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12/06/2023 | FRANCE | N°21MA03813

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 7ème chambre, 12 juin 2023, 21MA03813


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B... G... a demandé au tribunal administratif de Nice d'annuler l'arrêté du préfet des Alpes-Maritimes du 28 octobre 2019 portant délimitation du domaine public maritime naturel intégrant les lais et relais de la mer sur le territoire de la commune de Cap-d'Ail, plage de la Mala et la décision implicite par laquelle le préfet des Alpes-Maritimes a rejeté son recours gracieux formé le 17 décembre 2019 à l'encontre de cet arrêté.

Par un jugement n° 2001292 du 6 juillet 2021, le tribunal admin

istratif de Nice a rejeté cette demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requê...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B... G... a demandé au tribunal administratif de Nice d'annuler l'arrêté du préfet des Alpes-Maritimes du 28 octobre 2019 portant délimitation du domaine public maritime naturel intégrant les lais et relais de la mer sur le territoire de la commune de Cap-d'Ail, plage de la Mala et la décision implicite par laquelle le préfet des Alpes-Maritimes a rejeté son recours gracieux formé le 17 décembre 2019 à l'encontre de cet arrêté.

Par un jugement n° 2001292 du 6 juillet 2021, le tribunal administratif de Nice a rejeté cette demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête et un mémoire, enregistrés les 6 septembre 2021 et 10 février 2023, sous le n° 21MA03813, M. G..., représenté par Me Marchi, demande à la Cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Nice du 6 juillet 2021 ;

2°) d'annuler l'arrêté du préfet des Alpes-Maritimes du 28 octobre 2019 et la décision implicite de rejet de son recours gracieux ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 3 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- en refusant de tenir compte de ses productions, le tribunal a méconnu le caractère contradictoire de la procédure et a violé l'article 6-1 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- le tribunal aurait dû faire droit à sa demande de réouverture de l'instruction ;

- le jugement attaqué ne fait pas mention du rapport de l'expertise ordonnée par le tribunal portant sur la délimitation du domaine public ni des autres pièces qu'il a produites ;

- l'enquête publique a été anormalement courte et totalement insuffisante ;

- elle est entachée d'inexactitudes et d'omissions qui ont eu pour effet de nuire à l'information complète du public et ont été de nature à exercer une influence sur la décision de l'autorité administrative ;

- le tribunal a dénaturé les faits et les pièces du dossier qui devait le conduire à considérer que la délimitation préfectorale n'était pas conforme aux dispositions du code général de la propriété des personnes publiques ;

- en ne tenant pas compte de la procédure judiciaire de délimitation judiciaire, le tribunal a privé sa décision de base légale au regard du principe de sécurité juridique.

Par un mémoire en défense, enregistré le 12 janvier 2023, le ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires conclut au rejet de la requête de M. G....

Il fait valoir que les moyens soulevés par M. G... ne sont pas fondés.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- la charte des droits fondamentaux de l'Union européenne ;

- le code de l'environnement ;

- le code général de la propriété de personnes publiques ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Marchessaux,

- les conclusions de M. Guillaumont, rapporteur public,

- et les observations de Me Marchi, représentant M. G....

Considérant ce qui suit :

1. Par des arrêtés des 18 février 1982 et 14 mai 1996, le préfet des Alpes-Maritimes a concédé à la commune de Cap d'Ail, l'équipement, l'entretien et l'exploitation de la plage de la Mala. La commune de Cap d'Ail a accordé des sous-traités d'exploitation de la plage à divers occupants, dont M. G..., gérant de l'établissement " La Réserve de la Mala ". La concession de la plage de la Mala est venue à expiration le 31 décembre 2010 et n'a pas été renouvelée. Par un arrêté du 6 juin 2019, le préfet des Alpes-Maritimes a prescrit l'ouverture d'une enquête publique portant sur la délimitation du domaine public maritime sur la plage de la Mala, enquête qui s'est déroulée du 2 au 31 juillet 2019. Après l'avis favorable du commissaire enquêteur, du 25 août 2019, le préfet des Alpes Maritimes a, par arrêté du 28 octobre 2019, procédé à la délimitation du domaine public maritime naturel intégrant les lais et relais de la mer sur la plage de la Mala, laquelle délimitation a pour effet d'incorporer la parcelle cadastrée section DP 7a dans le domaine public maritime. M. G... relève appel du jugement du 6 juillet 2021 par lequel le tribunal administratif de Nice a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 28 octobre 2019 et de la décision implicite rejetant son recours gracieux formé le 17 décembre 2019 à l'encontre de cet arrêté.

