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20/01/2023 | FRANCE | N°22MA01785

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 7ème chambre, 20 janvier 2023, 22MA01785


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B... A... a demandé au tribunal administratif de Nice d'annuler la décision du 23 septembre 2020 par laquelle le préfet des Alpes-Maritimes a refusé de lui délivrer un titre de séjour.

Par un jugement n° 2004804 du 16 juin 2022, le tribunal administratif de Nice a rejeté cette demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête, enregistrée le 24 juin 2022, sous le n° 22MA01785, M. A..., représenté par Me Antoine, demande à la Cour :

1°) d'annuler ce jugement du 16 jui

n 2022 du tribunal administratif de Nice ;

2°) d'annuler la décision du 23 septembre 2020 ;

3°) d'en...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B... A... a demandé au tribunal administratif de Nice d'annuler la décision du 23 septembre 2020 par laquelle le préfet des Alpes-Maritimes a refusé de lui délivrer un titre de séjour.

Par un jugement n° 2004804 du 16 juin 2022, le tribunal administratif de Nice a rejeté cette demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête, enregistrée le 24 juin 2022, sous le n° 22MA01785, M. A..., représenté par Me Antoine, demande à la Cour :

1°) d'annuler ce jugement du 16 juin 2022 du tribunal administratif de Nice ;

2°) d'annuler la décision du 23 septembre 2020 ;

3°) d'enjoindre au préfet des Alpes-Maritimes de lui délivrer un titre de séjour mention " membre de famille d'un citoyen de l'Union " ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 500 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- la décision en litige est insuffisamment motivée ;

- il bénéficie de ressources suffisantes pour prendre en charge sa famille et n'a jamais eu recours à l'assistance sociale de la France ;

- la décision contestée viole l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- elle méconnaît les stipulations de l'article 3-1 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant ;

- elle portent atteinte à l'article 2 de la charte des droits fondamentaux de l'Union européenne.

La requête a été communiquée au préfet des Alpes-Maritimes qui n'a pas produit de mémoire.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention internationale relative aux droits de l'enfant, signée à New-York le 26 janvier 1990 ;

- le Traité sur le fonctionnement de l'Union européenne ;

- la Charte des droits fondamentaux de l'Union européenne ;

- la directive 2004/38/CE du Parlement européen et du Conseil du 29 avril 2004 ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

- le décret n° 91-1266 du 19 décembre 1991 ;

- les arrêts de la Cour de justice de l'Union Européenne C-413/99 du 17 septembre 2002, C- 200/02 du 19 octobre 2004, C-34/09 du 8 mars 2011 et C-86/12 du 10 octobre 2013 ;

- le code de justice administrative.

La présidente de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le rapport de Mme C... a été entendu au cours de l'audience publique.

Considérant ce qui suit :

1. M. A..., né le 17 juin 1974 et de nationalité marocaine, serait, selon ses allégations, entré en France le 1er janvier 2015 avec son épouse et leurs deux enfants. Sa fille qui est née le 11 juillet 2013 en Espagne est de nationalité espagnole. Le 16 janvier 2019, l'intéressé a sollicité la délivrance d'un titre de séjour en qualité de " membre de famille d'un citoyen de l'Union " qui a fait l'objet d'une décision de rejet du préfet des Alpes-Maritimes le 23 septembre 2020. M. A... relève appel du jugement attaqué par lequel le tribunal administratif de Nice a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cette décision.

Sur le bien-fondé du jugement attaqué :

2. M. A... reprend en appel le moyen tiré de l'insuffisance de motivation de la décision contestée. Toutefois, il y a lieu d'écarter ce moyen, qui ne comporte aucun développement nouveau, par adoption des motifs retenus à juste titre par les premiers juges.

