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31/03/2022 | FRANCE | N°19MA03670

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 2ème chambre, 31 mars 2022, 19MA03670


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La société civile d'exploitation agricole (SCEA) PMR Camargue a demandé au tribunal administratif de Montpellier, d'une part, d'annuler la décision du 25 août 2017 par laquelle le directeur général de l'Etablissement national des produits de l'agriculture et de la mer (FranceAgriMer) a ramené à la somme de 1 054,21 euros le montant de l'aide à la restructuration individuelle du vignoble demandée au titre de l'année 2014-2015 et, d'autre part, d'enjoindre au directeur de lui verser l'intégralité du mon

tant de cette aide.

Par un jugement n° 1705005 du 20 juin 2019, le tribunal...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La société civile d'exploitation agricole (SCEA) PMR Camargue a demandé au tribunal administratif de Montpellier, d'une part, d'annuler la décision du 25 août 2017 par laquelle le directeur général de l'Etablissement national des produits de l'agriculture et de la mer (FranceAgriMer) a ramené à la somme de 1 054,21 euros le montant de l'aide à la restructuration individuelle du vignoble demandée au titre de l'année 2014-2015 et, d'autre part, d'enjoindre au directeur de lui verser l'intégralité du montant de cette aide.

Par un jugement n° 1705005 du 20 juin 2019, le tribunal administratif de Montpellier a rejeté cette demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête et un mémoire, enregistrés le 2 août 2019 et le 14 septembre 2021, la société PMR Camargue, représentée par Me Pugliese, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Montpellier du 20 juin 2019 ;

2°) d'annuler la décision du 25 août 2017 du directeur général de FranceAgriMer ;

3°) d'enjoindre au directeur de lui verser l'intégralité du montant de l'aide à la restructuration individuelle du vignoble demandée au titre de l'année 2014-2015 ;

4°) de mettre à la charge de FranceAGriMer le versement d'une somme de 3 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- la décision contestée, qui a pour effet de retirer la décision du 2 juin 2017 se substituant à la décision initiale du 15 février 2017, ne pouvait être prise sans être précédée d'une nouvelle procédure ;

- le rapport définitif qui lui a été adressé est antidaté ;

- il n'est justifié ni de l'habilitation, ni de l'assermentation de l'agent ayant mené le contrôle et rédigé le rapport ;

- en ce qu'il a été réalisé de manière inopinée, le contrôle sur place est irrégulier au regard du droit européen et vicie la procédure au terme de laquelle a été prise la décision contestée ;

- en ce qu'elle ne tient pas compte de l'ampleur de l'inexécution au regard de la taille de la parcelle pour moduler le montant de la sanction, la décision du directeur général de FranceAgriMer du 20 janvier 2014, sur la base de laquelle a été édictée la décision contestée, méconnait l'article 98 du règlement (CE) n° 555/2008 du 27 juin 2008.

Par des mémoires en défense, enregistrés les 31 mai 2021 et 13 octobre 2021, FranceAgriMer, représenté par la SCP Hélène Didier et François Pinet, conclut au rejet de la requête et à ce que soit mise à la charge de la société PMR Camargue la somme de 3 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle fait valoir que les moyens soulevés ne sont pas fondés.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- le règlement (CE) 555/2008 de la Commission du 27 juin 2008 ;

- le code rural et de la pêche maritime ;

- la décision du directeur général de FranceAgriMer AIDES/SACSPE/2014-03 du 20 janvier 2014 ;

- l'arrêt C-59/17 du 7 août 2018 de la Cour de Justice de l'Union Européenne ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Sanson,

- les conclusions de M. Gautron, rapporteur public,

- et les observations de Me Rosier, représentant la SCEA PMR Camargue.

Une note en délibéré, présentée pour la SCEA Camargue, a été enregistrée le 17 mars 2022.

