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16/02/2021 | FRANCE | N°19MA01440

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 9ème chambre, 16 février 2021, 19MA01440


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. D... B... a demandé au tribunal administratif de Toulon d'annuler l'arrêté du 6 décembre 2018 par lequel le préfet du Var a refusé son admission au séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans le délai de trente jours et a fixé le pays de destination.

Par le jugement n° 1804029 du 25 février 2019, le tribunal administratif de Toulon a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête enregistrée le 26 mars 2019, M. B..., représenté par M

e E..., demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement du 25 février 2019 du tribunal administrati...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. D... B... a demandé au tribunal administratif de Toulon d'annuler l'arrêté du 6 décembre 2018 par lequel le préfet du Var a refusé son admission au séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans le délai de trente jours et a fixé le pays de destination.

Par le jugement n° 1804029 du 25 février 2019, le tribunal administratif de Toulon a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête enregistrée le 26 mars 2019, M. B..., représenté par Me E..., demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement du 25 février 2019 du tribunal administratif de Toulon ;

2°) d'annuler l'arrêté du 6 décembre 2018 du préfet du Var ;

3°) d'enjoindre au préfet du Var, à titre principal, de lui délivrer un titre de séjour portant mention " vie privée et familiale " dans le délai de quinze jours à compter de la notification du présent arrêt sous astreinte de 50 euros par jour de retard passé ce délai, à titre subsidiaire, de réexaminer sa demande sous les mêmes conditions de délai et d'astreinte et de lui délivrer dans l'attente une autorisation provisoire de séjour ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 2 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- les premiers juges ont omis de statuer sur le moyen tiré de ce qu'il n'était pas établi qu'un collège des médecins ait été spécifiquement désigné pour examiner son dossier en méconnaissance de l'article 11 de l'arrêté du 27 décembre 2016 ;

En ce qui concerne le refus de délivrance d'un titre de séjour :

- il n'est pas établi qu'un collège des médecins ait été spécifiquement désigné par l'OFII pour examiner son dossier en méconnaissance de l'article 11 de cet arrêté du 27 décembre 2016 ;

- la décision en litige a été rendue au terme d'une procédure irrégulière, dès lors que le collège des médecins de l'OFII n'a pas rendu un avis collégial au sens de l'article 6 de l'arrêté du 27 décembre 2016, ce qui constitue une garantie ;

- ce refus méconnaît l'article L. 313-11 11° du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

En ce qui concerne l'obligation de quitter le territoire français :

- cette décision méconnaît l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.

La requête a été transmise au préfet du Var qui n'a pas produit de mémoire.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- l'arrêté du 27 décembre 2016 relatif aux conditions d'établissement et de transmission des certificats médicaux, rapports médicaux et avis mentionnés aux articles R. 313-22, R. 313-23 et R. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le rapport de Mme C... a été entendu au cours de l'audience publique.

Considérant ce qui suit :

1. M. B..., de nationalité marocaine, a demandé le 17 juillet 2017 au préfet du Var la délivrance d'un titre de séjour sur le fondement de l'article L. 313-11 11° du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Le refus qui lui a été opposé par le préfet par un arrêté du 7 septembre 2018 a été annulé par le jugement n° 1801985 du 7 septembre 2018 du tribunal administratif de Toulon, qui a enjoint à l'administration de réexaminer la demande de titre de séjour du requérant dans un délai de deux mois à compter de la notification du jugement. En exécution de ce jugement, le préfet du Var, par l'arrêté en litige du 6 décembre 2018, a à nouveau rejeté la demande de titre de séjour de M. B... et lui a fait obligation de quitter le territoire français. Par le jugement dont M. B... relève appel, le tribunal administratif de Toulon a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté.

Sur la régularité du jugement attaqué :

2. Il ressort du point 4 du jugement attaqué que les premiers juges ont statué sur le moyen du requérant tiré de ce que les trois médecins qui ont statué sur son cas avaient été désignés par décision du directeur général de l'office en date du 17 janvier 2017 et n'ont ainsi pas entaché ce jugement d'irrégularité pour ce motif, contrairement à ce que soutient M. B....

