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03/07/2023 | FRANCE | N°22MA02504

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 5ème chambre, 03 juillet 2023, 22MA02504


Vu la procédure suivante :

I/ Par une requête enregistrée le 22 septembre 2022 sous le N° 22MA02504, des pièces et un mémoire complémentaire enregistrés les 25 octobre 2022 et 9 novembre 2022, l'association En toute franchise-département des Bouches-du-Rhône, représentée par Me Andreani, demande à la Cour :

1°) d'annuler le permis de construire valant autorisation d'exploitation commerciale délivré le 22 juillet 2022 par le maire de la commune de Vitrolles à la société Lidl ;

2°) de mettre à la charge de la commune de Vitrolles le paiement de la som

me de 2 000 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de jus...

Vu la procédure suivante :

I/ Par une requête enregistrée le 22 septembre 2022 sous le N° 22MA02504, des pièces et un mémoire complémentaire enregistrés les 25 octobre 2022 et 9 novembre 2022, l'association En toute franchise-département des Bouches-du-Rhône, représentée par Me Andreani, demande à la Cour :

1°) d'annuler le permis de construire valant autorisation d'exploitation commerciale délivré le 22 juillet 2022 par le maire de la commune de Vitrolles à la société Lidl ;

2°) de mettre à la charge de la commune de Vitrolles le paiement de la somme de 2 000 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- il n'est pas établi que le signataire de l'arrêté attaqué disposait d'une délégation de signature régulière ;

- la délimitation de la zone de chalandise est erronée ;

- le projet va impacter l'animation de la vie urbaine ;

- l'étude d'impact sur les flux de transport est insuffisante ; tandis que des risques de congestion de la circulation automobile sont avérés, la réalisation des travaux nécessaires pour y remédier n'est pas suffisamment certaine ;

- l'arrêté attaqué méconnaît les dispositions combinées de l'article L. 752-6 du code de commerce et de l'article L. 111-19 du code de l'urbanisme dès lors que la surface des places de stationnement est supérieure aux trois quarts de la surface de plancher des bâtiments affectés au commerce ;

- l'insertion paysagère et architecturale du projet n'est pas satisfaisante ;

- il existe un risque d'inondation sur le terrain d'assiette du projet du fait de l'important décaissement prévu ;

- le projet est incompatible avec le schéma de cohérence territoriale du pays d'Aix ;

- le projet est incompatible avec les orientations d'aménagement et de programmation du plan local d'urbanisme ;

- les dispositions de l'article R. 431-16 du code de l'urbanisme ont été méconnues dès lors qu'aucune étude d'impact environnementale n'a été réalisée ;

- les dispositions de l'article L. 111-11 du code de l'urbanisme ont été méconnues dès lors que le projet nécessite une extension de réseau de 150 mètres et que la commune de Vitrolles n'est pas en mesure d'indiquer dans quel délai et par quelle collectivité publique ou par quel concessionnaire de service public ces travaux doivent être exécutés.

Par mémoires en défense enregistrés les 23 janvier 2023 et 29 mars 2023, la société Lidl, représentée par Me Robbes, demande à la Cour :

- de rejeter la requête de l'association En toute franchise des Bouches-du-Rhône ;

- de mettre à la charge de l'association en toute franchise des Bouches-du-Rhône le paiement de la somme de 5 000 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- l'association n'a pas d'intérêt à agir à l'encontre de l'arrêté attaqué en tant qu'il vaut autorisation de construire ;

- les moyens de la requête sont irrecevables ou infondés.

Par un mémoire en défense enregistré le 24 janvier 2023, la commune de Vitrolles, représentée par Me Ladouari, demande à la Cour :

1°) de rejeter la requête de l'association En toute franchise des Bouches-du-Rhône ;

2°) de mettre à la charge de l'association En toute franchise des Bouches-du-Rhône le paiement de la somme de 3 000 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que les moyens de la requête sont irrecevables ou infondés.

