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23/12/2020 | FRANCE | N°18MA03108

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 5ème chambre, 23 décembre 2020, 18MA03108


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La SCI les Pins du Couloubrier a demandé au tribunal administratif de Toulon de condamner la commune de Sainte-Maxime à lui verser la somme totale de 10 300 000 euros, en réparation de la non constructibilité des parcelles dont elle est propriétaire, cadastrées section E n° 690, 814, 815, 1541, 1543 et 1569, situées sur le territoire de la commune.

Par un jugement n°1504140 du 3 mai 2018, le tribunal administratif de Toulon a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requ

ête et des mémoires, enregistrés les 4 juillet 2018, 6 octobre 2020 et 20 octobre 2020, la ...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La SCI les Pins du Couloubrier a demandé au tribunal administratif de Toulon de condamner la commune de Sainte-Maxime à lui verser la somme totale de 10 300 000 euros, en réparation de la non constructibilité des parcelles dont elle est propriétaire, cadastrées section E n° 690, 814, 815, 1541, 1543 et 1569, situées sur le territoire de la commune.

Par un jugement n°1504140 du 3 mai 2018, le tribunal administratif de Toulon a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête et des mémoires, enregistrés les 4 juillet 2018, 6 octobre 2020 et 20 octobre 2020, la SCI les Pins du Couloubrier, représentée par la SAS Huglo Lepage Avocats, demande à la Cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Toulon du 3 mai 2018 ;

2°) de condamner la commune de Sainte-Maxime à lui verser la somme de 10 300 000 euros ;

3°) de mettre à la charge de la commune une somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- le jugement n'est pas signé et est de ce fait irrégulier ;

- l'affaire aurait dû faire l'objet d'un renvoi d'audience par les premiers juges ;

- la responsabilité de la commune est engagée en raison de la faute commise par son maire dans l'exercice du pouvoir de police ;

- la responsabilité de la commune est également engagée en raison d'une méconnaissance du principe d'égalité ;

- ses préjudices sont constitués d'une perte de bénéfice sur la vente de ses terrains compte tenu de l'absence de droit à construire, d'une atteinte à son droit de propriété et d'une dégradation de ses parcelles ;

- une expertise pourrait être ordonnée.

Par des mémoires en défense, enregistrés les 14 septembre, 19 octobre 2020 et 26 octobre 2020, la commune de Sainte-Maxime, représentée par Me C..., conclut au rejet de la requête et à ce qu'une somme de 2 500 euros soit mise à la charge de la SCI Les Pins du Couloubrier au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que la requête est non fondée dans les moyens qu'elle soulève.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code général des collectivités territoriales ;

- le code de l'environnement ;

- le code de l'urbanisme ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Après avoir entendu en audience publique :

- le rapport de Mme B...,

- les conclusions de M. Pecchioli, rapporteur public,

- et les observations de Me A..., représentant la commune de Sainte-Maxime.

Considérant ce qui suit :

1. La SCI Les Pins du Couloubrier est propriétaire de plusieurs parcelles boisées situées sur le territoire de la commune de Sainte-Maxime, cadastrées section E n° 690, 814, 815, 1541, 1543 et 1569. Elle estime avoir subi un préjudice en raison du caractère non-constructible de ces parcelles et relève appel du jugement du 3 mai 2018 par lequel le tribunal administratif de Toulon a rejeté sa demande tendant à la condamnation de la commune à lui verser la somme de 10 300 000 euros.

Sur la régularité du jugement attaqué :

2. La minute du jugement, contrairement aux affirmations de la requérante, a été régulièrement signée. Le moyen tiré du défaut de signature du jugement ne peut donc qu'être écarté.

3. Le juge, auquel il incombe de veiller à la bonne administration de la justice, n'a aucune obligation, hormis le cas où des motifs exceptionnels tirés des exigences du débat contradictoire l'imposeraient, de faire droit à une demande de report de l'audience formulée par une partie. Si la SCI Les Pins du Couloubrier a sollicité, le 29 mars 2018, un report de l'audience fixée au 12 avril 2018 par avis du 22 mars 2018, elle s'est prévalue à cet égard de l'état de santé de son gérant en indiquant qu'il " devrait " être indisponible jusqu'à la fin du mois d'avril 2018. Elle n'a pas allégué qu'il ne lui était pas possible de s'assurer le ministère d'un avocat ou de faire représenter la société par une autre personne que son gérant. Dans ces circonstances, en refusant de faire droit à cette demande, les premiers juges n'ont pas méconnu le principe du contradictoire.

Sur le bien-fondé du jugement attaqué :

4. En premier lieu, d'une part, aux termes de l'article L. 2212-2 du code général des collectivités territoriales : " La police municipale a pour objet d'assurer le bon ordre, la sûreté, la sécurité et la salubrité publiques. Elle comprend notamment : / (...) / 5° Le soin de prévenir, par des précautions convenables, et de faire cesser, par la distribution des secours nécessaires, les accidents et les fléaux calamiteux ainsi que les pollutions de toute nature, tels que les incendies, (...) ".

