La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

25/01/2022 | FRANCE | N°21MA03953

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 9ème chambre, 25 janvier 2022, 21MA03953


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme C... B... née D... a demandé au tribunal administratif de Montpellier d'annuler la décision du 11 juin 2019 par lequel le préfet de l'Hérault a rejeté sa demande de délivrance d'un document de circulation pour étranger mineur en faveur de sa petite-fille A... D....

Par jugement n° 1903929 du 26 mars 2021, le tribunal administratif de Montpellier a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

I- Par une requête enregistrée sous le n° 21MA03953 le 22 septembre 2021 et par un m

moire complémentaire enregistré le 4 novembre 2021, Mme B..., représentée par Me Bonomo-Fay, d...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme C... B... née D... a demandé au tribunal administratif de Montpellier d'annuler la décision du 11 juin 2019 par lequel le préfet de l'Hérault a rejeté sa demande de délivrance d'un document de circulation pour étranger mineur en faveur de sa petite-fille A... D....

Par jugement n° 1903929 du 26 mars 2021, le tribunal administratif de Montpellier a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

I- Par une requête enregistrée sous le n° 21MA03953 le 22 septembre 2021 et par un mémoire complémentaire enregistré le 4 novembre 2021, Mme B..., représentée par Me Bonomo-Fay, demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement du 26 mars 2021 du tribunal administratif de Montpellier ;

2°) d'annuler l'arrêté du 11 juin 2019 du préfet de l'Hérault :

3°) d'enjoindre au préfet de l'Hérault à titre principal, de délivrer à Aïcha D... un document de circulation pour mineur, à titre subsidiaire de procéder à un réexamen de sa demande au titre de sa vie privée et familiale et au regard du pouvoir discrétionnaire du préfet ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat le versement à Me Bonomo-Fay de la somme de 1 500 euros sur le fondement des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991.

Elle soutient que :

- le refus de délivrance méconnaît le b) de l'article 10 de l'accord franco-algérien ;

- il méconnaît l'article 3-1 de la convention internationale des droits de l'enfant.

Par un mémoire en défense enregistré le 4 novembre 2021, le préfet de l'Hérault conclut au rejet de la requête.

Il fait valoir que les moyens de la requête ne sont pas fondés en s'en remettant à ses écritures de première instance.

Mme D... a été admise au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par décision du 9 juillet 2021 du bureau d'aide juridictionnelle du tribunal judiciaire de Marseille.

II. Par une requête enregistrée sous le n° 21MA03954 le 22 septembre 2021 et par un mémoire complémentaire enregistré le 4 novembre 2021, Mme B..., représentée par Me Bonomo-Fay, demande à la Cour :

1°) d'ordonner, sur le fondement de l'article R. 811-17 du code de justice administrative, le sursis à exécution du jugement du 26 mars 2021 du tribunal administratif de Montpellier ;

2°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 500 euros à verser à Me Bonomo-Fay sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991.

Elle soutient que :

- l'exécution du jugement comporte des conséquences difficilement réparables ;

- les moyens soulevés dans sa requête au fond sont sérieux.

Par un mémoire en défense enregistré le 4 novembre 2021, le préfet de l'Hérault conclut au rejet de la requête.

Il fait valoir que les moyens de la requête ne sont pas fondés.

Mme D... a été admise au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par décision du 9 juillet 2021 du bureau d'aide juridictionnelle du tribunal judiciaire de Marseille.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

A été entendu au cours de l'audience publique le rapport de Mme Carassic.

Considérant ce qui suit :

1. Les requêtes n° 21MA03953 et n° 210MA03954 présentées par Mme B... sont dirigées contre le même jugement et ont fait l'objet d'une instruction commune. Il y a lieu de les joindre pour statuer par un seul arrêt.

2. Mme B... née D..., alors de nationalité algérienne, a demandé au préfet de l'Hérault un document de circulation pour enfant mineur au bénéfice de sa petite-fille, A... D..., née le 19 novembre 2003. Par la décision en litige du 11 juin 2019, le préfet a rejeté sa demande. La requérante relève appel du jugement du 26 mars 2021 par lequel le tribunal administratif de Montpellier a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cette décision et demande qu'il soit sursis à son exécution.

Sur les conclusions aux fins d'annulation :

3. Aux termes de l'article 10 de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 relatif à la circulation, à l'emploi et au séjour en France des ressortissants algériens et de leurs familles : " Les mineurs algériens de dix-huit ans résidant en France, qui ne sont pas titulaires d'un certificat de résidence reçoivent sur leur demande un document de circulation pour étrangers mineurs qui tient lieu de visa lorsqu'ils relèvent de l'une des catégories mentionnées ci-après :/ (...) b) Le mineur algérien qui justifie par tous moyens avoir sa résidence habituelle en France depuis qu'il a atteint au plus l'âge de dix ans et pendant une durée d'au moins six ans (...) ".

