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09/04/2021 | FRANCE | N°19MA02695

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 7ème chambre, 09 avril 2021, 19MA02695


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La commune de Barbentane a demandé au tribunal administratif de Marseille, à titre principal, d'annuler l'arrêté du 12 avril 2016 par lequel le préfet des Bouches-du-Rhône a approuvé le plan de prévention des risques naturels d'inondation de la basse vallée de la Durance (PPRI) sur son territoire et à titre subsidiaire d'annuler le classement en zone R1 des parcelles AT 64, AT 133 et AT 138 pour les classer en zone B1.

Par un jugement n° 1610003 du 18 avril 2019, le tribunal administratif de Mars

eille a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête et un m...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La commune de Barbentane a demandé au tribunal administratif de Marseille, à titre principal, d'annuler l'arrêté du 12 avril 2016 par lequel le préfet des Bouches-du-Rhône a approuvé le plan de prévention des risques naturels d'inondation de la basse vallée de la Durance (PPRI) sur son territoire et à titre subsidiaire d'annuler le classement en zone R1 des parcelles AT 64, AT 133 et AT 138 pour les classer en zone B1.

Par un jugement n° 1610003 du 18 avril 2019, le tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête et un mémoire, enregistrés le 16 juin 2019 et le 6 janvier 2021, la commune de Barbentane, représentée par le cabinet Guin et Hequet, demande à la Cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Marseille du 18 avril 2019 ;

2°) d'annuler l'arrêté du préfet des Bouches-du-Rhône du 12 avril 2016 ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 5 000 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- les arrêtés du 27 octobre 2008 et du 6 décembre 2011 prescrivant l'élaboration du plan de prévention en litige sont dépourvus de caractère exécutoire en l'absence de preuves d'une publication régulière ;

- il n'est pas certain que la direction départementale des territoires et de la mer des Bouches-du-Rhône ait instruit et élaboré le projet du plan ni que les modalités d'élaboration du plan aient été définies ;

- les dispositions de l'article 2 du décret du 28 juin 2011 sont illégales en tant qu'elles affranchissent les plans de prévention des risques naturels prévisibles prescrits avant le 1er août 2011 de tout délai d'approbation ;

- le plan de prévention n'a pas été approuvé dans les trois ans prescrits par l'article R. 562-2 du code de l'environnement ;

- les personnes publiques qui auraient dû être associées à l'élaboration du plan aux termes de l'arrêté du 6 décembre 2011 ne l'ont pas été en méconnaissance des dispositions de cet arrêté ;

- le règlement du plan approuvé par l'arrêté en litige est différent de celui qui a été soumis à l'enquête publique ;

- ce règlement ne satisfait pas au principe d'accessibilité et d'intelligibilité de la norme ;

- en retenant un aléa de référence improbable de 5 000 m3 le préfet s'est fondé sur une méthodologie dénuée de pertinence et a entaché son arrêté d'une erreur de fait et d'une erreur manifeste d'appréciation ;

- en définissant les zones dédiées aux activités agricoles et celles destinées à l'urbanisation, le préfet a méconnu le principe de libre administration des collectivités locales ;

- la carte des vitesses et du sens d'écoulement des crues ainsi que la topographie qui a service de base aux études et notamment aux modèles mathématiques n'ont pas été communiquées à la commission d'enquête, circonstance dont il résulte une erreur de fait et une erreur manifeste d'appréciation ;

- le plan est incomplet faute de prendre en compte les risques d'inondation par ruissellement ;

- le classement des parcelles AT 64, AT 133 et AT 138 en zone R1 est entaché d'une erreur manifeste d'appréciation.

Par des mémoires en défense, enregistrés le 7 janvier 2021 et le 11 janvier 2021, la ministre de la transition écologique conclut au rejet de la requête.

Elle soutient que :

- le moyen tiré de l'exception d'illégalité de l'arrêté prescrivant le plan de prévention est irrecevable en application des dispositions de l'article L. 600-1 du code de l'urbanisme ;

- les autres moyens soulevés par la commune de Barbentane ne sont pas fondés.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la Constitution ;

- le code de l'environnement ;

- le code de l'urbanisme ;

- le décret n° 2011-765 du 28 juin 2011 ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Guidal,

- et les conclusions de M. Chanon, rapporteur public.