Sur les conclusions aux fins d'annulation :

En ce qui concerne le refus de lui délivrer un titre de séjour :

3. En premier lieu, aux termes de l'article R. 313-22 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Pour l'application du 11° de l'article L. 313-11, le préfet délivre la carte de séjour au vu d'un avis émis par un collège de médecins à compétence nationale de l'Office français de l'immigration et de l'intégration. L'avis est émis dans les conditions fixées par arrêté du ministre chargé de l'immigration et du ministre chargé de la santé au vu, d'une part, d'un rapport médical établi par un médecin de l'Office français de l'immigration et de l'intégration et, d'autre part, des informations disponibles sur les possibilités de bénéficier effectivement d'un traitement approprié dans le pays d'origine de l'intéressé (...) ". En application de l'article R. 313-23 du même code : " Le rapport médical mentionné à l'article R. 313-22 est établi par un médecin de l'Office français de l'immigration et de l'intégration à partir d'un certificat médical établi par le médecin qui suit habituellement le demandeur ou par un médecin praticien hospitalier inscrits au tableau de l'ordre, dans les conditions prévues par l'arrêté mentionné au deuxième alinéa de l'article R. 313-22.(...) / Le collège à compétence nationale, composé de trois médecins, émet un avis dans les conditions de l'arrêté mentionné au premier alinéa du présent article. La composition du collège et, le cas échéant, de ses formations est fixée par décision du directeur général de l'office. Le médecin ayant établi le rapport médical ne siège pas au sein du collège (...) ". Aux termes de l'article 3 de l'arrêté du 27 décembre 2016 pris pour l'application de ces dispositions : " Au vu du certificat médical et des pièces qui l'accompagnent ainsi que des éléments qu'il a recueillis au cours de son examen éventuel, le médecin de l'office établit un rapport médical, conformément au modèle figurant à l'annexe B du présent arrêté ". Aux termes de l'article 4 de cet arrêté : " Pour l'établissement de son rapport médical, le médecin de l'office peut demander, dans le respect du secret médical, tout complément d'information auprès du médecin ayant renseigné le certificat médical et faire procéder à des examens complémentaires. / Le médecin de l'office, s'il décide, pour l'établissement du rapport médical, de solliciter un complément d'information auprès du médecin qui a renseigné le certificat médical, en informe le demandeur. Il peut convoquer, le cas échéant, le demandeur auprès du service médical de la délégation territoriale compétente. Les informations ou les résultats d'examens complémentaires sollicités sont communiqués dans un délai de quinze jours à compter de la demande formulée par le médecin de l'office (...) ". Enfin, l'article 6 du même arrêté prévoit que : " Au vu du rapport médical mentionné à l'article 3, un collège de médecins désigné pour chaque dossier dans les conditions prévues à l'article 5 émet un avis, conformément au modèle figurant à l'annexe C du présent arrêté, (...) "

4. Il ressort de la décision du 17 janvier 2017 du directeur général de l'Office français de l'immigration et de l'intégration (OFII), et notamment de son annexe 1, que les trois médecins signataires de l'avis du 6 avril 2018 qui ont examiné le cas du requérant figurent sur la liste des médecins désignés pour participer au collège à compétence nationale. Aucune des dispositions citées au point 3 et notamment pas l'article 6 de l'arrêté du 27 décembre 2016, non plus qu'aucun principe général du droit, n'exige que l'avis émis pour l'application du 11° de l'article L. 313-11 du code susmentionné soit rendu par un collège de médecins spécifiquement nommés pour chaque dossier à examiner. Il en résulte que l'appelant n'est pas fondé à soutenir que l'avis du 6 avril 2018 aurait été émis par des médecins qui n'auraient pas été nommés conformément aux dispositions de l'article R. 313-23 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.

5. En deuxième lieu, aux termes de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " est délivrée de plein droit : (...) 11° A l'étranger résidant habituellement en France, si son état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait avoir pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité et si, eu égard à l'offre de soins et aux caractéristiques du système de santé dans le pays dont il est originaire, il ne pourrait pas y bénéficier effectivement d'un traitement approprié. La condition prévue à l'article L. 313-2 n'est pas exigée. / La décision de délivrer la carte de séjour est prise par l'autorité administrative après avis d'un collège de médecins du service médical de l'Office français de l'immigration et de l'intégration, dans des conditions définies par décret en Conseil d'Etat. (...) ".

