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05/07/2022 | FRANCE | N°20MA02248

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 4ème chambre, 05 juillet 2022, 20MA02248


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A... C... et Mme E... B..., épouse C..., ont demandé au tribunal administratif de Nice, par deux requêtes distinctes, d'annuler les arrêtés du 13 novembre 2019 par lequel le préfet des Alpes-Maritimes a rejeté leurs demandes de délivrance d'un titre de séjour, leur a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de destination et d'enjoindre au préfet des Alpes-Maritimes de délivrer à chacun d'eux un titre de séjour portant la mention " vie priv

ée et familiale ".

Par un jugement nos 1905662, 1905663 du 9 juin 2020, le tr...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A... C... et Mme E... B..., épouse C..., ont demandé au tribunal administratif de Nice, par deux requêtes distinctes, d'annuler les arrêtés du 13 novembre 2019 par lequel le préfet des Alpes-Maritimes a rejeté leurs demandes de délivrance d'un titre de séjour, leur a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de destination et d'enjoindre au préfet des Alpes-Maritimes de délivrer à chacun d'eux un titre de séjour portant la mention " vie privée et familiale ".

Par un jugement nos 1905662, 1905663 du 9 juin 2020, le tribunal administratif de Nice a rejeté leurs demandes.

Procédure devant la Cour :

Par une requête, enregistrée le 9 juillet 2020, et un mémoire, enregistré le 2 juin 2022, Mme E... B..., épouse C..., et M. A... C..., représentés par Me Traversini, demandent à la Cour :

1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de Nice du 9 juillet 2020 et les arrêtés du préfet des Alpes-Maritimes du 13 novembre 2019 ;

2°) d'enjoindre au préfet des Alpes-Maritimes de délivrer à chacun d'eux un titre de séjour portant la mention " vie privée et familiale " dans le délai d'un mois à compter de la date de notification de l'arrêt à intervenir, sous astreinte de 100 euros par jour de retard ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 2 000 euros à verser directement à son conseil, Me Traversini, en application des dispositions combinées de l'article 37 de la loi du

10 juillet 1991 et de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, celle-ci déclarant renoncer en ce cas par avance à percevoir la part contributive de l'Etat au titre de l'aide juridictionnelle.

Ils soutiennent que les arrêtés attaqués :

- ont été pris en méconnaissance de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, dès lors que le préfet n'a pas saisi pour avis la commission du titre de séjour sur leur demande de titre alors qu'ils justifient de dix années de résidence habituelle en France ;

- méconnaissent les dispositions du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ainsi que l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- méconnaissent l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile dès lors qu'ils justifient de motifs exceptionnels d'admission au séjour ;

- méconnaissent la convention internationale des droits de l'enfant ;

- sont entachées d'une erreur manifeste d'appréciation.

Par un mémoire en défense, enregistré le 17 mai 2022, le préfet des Alpes-Maritimes conclut au rejet de la requête.

Il soutient que les moyens ne sont pas fondés.

M. et Mme C... ont été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par décision du 23 octobre 2020.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- la convention internationale des droits de l'enfant ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

A été entendu au cours de l'audience publique le rapport de Mme D....

Considérant ce qui suit :

1. Mme E... B..., épouse C..., et M. A... C..., son époux, de nationalité philippine, relèvent appel du jugement du 9 juin 2020 par lequel le tribunal administratif de Nice a rejeté leurs demandes tendant à l'annulation des arrêtés du

13 novembre 2019 par lesquels le préfet des Alpes-Maritimes a rejeté leurs demandes de titre de séjour, leur a fait obligation de quitter le territoire français et a fixé le pays de destination de leur reconduite.

Sur les conclusions à fin d'annulation :

2. En premier lieu, aux termes de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile dans sa version en vigueur : " La carte de séjour temporaire mentionnée à l'article L. 313-11 ou la carte de séjour temporaire mentionnée au 1° de l'article L. 313-10 peut être délivrée, sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, à l'étranger ne vivant pas en état de polygamie dont l'admission au séjour répond à des considérations humanitaires ou se justifie au regard des motifs exceptionnels qu'il fait valoir, sans que soit opposable la condition prévue à l'article L. 311-7. (...) L'autorité administrative est tenue de soumettre pour avis à la commission mentionnée à l'article L. 312-1 la demande d'admission exceptionnelle au séjour formée par l'étranger qui justifie par tout moyen résider en France habituellement depuis plus de dix ans (...) ".

3. D'une part, Mme C..., qui disposait d'un visa Schengen valable du

26 septembre au 10 octobre 2009, soutient, sans le prouver, être entrée sur le territoire français le 28 septembre 2009 et y demeurer habituellement depuis lors. Si elle produit des pièces variées et cohérentes permettant d'établir sa présence à compter du deuxième trimestre 2010, les quelques pièces versées au dossier relatives à la période entre la date alléguée de son entrée en France et le deuxième trimestre 2010 ne permettent pas de démontrer une présence continue de dix ans à la date de l'arrêté attaqué. D'autre part, M. C... indique lui-même être entré sur le territoire français le 18 février 2010, sous couvert d'un visa Schengen valable du 17 au 24 février 2010. Dès lors, il ne pouvait se prévaloir, à la date de l'arrêté pris à son encontre, le 13 novembre 2019, d'une résidence habituelle en France de dix années. Les requérants ne sauraient, par suite, soutenir que le préfet des Alpes-Maritimes ne pouvait refuser de leur accorder un titre de séjour sans avoir préalablement recueilli l'avis de la commission du titre de séjour mentionnée à l'article L. 312-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.