4. Il ressort des pièces du dossier et notamment des certificats de scolarité produits par la requérante que la jeune A... est arrivée en France le 16 mars 2012, soit avant l'âge de 10 ans. Il ressort également des pièces du dossier qu'elle a suivi sa scolarité dans les classes de CE1 à CM2 à l'école élémentaire du 23 mars 2012 à juin 2015 puis a été inscrite au collège Jean Bène à Pézenas en classe de 6ème de section d'enseignement général et professionnel adapté (SEGPA) pour l'année scolaire 2015-2016 et en classe de 5ème SEGPA pour l'année 2016-2017. La requérante justifie aussi, par une attestation de scolarisation établie le 3 mai 2021 par la principale de ce collège, produite par la première fois en appel, qu'Aïcha D... a poursuivi sa scolarité dans cet établissement en classe de 4ème SEGPA en 2017-2018 et en classe de 3ème SEGPA en 2018-2019. La requérante produit, au surplus, une attestation d'assurance scolaire de la MAE pour l'année scolaire 2017-2018 et une attestation d'inscription datée du 30 octobre 2019 au club d'athlétisme de Pézenas de 2014 à 2020. Il peut ainsi être tenu pour établi qu'à la date de l'arrêté attaqué, l'enfant mineure résidait habituellement en France depuis qu'elle avait atteint au plus l'âge de 10 ans et pendant une durée d'au moins six ans, au sens du b) de l'article 10 de l'accord franco-algérien. Par suite, Mme B... est fondée à soutenir que, contrairement à ce qu'ont estimé les premiers juges, la décision en litige méconnaît ces stipulations.

5. L'effet dévolutif de l'appel n'appelle pas l'examen d'autres moyens soulevés par les parties. Par suite, il résulte de ce qui précède que Mme B... est fondée à demander tant l'annulation du jugement du tribunal administratif de Montpellier du 26 mars 2021 que de la décision en litige du 11 juin 2019 du préfet de l'Hérault rejetant sa demande de délivrance d'un document de circulation pour étranger mineur en faveur de sa petite-fille A... D....

Sur les conclusions aux fins d'injonction :

6. Aux termes de l'article L. 911-1 du code de justice administrative : " Lorsque sa décision implique nécessairement qu'une personne morale de droit public ou un organisme de droit privé chargé de la gestion d'un service public prenne une mesure d'exécution dans un sens déterminé, la juridiction, saisie de conclusions en ce sens, prescrit, par la même décision, cette mesure assortie, le cas échéant, d'un délai d'exécution ".

7. A la date de lecture du présent arrêt, Aïcha D..., née le 19 novembre 2003, est devenue majeure. Dans ces conditions, l'exécution du présent arrêt ne peut plus impliquer la délivrance d'un document de circulation pour mineur. Les conclusions principales de Mme B... tendant à ce qu'il soit enjoint au préfet de délivrer un tel document ne peuvent donc qu'être rejetées. Ses conclusions subsidiaires tendant à ce qu'il soit enjoint au préfet de procéder à un réexamen de sa demande, laquelle ne pourrait désormais porter, si l'intéressée le souhaite, que sur la délivrance d'un titre de séjour, doivent aussi être rejetées.

Sur les conclusions aux fins de sursis à exécution :

8. Dès lors qu'elle se prononce sur les conclusions de Mme B... tendant à l'annulation du jugement contesté, il n'y a pas lieu pour la Cour de statuer sur les conclusions tendant à ce qu'il soit sursis à l'exécution de ce jugement.

Sur les frais liés au litige :

9. Mme B... a été admise au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale dans ses deux requêtes. Par suite, son avocate peut se prévaloir des dispositions des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, et sous réserve que Me Bonomo-Fay, avocate de Mme B..., renonce à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l'État, de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 000 euros au titre des deux instances engagées.

D É C I D E :

Article 1er : Il n'y a pas lieu de statuer sur les conclusions à fin de sursis à l'exécution du jugement du 26 mars 2021du tribunal administratif de Montpellier.

Article 2 : Le jugement du 26 mars 2021 du tribunal administratif de Montpellier est annulé.

Article 3 : La décision du 11 juin 2019 du préfet de l'Hérault est annulée.

Article 4 : L'Etat versera à Me Bonomo-Fay la somme de 1 000 euros au titre des deux instances engagées en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et du deuxième alinéa de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991, sous réserve que celle-ci renonce à percevoir la part contributive de l'Etat au titre de l'aide juridictionnelle.

Article 5. : Le surplus des conclusions de la requête de Mme B... est rejeté.

Article 6 : Le présent arrêt sera notifié à Mme C... B... née D..., au ministre de l'intérieur et à Me Bonomo-Fay.

Copie pour information sera adressée au préfet de l'Hérault et au Procureur de la République près du tribunal judiciaire de Montpellier.

Délibéré après l'audience du 11 janvier 2022, où siégeaient :

- Mme Helmlinger, présidente de la Cour,

- M. Portail, président assesseur,

- Mme Carassic, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition du greffe le 25 janvier 2022.

2

N° 21MA03953,21MA03954


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Marseille
Formation : 9ème chambre
Numéro d'arrêt : 21MA03953
Date de la décision : 25/01/2022
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-01 Étrangers. - Séjour des étrangers.


Composition du Tribunal
Président : Mme HELMLINGER
Rapporteur ?: Mme Marie-Claude CARASSIC
Rapporteur public ?: M. ROUX
Avocat(s) : BONOMO FAY;BONOMO FAY;BONOMO FAY

Origine de la décision
Date de l'import : 08/02/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.marseille;arret;2022-01-25;21ma03953 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award