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31/05/2021 | FRANCE | N°19MA04723

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 6ème chambre, 31 mai 2021, 19MA04723


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A... E... a demandé au tribunal administratif de Nîmes d'annuler la décision, en date du 1er août 2017, par laquelle le maire de la commune de Mornas l'a mis en demeure de cesser immédiatement son activité de vente au déballage de type " marché aux puces ".

Par un jugement n° 1702743 du 4 octobre 2019, le tribunal administratif de Nîmes a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête enregistrée le 5 novembre 2019, M. E..., représenté par la SCP

C...

Clabeault, demande à la Cour :

1°) d'annuler ce jugement ;

2°) d'annuler la décision du maire de Mo...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A... E... a demandé au tribunal administratif de Nîmes d'annuler la décision, en date du 1er août 2017, par laquelle le maire de la commune de Mornas l'a mis en demeure de cesser immédiatement son activité de vente au déballage de type " marché aux puces ".

Par un jugement n° 1702743 du 4 octobre 2019, le tribunal administratif de Nîmes a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête enregistrée le 5 novembre 2019, M. E..., représenté par la SCP

C... Clabeault, demande à la Cour :

1°) d'annuler ce jugement ;

2°) d'annuler la décision du maire de Mornas en date du 1er août 2017 ;

3°) de mettre à la charge de la commune de Mornas la somme de 2 000 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- l'arrêté est " inopérant " dès lors qu'il concerne M. E... personne physique et non à la personne morale ;

- le courrier a, à tort, été adressé à M. E... personne physique, et non à la personne morale ;

- l'arrêté vise de façon concomitante l'article L. 310-2 et l'article L. 762-1 du code de commerce ;

- la décision est dépourvue de base matérielle ;

- la décision est entachée d'erreur de droit ; elle a pour effet d'empêcher la SAS RAI d'exercer son activité ; l'article L. 310-2 n'était pas applicable ; l'activité est exercée sur un parc d'exposition au sens du L. 762-1 du code de commerce ;

- la mesure est disproportionnée au regard de la liberté du commerce ;

- le trouble à l'ordre public invoqué n'est pas démontré ;

- l'arrêté méconnaît l'autorité de la chose jugée par la juridiction répressive.

Par un mémoire en défense, enregistré le 6 février 2020, la commune de Mornas conclut au rejet de la requête et à ce qu'il soit mis à la charge de M. E... la somme de 3 000 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- la décision est motivée ; elle n'est pas entachée de contradiction de motifs ;

- c'est à juste titre que la décision a été adressée à M. E... ;

- elle a fait une juste application des dispositions de l'article L. 310-2 du code de commerce ; l'activité n'est pas exercée sur un parc d'exposition ;

- le jugement du tribunal correctionnel de Carpentras du 14 décembre 2017 est sans incidence sur la légalité de la décision.

Par ordonnance en date du 29 mars 2021, la clôture de l'instruction a été fixée au 12 avril 2021.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code général des collectivités territoriales ;

- le code de justice administrative.

La présidente de la Cour a désigné Mme Christine Massé-Degois, présidente assesseure, pour présider les formations de jugement en cas d'absence ou d'empêchement de

M. Guy Fédou, président de la 6ème chambre en application de l'article R. 222-26 du code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. D... Point, rapporteur,

- les conclusions de M. B... Thielé, rapporteur public,

- et les observations de Me C... pour M. A... E....

Considérant ce qui suit :

1. M. E..., gérant de la société par actions simplifiée E... André Immobilier, a organisé sur un terrain appartenant à la SCI E... dans la zone d'activité dite " Les Crousilles Ouest " à Mornas dans le département de Vaucluse, un " marché aux puces ". Par une décision en date du 1er août 2017, le maire de la commune de Mornas ayant constaté que l'activité de vente au déballage dite " Marché aux puces de Mornas " avait dépassé les 60 jours de vente au déballage au cours de l'année 2017, a mis en demeure M. E... de cesser immédiatement cette activité. M. E... fait appel du jugement du 4 octobre 2019 par lequel le tribunal administratif de Nîmes a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cette décision.

