des impôts et des taxes sur le chiffre d'affaires, mentionnait que le matériel était en parfait état de marche. Dans ces conditions, et au regard de ces éléments contradictoires, l'appelante ne saurait revendiquer le bénéfice d'un amortissement supplémentaire pour usure prématurée sur le bien précité.

S'agissant de la valeur d'immobilisation de la licence IV :

13. Aux termes du 2 de l'article 38 du code général des impôts, applicable en matière d'impôt sur les sociétés en vertu de l'article 209 du même code : " Le bénéfice net est constitué par la différence entre les valeurs de l'actif net à la clôture et à l'ouverture de la période dont les résultats doivent servir de base à l'impôt (...) ". Il résulte de l'article 38 quinquies de l'annexe III du code général des impôts que : " Les immobilisations sont inscrites au bilan pour leur valeur d'origine. Cette valeur d'origine s'entend : / a. Pour les immobilisations acquises à titre onéreux, du coût d'acquisition c'est-à-dire du prix d'achat (...) ".

14. Il n'est pas contesté par la société Boss Boss qu'elle aurait dû faire figurer à l'actif du bilan de l'exercice clos en 2013, la somme non de 9 000 euros, mais celle de 10 000 euros correspondant au montant du prix d'achat de la licence IV, tel qu'il résulte de l'acte d'acquisition du 3 février 2011, ainsi que le prescrivent les dispositions précitées de l'article 38 quinquies de l'annexe III du code général des impôts. Pour justifier cette minoration de l'actif qu'elle qualifie d'erreur comptable, elle fait valoir que la licence IV a été réglée pour partie à hauteur de 9 000 euros par la société elle-même et à hauteur de 1 000 euros par l'un de ses associés. Cependant, elle ne justifie pas d'une avance consentie par un associé à hauteur de la somme précitée correspondant au solde du prix d'acquisition. La régularisation opérée ultérieurement ainsi que cela ressort d'un extrait du grand livre de l'exercice clos au 31 décembre 2016, faisant apparaître au compte 206 un débit de 1 000 euros sous l'intitulé " régul compte licence ", ne permet pas, par elle-même, de retenir l'existence d'une erreur comptable involontaire. Par suite, compte tenu des conditions dans lesquelles la minoration de l'actif a été commise, elle ne saurait être regardée comme une simple erreur comptable présentant un caractère involontaire. Dès lors, la société Boss Boss ne pouvait pas prétendre, postérieurement, à la correction comptable de cette erreur.

15. La société appelante n'est pas fondée à se prévaloir de la doctrine fiscale référencée BOI-BIC-BASE-40-10 du 12 septembre 2012, § 20 et § 80, dès lors qu'elle ne contient aucune interprétation de la loi fiscale différente de celle dont il vient d'être fait application.

S'agissant des charges non admises en déduction :

16. Aux termes de l'article 39 du code général des impôts, rendu applicable à l'impôt sur les sociétés par l'article 209 du même code : " 1. Le bénéfice net est établi sous déduction de toutes charges, celles-ci comprenant, sous réserve des dispositions du 5, notamment : / 1° Les frais généraux de toute nature (...) ". En vertu des règles qui gouvernent l'attribution de la charge de la preuve devant le juge administratif, applicables sauf loi contraire, s'il incombe, en principe, à chaque partie, d'établir les faits nécessaires au succès de sa prétention, les éléments de preuve qu'une partie est seule en mesure de détenir ne sauraient être réclamés qu'à celle-ci. Il appartient, dès lors, au contribuable, pour l'application des dispositions précitées du code général des impôts, de justifier tant du montant des créances de tiers, amortissements, provisions et charges qu'il entend déduire du bénéfice net défini à l'article 38 du code général des impôts que de la correction de leur inscription en comptabilité, c'est à dire du principe même de leur déductibilité. En ce qui concerne les charges, le contribuable apporte cette justification par la production de tous éléments suffisamment précis portant sur la nature de la charge en cause, ainsi que sur l'existence et la valeur de la contrepartie qu'il en a retirée. Dans l'hypothèse où le contribuable s'acquitte de cette obligation, il incombe ensuite au service, s'il s'y croit fondé, d'apporter la preuve de ce que la charge en cause n'est pas déductible par nature, qu'elle est dépourvue de contrepartie, qu'elle a une contrepartie dépourvue d'intérêt pour le contribuable ou que la rémunération de cette contrepartie est excessive.

Quant aux frais de voyage :

17. La société appelante conteste le refus de déductibilité des charges afférentes aux frais de voyage effectués en Egypte en janvier et octobre 2014. Cependant, ces charges ayant été déduites par la société au bilan de l'exercice clos en 2014, un tel moyen est inopérant à l'encontre de la demande de décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés au titre de l'exercice clos en 2013.

