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15/02/2021 | FRANCE | N°19MA00827

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 5ème chambre, 15 février 2021, 19MA00827


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La SA Hostellerie du Château de la Chèvre d'Or a demandé au tribunal administratif de Nice de la décharger de la somme de 36 576,91 euros qui lui a été réclamée par le titre de recette émis à son encontre par le maire de la commune d'Eze le 26 juillet 2018.

Par un jugement n°1600830-1804174 du 18 décembre 2018, le tribunal administratif de Nice a notamment rejeté cette demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête, enregistrée le 19 février 2019, la SA Hostellerie du Châ

teau de la Chèvre d'Or, représentée par Me D..., demande à la Cour :

1°) d'annuler ce jugement du...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La SA Hostellerie du Château de la Chèvre d'Or a demandé au tribunal administratif de Nice de la décharger de la somme de 36 576,91 euros qui lui a été réclamée par le titre de recette émis à son encontre par le maire de la commune d'Eze le 26 juillet 2018.

Par un jugement n°1600830-1804174 du 18 décembre 2018, le tribunal administratif de Nice a notamment rejeté cette demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête, enregistrée le 19 février 2019, la SA Hostellerie du Château de la Chèvre d'Or, représentée par Me D..., demande à la Cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Nice du 18 décembre 2018 ;

2°) de la décharger de la somme litigieuse ;

3°) de mettre à la charge de la commune d'Eze une somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- le jugement est insuffisamment motivé en ce qu'il écarte le moyen tiré ce que l'arrêté de péril imminent est illégal ;

- l'arrêté de péril imminent est illégal ;

- elle n'a pas la propriété de l'ensemble du mur concerné et l'autre propriétaire concerné n'a pas été requis ;

- les travaux prescrits correspondent à une réfection définitive et ne sont pas ceux définis par l'expert pour mettre fin à l'imminence du péril ;

- l'avis de l'architecte des bâtiments de France aurait dû être sollicité ;

- l'émission du titre méconnaît l'autorité de chose jugée.

Par un mémoire en défense, enregistré le 27 octobre 2020, la commune d'Eze, représentée par Me C..., conclut au rejet de la requête, à ce que la SA Hostellerie du Château de la Chèvre d'Or soit condamnée à lui verser la somme de 5 000 euros au titre de l'article R. 741-12 du code de justice administrative, et à ce qu'une somme de 4 000 euros soit mise à la charge de cette dernière au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- le moyen tiré de l'illégalité de l'arrêté de péril est irrecevable dès lors que celui-ci n'a pas été contesté en temps utile ;

- la requête est non fondée dans les moyens qu'elle soulève ;

- la requérante fait abusivement obstacle au règlement de cette dette par la multiplication des procédures.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code de la construction et de l'habitation ;

- le code général des collectivités territoriales ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Après avoir entendu en audience publique :

- le rapport de Mme F...,

- les conclusions de M. Pecchioli, rapporteur public,

- et les observations de Me A..., substituant Me D..., représentant la SA Hostellerie du Château de la Chèvre d'Or, et de Me B..., représentant la commune d'Eze.

Considérant ce qui suit :

1. Par un arrêté du 19 septembre 2005, le maire de la commune d'Eze a mis en demeure la SA Hostellerie du Château de la Chèvre d'Or, propriétaire de la parcelle cadastrée section AL, n° 225, et la société Gedo, propriétaire de la parcelle mitoyenne cadastrée section AL, n° 226, d'entreprendre, en deux phases devant s'achever le 23 octobre 2005, des travaux de mise en sécurité d'un mur bordant la rue principale du village afin de remédier à un état de péril imminent. A la suite de cet arrêté et après que la SA Hostellerie du Château de la Chèvre d'Or a racheté, le 20 janvier 2006, la parcelle cadastrée section AL, n° 226, la commune a fait procéder à des travaux sur ledit mur au début de l'année 2007, pour un montant total de 36 576,91 euros. Après plusieurs procédures infructueuses, le maire de la commune d'Eze a émis, le 26 juillet 2018, un titre de recette à l'encontre de la SA Hostellerie du Château de la Chèvre d'Or pour le recouvrement de cette somme. La société relève appel du jugement du 18 décembre 2018 par lequel le tribunal administratif de Nice a rejeté sa demande tendant à la décharge de cette somme.

2. Aux termes de l'article L. 511-3 du code de la construction et de l'habitation dans sa version applicable : " En cas de péril imminent, le maire, après avertissement adressé au propriétaire, demande à la juridiction administrative compétente la nomination d'un expert qui, dans les vingt-quatre heures qui suivent sa nomination, examine les bâtiments, dresse constat de l'état des bâtiments mitoyens et propose des mesures de nature à mettre fin à l'imminence du péril s'il la constate. / Si le rapport de l'expert conclut à l'existence d'un péril grave et imminent, le maire ordonne les mesures provisoires nécessaires pour garantir la sécurité, notamment, l'évacuation de l'immeuble. / Dans le cas où ces mesures n'auraient pas été exécutées dans le délai imparti, le maire les fait exécuter d'office. En ce cas, le maire agit en lieu et place des propriétaires, pour leur compte et à leurs frais. / Si les mesures ont à la fois conjuré l'imminence du danger et mis fin durablement au péril, le maire, sur le rapport d'un homme de l'art, prend acte de leur réalisation et de leur date d'achèvement. / Si elles n'ont pas mis fin durablement au péril, le maire poursuit la procédure dans les conditions prévues à l'article L. 511-2. ". Aux termes de l'article L. 511-4 du même code : " Lorsque, à défaut du propriétaire, le maire a dû prescrire l'exécution des travaux ainsi qu'il a été prévu aux articles L. 511-2 et L. 511-3, le montant des frais est avancé par la commune ; il est recouvré comme en matière d'impôts directs. / (...) ".