Sur la régularité du jugement attaqué :

2. Aux termes de l'article R. 613-4 du code de justice administrative : " Le président de la formation de jugement peut rouvrir l'instruction par une décision qui n'est pas motivée et ne peut faire l'objet d'aucun recours. Cette décision est notifiée dans les mêmes formes que l'ordonnance de clôture. (...) ".

3. Devant les juridictions administratives et dans l'intérêt d'une bonne justice, le juge a toujours la faculté de rouvrir l'instruction, qu'il dirige, lorsqu'il est saisi d'une production postérieure à la clôture de celle-ci. Il lui appartient, dans tous les cas, de prendre connaissance de cette production avant de rendre sa décision et de la viser. S'il décide d'en tenir compte, il rouvre l'instruction et soumet au débat contradictoire les éléments contenus dans cette production qu'il doit, en outre, analyser. Dans le cas particulier où cette production contient l'exposé d'une circonstance de fait ou d'un élément de droit dont la partie qui l'invoque n'était pas en mesure de faire état avant la clôture de l'instruction et qui est susceptible d'exercer une influence sur le jugement de l'affaire, le juge doit alors en tenir compte, à peine d'irrégularité de sa décision.

4. Il ressort des pièces de la procédure suivie devant le tribunal administratif de Nice qu'une ordonnance du 26 mars 2021 a fixé la clôture d'instruction le 16 avril 2021 à 12h, les parties ayant été dument prévenues de cette mesure. Par un mémoire enregistré le 9 juin 2021, M. G... a sollicité la réouverture de l'instruction en application des dispositions de l'article R. 613-4 du code de justice administrative afin que soient pris en compte les rapports d'expertise des 30 septembre 2020, 14 septembre 2020, juillet 2019, 13 avril 2021 et un constat d'huissier du 7 avril 2021. Toutefois, ces rapports et constat ayant déjà été produits par la requête introductive d'instance, le bordereau du 12 avril 2021 et le mémoire du 15 avril 2021 et communiqués à la partie adverse par le greffe du tribunal, c'est sans irrégularité que le tribunal, qui a visé ce mémoire du 9 juin 2021, ne l'a pas communiqué et n'a pas réouvert l'instruction.

5. L'article L. 5 du code de justice administrative prévoit que : " L'instruction des affaires est contradictoire. Les exigences de la contradiction sont adaptées à celles de l'urgence, du secret de la défense nationale et de la protection de la sécurité des personnes. ". Aux termes de l'article 6 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " Toute personne a droit à ce que sa cause soit entendue équitablement, publiquement et dans un délai raisonnable, par un tribunal indépendant et impartial, établi par la loi, qui décidera, soit des contestations sur ses droits et obligations de caractère civil, soit du bien-fondé de toute accusation en matière pénale dirigée contre elle. (...)". Selon l'article 47 de la charte des droits fondamentaux de l'Union européenne, intitulé " droit à un recours effectif et à accéder à un tribunal impartial " : " Toute personne dont les droits et libertés garantis par l'Union ont été violés a droit à un recours effectif devant un tribunal dans le respect des conditions prévues au présent article. / Toute personne a droit à ce que sa cause soit entendue équitablement, publiquement et dans un délai raisonnable par un tribunal indépendant et impartial, établi préalablement par la loi (...) ".

