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13/06/2022 | FRANCE | N°20MA02267

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 5ème chambre, 13 juin 2022, 20MA02267


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B... a demandé au tribunal administratif de Toulon d'annuler l'arrêté n° 806 du 30 mai 2018 du maire d'Hyères-les-Palmiers réglementant l'activité de vente ambulante sur le littoral de cette commune ainsi que la décision du 25 juin 2018 par laquelle le maire d'Hyères-les-Palmiers lui a refusé la délivrance d'une autorisation pour l'exercice d'une activité de vente ambulante.

Par un jugement n° 1802675 du 28 mai 2020, le tribunal administratif de Toulon a rejeté sa demande.

Procédure

devant la Cour :

Par une requête et un mémoire, enregistrés les 17 juillet 2020 et 18 f...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B... a demandé au tribunal administratif de Toulon d'annuler l'arrêté n° 806 du 30 mai 2018 du maire d'Hyères-les-Palmiers réglementant l'activité de vente ambulante sur le littoral de cette commune ainsi que la décision du 25 juin 2018 par laquelle le maire d'Hyères-les-Palmiers lui a refusé la délivrance d'une autorisation pour l'exercice d'une activité de vente ambulante.

Par un jugement n° 1802675 du 28 mai 2020, le tribunal administratif de Toulon a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête et un mémoire, enregistrés les 17 juillet 2020 et 18 février 2022, M. C... B..., représenté par Me Varron Charrier, demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de Toulon du 28 mai 2020 ;

2°) d'annuler l'arrêté du 30 mai 2018 ainsi que la décision du 25 juin 2018 ;

3°) de mettre à la charge de la commune d'Hyères-les-Palmiers une somme de 4 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

En ce qui concerne l'arrêté du 30 mai 2018 :

- il a été pris par une autorité incompétente, en l'absence de délégation régulière de signature ;

- il méconnaît l'étendue des pouvoir de police du maire en instituant une autorisation préalable illégale ; il viole le principe de la liberté du commerce et de l'industrie ; l'article L. 2122-1 du code général de la propriété des personnes publiques n'est pas applicable en l'espèce ;

- il constitue une mesure de police illégale ; il n'est pas justifié par un trouble à l'ordre public ; il instaure une interdiction à caractère général et absolu de l'exercice de la vente ambulante sans autorisation ;

- le principe d'égalité de traitement des candidats n'a pas été respecté ; les critères retenus pour délivrer l'autorisation sont illégaux en ce qu'ils ne prévoient pas une répartition égalitaire des autorisations entre tous les demandeurs ; la composition de la commission de sélection n'est pas précisée ; aucune hiérarchisation ni pondération des critères de sélection n'est indiquée ;

- il est entaché d'un détournement de pouvoir, son fondement réel n'étant pas l'ordre public mais la préservation des commerces locaux ;

En ce qui concerne la décision du 25 juin 2018 :

- le rejet de sa candidature n'est pas motivé ;

- il n'est pas fondé sur des critères objectifs ; sa candidature remplissait l'ensemble des critères de sélection prévus par l'arrêté du 30 mai 2018 ;

- le principe d'égalité de traitement des candidats n'a pas été respecté ;

- la décision porte atteinte à la libre concurrence et à la liberté d'entreprendre en ce qu'elle confère un avantage économique aux trois sociétés qui ont seules obtenu les 24 autorisations disponibles.

Par un mémoire en défense, enregistré le 28 mai 2021, la commune d'Hyères-les-Palmiers, représentée par Me Vergnon de la société d'avocats VEDESI, conclut au rejet de la requête et à ce que soit mise à la charge du requérant la somme de 2 000 euros à lui verser en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- la requête, qui se borne à reprendre la demande de première instance, est irrecevable ;

- elle est non fondée dans les moyens qu'elle soulève.