Par une lettre en date du 3 mai 2023, les parties ont été informées que la cour était susceptible de surseoir à statuer sur le fondement de l'article L. 600-5-1 du code de l'urbanisme dès lors que le vice tiré de la méconnaissance des dispositions de l'article L.111-19 du code de l'urbanisme est susceptible d'être régularisé.

Par un mémoire enregistré le 9 mai 2023, l'association En toute franchise département des Bouches-du-Rhône a présenté des observations sur l'éventualité d'un sursis à statuer en faisant valoir que le vice tiré de la méconnaissance des dispositions de l'article L. 111-19 du code de l'urbanisme n'est pas régularisable et qu'en tout état de cause, le projet ne respecte pas les dispositions de l'article L. 111-11 du même code.

Par un mémoire enregistré le 10 mai 2023, l'association En toute franchise département des Bouches-du-Rhône demande, en outre, à la Cour d'annuler le permis de construire modificatif délivré le 17 février 2023 à la société Lidl et de mettre à la charge de la commune de Vitrolles et de la société LIDL la somme de 2 000 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que l'illégalité du permis de construire initial entraîne celle du permis de construire modificatif.

La commission nationale d'aménagement commercial a produit des pièces le 12 mai 2023.

Par mémoires enregistrés le 15 mai 2023 et le 16 juin 2023, la société Lidl a présenté des observations sur l'éventualité d'un sursis à statuer en faisant valoir que la requête de l'association est irrecevable et qu'en tout état de cause le moyen tiré de la méconnaissance des dispositions de l'article L. 111-19 du code de l'urbanisme est infondé au regard des modifications apportées à son projet réceptionnées par la commune de Vitrolles le 15 juin 2022.

II/ Par une requête enregistrée le 23 mars 2023 sous le N°23MA00716, l'association En toute franchise-département des Bouches-du-Rhône, représentée par Me Andreani, demande à la Cour :

1°) de suspendre l'exécution du permis de construire valant autorisation d'exploitation commerciale délivré le 22 juillet 2022 par le maire de la commune de Vitrolles à la société Lidl ;

2°) de mettre à la charge de la commune de Vitrolles le paiement de la somme de 2 000 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que l'urgence justifie que soit prononcée la suspension de l'exécution de l'arrêté du 22 juillet 2022 et qu'il existe un doute sérieux quant à sa légalité. Elle soulève les mêmes moyens que ceux mentionnés dans le cadre de la requête N° 22MA02504.

Par un mémoire en défense enregistré le 10 mai 2023, la commune de Vitrolles, représentée par Me Ladouari, demande à la Cour :

1°) de rejeter la requête de l'association En toute franchise département des Bouches-du-Rhône ;

2°) de mettre à la charge de l'association En toute franchise département des Bouches-du-Rhône le paiement de la somme de 3 000 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que les moyens de la requête sont infondés.

La Commission nationale d'aménagement commercial a produit des pièces le 12 mai 2023.

Par un mémoire en défense enregistré le 23 mai 2023, la société Lidl, représentée par Me Robbes, demande à la Cour :

1°) de rejeter la requête de l'association En toute franchise département des Bouches-du-Rhône ;

2°) de mettre à la charge de l'association En toute franchise département des Bouches-du-Rhône le paiement de la somme de 5 000 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- l'association n'a pas d'intérêt à agir à l'encontre de l'arrêté attaqué en tant qu'il vaut autorisation de construire ;

- la condition d'urgence n'est pas remplie ;

- il n'existe aucun doute sérieux sur la légalité du permis attaqué.

Vu les autres pièces des dossiers.

Vu :

- le code de l'urbanisme ;

- le code de commerce ;

- le code de l'environnement ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties le jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Vincent,

- les conclusions de M. Pecchioli, rapporteur public,

- et les observations de Me Tosi pour l'association En toute franchise département des Bouches-du-Rhône, de Me Bezol pour la commune de Vitrolles et de Me Robbes pour la société LIDL.