Quant aux frais de location de véhicule :

18. S'agissant des frais relatifs au véhicule de marque " Aixam ", la société appelante soutient que l'administration a estimé que les sommes reçues de l'assureur consécutivement à sa destruction constituaient une cession, et donc un produit imposable, alors qu'elle a refusé de considérer, comme des charges déductibles, les mensualités versées à l'établissement de crédit se rapportant au financement de ce véhicule. Cependant, ainsi que l'a retenu le service, le véhicule concerné n'était plus en possession de la société à compter du 25 août 2012, date du certificat de cession à la société d'assurance MAIF, tandis que la copie de la carte grise barrée montre que le véhicule accidenté était une épave. Ainsi, la société n'était plus en possession du véhicule et les frais de location, s'ils se sont poursuivis au-delà, n'étaient plus acquittés pour les besoins de l'exploitation, la circonstance que l'indemnité perçue de l'assureur ait été considérée comme un produit imposable étant sans incidence sur l'appréciation ainsi portée sur le caractère non déductible de ces frais.

Quant aux frais d'architecte :

19. La société Boss Boss reprend en appel le moyen tiré du caractère déductible des frais d'architecte relatifs aux travaux d'aménagement au sein des locaux qu'elle utilise pour les besoins de son exploitation situés 2 rue Raymond Teisseire à Marseille, sans l'assortir d'éléments nouveaux de fait ou de droit de nature à remettre en cause le bien-fondé du jugement attaqué, dès lors qu'en particulier, la circonstance que les frais sont afférents à la conception même des locaux et non au suivi des travaux est indifférente sur l'appréciation à porter sur leur caractère déductible. Par suite, il y a lieu de l'écarter par adoption des motifs retenus à bon droit par le tribunal administratif au point 17 de son jugement.

S'agissant des erreurs de calculs alléguées :

20. La société appelante soutient que l'administration n'a pas suivi intégralement l'avis de la commission départementale des impôts directs et des taxes sur le chiffre d'affaires, s'agissant des rectifications opérées en matière de produits et de charges, alors qu'elle lui avait indiqué s'y conformer en tous points. Cependant, il résulte de la comparaison du tableau des conséquences financières du contrôle annexé à la proposition de rectification du 1er août 2016 à celui établi le 30 mai 2017 à la suite de l'avis de la commission précitée, que l'administration a décidé de suivre, que le rehaussement en base initialement retenu de 98 373 euros a été réduit à 78 370 euros, la différence entre ces deux montants, soit 20 003 euros, correspond à la somme des rectifications au titre desquelles cette commission a émis un avis défavorable. Ainsi, contrairement à ce que soutient la société requérante, l'administration a bien retenu en dernier lieu une minoration d'actif à hauteur de 25 083,61 euros au titre des travaux réalisés par l'entreprise Mendes, et non de 30 000 euros, et admis en déduction du résultat imposable les charges afférentes aux loyers du local commercial situé au 135 avenue de la Capelette, du garage situé impasse Barnier et du local sous-loué par Mme B.... Par suite, le moyen tiré des erreurs de calculs qu'auraient commises les services fiscaux doit être écarté.

21. Il résulte de tout ce qui précède que la SARL Boss Boss n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande. Doivent être rejetées, par voie de conséquence, ses conclusions présentées au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

D É C I D E :

Article 1er : La requête de la SARL Boss Boss est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à la société à responsabilité limitée (SARL) Boss Boss et au ministre de l'économie, des finances et de la relance.

Copie en sera adressée à la direction de contrôle fiscal Sud-Est Outre-mer.

Délibéré après l'audience du 19 novembre 2020, où siégeaient :

- M. Lascar, président,

- Mme D..., présidente assesseure,

- Mme A..., première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 3 décembre 2020.

9

N° 19MA04338

mtr


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Marseille
Formation : 3ème chambre
Numéro d'arrêt : 19MA04338
Date de la décision : 03/12/2020
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

Contributions et taxes - Impôts sur les revenus et bénéfices - Règles générales - Impôt sur les bénéfices des sociétés et autres personnes morales.

Contributions et taxes - Taxes sur le chiffre d'affaires et assimilées - Taxe sur la valeur ajoutée.


Composition du Tribunal
Président : M. LASCAR
Rapporteur ?: Mme Mylène BERNABEU
Rapporteur public ?: Mme COURBON
Avocat(s) : AMSELLEM

Origine de la décision
Date de l'import : 19/12/2020
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.marseille;arret;2020-12-03;19ma04338 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award