Sur les conclusions aux fins d'annulation :

2. Aux termes de l'article L. 310-2 du code de commerce : " I. _ Sont considérés comme ventes au déballage les ventes et rachats de marchandises effectués dans des locaux ou sur des emplacements non destinés à la vente au public ou au rachat de ces marchandises ainsi qu'à partir de véhicules spécialement aménagés à cet effet. Les ventes au déballage ne peuvent excéder deux mois par année civile dans un même local ou sur un même emplacement. Les ventes au déballage de fruits et légumes frais effectuées en période de crise conjoncturelle ne sont pas prises en compte pour le calcul de cette limite. Les ventes au déballage font l'objet d'une déclaration préalable auprès du maire de la commune dont dépend le lieu de la vente (...) III. _ Les dispositions du I ne sont pas applicables aux organisateurs de : 1° Manifestations commerciales comportant des ventes de marchandises au public dans un parc d'exposition (...).". Aux termes de l'article L. 762-1 du code de commerce : " Un parc d'exposition est un ensemble immobilier clos indépendant, doté d'installations et d'équipements appropriés ayant un caractère permanent et non soumis à l'autorisation prévue à l'article L. 752-1, qui accueille, pendant tout ou partie de l'année, des manifestations commerciales ou autres, à caractère temporaire. / Le parc d'exposition est enregistré auprès de l'autorité administrative compétente. Le programme des manifestations commerciales qu'il accueille fait chaque année l'objet d'une déclaration préalable auprès de l'autorité administrative compétente.".

3. M. E... soutient, en premier lieu, d'une part, au titre de la contestation de la légalité externe de l'arrêté du 1er août 2017, que c'est à tort que l'arrêté en cause lui a été adressé. Toutefois, les conditions de notification d'une décision sont sans incidence sur sa légalité.

4. M. E... soutient, d'autre part, que l'arrêté en litige aurait dû être adressé à la SAS E... André Immobilier, organisatrice de l'activité, et non à lui-même en tant que personne physique. Toutefois, le maire de Mornas fait valoir, sans être utilement contredit sur ce point, que l'activité n'a fait l'objet d'aucune déclaration préalable et qu'elle est exercée physiquement sur place par M. E.... A cet égard, il résulte de l'instruction que le maire de Mornas a adressé à M. E... au cours des années 2016 et 2017 plusieurs courriers en recommandé l'invitant à remplir l'obligation de déclaration préalable de vente au déballage. M. E..., qui a également la qualité de gérant de la SAS E... André Immobilier, ne conteste pas l'affirmation du maire de Mornas selon laquelle ces courriers sont restés sans réponse. Par ailleurs, il résulte de l'instruction que dans un courrier du préfet de Vaucluse au maire de Mornas en date du 10 mai 2016 concernant la " nature juridique du marché aux puces de Mornas ", M. E... est identifié comme exerçant l'activité commerciale en cause. Si d'autres documents font état de la participation de la SAS E... André Immobilier à l'organisation du marché aux puces, cette circonstance ne fait pas obstacle à ce que M. E... ait également pris part à titre personnel à l'organisation de ces ventes. Au regard de l'ensemble de ces éléments, le maire de Mornas a pu, à juste titre, considérer que M. E... avait participé à titre personnel à l'organisation des activités visées. Dès lors, le maire de Mornas n'a commis aucune erreur en adressant l'arrêté contesté à M. E... qui, et ainsi qu'il a été dit, est gérant de la société par actions simplifiée E... Immobilier, organisatrice de l'activité visée par l'arrêté en litige.

5. Si M. E... soutient, en deuxième lieu, concernant la motivation de l'arrêté du 1er aout 2017, que sont visées de façon concomitante les dispositions des articles L. 310-2 et L. 762-1 du code de commerce, il n'articule pas de moyen précis concernant la légalité externe de la décision en cause. Il n'est pas fondé à soutenir, à supposer qu'il ait entendu soulever un tel moyen, que la décision en litige en visant ces deux articles du code du commerce serait entachée d'une contradiction de motifs dans la mesure où, notamment, un parc d'exposition qui n'a pas déclaré ses manifestations annuelles au préalable relève du régime de la vente au déballage.

6. Le requérant soutient, en troisième lieu, que l'activité en cause n'est pas une activité de vente au déballage et que les dispositions de l'article L. 310-2 n'étaient pas applicables à sa situation, dès lors qu'elles sont organisées dans un parc d'exposition. Il résulte toutefois de l'instruction que la demande d'enregistrement d'un parc d'exposition déposée par la SAS E... André Immobilier le 14 septembre 2016 a été refusée par le préfet de Vaucluse et par arrêt en date du 26 avril 2021, la cour administrative d'appel de Marseille a confirmé la légalité du refus d'enregistrement opposé par le préfet de Vaucluse à la SAS E... André Immobilier. Par ailleurs, M. E... ne saurait utilement se prévaloir du jugement du tribunal correctionnel de Carpentras du 14 décembre 2017 qui l'a relaxé du chef d'organisation de manifestations publiques de vente sans dépôt du registre d'identification, ainsi que la SAS E... André Immobilier du chef de vente au déballage non déclarée, dès lors que l'autorité de la chose jugée dont sont revêtus les jugements rendus par les tribunaux répressifs s'attache seulement aux constatations matérielles sur lesquelles ils s'appuient, non aux qualifications juridiques qui en découlent. En tout état de cause, le jugement invoqué a trait à des faits survenus au cours de l'année 2016 alors que la décision contestée a trait à des faits survenus au cours de