Considérant ce qui suit :

1. Par un arrêté du 6 décembre 2011, le préfet des Bouches-du-Rhône a prescrit l'élaboration d'un plan de prévention des risques d'inondation de la basse vallée de la Durance sur le territoire de la commune de Barbentane. Par un arrêté du 12 avril 2016, il a approuvé le plan. La commune de Barbentane relève appel du jugement du 18 avril 2019 par lequel le tribunal administratif a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 12 avril 2016 du préfet des Bouches-du-Rhône.

Sur la légalité de l'arrêté du 12 avril 2016 du préfet des Bouches-du-Rhône :

En ce qui concerne la légalité externe :

2. D'une part, aux termes de l'article L. 562-1 du code de l'environnement, dans sa rédaction alors en vigueur : " I. - L'Etat élabore et met en application des plans de prévention des risques naturels prévisibles tels que les inondations, les mouvements de terrain, les avalanches, les incendies de forêt, les séismes, les éruptions volcaniques, les tempêtes ou les cyclones. / II. - Ces plans ont pour objet, en tant que de besoin : / 1° De délimiter les zones exposées aux risques, en tenant compte de la nature et de l'intensité du risque encouru, d'y interdire tout type de construction, d'ouvrage, d'aménagement ou d'exploitation agricole, forestière, artisanale, commerciale ou industrielle, notamment afin de ne pas aggraver le risque pour les vies humaines ou, dans le cas où des constructions, ouvrages, aménagements ou exploitations agricoles, forestières, artisanales, commerciales ou industrielles, pourraient y être autorisés, prescrire les conditions dans lesquelles ils doivent être réalisés, utilisés ou exploités ; / 2° De délimiter les zones qui ne sont pas directement exposées aux risques mais où des constructions, des ouvrages, des aménagements ou des exploitations agricoles, forestières, artisanales, commerciales ou industrielles pourraient aggraver des risques ou en provoquer de nouveaux et y prévoir des mesures d'interdiction ou des prescriptions telles que prévues au 1° ; / 3° De définir les mesures de prévention, de protection et de sauvegarde qui doivent être prises, dans les zones mentionnées au 1° et au 2°, par les collectivités publiques dans le cadre de leurs compétences, ainsi que celles qui peuvent incomber aux particuliers ; / 4° De définir, dans les zones mentionnées au 1° et au 2°, les mesures relatives à l'aménagement, l'utilisation ou l'exploitation des constructions, des ouvrages, des espaces mis en culture ou plantés existants à la date de l'approbation du plan qui doivent être prises par les propriétaires, exploitants ou utilisateurs (...) ". Aux termes de l'article L. 562-4 du même code : " Le plan de prévention des risques naturels prévisibles approuvé vaut servitude d'utilité publique. Il est annexé au plan d'occupation des sols, conformément à l'article L. 126-1 du code de l'urbanisme ".

3. D'autre part, en vertu de l'article L. 562-3 du code de l'environnement dans sa rédaction applicable à la date de l'arrêté prescrivant la réalisation du plan en litige : " Le préfet définit les modalités de la concertation relative à l'élaboration du projet de plan de prévention des risques naturels prévisibles. / Sont associés à l'élaboration de ce projet les collectivités territoriales et les établissements publics de coopération intercommunale concernés ". Aux termes de l'article R. 562-2 du même code, dans sa rédaction applicable à la même date : " L'arrêté prescrivant l'établissement d'un plan de prévention des risques naturels prévisibles détermine le périmètre mis à l'étude et la nature des risques pris en compte. Il désigne le service déconcentré de l'Etat qui sera chargé d'instruire le projet. / Cet arrêté définit également les modalités de la concertation et de l'association des collectivités territoriales et des établissements publics de coopération intercommunale concernés, relatives à l'élaboration du projet. / Il est notifié aux maires des communes ainsi qu'aux présidents des collectivités territoriales et des établissements publics de coopération intercommunale compétents pour l'élaboration des documents d'urbanisme dont le territoire est inclus, en tout ou partie, dans le périmètre du projet de plan. / Il est, en outre, affiché pendant un mois dans les mairies de ces communes et aux sièges de ces établissements publics et publié au recueil des actes administratifs de l'Etat dans le département. Mention de cet affichage est insérée dans un journal diffusé dans le département ".

