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06/07/2023 | FRANCE | N°22MA02527

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 1ère chambre, 06 juillet 2023, 22MA02527


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. C... A... et Mme B... A... ont demandé au tribunal administratif de Toulon d'annuler l'arrêté du 15 septembre 2020 par lequel le maire du Rayol-Canadel-sur-Mer a délivré à la société à responsabilité limitée (SARL) Piersogest un permis de construire afin d'édifier un ensemble immobilier de 1 589 m² de surface de plancher sur une unité foncière composée des parcelles cadastrées section AO n° 95 et n° 96 situées 3 avenue Etienne Gola sur le territoire communal, ainsi que la décision du 7 déce

mbre 2020 rejetant leur recours gracieux.

Par un premier jugement n° 2100291 du 8 ...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. C... A... et Mme B... A... ont demandé au tribunal administratif de Toulon d'annuler l'arrêté du 15 septembre 2020 par lequel le maire du Rayol-Canadel-sur-Mer a délivré à la société à responsabilité limitée (SARL) Piersogest un permis de construire afin d'édifier un ensemble immobilier de 1 589 m² de surface de plancher sur une unité foncière composée des parcelles cadastrées section AO n° 95 et n° 96 situées 3 avenue Etienne Gola sur le territoire communal, ainsi que la décision du 7 décembre 2020 rejetant leur recours gracieux.

Par un premier jugement n° 2100291 du 8 février 2022, le tribunal administratif de Toulon a, en application de l'article L. 600-5-1 du code de l'urbanisme, sursis à statuer sur cette demande jusqu'à l'expiration d'un délai de quatre mois pour permettre à la SARL Piersogest ou à la commune du Rayol-Canadel-sur-Mer de justifier des mesures régularisant les vices mentionnés au point 17 de ce jugement.

Par un arrêté du 11 mai 2022, le maire du Rayol-Canadel-sur-Mer a délivré un permis de construire modificatif à la SARL Piersogest.

Par un second jugement n° 2100291 du 26 juillet 2022, le tribunal administratif de Toulon a rejeté la demande de M. et Mme A....

Procédure devant la Cour :

Par une requête et un mémoire enregistrés le 26 septembre 2022 et le 26 mai 2023, M. et Mme A..., représentés par Me Sechi, demandent à la Cour :

1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de Toulon du 26 juillet 2022 ;

2°) d'annuler l'arrêté du maire du Rayol-Canadel-sur-Mer du 15 septembre 2020 et la décision du 7 décembre 2020 rejetant leur recours gracieux ;

3°) de mettre la somme de 2 000 euros à la charge de la commune du Rayol-Canadel-sur-Mer au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Ils soutiennet que :

- le jugement attaqué ne comporte pas les signatures obligatoires prévues par l'article R. 741-7 du code de justice administrative ;

- le permis de construire modificatif délivré à la SARL Piersogest le 11 mai 2022 n'a pas régularisé les vices retenus par le jugement du 8 février 2022 en l'absence de précisions quant aux caractéristiques des aménagements à réaliser permettant de garantir la sécurité des accès et aux modalités de leur réalisation.

Par un mémoire en défense enregistré le 20 octobre 2022, la commune du Rayol-Canadel-sur-Mer, représentée par Me Bauducco, conclut au rejet de la requête, subsidiairement à ce qu'il soit sursis à statuer pendant un délai de quatre mois aux fins de régularisation des éventuels vices susceptibles d'affecter l'arrêté du 15 septembre 2020, et à ce que la somme de 2 000 euros soit mise à la charge de M. et Mme A... au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- la demande de M. et Mme A... devant le tribunal administratif était irrecevable faute de justifier d'un intérêt leur donnant qualité pour agir ;

- les moyens soulevés par M. et Mme A... ne sont pas fondés.

Par un mémoire en défense enregistré le 9 mai 2023, la SARL Piersogest, représentée par la SARL Arcames avocats, conclut au rejet de la requête et à ce que la somme de 7 000 euros soit mise à la charge de M. et Mme A... au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- la demande de M. et Mme A... devant le tribunal administratif était irrecevable faute de justifier d'un intérêt leur donnant qualité pour agir ;

- les moyens soulevés par M. et Mme A... ne sont pas fondés.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code de l'urbanisme ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. d'Izarn de Villefort,

- les observations de M. A..., de Me Bauducco, représentant la commune du Rayol-Canadel-sur-Mer et de Me Durand, représentant la SARL Piersogest,

- et les conclusions de M. Roux, rapporteur public.