6. La circonstance que les premiers juges n'aient pas tenu compte ni même cité les rapports d'expertise mentionnés au point 4 produits par M. G..., dont celui du 30 septembre 2020 ordonné par le tribunal dans une autre instance relative à une contravention de grande voirie impliquant l'appelant, ne saurait caractériser une méconnaissance des principes du contradictoire et de l'égalité des armes, ces pièces étant postérieures à la décision attaquée. Par ailleurs, comme dit au point 4, la requête de M. G..., son bordereau du 12 avril 2021 et son mémoire complémentaire du 15 avril 2021 contenant ces rapports ont bien été communiqués au préfet des Alpes-Maritimes.

7. M. G... soutient que le jugement attaqué ne fait pas mention du rapport du 30 septembre 2020 de l'expertise qu'il a ordonnée par un jugement avant-dire droit n° 1602246 du 30 octobre 2018 relatif à une autre instance de contravention de grande voirie impliquant le requérant, ainsi que des pièces qu'il a produites, constituées par un rapport du 14 septembre 2020 de M. F..., un rapport du 13 avril 2021 de la société GlobOcéan et un constat d'huissier du 7 avril 2021. Toutefois, les premiers juges n'étaient pas tenus de les mentionner dès lors que ces pièces sont postérieures à l'arrêté et à la décision en litige. Par ailleurs, il ressort du point 6 du jugement contesté, que le tribunal a fait état des conclusions du rapport du bureau d'études ICTP, établi en juillet 2019, pour les écarter. Par suite, ce jugement est suffisamment motivé.

Sur le bien-fondé du jugement attaqué :

8. Aux termes de l'article L. 123-9 du code de l'environnement : " La durée de l'enquête publique est fixée par l'autorité compétente chargée de l'ouvrir et de l'organiser. Elle ne peut être inférieure à trente jours pour les projets, plans et programmes faisant l'objet d'une évaluation environnementale. (...) ".

9. Il ressort du dossier de l'enquête publique que cette dernière a duré trente jours consécutifs, du 2 juillet 2019 au 31 juillet 2019. Cette durée conforme aux dispositions de l'article L. 123-9 du code de l'environnement n'est pas de nature à établir que l'enquête aurait été insuffisante d'autant qu'elle a donné lieu à 54 observations dont celles du requérant et 102 pièces jointes, alors même qu'elle s'est déroulée pendant la période estivale. Il en va de même du fait que le commissaire enquêteur aurait estimé dans son rapport que cette enquête d'un grand intérêt technique, environnemental, juridique et sociétal a été menée dans un temps réduit, suivant en cela la demande des services de l'Etat.

10. Le porter à connaissance des caractérisations des niveaux marins actuels et à horizon 2100 du 7 décembre 2017 établi par le service déplacements, risques, sécurité de la direction départementale des territoires et de la mer (DDTM) des Alpes-Maritimes, dans le cadre des articles L. 132-2 et R. 132-1 du code de l'urbanisme dont se prévaut M. G... n'avait pas à être joint au dossier de l'enquête publique dès lors qu'il n'a pas pour objet de délimiter le domaine public maritime au droit de la plage de la Mala, en application de l'article L. 2111-4 du code général de la propriété de personnes publiques. Son absence au dossier n'a ainsi pas pu nuire à l'information du public ni exercé une influence sur la décision de l'autorité administrative.