Considérant ce qui suit :

1. La société PMR Camargue a sollicité le bénéfice de l'aide à la restructuration individuelle du vignoble au titre de l'année 2014-2015, afin de financer, d'une part, des opérations de plantation et de palissage sur ses parcelles cadastrées EL17 et EL18, d'une superficie totale de 2,8 hectares, et d'autre part, l'installation d'un système d'irrigation fixe sur ces deux parcelles ainsi que sur sa parcelle EL19, d'une superficie déclarée de 2,7 hectares. Elle relève appel du jugement du tribunal administratif de Montpellier du 20 juin 2019 rejetant sa demande tendant à l'annulation de la décision du 25 août 2017 par laquelle le directeur général de FranceAgriMer, au terme d'un contrôle sur place le 23 octobre 2015, a limité à la somme de 1 054,21 euros le montant de cette aide.

2. En premier lieu, il résulte de l'instruction que le directeur général de FranceAgriMer a omis de communiquer le rapport du contrôle réalisé le 23 octobre 2015 avant de ramener, par décision du 15 février 2017, le montant de l'aide demandée par la SCEA PMR Camargue à la somme de 1 054,21 euros. Contrairement à ce que soutient la société requérante, le directeur général pouvait légalement, afin de purger cette irrégularité, retirer sa décision et lui adresser le rapport de contrôle avant de reprendre la même décision le 25 août 2017, sans procéder à un nouveau contrôle.

3. En deuxième lieu, les moyens soulevés par la société requérante tirés de ce que la version du rapport qui lui a été communiquée serait substantiellement différent du rapport initialement établi ou de ce que ce rapport aurait été antidaté, que la requérante reprend en appel sans les assortir d'éléments nouveaux ou déterminants, doivent être écartés par adoption des motifs retenus à bon droit par les premiers juges, aux points 3 et 7 du jugement attaqué.

4. En troisième lieu, il résulte de l'instruction que l'agent qui a procédé au contrôle sur place du 23 octobre 2015 et rédigé le rapport de contrôle, a été habilitée par décision du directeur général de FranceAgriMer du 14 octobre 2009 à effectuer des contrôles dans le secteur Languedoc-Roussillon et a prêté serment devant le tribunal de grande instance de Montpellier le 25 mars 2010, conformément aux dispositions de l'article R. 622-50 du code rural et de la pêche maritime.

5. En quatrième lieu, dans un arrêt C-59/17 du 7 août 2018, la Cour de Justice de l'Union Européenne a dit pour droit que les dispositions de l'article 76 du règlement (UE) susvisé n° 555/2008 du 27 juin 2008, en vertu desquelles les contrôles sur place sont effectués de manière inopinée, doivent être interprétées en ce sens qu'elles n'autorisent pas les agents qui procèdent à un contrôle sur place à pénétrer sur une exploitation agricole sans avoir obtenu l'accord de l'exploitant.

6. Il n'est pas contesté que le contrôle sur place a eu lieu en l'absence de l'exploitant ou de l'un de ses représentants. Toutefois, en se bornant à soutenir qu'elle n'a reçu aucun courrier l'avertissant qu'un tel contrôle serait effectué, la société requérante ne conteste pas utilement les mentions portées sur les rapports de contrôle, selon lesquelles elle a été avisée dès le 19 octobre 2015 de ce qu'un contrôle sur place aurait lieu le 23 octobre 2015, une telle information préalable, à laquelle FranceAgriMer n'était nullement tenue, ayant valablement pu être portée à sa connaissance par n'importe quel moyen, qu'il s'agisse d'un courrier postal, d'un courrier électronique ou d'un simple appel téléphonique. Du reste, en admettant même que, faute d'avoir été préalablement avisée, la société requérante aurait été empêchée d'exercer le droit, qui lui est reconnu, de s'opposer à l'accès du contrôleur à son exploitation, la seule garantie dont elle aurait été privée au regard de l'objet de sa demande d'aide aurait été de voir cette dernière purement et simplement rejetée ainsi, d'ailleurs, que l'a expressément souligné la CJUE au point 32 de son arrêt C-59/17 du 7 août 2018.