l'année 2017. Enfin, M. E... ne démontre pas que le " marché aux puces " litigieux pourrait être regardé comme aménagé au sein d'un parc d'exposition et comme échappant ainsi au régime de la vente au déballage prévu par les dispositions de l'article L. 310-2 du code de commerce, les lieux ne pouvant être regardés, au vu des éléments du dossier, comme présentant, au sens des dispositions de l'article L. 762-1 du code de commerce, le caractère d'un ensemble immobilier clos indépendant doté d'installations et d'équipements appropriés à l'organisation de manifestations commerciales. Par suite, M. E... n'est pas fondé à soutenir que le maire de Mornas aurait commis une erreur d'appréciation en qualifiant l'activité de vente au déballage ou une erreur de droit en se fondant sur les dispositions de l'article L. 310-2 du code de commerce pour prendre la mise en demeure attaquée à la date du 1er août 2017.

7. M. E... fait valoir, en quatrième lieu, que le maire de Mornas aurait dû l'inviter à régulariser sa situation et que la décision est entachée d'erreur sur les motifs de fait. Il résulte toutefois de l'instruction que le maire de Mornas a constaté que l'activité de vente au déballage en litige avait dépassé pour l'année 2017 la durée cumulée de deux mois. Ces faits, qui ne sont pas contestés par le requérant, étaient de nature à justifier la mise en demeure de cesser les activités régies par les dispositions de l'article L. 310-2 du code du commerce. Par suite, le moyen doit être écarté.

8. En cinquième lieu, il est constant que l'activité de vente au déballage en litige a dépassé pour l'année 2017 la durée cumulée de deux mois par année civile prévue par les dispositions de l'article L. 310-2 du code de commerce, ainsi que l'a relevé le maire de Mornas dans la décision du 1er août 2017. La décision attaquée, en tant qu'elle constate la méconnaissance des dispositions de l'article L. 310-2 du code de commerce et qu'elle met en demeure le requérant de cesser l'activité ne porte pas en elle-même atteinte à la liberté du commerce. M. E... n'est, par suite, pas fondé à soutenir que la mesure serait disproportionnée. Par ailleurs, le maire de Mornas, pour justifier sa décision, ne s'est pas prévalu de l'existence de troubles à l'ordre public. Le moyen tiré de l'erreur d'appréciation doit dès lors être écarté.

Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

9. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que la commune de Mornas, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, soit condamnée à verser à M. E... la somme qu'il réclame sur ce fondement. Il y a lieu, en revanche, de mettre à la charge de M. E... la somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

D É C I D E :

Article 1er : La requête de M. E... est rejetée.

Article 2 : Il est mis à la charge de M. E... la somme de 2 000 euros à verser à la commune de Mornas au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à la M. A... E... et à la commune de Mornas.

Copie en sera adressée au préfet de Vaucluse.

Délibéré après l'audience du 26 avril 2021, où siégeaient :

- Mme Christine Massé-Degois, présidente assesseure, présidente de la formation de jugement en application de l'article R. 222-26 du code de justice administrative,

- M. Philippe Grimaud, premier conseiller,

- M. D... Point, premier conseiller.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 31 mai 2021.

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N° 19MA04723

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Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Marseille
Formation : 6ème chambre
Numéro d'arrêt : 19MA04723
Date de la décision : 31/05/2021
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

14-02-01 Commerce, industrie, intervention économique de la puissance publique. Réglementation des activités économiques. Activités soumises à réglementation.


Composition du Tribunal
Président : Mme MASSE-DEGOIS
Rapporteur ?: M. François POINT
Rapporteur public ?: M. THIELÉ
Avocat(s) : SCP LEMOINE CLABEAUT

Origine de la décision
Date de l'import : 08/06/2021
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.marseille;arret;2021-05-31;19ma04723 ?
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