4. En premier lieu, il ressort des pièces du dossier que le plan de prévention en litige a été prescrit par un arrêté du 6 décembre 2011 du préfet des Bouches-du-Rhône et non pas par l'arrêté préfectoral du 27 octobre 2008 qui a prescrit l'établissement d'un plan de prévention des risques naturels prévisibles d'inondation par débordement du Rhône et des principaux vallons périurbains et a d'ailleurs été abrogé par l'arrêté du 12 avril 2016 du préfet des Bouches-du-Rhône. Par suite, le moyen tiré de l'absence de caractère exécutoire de l'arrêté du 27 octobre 2008 est, en tout état de cause, inopérant.

5. En deuxième lieu, l'absence de caractère exécutoire de l'arrêté du préfet prescrivant l'élaboration ou la révision d'un plan de prévention des risques naturels prévisibles et précisant les modalités de concertation ne remet pas en cause l'existence juridique de cet acte, ni ne fait obstacle à ce que son annulation soit recherchée devant le juge de l'excès de pouvoir. Elle ne s'oppose pas davantage à ce que soit utilement invoqué, à l'encontre de l'arrêté approuvant le plan de prévention des risques naturels prévisibles, tout moyen relatif à la régularité du déroulement de la concertation au regard des modalités définies par l'arrêté en prescrivant l'élaboration ou la révision. Ainsi, le moyen tiré de ce que l'arrêté préfectoral du 6 décembre 2011 prescrivant l'élaboration du plan de prévention des risques naturels prévisibles d'inondation de la basse vallée de la Durance sur le territoire de la commune de Barbentane ne serait pas devenu exécutoire en raison du défaut d'accomplissement de l'ensemble des formalités de publicité prévues à l'article R. 562-2 du code de l'environnement ne peut, eu égard à son objet et à sa portée, être utilement invoqué contre l'arrêté préfectoral du 12 avril 2016 approuvant ce plan.

6. En troisième lieu, conformément aux dispositions de l'article R. 562-2 du code de l'environnement, l'arrêté préfectoral du 6 décembre 2011 prescrivant l'élaboration du plan en litige, qui est accessible sur le site internet de la préfecture, a désigné en son article 2 la direction départementale des territoires et de la mer des Bouches-du-Rhône comme le service déconcentré de l'Etat chargée de l'instruction et de l'élaboration du projet de plan en litige. Il ressort des pièces du dossier que c'est bien ce service qui a élaboré le projet du plan. Le même arrêté a défini en son article 3 les modalités de la concertation et de l'association des collectivités territoriales et des établissements publics de coopération intercommunale concernés à l'élaboration du projet. Par suite, la commune de Barbentane n'est pas fondée à soutenir qu'à aucun moment les modalités d'élaboration du plan n'ont été effectivement définies, ni qu'il " n'est pas certain que la direction départementale des territoires et de la mer des Bouches-du-Rhône ait instruit et élaboré ce projet de PPRI ".

7. En quatrième lieu, aux termes du dernier alinéa de l'article R. 562-2 du code de l'environnement, dans sa rédaction applicable au litige : " Le plan de prévention des risques naturels prévisibles est approuvé dans les trois ans qui suivent l'intervention de l'arrêté prescrivant son élaboration. Ce délai est prorogeable une fois, dans la limite de dix-huit mois, par arrêté motivé du préfet si les circonstances l'exigent, notamment pour prendre en compte la complexité du plan ou l'ampleur et la durée des consultations ". En vertu de l'article 2 du décret du 28 juin 2011 relatif à la procédure d'élaboration, de révision et de modification des plans de prévention des risques naturels prévisibles, publié au Journal officiel de la République française du 30 juin 2011, ces dispositions sont applicables aux " plans de prévention des risques naturels prévisibles dont l'établissement est prescrit par un arrêté pris postérieurement au dernier jour du premier mois suivant la publication du présent décret ", soit postérieurement au 31 juillet 2011.