11. Dans son rapport, le commissaire enquêteur a estimé que " l'enquête s'est déroulée conformément aux textes législatifs et réglementaires en vigueur. Le contenu du dossier mis à la disposition du public était conforme aux prescriptions du code général de la propriété des personnes publiques. Malgré leur inévitable technicité ces documents ont permis une bonne compréhension du projet par le public ". Il a également noté que l'aspect scientifique et photographique du dossier était développé de façon satisfaisante et a exposé les procédés utilisés par l'Etat, à savoir l'étude de domanialité, les analyses photographiques, cartographiques, cadastrales, topographiques, sondages, l'étude de déferlement de la houle ainsi que des constats établis par des agents assermentés. Le commissaire enquêteur a indiqué, en outre, que de nombreux rapports d'expertise lui ont été remis lors de la procédure d'enquête. Il conclut que le dossier " contient l'essentiel des informations nécessaires à une bonne information du public. Il est suffisamment explicite et détaillé et retient une variété de critères scientifiques pour délimiter le domaine public maritime ". Par ailleurs, le rapport d'enquête a mentionné les observations de M. G... ainsi que les pièces qu'il a déposées. Ces pièces constituées par le porter à connaissance des caractérisations des niveaux marins actuels à l'horizon 2100, un relevé topométrique ainsi que par deux rapports d'un géologue-hydrologue et d'un bureau d'étude n'étant pas de nature à remettre en cause les données scientifiques et les constats sur lesquels se sont fondés les services de l'Etat pour délimiter le domaine public sur la plage de la Mala, le commissaire enquêteur n'a commis aucune inexactitude ni omission en ne les retenant pas. Par suite, l'enquête publique n'est pas entachée d'irrégularité.

12. Aux termes de l'article L. 2111-4 du code général de la propriété de personnes publiques : " Le domaine public maritime naturel de l'Etat comprend : / 1° Le sol et le sous-sol de la mer entre la limite extérieure de la mer territoriale et, côté terre, le rivage de la mer. / Le rivage de la mer est constitué par tout ce qu'elle couvre et découvre jusqu'où les plus hautes mers peuvent s'étendre en l'absence de perturbations météorologiques exceptionnelles ; / (...) / 3° Les lais et relais de la mer : / a) Qui faisaient partie du domaine privé de l'Etat à la date du 1er décembre 1963, sous réserve des droits des tiers ; / b) Constitués à compter du 1er décembre 1963. (...) / Les terrains soustraits artificiellement à l'action du flot demeurent compris dans le domaine public maritime naturel sous réserve des dispositions contraires d'actes de concession translatifs de propriété légalement pris et régulièrement exécutés. ". L'article L. 2111-5 du code précité, dans sa version en vigueur à la date de l'arrêté contesté, dispose que : " Les limites du rivage sont constatées par l'Etat en fonction des observations opérées sur les lieux à délimiter ou des informations fournies par des procédés scientifiques. (...) ". Aux termes de l'article R. 2111-5 du même code : " La procédure de délimitation du rivage de la mer, des lais et relais de la mer et des limites transversales de la mer à l'embouchure des fleuves et rivières est conduite, sous l'autorité du préfet, par le service de l'Etat chargé du domaine public maritime. (...) / Les procédés scientifiques auxquels il est recouru pour la délimitation sont les traitements de données topographiques, météorologiques, marégraphiques, houlographiques, morpho-sédimentaires, botaniques, zoologiques, bathymétriques, photographiques, géographiques, satellitaires ou historiques. ".

