La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

01/10/2021 | FRANCE | N°19MA00902

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 7ème chambre, 01 octobre 2021, 19MA00902


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B... A... a demandé au tribunal administratif de Montpellier d'annuler pour excès de pouvoir la décision du 5 janvier 2017 par laquelle le commandant du groupement de gendarmerie mobile de Nîmes lui a infligé la sanction de 15 jours d'arrêts et d'enjoindre au ministre de l'intérieur, dans un délai de 15 jours, de retirer de son dossier toute pièce relative à cette sanction, de la détruire, et d'en donner attestation.

Par un jugement n° 1701404 du 28 décembre 2018, le tribunal administratif d

e Montpellier a rejeté cette demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requêt...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B... A... a demandé au tribunal administratif de Montpellier d'annuler pour excès de pouvoir la décision du 5 janvier 2017 par laquelle le commandant du groupement de gendarmerie mobile de Nîmes lui a infligé la sanction de 15 jours d'arrêts et d'enjoindre au ministre de l'intérieur, dans un délai de 15 jours, de retirer de son dossier toute pièce relative à cette sanction, de la détruire, et d'en donner attestation.

Par un jugement n° 1701404 du 28 décembre 2018, le tribunal administratif de Montpellier a rejeté cette demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête enregistrée le 26 février 2019 et un mémoire enregistré le 25 février 2020, M. A..., représenté par Me Maumont, demande à la Cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Montpellier du 28 décembre 2018 ;

2°) d'annuler la décision du 5 janvier 2017 par laquelle le commandant de groupement de gendarmerie mobile de Nîmes, lui a infligé la sanction de 15 jours d'arrêt ;

3°) d'enjoindre au ministre de l'intérieur, dans un délai d'un mois suivant la notification de la décision à intervenir, de retirer de tous ses dossiers administratifs toute pièce relative à ladite sanction, de la détruire et de lui en donner attestation ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 6 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- le jugement n'est pas motivé en droit ;

- le tribunal a uniquement procédé à un contrôle des faits et le jugement manque de motivation en droit ;

- le rejet du moyen tiré du défaut de régularité de la procédure disciplinaire révèle d'une erreur de droit ;

- l'irrégularité du rappel à la loi notifiée à M. A... entache la régularité de la procédure disciplinaire ;

- l'autorité militaire a entaché sa décision d'une erreur d'appréciation ;

- la sanction est disproportionnée eu égard à la gravité des faits en cause.

Par un mémoire en défense enregistré le 5 février 2020, la ministre des armées conclut au rejet de la requête.

Elle soutient que les moyens soulevés par M. A... ne sont pas fondés.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code de la défense ;

- la loi n° 79-587 du 11 juillet 1979 ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Prieto,

- les conclusions de M. Chanon, rapporteur public,

- et les observations de Me Moumni, représentant M. A....

Considérant ce qui suit :

1. Dans la nuit du 9 au 10 avril 2015, alors qu'il se trouvait avec trois autres militaires, M. A..., sous-officier de gendarmerie, s'est saisi d'un extincteur dans un parking public d'Ajaccio et, après l'avoir percuté, a déversé son contenu, par plaisanterie, dans le poste de police du cantonnement mobile d'Aspretto où il était affecté dans le cadre de la mission en cours. Il s'est, par la suite, excusé auprès du gérant du parking et a remboursé celui-ci du montant de la perte. Le gérant a retiré le 10 novembre 2015 une plainte initiale pour vol mais M. A... a fait l'objet d'un rappel à la loi par le procureur de la République le 17 novembre 2015. Par un jugement du 28 décembre 2018, le tribunal administratif de Montpellier a rejeté la demande de M. A... visant à annuler la sanction disciplinaire de 15 jours d'arrêts que lui a infligée le commandant de la gendarmerie mobile de Nîmes, autorité militaire de 1er niveau, en raison de ces faits. M. A... relève appel de ce jugement.

Sur la régularité du jugement :

En ce qui concerne le moyen tiré de l'absence de motivation en droit du jugement :

2. Si M. A... soutient que le tribunal administratif s'est borné à procéder à un contrôle des faits tout en omettant de motiver sa décision en droit, il ressort de sa lecture que le jugement contesté, au-delà de l'analyse des faits, se fonde également sur l'application des dispositions de l'article L. 4137-2 du code de la défense ainsi que sur les textes et principes relatifs à l'action disciplinaire, enfin sur ceux gouvernant l'indépendance des procédures administrative et pénale. Le moyen invoqué doit par suite être écarté comme manquant en fait.

Sur le bien-fondé du jugement :

En ce qui concerne le moyen tiré du défaut de régularité de la procédure disciplinaire :

3. Aux termes de l'article L. 4137-1 du code de la défense qui dispose que : " sans préjudice des sanctions pénales qu'ils peuvent entraîner, les fautes ou manquements commis par les militaires les exposent : 1°) A des sanctions disciplinaires prévues à l'article L. 4137-2 (...) ".

4. Compte tenu de l'indépendance des procédures disciplinaire et judiciaire, le fait que la sanction contestée ne vise pas le rappel à la loi n'a aucune incidence et, au demeurant, ce dernier figure bien au dossier disciplinaire dont M. A... a été mis à même de prendre connaissance. Par ailleurs et pour le même motif, l'irrégularité de la notification de ce rappel à la loi à l'intéressé, à la supposer établie, n'a aucune influence sur la régularité de la procédure disciplinaire.