3. D'une part, aux termes de l'article 20 du Traité sur le fonctionnement de l'Union européenne : " 1. Il est institué une citoyenneté de l'Union. Est citoyen de l'Union toute personne ayant la nationalité d'un État membre. La citoyenneté de l'Union s'ajoute à la citoyenneté nationale et ne la remplace pas. 2. Les citoyens de l'Union jouissent des droits et sont soumis aux devoirs prévus par les traités. Ils ont, entre autres : a) le droit de circuler et de séjourner librement sur le territoire des États membres ; [...] Ces droits s'exercent dans les conditions et limites définies par les traités et par les mesures adoptées en application de ceux-ci. ". Aux termes de l'article 7 de la directive 2004/38/CE du Parlement européen et du Conseil, du 29 avril 2004, relative au droit des citoyens de l'Union et des membres de leurs familles de circuler et de séjourner librement sur le territoire des Etats membres, intitulé " Droit de séjour de plus de trois mois " : " 1. Tout citoyen de l'Union a le droit de séjourner sur le territoire d'un autre État membre pour une durée de plus de trois mois : [...] b) s'il dispose, pour lui et pour les membres de sa famille, de ressources suffisantes afin de ne pas devenir une charge pour le système d'assistance sociale de l'État membre d'accueil au cours de son séjour, et d'une assurance maladie complète dans l'État membre d'accueil [...] 2. Le droit de séjour prévu au paragraphe 1 s'étend aux membres de la famille n'ayant pas la nationalité d'un État membre lorsqu'ils accompagnent ou rejoignent dans l'État membre d'accueil le citoyen de l'Union, pour autant que ce dernier satisfasse aux conditions énoncées au paragraphe 1, points a), b) ou c) ".

4. Ces dispositions combinées, telles qu'interprétées par la Cour de justice de l'Union européenne, notamment dans les arrêts visés ci-dessus, confèrent au ressortissant mineur d'un Etat membre, en sa qualité de citoyen de l'Union, ainsi que, par voie de conséquence, au ressortissant d'un Etat tiers, parent de ce mineur et qui en assume la charge, un droit de séjour dans l'Etat membre d'accueil à la double condition que cet enfant soit couvert par une assurance maladie appropriée et que le parent qui en assume la charge dispose de ressources suffisantes. L'Etat membre d'accueil, qui doit assurer aux citoyens de l'Union la jouissance effective des droits que leur confère ce statut, ne peut refuser à l'enfant mineur, citoyen de l'Union, et à son parent, le droit de séjourner sur son territoire que si l'une au moins de ces deux conditions, dont le respect permet d'éviter que les intéressés ne deviennent une charge déraisonnable pour ses finances publiques, n'est pas remplie. Dans pareille hypothèse, l'éloignement forcé du ressortissant de l'Etat tiers et de son enfant mineur ne pourrait, le cas échéant, être ordonné qu'à destination de l'Etat membre dont ce dernier possède la nationalité ou de tout Etat membre dans lequel ils seraient légalement admissibles.

5. D'autre part, aux termes de l'article L. 121-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile qui transpose les dispositions précitées de la directive du 29 avril 2004 : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, tout citoyen de l'Union européenne, (...) a le droit de séjourner en France pour une durée supérieure à trois mois s'il satisfait à l'une des conditions suivantes : (...) / 2° S'il dispose pour lui et pour les membres de sa famille tels que visés au 4° de ressources suffisantes afin de ne pas devenir une charge pour le système d'assistance sociale, ainsi que d'une assurance maladie ; / (...) / 4° S'il est un descendant direct âgé de moins de vingt et un ans ou à charge, ascendant direct à charge, conjoint, ascendant ou descendant direct à charge du conjoint, accompagnant ou rejoignant un ressortissant qui satisfait aux conditions énoncées aux 1° ou 2° ; (...) ".

6. En sa qualité de père d'un enfant mineur de nationalité espagnole, qui à la date de la décision contestée était citoyen de l'Union européenne, M. A... pouvait prétendre au droit de séjourner en France, Etat membre d'accueil, sous la double condition de disposer de ressources suffisantes et d'une couverture maladie appropriée. S'il soutient qu'il dispose de telles ressources issues de son activité de coiffeur à domicile non déclarée, il ne l'établit pas en se bornant à produire des documents bancaires postérieurs à la décision en litige. Par suite, la décision contestée ne méconnaît pas les dispositions de l'article 20 du traité sur le fonctionnement de l'Union européenne.

7. Aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. / 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui. ".

8. M. A... soutient sans l'établir être entré en France le 1er janvier 2015, accompagnée de son épouse, une compatriote dont la situation régulière sur le territoire français n'est pas établie, et de leurs deux enfants nés le 29 juin 2006 au Maroc et le 11 juillet 2013 en Espagne. Ces derniers sont scolarisés sur le territoire national, depuis leur arrivée, en classe de seconde et de CE2. Toutefois, il ne ressort pas des pièces du dossier que M. A... serait dans l'impossibilité de reconstituer sa cellule familiale hors de France, notamment dans son pays d'origine ou en Espagne, pays dont l'un de ses enfants mineurs a la nationalité. Dans ses conditions et alors même que le requérant exercerait une activité de coiffeur à domicile, que ses deux enfants seraient scolarisés en France et ne parleraient pas l'espagnol, eu égard à la durée et aux conditions de son séjour en France, la décision contestée n'a pas porté une atteinte à son droit au respect de sa vie privée et familiale disproportionnée aux buts en vue desquels elle a été prise, et n'a, par suite, pas méconnu les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.

9. Aux termes du paragraphe 1 de l'article 3 de la convention internationale des droits de l'enfant : " Dans toutes les décisions qui concernent les enfants, qu'elles soient le fait des institutions publiques ou privées de protection sociale, des tribunaux, des autorités administratives ou des organes législatifs, l'intérêt supérieur de l'enfant doit être une considération primordiale ". Il résulte de ces stipulations, qui peuvent être utilement invoquées à l'appui d'un recours pour excès de pouvoir, que, dans l'exercice de son pouvoir d'appréciation, l'autorité administrative doit accorder une attention primordiale à l'intérêt supérieur des enfants dans toutes les décisions les concernant.

10. La décision en litige n'a, par elle-même, ni pour objet, ni pour effet, de séparer durablement M. A... de ses deux enfants, ni ces enfants de leur père. L'intéressé ne démontre pas, ainsi qu'il a été dit précédemment, que sa cellule familiale ne pourrait être reconstituée hors de France, notamment dans son pays d'origine ou en Espagne, pays dont l'un de ses enfants a la nationalité. Enfin, il ne ressort pas des pièces du dossier que les enfants de M. A... ne pourraient pas poursuivre leur scolarité dans leur pays d'origine. Dès lors et compte tenu de ce qui a été dit au point 8, le moyen tiré de la violation des stipulations précitées du paragraphe 1 de l'article 3 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant doit être écarté.

11. Aux termes de l'article 2 de la Charte des droits fondamentaux de l'Union européenne : " 1. Toute personne a droit à la vie. / 2. Nul ne peut être condamné à la peine de mort, ni exécuté ".

12. M. A... ne peut utilement se prévaloir de la violation de l'article 2 de la Charte des droits fondamentaux de l'Union européenne dès lors que la décision contestée, qui se borne à rejeter sa demande de titre de séjour ne porte aucune atteinte au droit à la vie ou à la dignité.

13. Il résulte de tout ce qui précède que M. A... n'est pas fondé à soutenir que s'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Nice a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision préfectorale du 23 septembre 2020.

Sur les conclusions aux fins d'injonction :

14. Le présent arrêt qui rejette les conclusions à fin d'annulation présentées par M. A... n'implique aucune mesure d'exécution. Il y a lieu, par suite, de rejeter les conclusions à fin d'injonction de M. A....

Sur les frais liés au litige :

15. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de l'Etat, qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, tout ou partie de la somme que M. A... demande au titre des frais exposés et non compris dans les dépens.

D É C I D E :

Article 1er : La requête de M. A... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. B... A... et au ministre de l'intérieur et des Outre-mer.

Copie en sera adressée au préfet des Alpes-Maritimes.

Délibéré après l'audience du 6 janvier 2023, où siégeaient :

- Mme Chenal-Peter, présidente de chambre,

- M. Prieto, premier conseiller,

- Mme Marchessaux, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe, le 20 janvier 2023.

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N° 22MA01785

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Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Marseille
Formation : 7ème chambre
Numéro d'arrêt : 22MA01785
Date de la décision : 20/01/2023
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-01-03 Étrangers. - Séjour des étrangers. - Refus de séjour.


Composition du Tribunal
Président : Mme CHENAL-PETER
Rapporteur ?: Mme Jacqueline MARCHESSAUX
Rapporteur public ?: M. GUILLAUMONT
Avocat(s) : ANTOINE

Origine de la décision
Date de l'import : 29/01/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.marseille;arret;2023-01-20;22ma01785 ?
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