13. Il ressort de l'arrêté contesté et du plan de délimitation qui y est annexé que la parcelle cadastrée section DP 7a, située sur la plage de la Mala, exploitée par M. G... gérant de l'établissement " la Réserve de la Mala " a été incorporée au domaine public maritime. Dans le cadre de cette procédure de délimitation, la direction départementale des territoires et de la mer (DDTM) des Alpes-Maritimes a établi, au mois de janvier 2019, un rapport relatif à la délimitation du domaine public maritime fondé sur des données historiques, cartographiques, cadastrales, topographiques, morpho-sédimentaires et houlographiques mentionnées à l'article R. 2111-5 du code général de la propriété de personnes publiques. Selon une carte du cadastre de 1874 figurant dans ce rapport, la totalité de la plage, à l'exception de l'éperon rocheux apparaît dans l'eau. Les photographies aériennes de ce rapport montrent que la plage de la Mala s'étendait au début du 20ème siècle jusqu'à la falaise et n'était quasiment pas occupée. A l'époque le site était déjà recouvert d'un matériaux clair exempt de toute végétation caractérisant un sédiment soumis à l'action régulière des flots. Ce rapport met également en évidence, sur la base d'une étude géotechnique et des photographies aériennes anciennes, la présence de remblais anthropiques indiquant que le domaine public maritime a été soustrait artificiellement à l'action des flots, sans y avoir été expressément autorisé par une concession translative de propriété. Le rapport de la DDTM fait aussi état d'une étude du déferlement de la houle établie à partir des constats de terrain opérés les 11 et 25 janvier 2016 par un agent assermenté de la DDTM, le rapport d'un expert du 25 mars 2016 et sur les conclusions d'une expertise du centre d'études sur les risques, l'environnement, la mobilité et l'aménagement (CEREMA). Les constats montrent qu'entre 2014 et 2018, la houle a dépassé la hauteur de 2,5 m quatorze fois et celle de 4 m deux fois le 5 novembre 2014 et le 11 décembre 2017, ce qui tend à démontrer le caractère non exceptionnel de l'évènement et que son occurrence se produit environ trois fois par an. Le rapport conclut que l'intégralité du site de la plage de la Mala jusqu'à la cote 4 m A... est comprise dans le domaine public maritime. En outre, M. E... certifie, dans son rapport d'expertise du 25 mars 2016, d'après ses observations de terrain que la Mala subit, à l'image des plages de poche régionales, des submersions marines supérieures à 4-5 m A.... Par ailleurs, un rapport de visite du 12 décembre 2017 dressé par un agent assermenté de la DDTM a constaté des dépôts de sable, de galets, de gravillons, de posidonies laissés par les coups de mer la veille à l'intérieur des établissements de plage dont celui de " la Réserve de la Mala ". Il précise que selon deux bulletins météos du 11 décembre 2017, la force des vents sur le littoral niçois n'a pas dépassé les 100 km/h. Il ne ressort pas des pièces du dossier que ces submersions constatées à de nombreuses reprises relèveraient de perturbations météorologiques exceptionnelles lesquelles ne sont pas nécessairement constituées par des tempêtes violentes.

14. M. G... se prévaut du rapport du 30 septembre 2020 de M. D... qui estime qu'après analyse, la cote retenue par la DDTM des Alpes-Maritimes de 4 m A... est surévaluée, arbitraire, manque de justifications et que l'adaptation brutale de cette cote au plan cadastral est inadaptée. Toutefois, alors qu'en tout état de cause ce rapport est postérieur à l'arrêté contesté, la cote de 4 m A... est justifiée par des données probantes mentionnées au point 13, et le plan annexé à l'arrêté en litige montre que si la délimitation suit le pied de la falaise derrière les cabanons et donc le plan cadastral, elle s'en écarte à partir de l'allée de la Mala près de l'établissement " La réserve de la Mala ". En outre, cette seule circonstance n'est pas de nature à établir que cette délimitation serait erronée. Le constat réalisé par un huissier de justice, le 7 avril 2021, ainsi que le rapport du bureau d'études GlobOcean du 13 avril 2021 relatif à la qualification de la tempête Bella sur la plage de la Mala survenue les 27 et 28 décembre 2020, ne peuvent être pris en compte dès lors qu'ils sont postérieurs à l'arrêté contesté, tout comme le rapport du géomètre-expert foncier, M. F... du 14 septembre 2020. Le porter à connaissance des caractérisations des niveaux marins de la DDTM des Alpes-Maritimes, de novembre 2017 n'a pas pour objet la délimitation du domaine public maritime en application de l'article L. 2111-4 du code général de la propriété de personnes publiques. Concernant cette procédure de porter à connaissance, une note complémentaire du préfet des Alpes-Maritimes, du 26 juillet 2018, précise que " des études locales plus fines et les observations de terrain montrent que cette approximation conduirait le plus souvent à sous-évaluer l'action de la mer sur les rivages " et que " pour le cas des plages, les niveaux marins de référence donnés à travers ce porter à connaissance doivent faire l'objet d'études complémentaires ". En outre, le rapport d'étude hydrodynamique, du mois de juillet 2019, réalisé par le bureau d'études ICTP, qui analyse la caractérisation de la houle ne comporte pas d'éléments permettant de contredire utilement les constats réalisés par les agents assermentés de la DDTM. Si le rapport du 21 juillet 2019 d'un géologue-hydrologue, M. C..., conclut que l'examen du rapport Sol Essais du 11 avril 2018 et du site ne permet pas de confirmer que les bâtiments seraient fondés sur des remblais déversés sur le domaine public, il ressort de ce qui a été dit au point 13, que les limites du domaine public maritime telles que fixées par l'arrêté en litige ne sont pas fondées uniquement sur l'étude Sol Essais mais sur d'autres éléments mentionnés précédemment qui suffisent à établir ces limites.

