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06/10/2022 | FRANCE | N°21MA03220

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 2ème chambre, 06 octobre 2022, 21MA03220


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A... C... a demandé au tribunal administratif de Marseille d'annuler la décision implicite de rejet née du silence gardé par le maire de Simiane-Collongue sur sa demande, adressée le 22 novembre 2018, tendant à requalifier ses contrats conclus depuis le 1er septembre 2004 en contrats à durée déterminée, d'enjoindre à la commune de Simiane-Collongue de procéder à la requalification de ses contrats de vacataire au 1er septembre 2004, de condamner celle-ci à lui verser la somme de 31 611,15 euros en r

éparation des préjudices subis du fait de son statut de vacataire et de mett...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A... C... a demandé au tribunal administratif de Marseille d'annuler la décision implicite de rejet née du silence gardé par le maire de Simiane-Collongue sur sa demande, adressée le 22 novembre 2018, tendant à requalifier ses contrats conclus depuis le 1er septembre 2004 en contrats à durée déterminée, d'enjoindre à la commune de Simiane-Collongue de procéder à la requalification de ses contrats de vacataire au 1er septembre 2004, de condamner celle-ci à lui verser la somme de 31 611,15 euros en réparation des préjudices subis du fait de son statut de vacataire et de mettre à la charge de cette commune une somme de 2 000 euros au titre des frais du litige.

Par un jugement n° 1902422 du 31 mai 2021, le tribunal administratif de Marseille a :

- annulé la décision implicite du maire de Simiane-Collongue rejetant la demande de requalification des contrats de vacation de M. C... du 22 novembre 2018 ;

- enjoint à la commune de Simiane-Collongue de requalifier les décisions d'engagement de M. C... en qualité de vacataire à compter du 1er septembre 2004 en contrats à durée déterminée, dans un délai de trois mois à compter de sa notification ;

- condamné la commune de Simiane-Collongue à verser à M. C... une réparation financière calculée en fonction des modalités définies au point 8 de son jugement, ainsi que la somme de 4 200 euros au titre du préjudice moral ;

- mis à la charge de la commune de Simiane-Collongue la somme de 1 400 euros à verser à M. C... au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Procédure devant la cour :

Par une requête et un mémoire, enregistrés le 30 juillet 2021 et le 5 avril 2022, la commune de Simiane-Collongue, représentée par la SCP Lesage Berguet Gouard-Robert, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du 31 mai 2021 ;

2°) de rejeter la demande présentée par M. C... devant le tribunal administratif de Marseille ;

3°) de mettre à la charge de M. C... la somme de 1 600 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

En ce qui concerne la demande de requalification des contrats de vacation :

- le tribunal a prononcé la requalification des contrats de vacataire signés avec M. C... sans procéder à l'examen particulier de la situation de celui-ci ;

- la situation irrégulière de M. C... au regard des règles de cumul d'emplois publics interdit toute requalification de son contrat ;

En ce qui concerne les préjudices :

- c'est à tort que le tribunal a accordé à M. C... une réparation financière sans que celui-ci n'ait établi la réalité de l'existence d'une perte financière ;

- M. C... devra justifier de la régularité du cumul d'activités auquel il s'est livré ;

- sur le quantum du préjudice : l'indemnisation susceptible d'être allouée à M. C... ne peut être calculée que sur la base du traitement net et non sur la base du traitement brut alloué à l'agent ; conformément au jugement attaqué, l'indemnisation susceptible d'être allouée ne pourra être calculée que sur la base de l'indice de rémunération correspondant au premier échelon de la grille indiciaire des assistants territoriaux d'enseignement artistique de première classe ; il conviendra de tenir compte des congés payés à hauteur de 10% de son traitement, alloués par la commune de Simiane-Collongue ; s'agissant du supplément familial de traitement et de l'indemnité de résidence, il appartiendra à M. C... de justifier qu'il ne bénéficie pas de ces indemnités par ailleurs en sa qualité de titulaire au sein d'une autre collectivité.

Par un mémoire en défense, enregistré le 4 juillet 2022, M. A... C..., représenté par Me Andreani, conclut au rejet de la requête ainsi qu'à la mise à la charge de la commune de Simiane-Collongue de la somme de 2 000 euros à lui verser en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il fait valoir que les moyens soulevés par la commune requérante ne sont pas fondés.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 ;

- la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 ;

- le décret n° 85-1148 du 24 octobre 1985 ;

- le décret n° 88-145 du 15 février 1988 ;

- le décret n°91-298 du 20 mars 1991 ;

- le décret n° 91-857 du 2 septembre 1991 ;

- le décret n° 2012-437 du 29 mars 2012 ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. B...,

- les conclusions de M. Gautron, rapporteur public,

- et les observations de Me Gouard-Robert représentant la commune de Simiane-Collongue et de Me Tosi, de la Selarl Andreani-Humbert, représentant M. C....