Considérant ce qui suit :

1. La société Lidl a déposé, le 23 juillet 2021, une demande de permis de construire pour la création d'un supermarché dans la zone d'activité des Estroublans à Vitrolles. Le projet a reçu un avis favorable de la commission départementale d'aménagement commercial des Bouches-du-Rhône le 4 mars 2022. Saisie de recours formés par l'association En toute franchise département des Bouches-du-Rhône et une autre société, la Commission nationale d'aménagement commercial a émis un avis favorable au projet le 16 juin 2022. Par un arrêté du 22 juillet 2022, modifié par arrêté du 17 février 2023, le maire de Vitrolles a délivré un permis de construire à la société Lidl pour la réalisation de ce projet. L'association En toute franchise département des Bouches-du-Rhône demande à la Cour d'annuler les arrêtés précités dans la requête enregistrée sous le N° 22MA02504 et de suspendre le permis de construire initial dans la requête enregistrée sous le N° 23MA00716.

2. Les requêtes susvisées n° 22MA02504 et n° 23MA00716 présentées par l'association En toute franchise département des Bouches-du-Rhône sont dirigées contre le même arrêté. Il y a lieu, dès lors, de les joindre pour y statuer par un seul arrêt.

Sur les conclusions aux fins d'annulation :

En ce qui concerne la compétence du signataire du permis de construire du 22 juillet 2022 :

3. Le permis de construire du 22 juillet 2022 a été signé par Mme A... B..., adjointe au maire, déléguée à l'urbanisme et aménagement. Par un arrêté en date du 1erjuillet 2020, le maire a donné délégation à cette dernière aux fins de signer, notamment, les autorisations du droit des sols. Cette délégation a été affichée le 2 juillet 2020. Par suite, le moyen tiré de l'incompétence du signataire du permis litigieux doit être écarté.

En ce qui concerne la légalité du permis de construire du 22 juillet 2022 en tant qu'il vaut autorisation de construire :

S'agissant du moyen tiré de la méconnaissance des dispositions de l'article R. 431-16 du code de l'urbanisme :

4. Aux termes de l'article R. 431-16 du code de l'urbanisme : " Le dossier joint à la demande de permis de construire comprend en outre, selon les cas : a) L'étude d'impact ou la décision de l'autorité chargée de l'examen au cas par cas dispensant le projet d'évaluation environnementale ou, lorsqu'il s'agit d'une installation classée pour la protection de l'environnement pour laquelle une demande d'enregistrement a été déposée en application de l'article L. 512-7 du même code, le récépissé de la demande d'enregistrement. L'autorité compétente pour délivrer l'autorisation d'urbanisme vérifie que le projet qui lui est soumis est conforme aux mesures et caractéristiques qui ont justifié la décision de l'autorité chargée de l'examen au cas par cas de ne pas le soumettre à évaluation environnementale (...) ". L'article L. 122-1 du code de l'environnement dispose que : " II.- Les projets qui, par leur nature, leur dimension ou leur localisation, sont susceptibles d'avoir des incidences notables sur l'environnement ou la santé humaine font l'objet d'une évaluation environnementale en fonction de critères et de seuils définis par voie réglementaire et, pour certains d'entre eux, après un examen au cas par cas (...) ". Par ailleurs, aux termes de l'article R. 122-2 du code de l'environnement : " I. - Les projets relevant d'une ou plusieurs rubriques énumérées dans le tableau annexé au présent article font l'objet d'une évaluation environnementale, de façon systématique ou après un examen au cas par cas, en application du II de l'article L. 122-1, en fonction des critères et des seuils précisés dans ce tableau (...) ". Il résulte du tableau annexé à l'article R. 122-2 du code de l'environnement que, comme le fait valoir l'association requérante, sont soumis à une évaluation environnementale les projets d'aires de stationnement ouvertes au public de 50 unités et plus. Il ressort cependant des pièces du dossier que la société Lidl justifie avoir été dispensée de la production de cette étude d'impact par décision du préfet de région du 16 mai 2022. Par suite, le moyen tiré de l'absence préalable d'évaluation environnementale doit être écarté.