3. Ainsi qu'il a été exposé ci-dessus, le maire de la commune d'Eze a, sur le fondement des dispositions de l'article L. 511-3 citées ci-dessus et par arrêté du 19 septembre 2005, prescrit aux propriétaires des parcelles cadastrées section AL n° 225 et 226 " d'exécuter les travaux prescrits dans le rapport d'expertise de M. G... E... ", à savoir mettre en place une signalisation, poursuivre la mise en sécurité du domaine public en mettant en place un platelage en bois notamment pour assurer la sécurité dans la rue Principale en cas de nouvel éboulement, évacuer les gravats et dégager les structures afin de permettre à un ingénieur d'examiner l'état des maçonneries et de préciser les travaux à entreprendre pour rétablir la sécurité sur le domaine public. Or, il ressort de la facture de maçonnerie produite par la commune que les travaux que son maire a fait exécuter d'office et qui sont mis à la charge de la SA Hostellerie du Château de la Chèvre d'Or par l'effet du titre litigieux, consistent en la démolition du mur, la réalisation de terrassements et la reconstruction partielle du mur. Ainsi, comme le soutient la requérante, ces travaux ne correspondent pas même en partie aux travaux prescrits dans le rapport d'expertise, seuls ordonnés par l'arrêté du 19 septembre 2005. Il s'ensuit que la commune d'Eze, qui n'allègue pas qu'un autre arrêté aurait prescrit les travaux qu'elle a fait réaliser, ne pouvait légalement les mettre à la charge de la SA Hostellerie du Château de la Chèvre d'Or.

4. Il résulte de tout ce qui précède, sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens de la requête, que la SA Hostellerie du Château de la Chèvre d'Or est fondée à soutenir que c'est à tort que le tribunal administratif de Nice a rejeté sa demande.

5. Aux termes de l'article R. 741-12 du code de justice administrative : " Le juge peut infliger à l'auteur d'une requête qu'il estime abusive une amende dont le montant ne peut excéder 10 000 euros ". La faculté prévue par ces dispositions constituant un pouvoir propre du juge, les conclusions de la commune d'Eze tendant à ce que la SA Hostellerie du Château de la Chèvre d'Or soit condamnée à une telle amende ne sont en tout état de cause pas recevables.

6. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de la SA Hostellerie du Château de la Chèvre d'Or, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, une quelconque somme au titre des frais exposés par la commune d'Eze et non compris dans les dépens. Il y a lieu en revanche de mettre à la charge de cette dernière la somme de 2 000 euros à verser à la SA Hostellerie du Château de la Chèvre d'Or sur le fondement de ces dispositions.

D É C I D E :

Article 1er : Les articles 2 et 3 du jugement du tribunal administratif de Nice du 18 décembre 2018 sont annulés.

Article 2 : La SA Hostellerie du Château de la Chèvre d'Or est déchargée de la somme de 36 576,91 euros qui lui a été réclamée par le titre de recette émis par le maire de la commune d'Eze le 26 juillet 2018.

Article 3 : La commune d'Eze versera la somme de 2 000 euros à la SA Hostellerie du Château de la Chèvre d'Or au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 4 : Les conclusions présentées par la commune d'Eze sur le fondement des articles R. 741-12 et L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à la SA Hostellerie du Château de la Chèvre d'Or et à la commune d'Eze.

Copie en sera adressée à la direction départementale des finances publiques des Alpes-Maritimes.

Délibéré après l'audience du 3 février 2021, où siégeaient :

- M. Bocquet, président,

- M. Marcovici, président assesseur,

- Mme F..., premier conseiller.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 15 février 2021.

N°19MA00827 2


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Marseille
Formation : 5ème chambre
Numéro d'arrêt : 19MA00827
Date de la décision : 15/02/2021
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

135-02-03-02-02-02-02 Collectivités territoriales. Commune. Attributions. Police. Police de la sécurité. Immeubles menaçant ruine. Charge des travaux et responsabilité.


Composition du Tribunal
Président : M. BOCQUET
Rapporteur ?: Mme Caroline POULLAIN
Rapporteur public ?: M. PECCHIOLI
Avocat(s) : SELARL PLENOT-SUARES-BLANCO-ORLANDINI

Origine de la décision
Date de l'import : 25/02/2021
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.marseille;arret;2021-02-15;19ma00827 ?
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