La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

21/03/2022 | FRANCE | N°20MA02685

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 5ème chambre, 21 mars 2022, 20MA02685


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B... a demandé au tribunal administratif de Montpellier d'annuler l'arrêté du 27 août 2019 par lequel le préfet des Pyrénées-Orientales a refusé de lui délivrer un titre de séjour et lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai d'un mois.

Par un jugement n° 1905887 du 31 décembre 2019, le tribunal administratif de Montpellier a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête, enregistrée le 3 août 2020, M. A... B..., représenté pa

r Me Summerfield, demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement du 31 décembre 2019 ;

2°) d'annuler...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B... a demandé au tribunal administratif de Montpellier d'annuler l'arrêté du 27 août 2019 par lequel le préfet des Pyrénées-Orientales a refusé de lui délivrer un titre de séjour et lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai d'un mois.

Par un jugement n° 1905887 du 31 décembre 2019, le tribunal administratif de Montpellier a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête, enregistrée le 3 août 2020, M. A... B..., représenté par Me Summerfield, demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement du 31 décembre 2019 ;

2°) d'annuler l'arrêté du 27 août 2019 par lequel le préfet des Pyrénées-Orientales a refusé de lui délivrer un titre de séjour et lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai d'un mois ;

3°) d'enjoindre au préfet des Pyrénées-Orientales de lui délivrer un titre de séjour " vie privée et familiale " ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 1 500 euros à verser à Me Summerfield au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991.

Il soutient que :

- la décision portant refus de séjour est insuffisamment motivée, dès lors qu'elle ne mentionne pas l'enfant qu'il a eu avec son ex compagne, titulaire d'une carte de résident ;

- la décision portant refus de séjour méconnaît les stipulations du 7° de l'article 6 de l'accord franco-algérien ;

- le préfet ne pouvait, sans méconnaître l'autorité de la chose jugée par le jugement du 7 avril 2017 du tribunal administratif de Montpellier, refuser de lui délivrer un titre de séjour sur ce fondement ;

- l'avis du collège des médecins de l'office français d'immigration et d'intégration (OFII) est en contradiction avec le précédent avis du médecin de l'agence régionale de santé ; le préfet s'est cru à tort lié par l'avis des médecins de l'OFII et a commis une erreur de droit en ne justifiant pas la divergence d'appréciation entre les avis médicaux successifs ;

- le préfet a également méconnu son droit à être entendu ;

- il ne peut pas effectivement bénéficier des soins appropriés à son état de santé en Algérie ; il souffre d'une hypertension artérielle sévère par hyperaldostéronisme primaire ;

- la décision portant refus de séjour méconnaît les stipulations du 5° de l'article 6 de l'accord franco-algérien ; il réside habituellement en France depuis 2009, où son frère et ses sœurs sont en situation régulière ; il a eu un fils avec une compatriote titulaire d'une carte de résident et a obtenu par jugement du 12 novembre 2019 du juge aux affaires familiales l'autorité parentale et un droit de visite, tout en étant dispensé de contribution financière à son éducation du fait de ses faibles ressources ;

- elle méconnaît également l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ainsi que l'article 3-1 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant ;

- l'obligation de quitter le territoire français prise sur le fondement de cette décision de refus de séjour illégale l'est également ;

- elle méconnaît les dispositions du 10° de l'article L. 511-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la décision fixant le pays de renvoi méconnaît les stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.

Par un mémoire en défense, enregistré le 2 octobre 2020, le préfet des Pyrénées-Orientales conclut au rejet de la requête.

Il soutient que la requête, qui se borne à reprendre l'argumentation de première instance, est irrecevable et qu'elle n'est en outre pas fondée dans les moyens qu'elle soulève.

Par une décision du 26 juin 2020, M. B... a obtenu le bénéfice de l'aide juridictionnelle totale.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- la convention internationale relative aux droits de l'enfant ;

- l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer ses conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le rapport de Mme Balaresque a été entendu au cours de l'audience publique.

Considérant ce qui suit :

1. Par un arrêté du 27 août 2019, le préfet des Pyrénées-Orientales a refusé de délivrer le titre de séjour sollicité par M. B... et lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai d'un mois. M. B... relève appel du jugement du 31 décembre 2019 par lequel le tribunal administratif de Montpellier a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté.