S'agissant du moyen tiré de la méconnaissance des dispositions de l'article L. 111-11 du code de l'urbanisme :

5. Aux termes de l'article L. 111-11 du code de l'urbanisme : " Lorsque, compte tenu de la destination de la construction ou de l'aménagement projeté, des travaux portant sur les réseaux publics de distribution d'eau, d'assainissement ou de distribution d'électricité sont nécessaires pour assurer la desserte du projet, le permis de construire ou d'aménager ne peut être accordé si l'autorité compétente n'est pas en mesure d'indiquer dans quel délai et par quelle collectivité publique ou par quel concessionnaire de service public ces travaux doivent être exécutés. (...) ".

6. Ces dispositions poursuivent notamment le but d'intérêt général d'éviter à la collectivité publique ou au concessionnaire d'être contraints, par le seul effet d'une initiative privée, de réaliser des travaux d'extension ou de renforcement des réseaux publics de distribution d'eau, d'assainissement ou d'électricité et de garantir leur cohérence et leur bon fonctionnement, en prenant en compte les perspectives d'urbanisation et de développement de la collectivité. Il en résulte qu'un permis de construire doit être refusé lorsque, d'une part, des travaux d'extension ou de renforcement de la capacité des réseaux publics sont nécessaires à la desserte de la construction projetée et, d'autre part, l'autorité compétente n'est pas en mesure d'indiquer dans quel délai et par quelle collectivité publique ou par quel concessionnaire de service public ces travaux doivent être exécutés, après avoir, le cas échéant, accompli les diligences appropriées pour recueillir les informations nécessaires à son appréciation.

7. S'il résulte de l'avis d'Enedis, concessionnaire du réseau de distribution d'électricité, en date du 3 décembre 2021 que le projet nécessiterait " un allongement BT de 150 m sur le domaine public à partir du poste Nord ", il résulte des plans et explications qui y sont joints que cette distance de 150 mètres a été relevée entre le réseau public et le centre du lieu d'implantation des constructions (poste Nord) et non entre le réseau public et l'entrée du terrain d'assiette du projet. Il en ressort également que la distance relevée au droit de ce terrain par rapport au réseau public est très nettement inférieure à 100 mètres. La desserte du projet en litige n'exige, dans ces conditions, contrairement à ce que soutient l'association requérante, qu'un raccordement au réseau de distribution électrique et non une extension de celui-ci. Elle n'implique, par ailleurs, aucun renforcement. Au surplus, la société Enedis a précisé, dans ledit avis, que le délai de réalisation de ces travaux serait de 4 à 6 mois après l'ordre de service de la collectivité en charge de l'urbanisme et l'accord du pétitionnaire. Dans ces conditions, la commune étant en mesure d'indiquer dans quel délai et par quel concessionnaire de service public les travaux devaient être exécutés, le moyen tiré de la méconnaissance des dispositions de l'article L. 111-11 du code de l'urbanisme doit, en tout état de cause, être écarté.

8. Il résulte de ce qui précède, sans qu'il soit besoin de statuer sur la fin de non-recevoir soulevée par la société Lidl, que les conclusions aux fins d'annulation de l'arrêté du 22 juillet 2022 en tant qu'il vaut autorisation de construire doivent être rejetées.

En ce qui concerne la légalité du permis de construire du 22 juillet 2022 en tant qu'il vaut autorisation d'exploitation commerciale :

S'agissant de la délimitation de la zone de chalandise :

9. Aux termes de l'article R. 752-3 du code de commerce : " Pour l'application du présent titre, constitue la zone de chalandise d'un équipement faisant l'objet d'une demande d'autorisation d'exploitation commerciale l'aire géographique au sein de laquelle cet équipement exerce une attraction sur la clientèle. Elle est délimitée en tenant compte notamment de la nature et de la taille de l'équipement envisagé, des temps de déplacement nécessaires pour y accéder, de la présence d'éventuelles barrières géographiques ou psychologiques et de la localisation et du pouvoir d'attraction des équipements commerciaux existants ".

