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10/06/2021 | FRANCE | N°20MA00064

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 1ere chambre - formation a 3, 10 juin 2021, 20MA00064


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. E... D... a demandé au tribunal administratif de Toulon d'annuler la décision du 31 octobre 2017 par laquelle le maire de la commune de Régusse lui a délivré un certificat d'urbanisme positif en vue de la construction d'une maison individuelle sur un terrain cadastré section D n° 1101, situé 346 chemin du Peirard au lieu-dit Gréouré, sur le territoire de la commune, en tant que ce certificat d'urbanisme est assorti d'une prescription spéciale visant à limiter l'implantation de la construction au nord

de la parcelle, et la décision du 29 novembre 2017 par laquelle le maire ...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. E... D... a demandé au tribunal administratif de Toulon d'annuler la décision du 31 octobre 2017 par laquelle le maire de la commune de Régusse lui a délivré un certificat d'urbanisme positif en vue de la construction d'une maison individuelle sur un terrain cadastré section D n° 1101, situé 346 chemin du Peirard au lieu-dit Gréouré, sur le territoire de la commune, en tant que ce certificat d'urbanisme est assorti d'une prescription spéciale visant à limiter l'implantation de la construction au nord de la parcelle, et la décision du 29 novembre 2017 par laquelle le maire de la commune de Régusse a rejeté son recours gracieux.

Par un jugement n° 1704829 du 3 décembre 2019, le tribunal administratif de Toulon a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête, enregistrée le 7 janvier 2020, M. D..., représenté par la SELARL EBC Avocats, demande à la Cour :

1°) d'annuler ce jugement du 3 décembre 2019 du tribunal administratif de Toulon ;

2°) de faire droit à sa demande de première instance ;

3°) d'enjoindre à la commune de Régusse de ré-instruire sa demande de certificat d'urbanisme dans un délai de quinze jours ;

4°) de mettre à la charge de la commune de Régusse la somme de 1 500 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Il soutient que :

- le jugement attaqué ne reprend pas dans ses motifs les dispositions dont le tribunal a fait application ;

- le tribunal s'est fondé sur des éléments qui ne figuraient pas dans le dossier de première instance, en l'occurrence l'existence d'un massif boisé et d'un boisement sur la parcelle ;

- le maire de la commune de Régusse s'est à tort estimé lié par l'avis du représentant de l'Etat ;

- la décision attaquée n'est pas motivée en méconnaissance de l'article L. 424-3 du code de l'urbanisme car elle n'explique pas les raisons pour lesquelles la possibilité d'implanter la construction doit être limitée ;

- la décision attaquée est entachée d'erreur de droit et d'erreur manifeste d'appréciation au regard de l'article L. 111-3 du code de l'urbanisme ;

- son terrain est situé dans les parties urbanisées de la commune.

La procédure a été communiquée à la commune de Régusse, qui n'a pas produit de mémoire en défense ;

Une ordonnance du 15 mars 2021 a fixé la clôture de l'instruction ce même jour, en application de l'article R. 613-1 du code de justice administrative.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code de l'urbanisme ;

- le code de justice administrative.

La présidente de la Cour a désigné M. C... pour présider la formation de jugement en application de l'article R. 22226 du code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. C...,

- et les conclusions de Mme Giocanti, rapporteure publique,

Considérant ce qui suit :

1. M. D... est propriétaire d'une parcelle cadastrée section D n° 1101, 346 chemin du Peyrard, au lieu-dit Greoure, sur le territoire de la commune de Régusse. Il a déposé le 20 septembre 2017 une demande de certificat d'urbanisme pour savoir si ce terrain peut être utilisé pour la réalisation d'une opération consistant dans la construction d'une maison individuelle. Le maire de la commune de Régusse lui a délivré le 31 octobre 2017 un certificat d'urbanisme indiquant que l'opération est réalisable et que Le pétitionnaire devra implanter la construction sur la partie nord du terrain, entre la voie communale et la limite sud de la parcelle voisine cadastrée section D n° 558. M. D... a demandé au tribunal administratif de Toulon d'annuler ce certificat d'urbanisme en tant qu'il limite la possibilité de construire au nord de sa parcelle. Par un jugement du 3 décembre 2019, dont le requérant relève appel, le tribunal a rejeté sa demande.