Sur le bien-fondé du jugement attaqué :

En ce qui concerne la décision portant refus de titre de séjour :

2. La décision attaquée vise les textes dont elle fait application, en particulier l'article 6 de l'accord franco-algérien, et précise les considérations de fait qui en constitue le fondement. Elle est, par suite, suffisamment motivée, en dépit du fait qu'elle ne mentionne pas la présence en France de son enfant né en 2014 en Algérie et qu'il a reconnu en 2017.

3. Il y a lieu d'écarter les moyens tirés de la méconnaissance de l'autorité de la chose jugée par le jugement du 7 avril 2017 du tribunal administratif de Montpellier, de l'erreur de droit qu'aurait commise le préfet pour s'être cru à tort en situation de compétence liée et de la méconnaissance du droit à être entendu de M. B..., qui ont été précédemment invoqués dans les mêmes termes devant les juges de première instance, par adoption des motifs retenus à bon droit par le tribunal aux points 2, 3 et 8 de son jugement, le requérant ne faisant état devant la Cour d'aucun élément distinct de ceux soumis à son appréciation.

4. Aux termes de l'article 6 de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 susvisé : " Le certificat de résidence d'un an portant la mention "vie privée et familiale" est délivré de plein droit : / (...) / 7° au ressortissant algérien, résidant habituellement en France, dont l'état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait entraîner pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité, sous réserve qu'il ne puisse pas effectivement bénéficier d'un traitement approprié dans son pays (...) ". Il appartient à l'autorité administrative, lorsqu'elle envisage de refuser la délivrance d'un titre de séjour à un étranger qui en fait la demande en raison de son état de santé, de vérifier, au vu de l'avis émis par le collège de médecins du service médical de l'Office français de l'immigration et de l'intégration, que cette décision ne peut avoir de conséquences d'une exceptionnelle gravité sur l'état de santé de l'intéressé et, en particulier, d'apprécier, sous le contrôle du juge de l'excès de pouvoir, la nature et la gravité des risques qu'entraînerait un défaut de prise en charge médicale dans le pays dont l'étranger est originaire. Lorsque le défaut de prise en charge risque d'avoir des conséquences d'une exceptionnelle gravité sur la santé de l'intéressé, l'autorité administrative ne peut légalement refuser de délivrer ou de renouveler le titre de séjour sollicité que s'il existe des possibilités de traitement approprié de l'affection en cause dans son pays d'origine.

5. Il ressort des pièces du dossier que l'état de santé de M. B..., qui souffre d'une hypertension artérielle sévère par hyperaldostéronisme primaire pour laquelle il a été suivi de décembre 2011 à janvier 2017 au moins au sein du centre hospitalier régional universitaire (CHRU) de Montpellier, présente un caractère de gravité. Toutefois, le collège des médecins de l'office français de l'immigration et de l'intégration (OFII), dans son avis du 16 janvier 2019, a estimé que l'intéressé pouvait voyager sans risque et qu'il pouvait bénéficier effectivement d'un traitement approprié en Algérie. Les pièces de nature médicale produites par M. B..., en particulier les certificats émanant du praticien du CHRU qui ne se prononcent pas sur la disponibilité du traitement en Algérie et le certificat médical rédigé à une date indéterminée par un médecin algérien selon lequel " son cas nécessite une prise en charge en milieu hospitalier dans un centre spécialisé à l'étranger " sans autre précision, ne sont pas de nature à remettre en cause l'appréciation portée par le préfet sur l'existence d'un traitement approprié à son état de santé dans son pays d'origine, pas plus que les articles de presse faisant état dans des termes généraux de ruptures de stock affectant certains médicaments et des dysfonctionnements du système de santé algérien. Dans ces conditions, M. B... n'est pas fondé à soutenir que l'arrêté contesté méconnaît les stipulations précitées de l'alinéa 7 de l'article 6 de l'accord franco-algérien. Pour les mêmes motifs, cet arrêté n'est pas entaché d'une erreur manifeste d'appréciation.