10. L'association requérante soutient que la zone de chalandise a été délimitée de manière inexacte en ce qu'elle serait trop restreinte. Toutefois, il ressort des pièces du dossier que la délimitation de la zone de chalandise qui a été retenue a tenu compte, en premier lieu, d'un temps de trajet de 10 minutes maximum en voiture, ce qui englobe 14 quartiers de Vitrolles pour une population de 23 549 habitants, en deuxième lieu, d'une barrière géographique constituée, au Sud, par la route départementale 9, en troisième lieu, d'une barrière psychologique au Nord avec la ville de Rognac et, en dernier lieu, de barrières concurrentielles au regard, d'une part, du pôle urbain et commercial d'Aix-en-Provence et de Plan de Campagne et, d'autre part, de l'existence d'autres magasins de l'enseigne Lidl. Au regard de ces éléments, qui sont conformes aux critères de délimitation posés par l'article R. 752-3 du code de commerce et dont aucun n'est sérieusement contesté par l'association requérante, le moyen tiré de l'inexactitude de la zone de chalandise, telle que délimitée par le pétitionnaire, doit être écarté.

S'agissant de la méconnaissance des dispositions de l'article L. 752-6 du code de commerce :

11. Aux termes de l'article L. 752-6 du code de commerce : " I.- L'autorisation d'exploitation commerciale mentionnée à l'article L. 752-1 est compatible avec le document d'orientation et d'objectifs des schémas de cohérence territoriale ou, le cas échéant, avec les orientations d'aménagement et de programmation des plans locaux d'urbanisme intercommunaux comportant les dispositions prévues au deuxième alinéa de l'article L. 151-6 du code de l'urbanisme. / La commission départementale d'aménagement commercial prend en considération : 1° En matière d'aménagement du territoire : a) La localisation du projet et son intégration urbaine ; b) La consommation économe de l'espace, notamment en termes de stationnement ; c) L'effet sur l'animation de la vie urbaine, rurale et dans les zones de montagne et du littoral ; d) L'effet du projet sur les flux de transports et son accessibilité par les transports collectifs et les modes de déplacement les plus économes en émission de dioxyde de carbone ; e) La contribution du projet à la préservation ou à la revitalisation du tissu commercial du centre-ville de la commune d'implantation, des communes limitrophes et de l'établissement public de coopération intercommunale à fiscalité propre dont la commune d'implantation est membre ; f) Les coûts indirects supportés par la collectivité en matière notamment d'infrastructures et de transports ; / 2° En matière de développement durable : a) La qualité environnementale du projet, notamment du point de vue de la performance énergétique et des émissions de gaz à effet de serre par anticipation du bilan prévu aux 1° et 2° du I de l'article L. 229-25 du code de l'environnement, du recours le plus large qui soit aux énergies renouvelables et à l'emploi de matériaux ou procédés éco-responsables, de la gestion des eaux pluviales, de l'imperméabilisation des sols et de la préservation de l'environnement ; b) L'insertion paysagère et architecturale du projet, notamment par l'utilisation de matériaux caractéristiques des filières de production locales ; c) Les nuisances de toute nature que le projet est susceptible de générer au détriment de son environnement proche./ Les a et b du présent 2° s'appliquent également aux bâtiments existants s'agissant des projets mentionnés au 2° de l'article L. 752-1 ; / 3° En matière de protection des consommateurs : (...) d) Les risques naturels, miniers et autres auxquels peut être exposé le site d'implantation du projet, ainsi que les mesures propres à assurer la sécurité des consommateurs (...) ".

12. En premier lieu, si l'association requérante soutient que le projet litigieux est incompatible avec le schéma de cohérence territoriale (SCOT) du pays d'Aix, en ce que la zone des Estroublans serait un espace destiné à l'accueil des entreprises à vocation industrielle et non à vocation commerciale, il résulte dudit SCOT qu'il est prévu de densifier les zones d'activités de Vitrolles et de requalifier la zone des Estroublans, considérée comme un site de développement économique majeur. Par suite, le projet de la société Lidl n'est pas incompatible avec le SCOT du pays d'Aix.