8. Ainsi qu'il a été rappelé au point 4, le plan en litige a été prescrit par le préfet des Bouches-du-Rhône par un arrêté du 6 décembre 2011. Dès lors, en vertu des dispositions combinées du dernier alinéa de l'article R. 562-2 du code de l'environnement et de l'article 2 du décret du 28 juin 2011, sa procédure d'élaboration était enfermée dans un délai de trois ans, sauf prorogation, qui a commencé à courir le 6 décembre 2011. Il s'ensuit que le moyen tiré de ce que les dispositions transitoires de l'article 2 du décret du 28 juin 2011 seraient illégales en tant qu'elles affranchissent les plans de prévention des risques naturels prévisibles prescrits avant le 1er août 2011 de tout délai d'approbation ne peut, en tout état de cause, être utilement invoqué à l'encontre du plan de prévention contesté prescrit postérieurement à cette dernière date.

9. Il ressort des pièces du dossier que, si les dispositions de l'article 1er de l'arrêté préfectoral précité du 6 décembre 2011 prescrivant l'élaboration du plan en litige ont prévu que celui-ci serait approuvé dans les trois ans suivant cette date, un arrêté du 5 novembre 2014 du préfet des Bouches-du-Rhône a prévu que ce délai était prorogé jusqu'au 6 juin 2016 en vertu du dernier alinéa de l'article R. 562-2 du code de l'environnement. Il s'ensuit que la durée d'élaboration du plan en litige, qui a été approuvé le 12 avril 2016, n'a pas excédé le délai maximal d'approbation de quatre ans et six mois résultant de l'application de ces dispositions. Par suite, le moyen tiré de leur méconnaissance ne peut qu'être écarté.

10. En cinquième lieu, il résulte des dispositions précitées des articles L. 562-3 et R. 562-2 du code de l'environnement mentionnées au point 3, que le législateur a entendu associer les collectivités territoriales et les établissements publics de coopération intercommunale concernés à l'élaboration des plans de prévention des risques naturels prévisibles d'inondation qui doit se faire en concertation avec ces collectivités. La décision approuvant un plan de prévention des risques naturels prévisibles d'inondation ne saurait, dès lors, intervenir qu'au terme d'une procédure associant régulièrement à son élaboration les collectivités territoriales et les établissements publics de coopération intercommunale concernés.

11. Il ressort des dispositions de l'article 3 de l'arrêté du 6 décembre 2011, prescrivant l'élaboration du plan en litige, que le préfet a entendu associer à l'élaboration de ce document, la commune de Barbentane, le syndicat mixte du pays d'Arles, compétent pour l'élaboration du SCOT, le conseil régional Provence-Alpes-Côte d'Azur, le conseil général des Bouches-du-Rhône, la chambre d'agriculture et la chambre de commerce et d'industrie des Bouches-du-Rhône, le centre de la propriété forestière et le syndicat mixte d'aménagement de la vallée de la Durance. Le même arrêté a prévu que des réunions d'association seraient organisées avec la commune de Barbentane à chaque étape de l'élaboration du plan, que toutes les explications utiles seraient alors fournies et ses observations recueillies et prises en compte pour l'élaboration du plan et enfin que les projets de cartes et de notices explicatives utiles lui seraient remis lors de ces réunions. S'agissant des autres personnes publiques concernées, le même arrêté a prévu que celles-ci seraient associées soit dans le cadre des réunions organisées avec la commune, soit dans le cadre d'une ou de plusieurs réunions spécifiques, et que seraient présentées à ces personnes les mêmes informations que celles présentées à la commune. Enfin, il a été prévu que le syndicat mixte d'aménagement de la vallée de la Durance serait en outre associé au comité technique pour les phases techniques des études hydrauliques. S'il est soutenu que les collectivités territoriales et les autres personnes publiques concernées n'auraient été consultées que pour avis sur le projet de plan sans être associées à son élaboration, il ne ressort d'aucune des pièces du dossier qu'elles n'auraient pas été mises à même de participer aux différentes réunions organisées lors de l'élaboration du plan, ainsi que le prévoyait l'arrêté du 6 décembre 2011, ni que des circonstances particulières auraient fait obstacle à ce qu'elles y formulent leurs observations en toute connaissance de cause. Le moyen tiré de ce que la procédure d'élaboration du plan aurait été menée en méconnaissance des dispositions des articles L. 562-3 et R. 562-2 du code de l'environnement relatives à l'association des personnes publiques concernées doit, par suite, être écarté.