15. Par suite, compte tenu de ce qui a été dit aux points 12 à 14, la parcelle cadastrée section DP 7a occupée par M. G... appartient au domaine public maritime en application du 1° de l'article L. 2111-4 du code général de la propriété de personnes publiques.

16. Il ressort des pièces du dossier que par un jugement n° 1602246 avant-dire droit du 30 octobre 2018, le tribunal administratif de Nice, statuant sur la demande du préfet des Alpes-Maritimes de contravention de grande voirie à l'encontre de M. G... a notamment ordonné une expertise ayant pour objet, notamment, de déterminer contradictoirement les limites de la plus haute mer au droit des parcelles occupées par le requérant. Statuant au fond, ce même tribunal a, par un jugement du 6 juillet 2021, condamné M. G..., à procéder à la remise en état des lieux par la démolition des installations et ouvrages édifiés sur le domaine public maritime et à l'évacuation des matériaux et gravats résultant de cette démolition. L'appelant ne peut utilement soutenir que le tribunal a " privé le jugement attaqué de base légale " dès lors que ce jugement constitue un litige distinct de l'instance relative à la contravention de grande voirie dont il a fait appel au titre de l'instance n° 21MA03814. Par ailleurs, la circonstance que, parallèlement à cette procédure de contravention de grande voirie au cours de laquelle le tribunal a ordonné l'expertise précitée, le préfet des Alpes-Maritimes a procédé à cette même délimitation aux termes de laquelle a été pris l'arrêté contesté, est sans incidence sur la légalité de ce dernier. Enfin, le principe de sécurité juridique n'a pas été méconnu dès lors que le jugement contesté comme celui du 6 juillet 2021 précité estiment que la parcelle de M. G... relève du 1° de l'article L. 2111-4 du code général de la propriété des personnes publiques alors même que l'expertise ordonnée par le tribunal a conclu l'inverse, cette expertise ne constituant qu'un des éléments sur lesquels les premiers juges pouvaient, éventuellement, s'appuyer pour procéder à la délimitation du domaine public maritime.

17. Il résulte de tout ce qui précède que M. G... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Nice a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 28 octobre 2019 et de la décision implicite de rejet de son recours gracieux formé le 17 décembre 2019 à l'encontre de cet arrêté.

Sur les frais liés au litige :

18. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de l'Etat qui n'est pas dans la présente instance la partie perdante, la somme demandée par M. G... au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens.

D É C I D E :

Article 1er : La requête de M. G... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. B... G... et au ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires.

Copie en sera adressée à la commune de Cap d'Ail.

Délibéré après l'audience du 26 mai 2023, où siégeaient :

- Mme Chenal-Peter, présidente de chambre,

- Mme Ciréfice, présidente assesseure,

- Mme Marchessaux, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe, le 12 juin 2023.

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N° 21MA03813

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Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Marseille
Formation : 7ème chambre
Numéro d'arrêt : 21MA03813
Date de la décision : 12/06/2023
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

24-01-01-02-03 Domaine. - Domaine public. - Consistance et délimitation. - Domaine public naturel. - Délimitation du domaine public naturel.


Composition du Tribunal
Président : Mme CHENAL-PETER
Rapporteur ?: Mme Jacqueline MARCHESSAUX
Rapporteur public ?: M. GUILLAUMONT
Avocat(s) : MARCHI

Origine de la décision
Date de l'import : 18/06/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.marseille;arret;2023-06-12;21ma03813 ?
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