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09/02/2023 | FRANCE | N°22MA00452

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 3ème chambre, 09 février 2023, 22MA00452


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A... B... a demandé au tribunal administratif de Marseille d'annuler l'arrêté du 30 juin 2021 par lequel le préfet des Bouches-du-Rhône a décidé de l'expulser du territoire français et a fixé le pays de destination de cette mesure.

Par un jugement n° 2106516 du 7 décembre 2021, le tribunal administratif de Marseille a rejeté cette demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête, enregistrée le 4 février 2022, M. B..., représenté par Me Marchi, demande à la Cour :
r>1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de Marseille du 7 décembre 2021 ;

2°) d'annuler l'...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A... B... a demandé au tribunal administratif de Marseille d'annuler l'arrêté du 30 juin 2021 par lequel le préfet des Bouches-du-Rhône a décidé de l'expulser du territoire français et a fixé le pays de destination de cette mesure.

Par un jugement n° 2106516 du 7 décembre 2021, le tribunal administratif de Marseille a rejeté cette demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête, enregistrée le 4 février 2022, M. B..., représenté par Me Marchi, demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de Marseille du 7 décembre 2021 ;

2°) d'annuler l'arrêté du préfet des Bouches-du-Rhône du 30 juin 2021 ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 2 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- l'arrêté est insuffisamment motivé ;

- le préfet, en décidant son expulsion, a méconnu l'article L. 631-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la décision d'expulsion a été prise en méconnaissance de l'article L. 631-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le préfet a méconnu l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- la décision d'expulsion a été prise en méconnaissance des articles 3-1 et 9 de la convention internationale des droits de l'enfant.

La requête a été communiquée au préfet des Bouches-du-Rhône qui n'a pas produit de mémoire.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- la convention internationale des droits de l'enfant ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le code des relations entre le public et l'administration ;

- le code de justice administrative.

La présidente de la Cour a désigné M. Platillero, président assesseur, pour présider la formation de jugement, en application de l'article R. 222-26 du code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme D...,

- les conclusions de M. Ury, rapporteur public,

- et les observations de Me Marchi, représentant M. B....

Considérant ce qui suit :

1. M. B..., ressortissant tunisien né en 1986, relève appel du jugement du 7 décembre 2021 par lequel le tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 30 juin 2021 par lequel le préfet des Bouches-du-Rhône a prononcé son expulsion du territoire français et a fixé le pays de destination de cette mesure.

2. En premier lieu, l'arrêté attaqué, d'une part, vise les textes utiles sur lesquels il se fonde, notamment l'article L. 631-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, et, d'autre part, rappelle les faits qui motivent l'expulsion de M. B..., en indiquant qu'il s'est rendu coupable, le 24 mars 2020, de violences sur conjoint suivies d'une incapacité supérieure à huit jours et en état d'ivresse, et précise que la mesure intervient en raison de l'ensemble de son comportement. Il relève également que l'intéressé ne justifie pas contribuer effectivement à l'entretien et à l'éducation de ses deux enfants. Ainsi, l'arrêté en litige est suffisamment motivé en droit et en fait au regard des exigences des articles L 211-2 à L. 211-5 du code des relations entre le public et l'administration.

3. En deuxième lieu, aux termes de l'article L. 631-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " L'autorité administrative peut décider d'expulser un étranger lorsque sa présence en France constitue une menace grave pour l'ordre public, sous réserve des conditions propres aux étrangers mentionnés aux articles L. 631-2 et L. 631-3 ". Aux termes de l'article L. 631-2 du même code, dans sa rédaction applicable au présent litige : " Ne peut faire l'objet d'une décision d'expulsion que si elle constitue une nécessité impérieuse pour la sûreté de l'Etat ou la sécurité publique et sous réserve que l'article L. 631-3 n'y fasse pas obstacle : / 1° L'étranger, ne vivant pas en état de polygamie, qui est père ou mère d'un enfant français mineur résidant en France, à condition qu'il établisse contribuer effectivement à l'entretien et à l'éducation de l'enfant dans les conditions prévues par l'article 371-2 du code civil depuis la naissance de celui-ci ou depuis au moins un an ; / 2° L'étranger marié depuis au moins trois ans avec un conjoint de nationalité française, à condition que la communauté de vie n'ait pas cessé depuis le mariage et que le conjoint ait conservé la nationalité française ; (...) ".