Les parties ont été informées, en application de l'article R. 611-7 du code de justice administrative, de ce que l'arrêt de la Cour était susceptible d'être fondé sur un moyen relevé d'office tenant à l'irrecevabilité du moyen de légalité externe soulevé par le requérant à l'encontre de la décision du 25 juin 2018 dans son mémoire complémentaire enregistré le 18 février 2022, dès lors que ce moyen, qui n'est pas d'ordre public, est fondé sur une cause juridique distincte de celle invoquée dans sa demande de première instance, qui se bornait à contester la légalité interne de la décision en litige.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code général des collectivités territoriales ;

- le code général de la propriété des personnes publiques ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience au cours de laquelle ont été entendus :

- le rapport de Mme E... ;

- les conclusions de M. Pecchioli, rapporteur public ;

- les observations de Me Schmidt représentant la commune d'Hyères-les-Palmiers.

Considérant ce qui suit :

1. M. B..., qui exerce une activité saisonnière de commerce de détail alimentaire, relève appel du jugement du 28 mai 2020 par lequel le tribunal administratif de Toulon a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du maire d'Hyères-les-Palmiers du 30 mai 2018 soumettant l'exercice de la vente ambulante sur le littoral de la commune à autorisation ainsi qu'à l'annulation de la décision du 25 juin 2018 lui refusant la délivrance d'une telle autorisation.

Sur le bien-fondé du jugement attaqué :

En ce qui concerne l'arrêté du 30 mai 2018 :

2. En premier lieu, par un arrêté du maire d'Hyères-les-Palmiers du 16 septembre 2014, régulièrement publié au recueil des actes administratifs de la commune et affiché en mairie, M. D... A..., 13ème adjoint au maire, a reçu délégation pour signer l'ensemble des actes concernant la sécurité, la circulation et le stationnement. Par suite, le moyen tiré de l'incompétence du signataire de l'arrêté en litige doit être écarté.

3. En deuxième lieu, le maire tient de son pouvoir de police, et notamment des articles L. 2212-2 et L. 2212-3 du code général des collectivités territoriales, le pouvoir de réglementer ou d'interdire la vente ambulante sur le territoire de sa commune, en particulier sur le domaine public maritime, dans l'intérêt de la sécurité, de la tranquillité et de la salubrité publiques. Toutefois, dès lors que l'exercice de pouvoirs de police administrative est susceptible d'affecter des activités de production, de distribution ou de services, la circonstance que les mesures de police ont pour objectif la protection de l'ordre ou de la santé publics n'exonère pas l'autorité investie de ces pouvoirs de police de l'obligation de prendre en compte également la liberté du commerce et de l'industrie. Dans cette perspective, il appartient seulement aux maires, en vue de remédier aux inconvénients pouvant résulter, en certains cas, pour la circulation et l'ordre public, de 1'exercice de cette profession, de prendre les mesures nécessaires pour assurer notamment le libre passage sur les plages et dans les voies publiques comme l'interdiction ou la limitation de l'exercice de cette profession dans certains espaces ou à certaines heures ou de fixer des emplacements réservés à la vente, et même, dans des circonstances exceptionnelles, de limiter le nombre des marchands admis à occuper ces emplacements en fixant, s'il y a lieu, un ordre de préférence, dont il appartient, le cas échéant, au juge de l'excès de pouvoir de vérifier s'il a été établi pour des motifs légitimes.