4. En deuxième lieu, aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1° Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance ; 2° Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale ou à la protection des droits et libertés d'autrui " et aux termes de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, dans sa version alors en vigueur : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention "vie privée et familiale" est délivrée de plein droit : (...) /7º A l'étranger ne vivant pas en état de polygamie, qui n'entre pas dans les catégories précédentes ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial, dont les liens personnels et familiaux en France, appréciés notamment au regard de leur intensité, de leur ancienneté et de leur stabilité, des conditions d'existence de l'intéressé, de son insertion dans la société française ainsi que de la nature de ses liens avec la famille restée dans le pays d'origine, sont tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus, sans que la condition prévue à l'article L. 311-7 soit exigée ".

5. M. et Mme C... se prévalent de leur présence sur le territoire français depuis le 18 février 2010 pour lui, le 28 septembre 2009 pour elle, de la circonstance que la mère de Mme C... ainsi que son oncle et sa tante vivent en France, enfin du fait que deux enfants sont nés, en France, de leur union, la première le 26 novembre 2010, la seconde le 27 juillet 2015. Ils font valoir en outre qu'ils bénéficient tous deux d'une promesse d'embauche, pour un emploi de cuisinier pour lui, d'aide-ménagère pour elle, et qu'ils ont développé en France des liens privés solides, ainsi qu'en témoigneraient les deux attestations rédigées par des amis du couple et produites au dosser. Toutefois, par ces seuls éléments, M. et Mme C..., qui sont de même nationalité, et pourraient, dès lors, reconstituer leur cellule familiale dans leur pays d'origine, n'établissent pas y être dépourvus de liens familiaux ni ne démontrent une insertion particulière dans la société française. Dans ces conditions, alors que M. C... avait déjà fait l'objet, à la date de l'arrêté attaqué, de deux obligations de quitter le territoire, non exécutées, en date du

12 avril 2013 et 15 septembre 2015, et Mme C... d'une obligation de quitter le territoire français, non exécutée, du 15 septembre 2015 également, les intéressés ne sont pas fondés à soutenir que les arrêtés attaqués, au regard des buts poursuivis par l'administration, portent à leur droit au respect de leur vie privée et familiale une atteinte disproportionnée. Ces arrêtés ne méconnaissent, par suite, ni les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, ni les dispositions du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Pour les mêmes motifs, ces arrêtés ne sont pas entachés d'erreurs manifestes d'appréciation.

6. En troisième lieu, aux termes de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " La carte de séjour temporaire mentionnée à l'article

L. 313-11 ou la carte de séjour temporaire mentionnée au 1° et 2° de l'article L. 313-10 peut être délivrée, sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, à l'étranger ne vivant pas en état de polygamie dont l'admission au séjour répond à des considérations humanitaires ou se justifie au regard des motifs exceptionnels qu'il fait valoir, sans que soit opposable la condition prévue à l'article L. 313-2. (...) ".

7. Pour les mêmes motifs que ceux exposés précédemment au point 5,

M et Mme C... n'établissent pas que leurs demandes de titre de séjour répondraient à des considérations humanitaires ou se justifieraient au regard de motifs exceptionnels, notamment en raison de leur insertion sociale ou professionnelle. La circonstance qu'ils disposent tous deux de promesses d'embauche ne saurait être considérée comme un motif exceptionnel de nature à permettre la délivrance à leur profit d'une carte de séjour.

8. En quatrième lieu, si M. et Mme C... invoquent l'intérêt supérieur de leurs filles mineures, nées à Nice en 2010 et en 2015, qui commanderait qu'elles puissent continuer à vivre en France et à y être scolarisées, ils ne font valoir aucun fait qui permettrait de présumer que la famille ne pourrait se reconstituer dans le pays d'origine des parents, tous deux en situation irrégulière, ni que les enfants ne pourraient poursuivre leur scolarité dans le pays de naissance de ceux-ci. Par suite, le moyen tiré de la violation des stipulations précitées de l'article 3-1 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant, doit être écarté.

9. Il résulte de ce qui précède que M. et Mme C... ne sont pas fondés à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, les premiers juges ont rejeté leurs demandes. Par voie de conséquence, leurs conclusions à fin d'injonction et présentées sur le fondement des articles 37 de la loi du 10 juillet 1991 et de l'article L. 761-1 du code de justice administrative doivent également être rejetées.

D É C I D E :

Article 1er : La requête de Mme E... B... épouse C... et de M. A... C... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme E... B... épouse C...

à M. A... C..., au ministre de l'intérieur et à Me Traversini.

Copie en sera adressée au préfet des Alpes-Maritimes.

Délibéré après l'audience publique du 21 juin 2022 où siégeaient :

' M. Badie, président,

' M. Revert, président assesseur,

' Mme Renault, première conseillère.

Lu en audience publique le 5 juillet 2022.

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N° 20MA02248


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Marseille
Formation : 4ème chambre
Numéro d'arrêt : 20MA02248
Date de la décision : 05/07/2022
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-01-03 Étrangers. - Séjour des étrangers. - Refus de séjour.


Composition du Tribunal
Président : M. BADIE
Rapporteur ?: Mme Thérèse RENAULT
Rapporteur public ?: M. ANGENIOL
Avocat(s) : TRAVERSINI

Origine de la décision
Date de l'import : 12/07/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.marseille;arret;2022-07-05;20ma02248 ?
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