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27/06/2023 | FRANCE | N°22MA02314

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 4ème chambre, 27 juin 2023, 22MA02314


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme A... B... a demandé au tribunal administratif de Marseille d'annuler la décision du 14 décembre 2020 par laquelle le maire de Marseille a refusé d'accéder à sa demande de rupture conventionnelle présentée en application du I de l'article 72 de la loi du 6 août 2019 de transformation de la fonction publique.

Par un jugement n° 2100495 du 29 juin 2022, le tribunal administratif de Marseille a rejeté la demande de Mme B....

Procédure devant la Cour :

Par une requête, enregistrée

le 10 août 2022, Mme A... B..., représentée par Me Regis, demande à la Cour :

1°) d'annuler l...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme A... B... a demandé au tribunal administratif de Marseille d'annuler la décision du 14 décembre 2020 par laquelle le maire de Marseille a refusé d'accéder à sa demande de rupture conventionnelle présentée en application du I de l'article 72 de la loi du 6 août 2019 de transformation de la fonction publique.

Par un jugement n° 2100495 du 29 juin 2022, le tribunal administratif de Marseille a rejeté la demande de Mme B....

Procédure devant la Cour :

Par une requête, enregistrée le 10 août 2022, Mme A... B..., représentée par Me Regis, demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 2100495 du 29 juin 2022 du tribunal administratif de Marseille ;

2°) d'annuler la décision du 14 décembre 2020 du maire de la commune de Marseille ;

3°) d'enjoindre au maire de la commune de Marseille de réexaminer sa demande de rupture conventionnelle dans un délai de deux mois ;

4°) de mettre à la charge de la commune de Marseille la somme de 1 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- le jugement est entaché d'une première erreur de droit dès lors que la procédure prévue par l'article 2 du décret du 31 décembre 2019 n'a pas été respectée, la commune de Marseille n'ayant pas respecté un délai raisonnable dans le traitement de sa demande puisque l'entretien sollicité le 25 février 2020 n'a été organisé que le 6 juillet 2020 par la direction des ressources humaines ; il ne lui appartenait pas de " couvrir " une telle illégalité en attaquant

" la décision implicite de rejet née de l'absence de réponse du maire de Marseille à sa demande formée le 25 février 2020 au terme d'un délai de deux mois " dès lors que sa demande n'avait pas fait l'objet d'un rejet implicite mais était en cours de traitement par l'administration ;

- la procédure de rupture conventionnelle fixe de nombreux délais de procédure qui constituent des garanties pour l'agent public de sorte que leur méconnaissance par l'autorité territoriale est de nature à remettre en cause la procédure de rupture conventionnelle lorsque celle-ci a été menée à son terme mais également lorsque l'examen de la demande a conduit à une décision de refus ; ont été méconnus les articles 2, 4 et 5 du décret du 31 décembre 2019 ;

- la commune de Marseille a pris une décision de refus au terme d'une procédure irrégulière en mettant plus de 10 mois à statuer sur sa demande dont cinq mois après le premier entretien alors qu'il lui appartenait de statuer dans un délai raisonnable et qu'elle n'invoque aucun élément de nature à justifier qu'elle ait tant tardé à se prononcer ; une telle exigence découle de la nécessaire protection de l'agent qui doit pouvoir être fixé sur son évolution de carrière et sur les conséquences que la rupture conventionnelle attache à l'écoulement du temps en matière de détermination du montant de l'indemnité mais également de date de cessation des fonctions de l'intéressé ;

- la décision attaquée est entachée d'erreur d'appréciation dès lors que la rupture conventionnelle permettrait à la ville de Marseille de générer des économies, qu'au surplus, la circonstance que la commune ait reçu de nombreuses demandes - en réalité 281 sur le nombre important d'agents communaux - ne permet pas de justifier le refus qui lui a été opposé, et qu'en tout état de cause, au regard de l'importance du budget annuel de la ville de Marseille

- deuxième ville de France - l'octroi d'une rupture conventionnelle, qui n'impliquait nullement qu'il soit fait droit aux autres demandes reçues par le service des ressources humaines, n'a qu'une incidence infime sur son équilibre et ne peut donc justifier la décision prise par le maire de Marseille.