13. En second lieu, dès lors que le territoire de la commune de Vitrolles est couvert par le SCOT précité, le moyen tiré de ce que le projet serait contraire aux orientations d'aménagement et de programmation du plan local d'urbanisme de Vitrolles est, en tout état de cause, inopérant.

Quant à l'objectif d'aménagement du territoire :

La consommation économe de l'espace en termes de stationnement :

14. Aux termes de l'article L. 111-19 du code de l'urbanisme : " Nonobstant toute disposition contraire du plan local d'urbanisme, l'emprise au sol des surfaces, bâties ou non, affectées aux aires de stationnement annexes d'un commerce soumis à l'autorisation d'exploitation commerciale prévue aux 1° et 4° du I de l'article L. 752-1 du code de commerce et à l'autorisation prévue au 1° de l'article L. 212-7 du code du cinéma et de l'image animée, ne peut excéder un plafond correspondant aux trois quarts de la surface de plancher des bâtiments affectés au commerce. Les espaces paysagers en pleine terre, les surfaces des aménagements relevant de l'article L. 3114-1 du code des transports, les surfaces réservées à l'auto-partage et les places de stationnement destinées à l'alimentation des véhicules électriques ou hybrides rechargeables sont déduits de l'emprise au sol des surfaces affectées au stationnement. La surface des places de stationnement non imperméabilisées compte pour la moitié de leur surface. ".

15. Il ressort des pièces du dossier que si le dossier de demande d'autorisation initial comportait un parking extérieur de 71 places de stationnement dont 8 places électriques et 28 places pré-équipées électriques, lesquelles ne comportant aucune borne de recharge destinée à l'alimentation des véhicules électriques ne pouvaient être déduites de l'emprise au sol des surfaces affectées au stationnement, celui-ci a été, à la suite de l'avis rendu le 18 février 2002 par la direction départementale des territoires et de la mer, et ainsi que cela est établi, d'une part, par la production d'un plan masse PC2b et d'autre part, par l'accusé de réception du dépôt de cette pièce complémentaire par la commune de Vitrolles le 15 juin 2022, modifié en ce sens que le projet finalement soumis à autorisation comportait 26 places de stationnement dédiées aux véhicules électriques et équipées de bornes de recharge, dont la surface devait, dès lors, être déduite de l'emprise au sol et 45 places non imperméabilisées devant être comptabilisées pour la moitié de leur surface. Par ailleurs, si l'association requérante soutient que les places dédiées au stationnement des véhicules électriques ne doivent pas être soustraites du calcul de l'emprise au sol des surfaces affectées au stationnement lorsqu'elles sont situées dans l'emprise d'un espace déjà bâti, ce moyen est inopérant dès lors que toutes les places de stationnement dédiées aux véhicules électriques sont prévues dans un parking extérieur. Au regard de ces éléments ainsi que, par ailleurs, de la surface des places imperméabilisées et des espaces paysagers en pleine terre, l'emprise au sol des surfaces de stationnement n'excède pas les trois quarts de la surface de plancher des bâtiments affectés au commerce.

L'animation de la vie urbaine :

16. L'association requérante fait valoir que le projet litigieux est de nature à avoir une influence préjudiciable sur l'attractivité des commerces du centre-ville. Il ressort toutefois des pièces du dossier, ainsi que l'a retenu la Commission nationale d'aménagement commercial, que le taux de vacance commerciale sur la commune de Vitrolles est de 9 % au 1er juin 2022 avec 7 commerces vacants sur 78 dont aucun dans le secteur alimentaire. Par ailleurs, le projet consiste en un simple transfert avec extension, sur une distance de 200 mètres, d'un magasin Lidl déjà existant, circonstance de nature à limiter l'impact de ce projet sur les commerces du centre-ville. Par ailleurs, la circonstance qu'il existe, au sein de la zone de chalandise, un déséquilibre entre l'offre en supermarchés traditionnels et celle en supermarchés à marque propre tels que Lidl n'est pas de nature à avoir un impact sur les commerces du centre-ville. Enfin, l'association En toute franchise département des Bouches-du-Rhône ne peut utilement faire état de la forte densité de l'offre commerciale au sein de la zone, dès lors que depuis l'entrée en vigueur de la loi du 4 août 2008 de modernisation de l'économie, la densité d'équipement commercial de la zone de chalandise concernée ne figure plus au nombre des critères à prendre en compte par la Commission nationale d'aménagement commercial. Il n'est ainsi pas établi que le projet porterait atteinte à l'animation de la vie urbaine.