5. D'autre part, aux termes de l'article L. 562-1 du code de l'environnement :

" I.- L'Etat élabore et met en application des plans de prévention des risques naturels prévisibles tels que les (...) les incendies de forêt (...). / II.- Ces plans ont pour objet, en tant que de besoin : / 1° De délimiter les zones exposées aux risques, en tenant compte de la nature et de l'intensité du risque encouru, d'y interdire tout type de constructions (...) ou, dans le cas où des constructions (...) pourraient y être autorisés, prescrire les conditions dans lesquelles ils doivent être réalisés (...) ; / 2° De délimiter les zones qui ne sont pas directement exposées aux risques mais où des constructions (...) pourraient aggraver des risques ou en provoquer de nouveaux et y prévoir des mesures d'interdiction ou des prescriptions telles que prévues au 1° ; / (...) ". Aux termes de l'article L. 562-2 du même code : " Lorsqu'un projet de plan de prévention des risques naturels prévisibles contient certaines des dispositions mentionnées au 1° et au 2° du II de l'article L. 562-1 et que l'urgence le justifie, le préfet peut, après consultation des maires concernés, les rendre immédiatement opposables à toute personne publique ou privée par une décision rendue publique. / (...) ".

6. En application de ces dispositions du code de l'environnement, le préfet du Var a, en dernier lieu par un arrêté préfectoral du 18 décembre 2013, rendu immédiatement opposables les dispositions du projet de plan de prévention des risques naturels incendie de forêt sur la commune de Sainte-Maxime, classant notamment les parcelles de la requérante en zone En'1h, dans laquelle les constructions futures sont proscrites compte tenu du niveau de l'aléa incendie qui y prévaut et d'une défendabilité actuelle insuffisante. Le projet de plan de prévention prévoit néanmoins, sous réserve des dispositions du plan local d'urbanisme, une évolution du zonage vers un classement en zone En 2, constructible, lorsque des travaux d'amélioration de la défendabilité, consistant en la création d'une voie de défense V7 et en un débroussaillement de la zone D5, seront effectués.

7. Contrairement à ce que soutient la requérante, il ne résulte pas de ce classement que le maire de la commune aurait, au titre des dispositions des articles L. 562-1 et 2 du code de l'environnement ou du pouvoir de police générale qu'il tient des dispositions de l'article L. 2212-2 du code général des collectivités territoriales, en dehors de toute ouverture de la zone en cause à la construction, une obligation de faire réaliser la voie de défense V7 et de débroussailler la zone D5. Il ne saurait dès lors être soutenu que son abstention à faire réaliser ces travaux caractériserait, au regard de ces dispositions, une faute de nature à engager la responsabilité de la commune à l'égard de la SCI Les Pins du Couloubrier.

8. En deuxième lieu, la requérante doit être regardée comme soutenant que la responsabilité de la collectivité est engagée en raison d'une méconnaissance du principe d'égalité entre les usagers. Il résulte à cet égard de l'instruction que certaines parcelles situées à proximité de celles de la requérante, également classées en zone non constructible dans les dispositions du projet de plan de prévention des risques naturels incendie de forêt rendues immédiatement opposables par arrêté préfectoral du 13 juillet 2012, ont pu voir leur classement modifié dans les dispositions du projet rendues opposables par l'arrêté du 18 décembre 2013 mentionné ci-dessus, abrogeant le précédent. Toutefois, ces parcelles ne faisaient initialement pas l'objet du même classement que celles de la requérante dès lors qu'elles étaient classées en zone En'1f et En'1g et que leur passage en zone constructible n'était subordonné qu'à la réalisation des travaux de débroussaillement sur la zone D5, et non pas à l'aménagement de la voie de défense V7. Dès lors, la requérante, dans une situation différente, au regard de critères objectifs tenant à la situation de ses terrains et en rapport avec les objectifs poursuivis par le plan de prévention, ne saurait soutenir que la commune aurait méconnu le principe d'égalité en ne faisant pas réaliser la voie de défense V7 mais en veillant seulement à ce que les travaux de débroussaillement soient rapidement entrepris et en ne concluant une convention de projet urbain partenarial qu'avec les propriétaires des parcelles initialement classées en zone En'1f et En'1g.

9. Il résulte de tout ce qui précède que la responsabilité de la commune de Sainte-Maxime n'est pas engagée et que la SCI Les Pins du Couloubrier n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que le tribunal administratif de Toulon a rejeté sa demande.

Sur les frais liés au litige :

10. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de la commune de Sainte-Maxime, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, une quelconque somme au titre des frais exposés par la SCI Les Pins du Couloubrier et non compris dans les dépens. Il y a lieu, en revanche, de mettre à la charge de cette dernière la somme de 2 000 euros à verser à la commune de Sainte-Maxime sur le fondement de ces dispositions.

D É C I D E :

Article 1er : La requête de la SCI Les Pins du Couloubrier est rejetée.

Article 2 : La SCI Les Pins du Couloubrier versera à la commune de Sainte-Maxime une somme de 2 000 euros en application des dispositions de l'article L.761-1 du code de justice administrative.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à la SCI Les Pins du Couloubrier et à la commune de Sainte-Maxime.

Délibéré après l'audience du 14 décembre 2020, où siégeaient :

- Mme D..., présidente,

- M. Marcovici, président assesseur,

- Mme B..., premier conseiller.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 23 décembre 2020.

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