En ce qui concerne la légalité interne :

12. En premier lieu, s'il est soutenu que le règlement du plan de prévention approuvé par l'arrêté contesté est clairement différent de celui qui a été soumis à enquête publique, la commune de Barbentane s'abstient d'indiquer les modifications qui auraient été apportées au document à la suite de la consultation du public et qui seraient susceptibles, selon elle, d'en avoir rendu plus difficile la compréhension. Elle ne met ainsi pas la Cour à même d'apprécier la pertinence de son moyen tiré de cette modification. Par ailleurs, si, en réponse à une remarque de la commission d'enquête, le service en charge de l'élaboration du plan a suggéré de modifier la présentation du règlement du plan dans un document destiné aux services instructeurs pour regrouper l'ensemble des règles applicables à chaque zone et ainsi en faciliter la lecture, cette circonstance ne permet pas, à elle seule, d'en déduire que le règlement, tel qu'il a été approuvé par l'autorité préfectorale, serait obscur et susceptible d'être sources d'erreurs. Dans cette mesure, la commune de Barbentane n'est pas fondée à soutenir que le règlement du plan aurait méconnu le principe de valeur constitutionnelle d'accessibilité et d'intelligibilité de la norme. Enfin, il ressort des pièces du dossier que l'article 6 du règlement du plan a défini les cotes de référence dans les termes suivants : " La cote de référence est la cote maximale atteinte par la ligne d'eau au cours d'une crue. / Pour les zones RH, R2, R1B2 et B1, en un lieu donné, la cote de référence est précisée sur la pièce 3 du présent dossier intitulée " -3- Zonage réglementaire et cotes de référence ". Elle correspond à la cote fournie par la modélisation hydraulique et elle est exprimée en mètre rattaché au nivellement général de la France (en m NGF). / En zone RH, lorsqu'aucune cote n'est précisée sur le plan, la cote de référence est fixée forfaitairement à 1m au-dessus de la cote du terrain naturel. / Pour les zones R1 et B1 uniquement, en l'absence de donnée topographique du terrain naturel rattachée au nivellement général de France (en m NFG), la cote de référence peut être déterminée forfaitairement par rapport au niveau du terrain naturel : elle est alors fixée à 1 m au-dessus de la cote du terrain naturel. / Pour la zone BE, la cote de référence est fixée à 0,30 m au-dessus de la cote du terrain naturel ". Ces dispositions, qui ne résultent pas d'une décision arbitraire, déterminent sans ambiguïté et sans confusion la cote de référence selon les zones par la fixation d'une hauteur au-dessus de la cote du terrain naturel. Par suite, elles ne méconnaissaient pas le principe susmentionné d'intelligibilité de la norme.

13. En deuxième lieu, il ressort du rapport de présentation du plan de prévention des risques d'inondation de la basse vallée de la Durance sur le territoire de la commune de Barbentane que la zone inondable a été définie par une analyse croisée entre l'approche hydrogéomorphologique, qui caractérise l'enveloppe maximale de la zone inondable, appelée crue exceptionnelle, et l'approche hydraulique, qui caractérise quantitativement les vitesses et les hauteurs d'eau en chacun des points du territoire étudié. Par analyse comparative des crues historiques et des débits définis par analyse statistique, et au vu des définitions précisées ci-dessus, la crue de référence qui a été retenue pour déterminer l'intensité de l'aléa à prendre en compte pour le risque d'inondation en prévention duquel ont été arrêtées les dispositions du plan a été la crue d'un débit de 5 000 m3/s à Cadarache, correspondant à la fois au débit estimé des plus fortes crues historiques connues et de la crue statistique d'occurrence centennale. En retenant cette méthodologie et en qualifiant l'aléa de référence par rapport à cette crue d'occurrence centennale dont il est établi, par les données collectées et les études menées, que la survenance n'est pas dénuée de probabilité, les autorités préfectorales n'ont pas méconnu les dispositions précitées du II de l'article L. 562-1 du code de l'environnement.

