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14/06/2021 | FRANCE | N°21MA01951

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 14 juin 2021, 21MA01951


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La commune de Vignale a demandé au juge des référés du tribunal administratif de Bastia, sur le fondement de l'article R. 541-1 du code de justice administrative, de condamner la SARL Via Corsa à lui verser la somme de 40 176,82 euros à titre de provision sur les sommes qui lui sont dues pour la déconstruction de la structure en béton armé de deux aires de stationnement.

Par une ordonnance n° 2100366 du 30 avril 2021, le juge des référés du tribunal administratif de Bastia a fait droit à cette

demande et a mis à la charge de la SARL Via Corsa les frais d'expertise.

Procéd...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La commune de Vignale a demandé au juge des référés du tribunal administratif de Bastia, sur le fondement de l'article R. 541-1 du code de justice administrative, de condamner la SARL Via Corsa à lui verser la somme de 40 176,82 euros à titre de provision sur les sommes qui lui sont dues pour la déconstruction de la structure en béton armé de deux aires de stationnement.

Par une ordonnance n° 2100366 du 30 avril 2021, le juge des référés du tribunal administratif de Bastia a fait droit à cette demande et a mis à la charge de la SARL Via Corsa les frais d'expertise.

Procédure devant la Cour :

Par une requête, enregistrée le 21 mai 2021, la SARL Via Corsa, représentée par Me A... de la Selarl Racine, demande à la Cour d'ordonner, sur le fondement de l'article R. 541-6 du code de justice administrative, le sursis à l'exécution de cette ordonnance du juge des référés du tribunal administratif de Bastia.

Elle soutient que :

- l'exécution de l'ordonnance attaquée risque d'entrainer des conséquences difficilement réparables en ce qu'elle compromettrait toute possibilité d'expertise complémentaire ;

- il existe un moyen sérieux d'annulation de l'ordonnance tiré de ce que le rapport d'expertise comporte de nombreuses carences et qu'elle n'a pas eu l'opportunité de les dénoncer lors de la procédure devant le tribunal administratif.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code civil ;

- le code de justice administrative.

Vu la décision du 1er septembre 2020 par laquelle la présidente de la cour administrative d'appel de Marseille a désigné M. Guy Fédou, président de la 6ème chambre, pour juger les appels formés contre les décisions rendues par les juges des référés des tribunaux du ressort.

Considérant ce qui suit :

1. Dans le cadre de la création de deux aires de stationnement, la commune de Vignale a passé, à l'issue d'une procédure adaptée, un marché public de travaux. Par un acte d'engagement du 15 janvier 2013, le marché a été confié à la SARL Via Corsa pour un montant de 187 758 euros toutes taxes comprises. La réception des travaux a été prononcée sans réserves le 5 janvier 2015. En 2018, lors des opérations de préparation de l'extension de cette aire de stationnement, la société attributaire du marché a relevé la non-conformité des fondations de l'ouvrage existant construit par la SARL Via Corsa. Par une requête du 10 juillet 2018, la commune de Vignale a saisi le tribunal administratif de Bastia afin d'obtenir la désignation d'un expert, lequel a déposé son rapport le 25 novembre 2019.

2. La SARL Via Corsa relève appel de l'ordonnance du 30 avril 2021 par laquelle le juge des référés du tribunal administratif de Bastia a reconnu sa responsabilité décennale et l'a condamnée à verser à la commune de Vignale la somme de 40 176,82 euros sur le fondement de l'article R. 541-1 du code de justice administrative.

3. Aux termes de l'article R. 541-6 du code de justice administrative : " Le sursis à l'exécution d'une ordonnance du juge des référés accordant une provision peut être prononcé par le juge d'appel ou par le juge de cassation si l'exécution de cette ordonnance risque d'entraîner des conséquences difficilement réparables et si les moyens énoncés à son encontre paraissent, en l'état de l'instruction, sérieux et de nature à justifier son annulation et le rejet de la demande. ". Aux termes de l'article R. 222-1 du même code : " (...) les présidents des formations de jugement des cours peuvent (...), par ordonnance, rejeter les conclusions à fin de sursis à exécution d'une décision juridictionnelle frappée d'appel (...). ".

4. En premier lieu, aux termes des dispositions de l'article R. 621-13 du code de justice administrative : " Lorsque l'expertise a été ordonnée sur le fondement du titre III du livre V, le président du tribunal ou de la cour (...) en fixe les frais et honoraires par une ordonnance prise conformément aux dispositions des articles R. 621-11 et R. 761-4. Cette ordonnance désigne la ou les parties qui assumeront la charge de ces frais et honoraires. Elle est exécutoire dès son prononcé, et peut être recouvrée contre les personnes privées ou publiques par les voies de droit commun. Elle peut faire l'objet, dans le délai d'un mois à compter de sa notification, du recours prévu à l'article R. 761-5. / Dans le cas où les frais d'expertise mentionnés à l'alinéa précédent

sont compris dans les dépens d'une instance principale, la formation de jugement statuant sur cette instance peut décider que la charge définitive de ces frais incombe à une partie autre que celle qui a été désignée par l'ordonnance mentionnée à l'alinéa précédent ou par le jugement rendu sur un recours dirigé contre cette ordonnance. (...).". En vertu de l'article R. 761-1 du même code : " Les dépens comprennent les frais d'expertise, d'enquête et de toute autre mesure d'instruction dont les frais ne sont pas à la charge de l'Etat. / Sous réserve de dispositions particulières, ils sont mis à la charge de toute partie perdante sauf si les circonstances particulières de l'affaire justifient qu'ils soient mis à la charge d'une autre partie ou partagés entre les parties. (...). ".