Une note en délibéré, présentée par Me Gouard-Robert, représentant la commune de Simiane-Collongue, a été enregistrée le 22 septembre 2022 et n'a pas été communiquée.

Considérant ce qui suit :

1. Par un jugement du 31 mai 2021, le tribunal administratif de Marseille a annulé la décision implicite par laquelle le maire de Simiane-Collongue a refusé de faire droit à la demande de requalification de ses contrats depuis le 1er septembre 2004 en contrats à durée déterminée dont l'avait saisi M. C..., enjoint à la commune de Simiane-Collongue de requalifier les décisions d'engagement de M. C... en qualité de vacataire à compter du 1er septembre 2004 en contrats à durée déterminée, dans un délai de trois mois à compter de sa notification et, enfin, condamné la commune de Simiane-Collongue à verser à M. C... une réparation financière calculée en fonction des modalités définies au point 8 de son jugement, ainsi que la somme de 4 200 euros au titre du préjudice moral. La commune de Simiane-Collongue relève appel de ce jugement.

Sur le bien-fondé du jugement attaqué :

En ce qui concerne les conclusions à fin d'annulation :

2. Aux termes de l'article 3 de la loi du 13 juillet 1983 : " Sauf dérogation prévue par une disposition législative, les emplois civils permanents de l'État, des régions, des départements, des communes et de leurs établissements publics à caractère administratif sont, occupés (...) par des fonctionnaires régis par le présent titre. ". Aux termes de l'article 3 de la loi du 26 janvier 1984, dans sa rédaction applicable au litige : " Les collectivités (...) ne peuvent recruter des agents non titulaires pour occuper des emplois permanents que pour assurer le remplacement momentané de titulaires autorisés à exercer leurs fonctions à temps partiel ou indisponibles en raison d'un congé de maladie, d'un congé de maternité ou d'un congé parental, ou de l'accomplissement du service national, du rappel ou du maintien sous les drapeaux, ou pour faire face temporairement et pour une durée maximale d'un an à la vacance d'un emploi qui ne peut être immédiatement pourvu dans les conditions prévues par la présente loi. / Ces collectivités (...) peuvent, en outre, recruter des agents non titulaires pour exercer des fonctions correspondant à un besoin saisonnier pour une durée maximale de six mois pendant une même période de douze mois et conclure pour une durée maximale de trois mois, renouvelable une fois à titre exceptionnel, des contrats pour faire face à un besoin occasionnel. (...). ".

3. Il ressort des pièces du dossier que M. C... a assuré, à compter du mois de septembre 2004, des cours de musique au sein de l'école municipale de Simiane-Collongue, selon un volume horaire variable chaque année. Il a bénéficié ainsi de contrats au titre de chaque année scolaire jusqu'en 2018, qui se sont succédés de manière discontinue, toujours sur une période allant du mois de septembre à celui de juin. Dans ces conditions, il occupait un emploi répondant à un besoin permanent, et, alors même qu'il était rémunéré sur la base d'un nombre de vacations multiplié par un taux horaire, il ne pouvait être regardé comme ayant la qualité de vacataire engagé pour accomplir ponctuellement une tâche déterminée mais devait être considéré comme un agent non titulaire de la fonction publique territoriale recruté sur un emploi permanent. La circonstance que l'intéressé demeure par ailleurs un agent public territorial titulaire dans une autre collectivité est à cet égard sans incidence. Dans ces conditions, c'est à bon droit que les premiers juges ont annulé la décision implicite par laquelle le maire de Simiane-Collongue a refusé de faire droit à sa demande de requalification de ses contrats depuis le 1er septembre 2004 en contrats à durée déterminée dont l'avait saisi M. C....

En ce qui concerne les conclusions à fin d'injonction :

4. Compte tenu de ce qui vient d'être dit, c'est également à bon droit que les premiers juges ont enjoint à la commune de Simiane-Collongue de requalifier les décisions d'engagement de M. C... en qualité de vacataire à compter du 1er septembre 2004 en contrats à durée déterminée, dans un délai de trois mois à compter de la notification de son jugement.

En ce qui concerne les conclusions indemnitaires :

5. Compte tenu de ce qui a été dit au point 3, M. C... a droit à réparation des préjudices directement liés à l'illégalité commise par la commune de Simiane-Collongue.