6. L'arrêté contesté a été pris au vu de l'avis émis le 6 avril 2018 par le collège de médecins de l'OFII produit par le préfet du Var. Contrairement à ce que soutient le requérant, il ne ressort pas des pièces du dossier que cet avis, qui a été signé par les trois médecins composant le collège et qui porte la mention " Après en avoir délibéré, le collège de médecins émet l'avis suivant " ne serait pas le résultat d'une délibération collégiale. En outre, les dispositions de l'article 6 de l'arrêté du 27 décembre 2016 permettent au collège de médecins de se réunir " au moyen d'une conférence téléphonique ou audiovisuelle ". En se bornant à produire un extrait du logiciel Thémis " historique des changements " mentionnant une date différente de validation de cet avis sur son ordinateur par chacun de ces trois médecins, M. B... n'établit pas que les trois médecins concernés n'auraient pas délibéré sur son dossier au terme d'une réunion collégiale comme exigé par l'article L. 313-11 du code précité. Par suite, le moyen tiré du vice de procédure doit être écarté.

7. En troisième lieu, le collège de médecins de l'OFII a estimé dans son avis du 6 avril 2018 que l'état de santé de M. B... nécessitait une prise en charge médicale dont le défaut ne devrait pas entraîner des conséquences d'une exceptionnelle gravité et que son état de santé lui permettait de voyager sans risque vers son pays d'origine. Le requérant, qui a bénéficié de plusieurs greffes de la cornée depuis 2014, en se bornant à soutenir qu'il doit bénéficier d'un suivi ophtalmologique régulier et qu'il doit subir une autre opération de kératoplastie transfixiante à l'oeil gauche, ne remet pas en cause utilement l'avis du collège des trois médecins s'agissant de l'absence de conséquence d'une exceptionnelle gravité en cas de défaut de prise en charge de sa pathologie et ne peut dès lors utilement soutenir que cette prise en charge ne serait pas disponible dans son pays d'origine. Dès lors, le requérant n'est pas fondé à soutenir que la décision portant refus de lui délivrer un titre de séjour a été prise en méconnaissance des dispositions de l'article L. 313-11 11° du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.

En ce qui concerne l'obligation de quitter le territoire français :

8. Aux termes de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " Nul ne peut être soumis à la torture ni à des peines ou traitements inhumains ou dégradants ".

9. Le requérant ne peut utilement soutenir, à l'appui de ses conclusions contre la mesure d'éloignement en litige, qu'eu égard à l'absence de traitement adapté à son état de santé dans son pays d'origine, un retour au Maroc l'exposerait à un traitement inhumain ou dégradant au sens de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.

10. Il résulte de tout ce qui précède que M. B... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Toulon a rejeté sa demande. Par voie de conséquence, ses conclusions aux fins d'injonction et celles tendant à ce qu'une somme soit mise à la charge de l'Etat sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative doivent être rejetées.

D É C I D E :

Article 1er : La requête de M. B... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. D... B... et au ministre de l'intérieur.

Copie en sera adressée au préfet du Var.

Délibéré après l'audience du 2 février 2021, où siégeaient :

- Mme A..., présidente assesseure, présidant la formation de jugement en application de l'article R. 222- 26 du code de justice administrative,

- Mme C..., première conseillère,

- M. Mouret, premier conseiller.

Rendu public par mise à disposition du greffe le 16 février 2021.

4

N° 19MA01440


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Marseille
Formation : 9ème chambre
Numéro d'arrêt : 19MA01440
Date de la décision : 16/02/2021
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-03-03 Étrangers. Obligation de quitter le territoire français (OQTF) et reconduite à la frontière. Règles de procédure contentieuse spéciales.


Composition du Tribunal
Président : Mme SIMON
Rapporteur ?: Mme Marie-Claude CARASSIC
Rapporteur public ?: M. ROUX
Avocat(s) : BOCHNAKIAN et LARRIEU-SANS

Origine de la décision
Date de l'import : 27/02/2021
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.marseille;arret;2021-02-16;19ma01440 ?
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