La requête a été communiquée à la commune de Marseille, qui n'a pas produit d'observations en défense.

Par ordonnance du 28 février 2023, la clôture de l'instruction a été fixée au 15 mars 2023 à 12 heures.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- la loi n° 2019-828 du 6 août 2019 ;

- le décret n° 2019-1593 du 31 décembre 2019 ;

- le code de justice administrative ;

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Martin,

- et les conclusions de M. Angéniol, rapporteur public.

Considérant ce qui suit :

1. Mme B..., titulaire du grade d'adjoint administratif principal de première classe, exerce les fonctions de téléphoniste au sein du service du standard de la commune de Marseille. Par courrier réceptionné le 25 février 2020, elle a sollicité un entretien auprès de la direction des ressources humaines de la commune afin d'obtenir " des renseignements sur la procédure de rupture conventionnelle ". Le 16 juin 2020, elle a été convoquée à un entretien programmé le 6 juillet 2020. Par un courrier du 14 décembre 2020, le maire de Marseille l'a informée que sa demande de rupture conventionnelle était refusée. Mme B... relève appel du jugement du 29 juin 2022 par lequel le tribunal administratif de Marseille a rejeté la demande de l'intéressée tendant à l'annulation de cette décision.

2. En premier lieu, aux termes du I de l'article 72 de la loi du 6 août 2019 de transformation de la fonction publique : " L'administration et le fonctionnaire mentionné à l'article 2 de la loi n° 84 16 du 11 janvier 1984 précitée (...) peuvent convenir en commun des conditions de la cessation définitive des fonctions, qui entraîne radiation des cadres et perte de la qualité de fonctionnaire. La rupture conventionnelle, exclusive des cas mentionnés à

l'article 24 de la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 précitée, ne peut être imposée par l'une ou l'autre des parties. (...) Les modalités d'application du présent I, notamment l'organisation de la procédure, sont définies par décret en Conseil d'Etat. (...) ". Aux termes de l'article 2 du décret du 31 décembre 2019 relatif à la procédure de rupture conventionnelle dans la fonction publique : " La procédure de la rupture conventionnelle peut être engagée à l'initiative du fonctionnaire ou de l'administration, de l'autorité territoriale ou de l'établissement dont il relève. (...) Lorsque la demande émane du fonctionnaire, celle-ci est adressée, au choix de l'intéressé, au service des ressources humaines ou à l'autorité investie du pouvoir de nomination. / Dans les conditions prévues aux articles 3 et 4, un entretien relatif à cette demande se tient à une date fixée au moins dix jours francs et au plus un mois après la réception de la lettre de demande de rupture conventionnelle. / Cet entretien est conduit par l'autorité hiérarchique ou l'autorité territoriale ou l'autorité investie du pouvoir de nomination dont relève le fonctionnaire ou son représentant. / Il peut être organisé, le cas échéant, d'autres entretiens ".

3. Le délai d'un mois fixé par l'article 2 du décret du 31 décembre 2019 pour organiser l'entretien relatif à une demande de rupture conventionnelle présentée en application du I de l'article 72 de la loi du 6 août 2019, qui court à compter de la date de réception de cette demande, n'est pas prescrit à peine de nullité. Par conséquent, à supposer même que le courrier de Mme B..., réceptionné le 25 février 2020 par la commune de Marseille, par lequel l'intéressée se borne à solliciter un rendez-vous pour obtenir des renseignements concernant la rupture conventionnelle, puisse être regardé comme une lettre de demande de rupture conventionnelle au sens de l'article 2 du décret 31 décembre 2019, la circonstance que l'entretien prévu par ces dispositions s'est tenu le 6 juillet 2020, n'est pas de nature à vicier la procédure au terme de laquelle a été prise la décision contestée. Par suite, le moyen tiré de la méconnaissance de l'article 2 du décret du 31 décembre 2019 ne peut qu'être écarté.