14. Il résulte des dispositions du code de l'environnement citées au point 2 ci-dessus que le classement de terrains par un plan de prévention des risques d'inondation en application du 1° du II de l'article L. 561-2 du code a pour objet de déterminer, en fonction de la nature et de l'intensité du risque auquel ces terrains sont exposés, les interdictions et prescriptions nécessaires à titre préventif, notamment pour ne pas aggraver le risque pour les vies humaines. Lorsque les terrains sont situés derrière un ouvrage de protection, il appartient à l'autorité compétente de prendre en compte non seulement la protection qu'un tel ouvrage est susceptible d'apporter, eu égard notamment à ses caractéristiques et aux garanties données quant à son entretien, mais aussi le risque spécifique que la présence même de l'ouvrage est susceptible de créer, en cas de sinistre d'une ampleur supérieure à celle pour laquelle il a été dimensionné ou en cas de rupture, dans la mesure où la survenance de tels accidents n'est pas dénuée de toute probabilité.

15. S'il est soutenu que le débit d'écoulement retenu de 5 000 m3/s est manifestement erroné dans la mesure où il ne tient pas compte des nombreux ouvrages de protection et notamment des barrages régulateurs construit au cours des cent-vingt dernières années sur les cours d'eau du bassin de la Durance, il ressort du rapport de présentation du plan que si ces ouvrages ont pu modifier le fonctionnement naturel du cours d'eau, ils sont de natures diverses et leur niveau de résistance, qui dépend beaucoup de leur usage, est très mal connu. Par ailleurs plusieurs de ces ouvrages n'ont pas été conçus pour protéger contre le risque d'inondation. Dans cette mesure, le risque qu'ils se trouvent exposés à un risque de rupture, ou de surverse, n'est pas dénuée de toute probabilité. Par suite, c'est sans erreur de fait ni erreur manifeste d'appréciation que, nonobstant la présence de ces ouvrages, les autorités préfectorales ont fixé l'aléa en retenant le débit d'écoulement susmentionné de 5 000 m3/s.

16. En troisième lieu, si, en vertu de l'article 72 de la Constitution, les collectivités territoriales " s'administrent librement par des conseils élus ", chacune d'elles le fait " dans les conditions prévues par la loi ". " Aucune collectivité territoriale ne peut exercer une tutelle sur une autre " et " le représentant de l'Etat, représentant de chacun des membres du Gouvernement, a la charge des intérêts nationaux, du contrôle administratif et du respect des lois ". L'article L. 562-1 du code de l'environnement prévoit que l'État élabore et met en application des plans de prévention des risques naturels prévisibles qui ont notamment pour objet, en vertu des 1° et 2° du II de cet article, de délimiter les zones exposées à ces risques et celles dans lesquelles de tels risques sont susceptibles d'être provoqués ou aggravés par des constructions, des aménagements ou des exploitations et de définir, compte tenu de leur gravité, les mesures de prévention, de protection et de sauvegarde qui doivent être prises dans ces zones. Ces mesures peuvent consister en l'interdiction de tout type de construction, d'ouvrage, d'aménagement ou d'exploitation. Par la faculté qu'elles ouvrent à cette fin au préfet, dont la décision peut être soumise au contrôle du juge, ces dispositions ne portent pas à la libre administration des collectivités territoriales une atteinte qui excèderait la réalisation de l'objectif d'intérêt général poursuivi. Par suite en délimitant, par le plan en litige, les zones urbanisées et celles peu ou pas urbanisées et en fixant à l'intérieur de ces zones des interdictions, prescriptions et mesures de prévention différente, le préfet des Bouches-du-Rhône s'est borné à faire usage des pouvoirs qui lui sont conférés par la loi sans porter une quelconque atteinte au principe de la libre administration des collectivités territoriales.