5. M. A... reproche également à l'autorité militaire d'avoir utilisé la procédure judiciaire avant d'en être autorisé par le procureur de la République, en méconnaissance de l'article R. 156 du code de procédure pénale alors applicable. En l'espèce, les agissements de M. A... ont fait l'objet d'une demande de sanction disciplinaire le 15 avril 2016, la demande d'autorisation d'utiliser la procédure judiciaire a été faite par un courrier du 20 avril 2016 et le procureur de la République a délivré l'autorisation sollicitée par une lettre du 26 septembre 2016, en annexant à cette autorisation une copie de la procédure judiciaire. Toutefois, et à l'évidence, le signataire de la demande de sanction disposait déjà de la procédure judiciaire au regard en particulier des éléments extrêmement précis sur le déroulement de la soirée festive du 9 avril 2015, notamment en termes horaires, et de la référence aux vidéos de surveillance du parking jointes. La demande de sanction est ainsi fondée sur la procédure pénale. Il résulte d'ailleurs d'un bordereau d'envoi du directeur départemental de la sécurité publique de la Corse-du-Sud du 10 mars 2016 que la procédure judiciaire semble avoir été transmise au commandant de groupement de gendarmerie de Lodève en même temps que le rappel à la loi pour signature par l'intéressé. Comme soutenu, la procédure judiciaire a donc bien été utilisée avant l'autorisation du procureur de la République. Cependant cette autorisation était obtenue, et les pièces judiciaires régulièrement communiquées, lorsque l'intéressé a été informé, le 6 octobre 2016, de son droit à communication du dossier disciplinaire, lequel comprend la procédure pénale. Dans ces conditions et d'une part, il ne ressort pas des pièces du dossier que le vice de procédure aurait été susceptible d'exercer en l'espèce une influence sur le sens de la décision en litige. D'autre part, dès lors que l'autorisation était intervenue à la date de la consultation de son dossier par le militaire, il ressort de l'ensemble des circonstances de l'espèce que celui-ci n'a pas été effectivement privé d'une garantie. Le moyen pourra ainsi être écarté.

En ce qui concerne le moyen tiré de l'erreur de fait et de l'erreur d'appréciation des faits :

6. Les faits reprochés à M. A... d'une appropriation frauduleuse de l'extincteur et de sa percussion à l'intérieur de l'enceinte du casernement militaire pour des raisons festives sont mentionnés, tout comme la valeur de ses états de service antérieurs, dans les motifs principaux de la décision portant sanction disciplinaire. Par voie de conséquence, le moyen invoqué tiré de l'erreur de fait doit être écarté.

7. Il appartient au juge de l'excès de pouvoir, saisi de moyens en ce sens, de rechercher si les faits reprochés à un agent public ayant fait l'objet d'une sanction disciplinaire constituent des fautes de nature à justifier une sanction et si la sanction retenue est proportionnée à la gravité de ces fautes.

8. Les faits reprochés, reconnus par le requérant, révèlent des graves manquements en termes de discernement et de dignité de la part de l'intéressé, qui exerce au surplus des fonctions d'encadrement, et étaient de nature à justifier légalement une sanction.

En ce qui concerne le moyen tiré de la disproportion de la sanction :

9. Aux termes de l'article L. 4137-2 du code de la défense : " Les sanctions disciplinaires applicables aux militaires sont réparties en trois groupes : / 1° Les sanctions du premier groupe sont : / a) L'avertissement ; / b) La consigne ; / c) La réprimande ; / d) Le blâme ; / e) Les arrêts ; / f) Le blâme du ministre ; / (...) ".

10. Dans les circonstances de l'espèce, eu égard à la nature de la faute ainsi commise, qui relève, ainsi qu'il a été dit au point 7, de la méconnaissance des devoirs de discernement, de dignité et d'exemplarité, l'autorité militaire compétente a agi de manière proportionnée en infligeant au maréchal des logis chef A..., compte tenu de ce manquement et de la nature de ses responsabilités d'encadrement, et en dépit de l'absence de sanctions antérieures et des brillants états de service de l'intéressé, la sanction de premier niveau de quinze jours d'arrêts.

11. Il résulte de tout ce qui précède que M. A... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Montpellier a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision du 5 janvier 2017 du commandant du groupement de gendarmerie mobile de Nîmes. Par voie de conséquence, ses conclusions à fin d'injonction doivent également être rejetées.

Sur les frais liés au litige :

12. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de l'Etat, qui n'est pas partie perdante à l'instance, une somme quelconque au titre des frais exposés par le requérant.

D É C I D E :

Article 1er : La requête de M. A... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. B... A... et à la ministre des armées.

Copie en sera adressée au ministre de l'intérieur.

Délibéré après l'audience du 17 septembre 2021, où siégeaient :

- M. Pocheron, président de chambre,

- M. Guidal, président assesseur,

- M. Prieto, premier conseiller.

Rendu public par mise à disposition au greffe, le 1er octobre 2021.

N° 19MA00902 5

fa


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Marseille
Formation : 7ème chambre
Numéro d'arrêt : 19MA00902
Date de la décision : 01/10/2021
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

36-09-04 Fonctionnaires et agents publics. - Discipline. - Sanctions.


Composition du Tribunal
Président : M. POCHERON
Rapporteur ?: M. Gilles PRIETO
Rapporteur public ?: M. CHANON
Avocat(s) : MDMH - MAUMONT MOUMNI AVOCATS ASSOCIES

Origine de la décision
Date de l'import : 12/10/2021
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.marseille;arret;2021-10-01;19ma00902 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award