6. Aux termes de l'article 6 de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 : " Le certificat de résidence d'un an portant la mention " vie privée et familiale " est délivré de plein droit : (...) 5) au ressortissant algérien, qui n'entre pas dans les catégories précédentes ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial, dont les liens personnels et familiaux en France sont tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus ". Aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance ; 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui ".

7. M. B... fait valoir qu'il réside habituellement en France depuis 2009, que son frère et ses sœurs y vivent en situation régulière ainsi que son fils né en 2014 de son union avec une compatriote titulaire d'une carte de résident. Toutefois, M. B..., qui a fait l'objet de deux obligations de quitter le territoire français en décembre 2014 et juin 2015, n'établit pas, par les rares pièces qu'il produit, la durée et la stabilité du séjour dont il se prévaut. Il n'établit pas non plus la réalité des liens avec son enfant né en Algérie en 2014, qu'il n'a reconnu qu'en 2017 et pour lequel il n'a obtenu l'autorité parentale ainsi qu'un droit de visite que par un jugement du 12 novembre 2019, postérieur à la décision contestée. Enfin, M. B..., qui ne fait état d'aucune intégration particulière en France, n'établit pas être dépourvu d'attaches en Algérie où il a vécu jusqu'à, à tout le moins, l'âge de 45 ans. Dans ces conditions, les moyens tirés de la méconnaissance des stipulations de l'article 6 de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 et de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales doivent être écartés.

8. Si M. B... soutient que l'arrêté attaqué porte atteinte à l'intérêt supérieur de son enfant, toutefois, ainsi qu'il a été dit au point précédent, il n'établit pas la réalité de ses liens avec celui-ci, antérieurement à la décision contestée. Dans ces conditions, le moyen tiré de la méconnaissance des stipulations de l'article 3-1 de la convention internationale des droits de l'enfant ne peut qu'être écarté.

En ce qui concerne la décision portant obligation de quitter le territoire français :

9. Il résulte de ce qui précède que la décision portant refus de séjour n'est pas entachée des illégalités que le requérant lui impute. M. B... n'est donc pas fondé à exciper de son illégalité à l'appui de ses conclusions dirigées contre la décision portant obligation de quitter le territoire français.

10. Ainsi qu'il a été dit au point 5, M. B... n'établit pas qu'il ne pourrait pas bénéficier dans son pays d'origine d'un traitement approprié à son état de santé. Par suite, le moyen tiré de la méconnaissance des dispositions du 10° de l'article L. 511-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, dans leur rédaction alors applicable, doit être écarté.

11. Enfin, M. B..., dont les conclusions de première instance comme d'appel ne sont pas dirigées contre la décision fixant le pays de destination, ne peut utilement invoquer la méconnaissance des stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales par cette décision.

12. Il résulte de ce qui précède que M. B... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que le tribunal administratif de Montpellier a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 27 août 2019 par lequel le préfet des Pyrénées-Orientales a refusé de lui délivrer le titre de séjour sollicité et lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai d'un mois.

13. Par suite, ses conclusions à fin d'injonction ainsi que ses conclusions présentées en application des dispositions des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 et 75 de la loi du 10 juillet 1991 ne peuvent être accueillies.

D E C I D E :

Article 1er : La requête de M. B... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... B..., à Me Summerfield et au ministre de l'intérieur.

Copie en sera adressée pour information au préfet des Pyrénées-Orientales.

Délibéré après l'audience du 28 février 2022, où siégeaient :

- M. Bocquet, président,

- M. Marcovici, président assesseur,

- Mme Balaresque, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 21 mars 2022.

2

No 20MA02685


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Marseille
Formation : 5ème chambre
Numéro d'arrêt : 20MA02685
Date de la décision : 21/03/2022
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-03 Étrangers. - Obligation de quitter le territoire français (OQTF) et reconduite à la frontière.


Composition du Tribunal
Président : M. BOCQUET
Rapporteur ?: Mme Claire BALARESQUE
Rapporteur public ?: M. PECCHIOLI
Avocat(s) : SUMMERFIELD TARI

Origine de la décision
Date de l'import : 29/03/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.marseille;arret;2022-03-21;20ma02685 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award