17. En quatrième lieu, s'il est soutenu que la carte des vitesses et du sens d'écoulement des crues ainsi que la topographie qui a servi de base aux études et notamment aux modèles mathématiques n'ont pas été communiquées à la commission d'enquête, il ne saurait se déduire de cette seule circonstance que le préfet aurait entaché son arrêté d'une erreur de fait ou d'une erreur manifeste d'appréciation.

18. En cinquième lieu, il ressort des pièces du dossier que le plan de prévention en litige a pour objet de prévenir les risques d'inondation résultant des crues de la Durance, son objet principal étant, selon le rapport de présentation " la qualification de l'aléa pour la crue de référence, la maîtrise de l'urbanisation et la réduction de la vulnérabilité des constructions ". Comme l'indique ce même rapport, la prévention du risque d'inondation relève de nombreux outils complémentaires de planification et de gestion et non du seul plan de prévention des risques naturels prévisibles. Ainsi, la circonstance que le plan contesté n'aurait pas entendu traiter du risque d'inondation par ruissellement des eaux pluviales et n'aurait envisagé que le seul risque d'inondation par débordement de la Durance est sans influence sur sa légalité.

19. En sixième lieu, il ressort des pièces du dossier que le PPRI en litige a entendu préserver l'état des terrains situés dans des zones peu ou pas urbanisées, à la fois en raison des risques d'inondations auxquels ils sont exposés et en vue de conserver des zones d'expansion des crues. A cette fin, les zones peu ou pas urbanisées et soumises à un aléa modéré ont été classées en zone orange R1 correspondant aux secteurs d'écoulement des crues. Dans ces zones, le principe est de permettre des extensions limitées des constructions et des aménagements prenant en compte la diminution de vulnérabilité des personnes et des biens exposés.

20. Si les parcelles AT 133 et AT 138 sont situées à proximité de la zone d'activité " Le Grand Roumette " aménagée par la commune, il est constant qu'il s'agit de terrains non bâtis situés en secteur peu urbanisé. Il n'est ni soutenu ni même allégué que ces parcelles ne seraient pas situées dans une zone d'expansion des crues. La préservation de la capacité des champs d'expansion des crues, qui permet de limiter leur impact en aval, présente un caractère d'intérêt général et justifie que puissent être déclarées inconstructibles ou enserrées dans des règles de constructibilité limitée des zones ne présentant pas un niveau d'aléa fort. Dans ces conditions, la seule circonstance invoquée tenant au souhait de la commune d'étendre sa zone d'activité sur ces deux parcelles n'est pas de nature à établir que le classement en zone orange N1 de ces terrains serait entaché d'une erreur manifeste d'appréciation. Le classement de la parcelle AT 64 en zone R1 appartenant à la commune n'est pas davantage entaché d'une telle erreur au seul motif qu'elle serait en continuité avec une zone urbanisée et qu'il serait envisagé d'y construire des logements sociaux.

21. Il résulte de tout ce qui précède que la commune de Barbentane n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande.

Sur les frais liés au litige :

22. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de l'Etat, qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, la somme que la commune de Barbentane demande au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens.

D É C I D E :

Article 1er : La requête de la commune de Barbentane est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à la commune de Barbentane et à la ministre de la transition écologique.

Copie en sera adressée au préfet des Bouches-du-Rhône.

Délibéré après l'audience du 26 mars 2021, où siégeaient :

- M. Pocheron, président de chambre,

- M. Guidal, président assesseur,

- M. Coutier, premier conseiller.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 9 avril 2021.

2

N° 19MA02695

bb


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Marseille
Formation : 7ème chambre
Numéro d'arrêt : 19MA02695
Date de la décision : 09/04/2021
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

Procédure - Pouvoirs et devoirs du juge - Questions générales - Moyens - Moyens inopérants.

Urbanisme et aménagement du territoire - Plans d'aménagement et d'urbanisme.


Composition du Tribunal
Président : M. POCHERON
Rapporteur ?: M. Georges GUIDAL
Rapporteur public ?: M. CHANON
Avocat(s) : GUIN

Origine de la décision
Date de l'import : 20/04/2021
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.marseille;arret;2021-04-09;19ma02695 ?
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