4. En deuxième lieu, Mme B... ne peut utilement se prévaloir d'une méconnaissance des articles 4 et 5 du décret du 31 décembre 2019, et plus précisément des délais de procédure fixés tant pour la signature de la convention que pour la date d'intervention de la radiation des cadres en l'absence de l'exercice de son droit de rétractation, par l'une ou l'autre des parties après la date de signature de la convention, dès lors que la décision attaquée, qui rejette la demande de rupture conventionnelle de l'appelante en l'absence d'accord de la commune de Marseille, n'a eu ni pour objet ni pour effet de procéder à sa radiation des cadres dans le cadre conventionnel prévu par les dispositions citées au point 2 du I de l'article 72 de la loi du 6 août 2019.

5. En troisième lieu, il ne résulte d'aucune disposition réglementaire, et notamment pas du décret précité du 31 décembre 2019, que dans le cadre de la procédure conduite au titre de l'examen d'une demande de rupture conventionnelle, l'administration serait tenue de prendre une décision de refus de signature d'une convention dans un délai de rigueur qui commencerait à courir à la date du dernier entretien. Par suite, Mme B... ne peut utilement soutenir que la décision attaquée serait intervenue au terme d'un délai déraisonnable.

6. En quatrième et dernier lieu, il résulte des dispositions du I de l'article 72 de la loi du 6 août 2019 de transformation de la fonction publique que la rupture conventionnelle, soumise à un accord entre l'administration et son agent sans pouvoir être imposée par l'une ou l'autre des parties, ne constitue pas un droit pour celui-ci. Saisie d'une demande de rupture conventionnelle présentée sur le fondement de ces dispositions, l'administration peut la rejeter dans l'intérêt du service. Il n'appartient au juge de l'excès de pouvoir de censurer l'appréciation ainsi portée par l'autorité administrative qu'en cas d'erreur manifeste.

7. En l'espèce, les circonstances alléguées par Mme B..., tirées de ce que la rupture conventionnelle n'aurait aucune incidence sur l'équilibre budgétaire de la commune de Marseille, voire même qu'elle permettrait à la collectivité de générer des économies, ne sauraient, par elles-mêmes, être de nature à établir que la décision attaquée serait entachée d'une erreur manifeste d'appréciation. Par suite, un tel moyen ne peut qu'être écarté.

8. Il résulte de tout ce qui précède que Mme B... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande. Par voie de conséquence, ses conclusions aux fins d'annulation et d'injonction, ainsi que celles présentées en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, doivent être rejetées.

D É C I D E :

Article 1er : La requête de Mme B... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme A... B... et à la commune de Marseille.

Délibéré après l'audience du 13 juin 2023, où siégeaient :

- M. Marcovici, président,

- M. Revert, président assesseur,

- M. Martin, premier conseiller.

Rendu public par mise à disposition au greffe, le 27 juin 2023.

2

N° 22MA02314


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Marseille
Formation : 4ème chambre
Numéro d'arrêt : 22MA02314
Date de la décision : 27/06/2023
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

36-10 FONCTIONNAIRES ET AGENTS PUBLICS. - CESSATION DE FONCTIONS. - REFUS DE FAIRE DROIT À UNE DEMANDE DE RUPTURE CONVENTIONNELLE EN APPLICATION DU I DE L'ARTICLE 72 DE LA LOI N° 2019-828 DU 6 AOÛT 2019 DE TRANSFORMATION DE LA FONCTION PUBLIQUE - CONTRÔLE DU JUGE DE L'EXCÈS DE POUVOIR - CONTRÔLE RESTREINT.

36-10 Les dispositions du I de l'article 72 de la loi du 6 août 2019 de transformation de la fonction publique soumettent la rupture conventionnelle à un accord entre l'administration et son agent. Elle ne peut être imposée par l'une ou l'autre des parties. ......Saisie d'une demande de rupture conventionnelle présentée sur le fondement de ces dispositions, l'administration peut la rejeter dans l'intérêt du service. Il n'appartient au juge de l'excès de pouvoir de censurer l'appréciation ainsi portée par l'autorité administrative qu'en cas d'erreur manifeste.


Composition du Tribunal
Président : M. MARCOVICI
Rapporteur ?: M. Stéphen MARTIN
Rapporteur public ?: M. ANGENIOL
Avocat(s) : REGIS

Origine de la décision
Date de l'import : 10/08/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.marseille;arret;2023-06-27;22ma02314 ?
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