5. Il résulte de ces dispositions qu'il appartient à la juridiction de se prononcer d'office sur la charge définitive des frais d'expertise et de déterminer qui en assumera la charge. Le juge du référé provision était dès lors, ainsi que les dispositions ci-dessus le prescrivent, tenu de se prononcer sur la dévolution des frais d'expertise afin d'épuiser son pouvoir juridictionnel. La SARL Via Corsa n'est dès lors pas fondée à soutenir que l'ordonnance attaquée aurait à cet égard statué ultra petita.

6. En deuxième lieu, si la société requérante soutient que l'expertise ordonnée par le président du tribunal administratif de Bastia, à la demande de la commune de Vignale et au vu de laquelle a été rendue l'ordonnance n'a pas eu un caractère contradictoire, il résulte de l'instruction et notamment du rapport d'expertise, d'une part, qu'elle était présente aux trois opérations d'expertise et qu'elle a pu produire ses observations par trois dires des 18 janvier 2019, 29 octobre 2019 et 18 novembre 2019, auxquels l'expert a répondu dans la dernière partie de son rapport et, d'autre part, que l'expert a mis au contradictoire un pré-rapport en date du 2 novembre 2019 afin de recueillir les observations des parties, auxquelles il a répondu alors qu'aucune disposition ne lui imposait de discuter des conclusions de son rapport avec les parties qui avaient participé aux opérations d'expertise. Enfin, si la société requérante soutient qu'elle n'a pas été en mesure de formuler ses observations en première instance, il résulte des visas de la décision attaquée du juge des référés du tribunal administratif de Bastia que " la requête a été communiquée à la SARL Via Corsa qui n'a pas produit de mémoire ". Dès lors, le moyen tiré du non-respect du principe du contradictoire manque en fait et ne peut qu'être écarté.

7. En troisième lieu, si la société requérante soutient que des solutions de reprise sans démolition totale de l'ouvrage étaient parfaitement envisageables, il résulte toutefois de l'instruction, et notamment du rapport d'expertise, que les parties n'ont pas saisi la possibilité offerte par l'expert de proposer des solutions alternatives, notamment des études de confortement, validées par un bureau de contrôle, proposition qu'il avait formulée dans son pré-rapport du 2 novembre 2019 avant de constater, dans son rapport final, qu'il n'avait pas été informé de la saisine d'un BET et/ou d'un bureau de contrôle. A défaut, l'expert a estimé par un chiffrage détaillé que le montant de la démolition de l'ouvrage était de 40 176,82 euros, somme que la commune a réclamée et qui lui a été accordée en première instance. Dès lors, la société requérante relevant en outre que le marché que la commune de Vignale a passé pour la déconstruction de l'ouvrage s'est élevé à la somme de 97 500 euros, soit plus du double du montant estimé par l'expert pour la démolition de l'ouvrage en cause, le moyen doit être écarté.

8. En quatrième lieu, alors que la société requérante se borne à invoquer les carences qui auraient, selon elle, affecté les opérations conduites par l'expert, ainsi que le caractère prétendument incomplet ou entaché d'inexactitudes de son rapport, ces seules circonstances ne sont pas de nature à justifier, en l'état de l'instruction et compte tenu de ce qui a été rappelé aux points 6 et 7 de la présente décision, le sursis à exécution de l'ordonnance attaquée.

9. Il résulte de ce qui précède que l'une au moins des conditions posées par l'article R. 541-6 du code de justice administrative n'est pas satisfaite. Par suite, et sans qu'il soit besoin de rechercher si les conséquences de l'exécution de l'ordonnance du juge des référés du tribunal administratif de Bastia risqueraient d'entraîner des conséquences difficilement réparables, la SARL Via Corsa n'est pas fondée à demander que soit ordonné son sursis à exécution.

ORDONNE :

Article 1er : La requête présentée par la SARL Via Corsa est rejetée.

Article 2 : La présente ordonnance sera notifiée à la SARL Via Corsa et à la commune de Vignale.

Fait à Marseille, le 14 juin 2021.

2

N° 21MA01951


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Marseille
Numéro d'arrêt : 21MA01951
Date de la décision : 14/06/2021
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

54-03-015-05 Procédure. Procédures de référé autres que celles instituées par la loi du 30 juin 2000. Référé-provision. Sursis de l'ordonnance accordant la provision.


Composition du Tribunal
Avocat(s) : SELARL RACINE

Origine de la décision
Date de l'import : 22/06/2021
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.marseille;arret;2021-06-14;21ma01951 ?
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