7. En dernier lieu, d'une part, en vertu de l'article 98 du règlement (UE) n° 555/2008 du 27 juin 2008, les sanctions que les Etats membres prévoient, au niveau national, pour garantir la bonne application du dispositif d'aide à l'investissement que ce règlement institue doivent être proportionnées.

8. D'autre part, aux termes de l'article 6 de la décision susvisée du directeur général de FranceAgriMer du 20 janvier 2014 : " Pour une parcelle objet d'une demande d'aide qui comporte une opération de plantation concomitante à la mise en place du palissage et/ou d'une installation d'irrigation fixe, le demandeur s'engage à terminer la totalité des opérations programmées au plus tard à la fin de la campagne de plantation. Si une de ces opérations programmées -plantation, palissage, irrigation- n'est pas pleinement exécutée ou ne respecte pas les critères d'éligibilité, la parcelle est rejetée en intégralité pour l'ensemble des opérations, y compris la plantation (...) ". En outre, l'article 18.1 de cette même décision prévoit que l'aide à la restructuration individuelle est minorée de 50% si la superficie totale éligible est inférieure à 50% de la superficie totale au titre de laquelle cette aide est demandée.

9. En l'espèce, lorsqu'en application de l'article 6 précité de sa décision du 20 janvier 2014, après avoir relevé que les parcelles EL 17 et EL 18 n'avaient fait l'objet d'aucune opération de plantation et de palissage et que la parcelle EL 19, qui avait fait seule l'objet d'une installation d'irrigation fixe, ne représentait qu'une superficie de 2,63 hectares, le directeur général de FranceAgriMer a estimé que ces surfaces n'étaient éligibles qu'à l'aide au financement de la seule installation du système d'irrigation fixe, à hauteur de 47,91% de la superficie déclarée seulement, pour ramener à la somme de 2 108,24 euros le montant de l'aide demandée par la société PMR Camargue, il n'a pas sanctionné cette dernière mais s'est borné à tirer les conséquences du non-respect, au terme de la campagne de plantation, des conditions au versement desquelles ces aides sont subordonnées.

10. En outre, l'article 18.1 précité, dont le directeur général de FranceAgriMer a fait application pour minorer de moitié cette somme de 2 108,24 euros, détermine le montant de la sanction infligée à l'exploitant en fonction de la différence entre la superficie des terrains au titre desquels l'aide est demandée et la superficie des terrains éligibles à cette aide et ne méconnait pas, par suite, les dispositions de l'article 98 du règlement (UE) n° 555/2008 du 27 juin 2008.

11. Il résulte de tout ce qui précède que la société PMR Camargue n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Montpellier a rejeté sa demande. Il s'ensuit que sa requête doit être rejetée, en toutes ses conclusions. Il y a lieu, en revanche, de faire application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et mettre à sa charge une somme de 2 000 euros à verser à FranceAgriMer au titre des frais exposés dans la présente instance.

D É C I D E :

Article 1er : La requête de La société PMR Camargue est rejetée.

Article 2 : La société PMR Camargue versera à FranceAgriMer une somme de 2 000 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à l'établissement national des produits de l'agriculture et de la mer (FranceAgriMer) et à la société civile d'exploitation agricole PMR Camargue.

Délibéré après l'audience du 17 mars 2022, où siégeaient :

- M. Alfonsi, président,

- M. Mahmouti, premier conseiller,

- M. Sanson, premier conseiller.

Rendu public par mise à disposition au greffe, le 31 mars 2022.

2

N° 19MA03670


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Marseille
Formation : 2ème chambre
Numéro d'arrêt : 19MA03670
Date de la décision : 31/03/2022
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

03-03-05 Agriculture et forêts. - Exploitations agricoles. - Aides à l'exploitation.


Composition du Tribunal
Président : M. ALFONSI
Rapporteur ?: M. Pierre SANSON
Rapporteur public ?: M. GAUTRON
Avocat(s) : CABINET PLMC PUJOL LAFONT MARTY CASES PUGLIESE

Origine de la décision
Date de l'import : 12/04/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.marseille;arret;2022-03-31;19ma03670 ?
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