4. D'une part, si M. B... est marié à une ressortissante française avec laquelle il a eu deux enfants de nationalité française nés en 2017 et 2019, il a été incarcéré en mars 2020 pour des faits de violences aggravées sur son épouse, avec laquelle il avait interdiction d'entrer en contact à la date de la décision attaquée, et il ne démontre pas contribuer effectivement à l'entretien et l'éducation de ses enfants par la seule production de copies du recto de chèques et d'une attestation rédigée par son cousin. Dans ces conditions, M. B... était bien au nombre des étrangers susceptibles de faire l'objet d'une mesure d'expulsion en application des dispositions précitées de l'article L. 631-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.

5. D'autre part, il ressort des pièces du dossier que M. B... a été condamné, le 26 mars 2020, à une peine de trois ans d'emprisonnement, dont un avec sursis, pour des faits de violences volontaires et en état d'ivresse sur son épouse, qui ont entraîné une incapacité temporaire de travail de cette dernière de 18 jours. Si l'appelant, qui a été placé sous un régime de semi-liberté à compter du 15 mars 2021 au motif, notamment, de son bon comportement en détention, fait valoir qu'il n'a pas fait l'objet d'une interdiction du territoire, qu'il travaille, suit des soins à fin de guérir son addiction à l'alcool, et regrette la violence dont il a fait preuve, eu égard à la particulière gravité des faits, à leur imputation par M. B... à son épouse, laquelle, selon lui, " lui manquait de respect ", et à leur caractère récent, c'est sans commettre d'erreur d'appréciation que le préfet a pu estimer que son comportement constituait une menace grave pour l'ordre public.

6. En troisième lieu, aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. / 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui (...) ".

7. M. B..., qui n'est entré en France qu'en 2017, est séparé de son épouse, et a été incarcéré à compter du mois de mars 2020 jusqu'au 15 mars 2021, date à laquelle il a bénéficié d'un régime de semi-liberté comme il a été dit précédemment. Par ailleurs, ainsi qu'il a été dit au point 4, il ne démontre pas contribuer effectivement à l'entretien et l'éducation de ses enfants. Enfin, il n'établit pas être dépourvu d'attaches familiales en Tunisie, où il a vécu la majeure partie de sa vie. Dans ces conditions, le préfet des Bouches-du-Rhône, en prononçant son expulsion du territoire français, n'a pas, eu égard à la gravité de la menace pour l'ordre public que constitue sa présence en France, porté une atteinte disproportionnée au droit de l'intéressé au respect de sa vie privée et familiale garanti par l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.

8. En quatrième lieu, aux termes du paragraphe 1 de l'article 3 de la convention relative aux droits de l'enfant susvisée : " Dans toutes les décisions qui concernent les enfants, qu'elles soient le fait des institutions publiques ou privées de protection sociale, des tribunaux, des autorités administratives ou des organes législatifs, l'intérêt supérieur de l'enfant doit être une considération primordiale ".

9. Ainsi qu'il a été dit au point 4, M. B... ne rapporte pas la preuve d'une contribution effective à l'entretien et à l'éducation de ses filles. Par suite, le préfet des Bouches-du-Rhône n'a pas méconnu l'intérêt supérieur de ses enfants en prenant la décision d'expulsion.

10. En cinquième et dernier lieu, si M. B... invoque également la violation de l'article 9 de la convention du 26 janvier 1990 relative aux droits de l'enfant, ces stipulations créent seulement des obligations entre Etats sans ouvrir de droits aux intéressés et ne peuvent donc, en tout état de cause, être utilement invoquées.

11. Il résulte de tout ce qui précède que M. B... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande. Par conséquent, ses conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative doivent être rejetées.

D É C I D E :

Article 1er : La requête de M. B... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... B... et au ministre de l'intérieur et des outre-mer.

Copie en sera adressée au préfet des Bouches-du-Rhône.

Délibéré après l'audience du 26 janvier 2023, où siégeaient :

- M. Platillero, président assesseur, président de la formation de jugement en application de l'article R. 222-26 du code de justice administrative,

- Mme C... et Mme D..., premières conseillères.

Rendu public par mise à disposition au greffe, le 9 février 2023.

2

N° 22MA00452


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Marseille
Formation : 3ème chambre
Numéro d'arrêt : 22MA00452
Date de la décision : 09/02/2023
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-02 Étrangers. - Expulsion.


Composition du Tribunal
Président : M. PLATILLERO
Rapporteur ?: Mme Florence MASTRANTUONO
Rapporteur public ?: M. URY
Avocat(s) : MARCHI SYLVAIN

Origine de la décision
Date de l'import : 19/02/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.marseille;arret;2023-02-09;22ma00452 ?
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