4. En l'espèce, il ressort des termes de l'article 3 de l'arrêté litigieux que le maire d'Hyères-les-Palmiers, afin de limiter les atteintes à la tranquillité et à la sécurité publique provoquées par un trop grand nombre de vendeurs sur les plages les plus fréquentées de sa commune, a décidé de réglementer la vente ambulante sur ces dernières en soumettant l'exercice de cette activité du 1er juillet au 15 septembre, à partir de quinze heures, à la délivrance d'une autorisation préalable. D'une part, il n'est pas sérieusement contesté par le requérant que les plages de la commune d'Hyères-les-Palmiers connaissent une affluence exceptionnelle de touristes durant la saison estivale et qu'il résulte de cette affluence un encombrement des plages et une difficulté de passage, ainsi que diverses nuisances. D'autre part, il ressort des termes mêmes de l'arrêté contesté que la restriction ainsi apportée à l'exercice de la vente ambulante ne concerne que certaines plages de la commune, pour la seule période estivale et pour une partie seulement de la journée. Dans ces conditions, en prenant une telle mesure, justifiée par la nécessité de prévenir les troubles à l'ordre public résultant de la forte affluence sur les plages de sa commune et de portée limitée à la fois dans l'espace et le temps, le maire d'Hyères-les-Palmiers n'a pas méconnu l'étendue de ses pouvoirs de police en instaurant un régime d'autorisation illégal, ni porté une atteinte disproportionnée à la liberté du commerce et de l'industrie.

5. En troisième lieu, aux termes de l'article L. 2122-1 du code général de la propriété des personnes publiques : " Nul ne peut, sans disposer d'un titre l'y habilitant, occuper une dépendance du domaine public d'une personne publique mentionnée à l'article L. 1 ou l'utiliser dans des limites dépassant le droit d'usage qui appartient à tous. (...) ".

6. Il résulte des termes mêmes de l'arrêté contesté qu'en réglementant au titre de ses pouvoirs de police générale, dans l'intérêt de la sécurité, de la tranquillité et de la salubrité publiques, la vente ambulante sur le littoral de sa commune, le maire d'Hyères-les-Palmiers n'a pas entendu faire application des dispositions des articles L. 2122-1, L. 2125-1 et L. 2125-3 du code général de la propriété des personnes publiques qui soumettent l'occupation ou l'utilisation privative du domaine public à la délivrance d'une autorisation et au paiement d'une redevance en contrepartie du droit d'occupation ou d'utilisation privative ainsi accordé. Dans ces conditions, le moyen tiré de la méconnaissance des dispositions de l'article L. 2122-1 du code général de la propriété des personnes publiques ne peut qu'être écarté.

7. En quatrième lieu, l'article 3 de l'arrêté contesté a fixé à 24 le nombre maximal d'autorisations susceptibles d'être délivrées pour l'exercice de l'activité de vente ambulante sur les plages de la commune concernées par la réglementation qu'il met en place. L'article 6 de cet arrêté prévoit que " la sélection des vendeurs ambulants s'effectuera par une commission ad hoc selon les critères suivants : - la transmission de l'ensemble des documents visés à l'article 8, - la transmission de photos du matériel utilisé, - le respect de la réglementation lors de l'année précédente ". L'article 8 fixe la liste des documents dont les vendeurs ambulants devront être en possession, en particulier une pièce d'identité, une attestation d'inscription au registre du commerce et des sociétés en cours de validité, une attestation d'assurance responsabilité civile. Enfin, l'article 7 de cet arrêté prévoit que : " Le nombre d'autorisation sera réparti entre les demandeurs dans la limite du nombre d'autorisations possibles sur l'ensemble des plages de la commune ".

8. Il résulte de l'ensemble de ces dispositions que l'arrêté litigieux a précisé les modalités de présentation et de sélection des demandes d'autorisation, laquelle est effectuée par une commission ad-hoc chargée d'examiner ces demandes au regard de critères objectifs et clairement identifiés. Contrairement à ce que soutient le requérant, aucun texte ni aucun principe n'imposait au maire d'indiquer une éventuelle hiérarchisation ou pondération de ces critères ni de préciser la composition de la commission ad-hoc chargée d'assurer la sélection des candidats. Le maire n'était pas non plus tenu de prévoir une répartition égalitaire des autorisations entre les différents demandeurs, dès lors que la délivrance de ces autorisations n'était pas laissée à son appréciation arbitraire mais résultait d'une procédure de sélection assurant l'égalité de traitement des demandeurs. Il s'ensuit que le moyen tiré du non-respect du principe d'égalité entre les candidats doit être écarté.