6. Aux termes de l'article 4 du décret du 2 mai 2007 : " Le cumul d'une activité exercée à titre accessoire mentionnée aux articles 2 et 3 avec une activité exercée à titre principal est subordonné à la délivrance d'une autorisation par l'autorité dont relève l'agent intéressé. (...) ". Aux termes de l'article 7 du décret du 27 janvier 2017 : " Le cumul d'une activité exercée à titre accessoire mentionnée à l'article 6 avec une activité exercée à titre principal est subordonné à la délivrance d'une autorisation par l'autorité dont relève l'agent intéressé. ". Contrairement à ce qu'allègue la commune, M. C... justifie avoir été autorisé par son employeur à cumuler son emploi de professeur musique au sein de l'école municipale de Simiane-Collongue avec son emploi au sein de la commune d'Aix-en-Provence de manière régulière au regard des dispositions précitées. Par suite, aucune faute de nature à réduire son droit à indemnité ne peut lui être reprochée.

S'agissant du préjudice financier :

7. M. C... a droit à une indemnité correspondant à la différence entre les rémunérations qui lui sont dues et celles qu'il a effectivement perçues, parmi lesquelles celles que la commune de Simiane-Collongue lui a, le cas échéant, versées au titre des congés payés. Par ailleurs, aux termes de l'article 8 du décret du 20 mars 1991 : " Un fonctionnaire ne peut occuper un ou plusieurs emplois permanents à temps non complet que si la durée totale de service qui en résulte n'excède pas de plus de 15 p. 100 celle afférente à un emploi à temps complet. ". Le montant des rémunérations qui sont dues à M. C... ne saurait, par conséquent, excéder le montant des rémunérations correspondant à la durée totale de service autorisée par ces dispositions.

8. Compte tenu de ce que la rémunération de M. C... prévue au contrat qui le liait avec la commune de Simiane-Collongue prenait pour référence le 1er échelon de l'indice de " professeur d'école nationale de musique " avec une minoration de 40 % du traitement, qui correspond à un taux horaire de 16 euros brut, le droit à indemnisation de l'intéressé doit être calculé à partir du montant brut, et non pas net, de l'indice de rémunération correspondant au premier échelon de la grille indiciaire des assistants territoriaux d'enseignement artistique de 1ère classe. Ainsi et contrairement à ce que soutient la commune, c'est à bon droit que les premiers juges ont fixé le taux horaire de la rémunération à laquelle M. C... a droit à un montant de 16 euros brut.

9. M. C... n'ayant pas sollicité l'octroi d'un supplément familial de traitement et le tribunal n'ayant pas non plus accordé une indemnisation à ce titre, la commune requérante ne peut utilement soutenir que l'intéressé n'aurait pas droit à cet avantage financier.

10. Enfin, comme l'a exactement jugé le tribunal, M. C... a droit au bénéfice de l'indemnité de résidence sous réserve qu'il remplisse les conditions pour y prétendre.

S'agissant du préjudice moral :

11. Les premiers juges ont fait une juste appréciation du préjudice moral subi par M. C... du fait de l'illégalité commise par la commune de Simiane-Collongue en fixant le montant de l'indemnité due à ce titre à une somme de 4 200 euros.

12. Il résulte de tout ce qui précède que la commune de Simiane-Collongue est uniquement fondée à demander que le montant de la réparation financière à laquelle elle doit être condamnée à verser à M. C... soit calculé en fonction des modalités définies au point 8 du jugement attaqué en tenant compte également des congés payés déjà payés et du temps de travail maximal autorisé.

Sur les frais liés au litige :

13. Dans les circonstances de l'espèce, il n'y a pas lieu de faire droit aux conclusions présentées par les parties sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

D É C I D E :

Article 1er : La réparation financière que la commune de Simiane-Collongue a été condamnée à verser à M. C... par l'article 3 du jugement du 31 mai 2021 du tribunal administratif de Marseille doit tenir compte également des congés payés déjà payés et du temps de travail maximal autorisé.

Article 2 : L'article 3 du jugement n° 1902422 du 31 mai 2021 du tribunal administratif de Marseille est réformé en ce qu'il a de contraire au présent arrêt.

Article 3 : Le surplus des conclusions des parties est rejeté.

Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à la commune de Simiane-Collongue et à M. A... C....

Délibéré après l'audience du 22 septembre 2022 où siégeaient :

- Mme Fedi, présidente de chambre,

- M. Taormina, président-assesseur,

- M. Mahmouti, premier conseiller.

Rendu public par mise à disposition au greffe, le 6 octobre 2022.

2

N° 21MA03220


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Marseille
Formation : 2ème chambre
Numéro d'arrêt : 21MA03220
Date de la décision : 06/10/2022
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

36-13-03 Fonctionnaires et agents publics. - Contentieux de la fonction publique. - Contentieux de l'indemnité.


Composition du Tribunal
Président : Mme FEDI
Rapporteur ?: M. Jérôme MAHMOUTI
Rapporteur public ?: M. GAUTRON
Avocat(s) : SCP LESAGE - BERGUET - GOUARD-ROBERT

Origine de la décision
Date de l'import : 16/10/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.marseille;arret;2022-10-06;21ma03220 ?
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