Sur la régularité du jugement :

2. En premier lieu, aux termes de l'article R. 741 2 du code de justice administrative " La décision (...) contient le nom des parties, l'analyse des conclusions et mémoires ainsi que les visas des dispositions législatives ou réglementaires dont elle fait application. (...) ".

3. Si les visas du jugement attaqué font mention sans davantage de précision du code de l'urbanisme et du code général des collectivités territoriales, les motifs de ce jugement reproduisent le texte des dispositions pertinentes du code de l'urbanisme dont le tribunal, en l'occurrence, a fait application. Le jugement satisfait ainsi aux dispositions précitées.

4. En deuxième lieu, si le requérant soutient que le tribunal aurait pris en compte des éléments non débattus par les parties, il ressort des pièces du dossier qu'il s'est borné, conformément à son office, à s'appuyer sur les plans cadastraux et les photographies produits par le requérant dans sa demande de première instance pour juger que la parcelle en litige est boisée et voisine de secteurs forestiers, et se trouve partiellement en dehors des parties urbanisées de la commune.

Sur le bien-fondé du jugement :

5. En premier lieu, aux termes des dispositions de l'article L. 422-5 du code de l'urbanisme: " Lorsque le maire ou le président de l'établissement public de coopération intercommunale est compétent, il recueille l'avis conforme du préfet si le projet est situé : / a) Sur une partie du territoire communal non couverte par une carte communale, un plan local d'urbanisme ou un document d'urbanisme en tenant lieu ; ". Ces dispositions, relatives au régime des autorisations d'urbanisme et des déclarations préalables, ne sont pas applicables aux certificats d'urbanisme. Aucune autre disposition ne subordonne la délivrance d'un certificat d'urbanisme à un avis conforme du préfet. Il s'ensuit que s'il est loisible au maire ou, par délégation, au président de l'établissement public de coopération intercommunale de recueillir l'avis du préfet sur une demande de certificat d'urbanisme dont il est saisi, il n'est toutefois pas lié par cet avis.

6. Dans sa réponse au recours gracieux formé par le requérant contre le certificat d'urbanisme contesté, le maire de la commune de Régusse précise : " les décisions d'urbanisme sont prises par le préfet au nom de l'État, par conséquent, je n'ai pas la faculté de m'opposer voire de modifier la décision qui vous a été transmise. ". Si le certificat d'urbanisme a été en réalité pris au nom de la commune, dont le plan d'occupation des sols était caduc, il ressort des termes employés dans sa lettre que le maire de la commune de Régusse n'a pas porté sa propre appréciation mais s'est estimé lié, à tort, par l'avis du préfet. Le maire a ainsi commis une erreur de droit, qui si elle affecte la légalité de la totalité du code de l'urbanisme, n'en affecte pas moins la légalité de la partie divisible de ce certificat d'urbanisme dont le requérant demande l'annulation.

7. En deuxième lieu, l'article L. 410-1 du code de l'urbanisme dispose : " Le certificat d'urbanisme, en fonction de la demande présentée : a) Indique les dispositions d'urbanisme, les limitations administratives au droit de propriété et la liste des taxes et participations d'urbanisme applicables à un terrain ;b) Indique en outre, lorsque la demande a précisé la nature de l'opération envisagée ainsi que la localisation approximative et la destination des bâtiments projetés, si le terrain peut être utilisé pour la réalisation de cette opération ainsi que l'état des équipements publics existants ou prévus. ". Aux termes de l'article R. 410-14 de ce code : " Dans les cas prévus au b de l'article L. 410-1, lorsque la décision indique que le terrain ne peut être utilisé pour la réalisation de l'opération mentionnée dans la demande, ou lorsqu'elle est assortie de prescriptions, elle doit être motivée. ".