9. En cinquième lieu, si aux termes de l'article 4 de l'arrêté contesté, la vente ambulante est interdite à moins de 20 mètres de part et d'autre des établissements de plage, il ne ressort pas des pièces du dossier, contrairement à ce que soutient le requérant, qu'en prenant cette mesure de portée très limitée, le maire d'Hyères-les-Palmiers ait eu pour objectif de protéger les commerces sédentaires de la commune et non de prévenir les troubles à l'ordre public susceptibles de résulter d'une trop grande proximité entre deux points de vente sur une même plage dans un contexte de forte affluence. Le moyen tiré du détournement de pouvoir ne peut dès lors qu'être écarté.

En ce qui concerne la décision du 25 juin 2018 :

10. En premier lieu, devant le tribunal administratif, M. B... n'avait soulevé que des moyens tirés de l'illégalité interne de la décision en litige. Si devant la Cour, il soutient, en outre, que cette décision serait entachée d'une insuffisance de motivation, ce moyen fondé sur une cause juridique distincte, constitue une demande nouvelle irrecevable en appel.

11. En deuxième lieu, si le requérant soutient que sa demande d'autorisation a été illégalement rejetée alors qu'elle respectait l'ensemble des critères fixés à l'article 6 de l'arrêté du 30 mai 2018, il ressort toutefois des pièces du dossier, en particulier de la demande d'autorisation de l'intéressé produite en défense par la commune, que cette demande ne comportait pas l'ensemble des documents requis par l'article 8 de cet arrêté, dès lors que manquaient notamment la copie de sa pièce d'identité ainsi que celle de la carte permettant l'exercice d'une activité commerciale ambulante.

12. En troisième lieu, à la supposer établie, la seule circonstance que les 24 autorisations prévues par l'arrêté du 30 mai 2018 n'aient été réparties qu'entre trois demandeurs, ne saurait par elle-même révéler le non-respect de l'égalité de traitement entre les candidats ni l'atteinte à la libre-concurrence allégués par le requérant, dont ainsi qu'il a été dit la demande n'était pas conforme aux conditions d'attribution fixées par cet arrêté. Par suite, le moyen tiré de la méconnaissance des règles de concurrence et la liberté du commerce et de l'industrie doit être écarté.

13. Il résulte de l'ensemble de ce qui précède, et sans qu'il soit besoin d'examiner la recevabilité de la requête d'appel, que M. B... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Toulon a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 30 mai 2018 et de la décision du 25 juin 2018.

14. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de la commune d'Hyères-les-Palmiers, qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, la somme demandée par M. B... au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens. Il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de M. B... la somme demandée par la commune en application des mêmes dispositions.

D E C I D E :

Article 1er : La requête de M. B... est rejetée.

Article 2 : Les conclusions présentées par la commune d'Hyères-les-Palmiers sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. C... B... et à la commune d'Hyères-les-Palmiers.

Délibéré après l'audience du 30 mai 2022, où siégeaient :

- M. Bocquet, président,

- M. Marcovici, président-assesseur,

- Mme Balaresque, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 13 juin 2022.

2

N° 20MA02267


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Marseille
Formation : 5ème chambre
Numéro d'arrêt : 20MA02267
Date de la décision : 13/06/2022
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

Droits civils et individuels - Libertés publiques et libertés de la personne - Liberté du commerce et de l`industrie (voir : Commerce - industrie - intervention économique de la puissance publique).

Police - Police générale - Circulation et stationnement - Réglementation de certaines activités dans l'intérêt de la circulation - Marchands ambulants.


Composition du Tribunal
Président : M. BOCQUET
Rapporteur ?: Mme Claire BALARESQUE
Rapporteur public ?: M. PECCHIOLI
Avocat(s) : SOCIÉTÉ D'AVOCATS VEDESI

Origine de la décision
Date de l'import : 21/06/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.marseille;arret;2022-06-13;20ma02267 ?
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