Les flux de transport :

17. Il appartient aux commissions d'aménagement commercial, lorsqu'elles se prononcent sur un projet d'exploitation commerciale soumis à autorisation en application de l'article L. 752-1 du code de commerce, d'apprécier la conformité de ce projet aux objectifs prévus à l'article 1er de la loi n° 73-1193 du 27 décembre 1973 et à l'article L. 750-1 du code de commerce, au vu des critères d'évaluation mentionnés à l'article L. 752-6 du même code. L'autorisation ne peut être refusée que si, eu égard à ses effets, le projet compromet la réalisation de ces objectifs. Lorsque l'instruction fait apparaître que, pour satisfaire aux objectifs fixés par le législateur en matière d'aménagement du territoire ou de développement durable, des aménagements sont nécessaires, l'autorisation ne peut être accordée que si la réalisation de tels aménagements à l'ouverture de l'ensemble commercial est suffisamment certaine.

18. Il ressort des pièces du dossier qu'une étude des flux de transport, réalisée non pas au cours de la période estivale mais du 29 mai au 4 juin 2017 puis en janvier 2019, laquelle est, contrairement à ce que soutient l'association requérante, suffisamment précise et complète quant à, d'une part, l'analyse du trafic actuel à différentes heures dont les heures de pointe en semaine et le week-end et, d'autre part, quant à l'analyse de l'impact du projet sur les flux, a révélé que des difficultés de circulation sont à prévoir en heures de pointe le matin et le soir sur la bretelle de sortie de la route départementale 113 depuis Salon et sur le boulevard de l'Europe. Toutefois, il ressort également des pièces du dossier que, par une délibération en date du 18 février 2021 antérieure au permis attaqué, le conseil du territoire du pays d'Aix a approuvé la création et l'affectation de l'opération d'investissement " Réhabilitation des zones d'activités " pour un montant global de 8 millions d'euros comportant, notamment, la mise à deux voies de circulation de la sortie de la RD113 sur le giratoire entre la rue Victor Gelu et le boulevard de l'Europe ainsi que la mise à deux fois deux voies de la section du boulevard de l'Europe entre l'avenue de Rome et la rue Victor Gelu. La réalisation de ces travaux, dont la charge incombe, depuis la suppression des états spéciaux de territoires, à la métropole Aix-Marseille-Provence, permettra de remédier aux difficultés de flux révélées par l'étude précitée et était, au vu des éléments précités, suffisamment certaine à la date du permis.

Quant à l'objectif de développement durable :

L'insertion paysagère et architecturale :

19. L'association requérante soutient que le projet marque une rupture dans l'harmonisation de la zone et fait état de l'avis émis par l'architecte conseil de la direction départementale des territoires et de la mer, lequel a relevé que " le modèle de référence LIDL avec sa façade la moins large vitrée toute hauteur, constituant à l'intérieur un hall magistral en double hauteur, n'est guère favorable sur un site où c'est la façade longue sur rue qui devrait être principale et traitée en conséquence ". Il ressort toutefois des pièces du dossier que le projet, situé dans une zone d'activités, présente une architecture contemporaine, respectueuse de son environnement, et comprenant un accompagnement végétal qualitatif. Par suite, en dépit de la réserve précitée émise par l'architecte quant aux façades du bâtiment, le moyen tiré de ce que les dispositions du b) du 2° de l'article L. 752-6 du code de commerce auraient été méconnues doit être écarté.