8. D'une part, le certificat d'urbanisme ne mentionne pas les considérations de fait pour lesquelles le pétitionnaire devra implanter la construction sur la partie nord du terrain, entre la voie communale et la limite sud de la parcelle voisine cadastrée section D n° 558. D'autre part, si la réponse du maire de la commune de Régusse précise que les constructions ne peuvent être autorisées que dans les parties actuellement urbanisées de la commune, elle se borne à citer les dispositions des articles L. 111-3 et L. 111-4 du code de l'urbanisme, sans préciser les considérations de fait pour lesquelles il estime que la construction ne peut pas être implantée sur la partie sud de la parcelle. Cette prescription n'est donc pas motivée, en méconnaissance de l'article R. 410-14 du code de l'urbanisme précité. Contrairement à ce qu'a jugé le tribunal, cette illégalité affecte une partie divisible du certificat d'urbanisme et doit en entraîner l'annulation.

9. Pour l'application de l'article L. 600-4-1, aucun autre moyen n'est susceptible, en l'état du dossier, de fonder l'annulation de la décision attaquée.

10. Il résulte de ce qui précède que M. D... est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Toulon a rejeté sa demande et à demander l'annulation de ce jugement, du certificat d'urbanisme du 31 octobre 2017 en tant qu'il prescrit que le pétitionnaire devra implanter la construction sur la partie nord du terrain, entre la voie communale et la limite sud de la parcelle voisine cadastrée section D n° 558, et de la décision du 29 novembre 2017 par laquelle a été rejeté son recours gracieux en tant qu'il impose une prescription illégale.

Sur les conclusions aux fins d'injonction :

11. Il y a lieu d'enjoindre au maire de la commune de Régusse de réexaminer la demande de certificat d'urbanisme présentée par M. D... dans un délai de deux mois à compter de la notification du présent arrêt.

Sur les frais liés au litige :

12. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de la commune de Régusse la somme de 1 500 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

D E C I D E :

Article 1er : Le jugement du 3 décembre 2019 du tribunal administratif de Toulon est annulé.

Article 2 : Le certificat d'urbanisme du 31 octobre 2017 est annulé en tant qu'il prescrit que le pétitionnaire devra implanter la construction sur la partie nord du terrain, entre la voie communale et la limite sud de la parcelle voisine cadastrée section D n° 558.

Article 3 : La décision du 29 novembre 2017 par laquelle le maire de la commune de Régusse a rejeté le recours gracieux du requérant en ce que le certificat d'urbanisme impose une prescription illégale est annulée.

Article 4 : Il est enjoint à la commune de Régusse de procéder au réexamen de la demande de certificat d'urbanisme présentée par M. D... dans un délai de deux mois à compter de la notification du présent arrêt.

Article 5 : La commune de Régusse versera à M. D... la somme de 1 500 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 6 : Le présent arrêt sera notifié à M. E... D... et à la commune de Régusse.

Délibéré après l'audience du 27 mai 2021 où siégeaient :

- M. C..., président par intérim, présidant la formation de jugement en application de l'article R. 222-26 du code de justice administrative,

- Mme B..., première conseillère,

- Mme A..., première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe, 10 juin 2021.

2

N° 20MA00064

nb


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Marseille
Formation : 1ere chambre - formation a 3
Numéro d'arrêt : 20MA00064
Date de la décision : 10/06/2021
Type d'affaire : Administrative

Analyses

68-025-03 Urbanisme et aménagement du territoire. Certificat d'urbanisme. Contenu.


Composition du Tribunal
Président : M. PORTAIL
Rapporteur ?: M. Philippe PORTAIL
Rapporteur public ?: Mme GIOCANTI
Avocat(s) : SELARL ENARD-BAZIRE COLLIOU

Origine de la décision
Date de l'import : 15/06/2021
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.marseille;arret;2021-06-10;20ma00064 ?
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