Quant à l'objectif de protection des consommateurs :

Le risque inondation :

20. S'il ressort des pièces du dossier, ainsi que le soutient l'association requérante, que la première étude hydraulique réalisée en octobre 2021 n'avait pas tenu compte, alors qu'une partie du terrain d'assiette du projet, dans sa portion Nord-Est, est située dans une zone d'aléa résiduel au risque inondation, du fait que le projet prévoit un important décaissement jusqu'à 1,80 mètre par rapport au niveau actuel du terrain naturel, il en ressort également qu'à la suite de l'avis émis le 4 février 2022 par le pôle risques du service urbanisme de la direction des territoires et de la mer, le pétitionnaire a fait réaliser une nouvelle étude en mai 2022. Cette étude, après analyse de la localisation du décaissement, envisagé hors zone inondable, a conclu que " le projet, tant qu'il ne modifie pas la topographie en zone inondable ne présente pas d'impact préjudiciable sur les enjeux avoisinants ". Il suit de là que le moyen tiré de ce que le projet méconnaîtrait, au motif d'un risque d'inondation, l'objectif de protection des consommateurs doit être écarté.

21. Il résulte de tout ce qui précède que les conclusions aux fins d'annulation du permis de construire délivré le 22 juillet 2022 ainsi que, par voie de conséquence, celles tendant à l'annulation du permis de construire modificatif délivré le 17 février 2023, doivent être rejetées.

Sur les conclusions aux fins de suspension :

22. Le présent arrêt statuant au fond sur les conclusions aux fins d'annulation présentées par l'association En toute franchise département des Bouches-du-Rhône, il n'y a plus lieu de statuer sur les conclusions aux fins de suspension présentées dans le cadre de la requête enregistrée sous le n° 23MA00716.

Sur les frais d'instance :

23. Il y a lieu, en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, de mettre à la charge de l'association En toute franchise département des Bouches-du-Rhône le versement de la somme de 1 500 euros chacune à la commune de Vitrolles et à la société Lidl au titre des frais qu'elles ont exposés et non compris dans les dépens. Les dispositions de cet article font en revanche obstacle à ce qu'il soit fait droit aux conclusions présentées par l'association requérante sur le même fondement.

D É C I D E :

Article 1er : Il n'y a plus lieu de statuer sur les conclusions aux fins de suspension présentées dans le cadre de la requête enregistrée sous le N° 23MA00716.

Article 2 : Les conclusions de la requête de l'association En toute franchise département des Bouches-du-Rhône N° 22MA02504 sont rejetées.

Article 3 : L'association En toute franchise département des Bouches-du-Rhône versera la somme de 1 500 euros chacune à la commune de Vitrolles et à la société Lidl en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à l'association En toute franchise département des Bouches-du-Rhône, à la société Lidl et à la commune de Vitrolles.

Copie en sera adressée à la Commission nationale d'aménagement commercial.

Délibéré après l'audience du 26 juin 2023, à laquelle siégeaient :

- Mme Vincent, présidente,

- M. Mérenne, premier conseiller,

- Mme Balaresque, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 3 juillet 2023.

N°s 22MA02504 - 23MA0071602


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Marseille
Formation : 5ème chambre
Numéro d'arrêt : 22MA02504
Date de la décision : 03/07/2023
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

68-04-043 Urbanisme et aménagement du territoire. - Autorisations d`utilisation des sols diverses. - Autorisation d`exploitation commerciale (voir : Commerce, industrie, intervention économique de la puissance publique).


Composition du Tribunal
Président : Mme VINCENT
Rapporteur ?: Mme Aurélia VINCENT
Rapporteur public ?: M. PECCHIOLI
Avocat(s) : SELARL ANDREANI-HUMBERT-COLLIN

Origine de la décision
Date de l'import : 10/08/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.marseille;arret;2023-07-03;22ma02504 ?
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