Considérant ce qui suit :

1. Par un arrêté du 15 septembre 2020, le maire du Rayol-Canadel-sur-Mer a délivré à la société à responsabilité limitée (SARL) Piersogest un permis de construire afin d'édifier un ensemble immobilier de 1 589 m² de surface de plancher sur une unité foncière composée des parcelles cadastrées section AO n° 95 et n° 96 situées 3 avenue Etienne Gola. Par un premier jugement du 8 février 2022, le tribunal administratif de Toulon a, en application de l'article L. 600-5-1 du code de l'urbanisme, sursis à statuer sur la demande de M. et Mme A... tendant à l'annulation de cet arrêté et de la décision du 7 décembre 2020 rejetant leur recours gracieux jusqu'à l'expiration d'un délai de quatre mois pour permettre à la SARL Piersogest ou à la commune du Rayol-Canadel-sur-Mer de justifier des mesures régularisant les vices mentionnés au point 17 de ce jugement. Par un arrêté du 11 mai 2022, le maire du Rayol-Canadel-sur-Mer a délivré un permis de construire modificatif à la SARL Piersogest. Par un second jugement du 26 juillet 2022, dont M. et Mme A... relèvent appel, le tribunal administratif de Toulon a rejeté leur demande.

Sur la régularité du jugement :

2. Il résulte de l'examen de la minute du jugement rendu par le tribunal administratif de Toulon que celle-ci comporte les signatures du président de la formation de jugement, du rapporteur et du greffier d'audience. Elle respecte donc les prescriptions figurant en ce sens à l'article R. 741-7 du code de justice administrative.

Sur les conclusions à fin d'annulation :

3. Aux termes de l'article L. 600-5-1 du code de l'urbanisme : " Sans préjudice de la mise en œuvre de l'article L. 600-5, le juge administratif qui, saisi de conclusions dirigées contre un permis de construire, de démolir ou d'aménager ou contre une décision de non-opposition à déclaration préalable estime, après avoir constaté que les autres moyens ne sont pas fondés, qu'un vice entraînant l'illégalité de cet acte est susceptible d'être régularisé, sursoit à statuer, après avoir invité les parties à présenter leurs observations, jusqu'à l'expiration du délai qu'il fixe pour cette régularisation, même après l'achèvement des travaux. Si une mesure de régularisation est notifiée dans ce délai au juge, celui-ci statue après avoir invité les parties à présenter leurs observations. Le refus par le juge de faire droit à une demande de sursis à statuer est motivé ".

4. Lorsqu'une autorisation d'urbanisme a été délivrée en méconnaissance des dispositions législatives ou réglementaires relatives à l'utilisation du sol ou sans que soient respectées des formes ou formalités préalables à la délivrance de l'autorisation, l'illégalité qui en résulte peut être régularisée par la délivrance d'une autorisation modificative dès lors que celle-ci assure le respect des règles de fond applicables au projet en cause, répond aux exigences de forme ou a été précédée de l'exécution régulière de la ou des formalités qui avaient été omises. Elle peut, de même, être régularisée par une autorisation modificative si la règle relative à l'utilisation du sol qui était méconnue par l'autorisation initiale a été entretemps modifiée ou si cette règle ne peut plus être regardée comme méconnue par l'effet d'un changement dans les circonstances de fait de l'espèce. Il en va de même dans le cas où le bénéficiaire de l'autorisation initiale notifie en temps utile au juge une décision individuelle de l'autorité administrative compétente valant mesure de régularisation à la suite d'un jugement décidant, en application de l'article L. 600-5-1 du code de l'urbanisme, de surseoir à statuer sur une demande tendant à l'annulation de l'autorisation initiale.

5. Aux termes de l'article UB 3 du règlement du plan local d'urbanisme du Rayol-Canadel-sur-Mer, relatif à la desserte des terrains et aux accès aux voies : " Une autorisation d'urbanisme (déclaration préalable, permis de construire ou d'aménager) peut être refusée sur des terrains qui ne seraient pas desservis par des voies publiques ou privées dans des conditions répondant à l'importance ou à la destination des aménagements ou constructions envisagées. Un refus peut également être justifié si les accès présentent un risque pour la sécurité des usagers des voies publiques ou pour celles des personnes utilisant ces accès. Cette sécurité doit être appréciée compte-tenu, notamment, de la position des accès, de leur configuration ainsi que de la nature et de l'intensité du trafic, / (...) ". Par ailleurs, en vertu de l'article R. 111-2 du code de l'urbanisme, lorsqu'un projet de construction est de nature à porter atteinte à la salubrité ou à la sécurité publique, le permis de construire ne peut être refusé que si l'autorité compétente estime, sous le contrôle du juge, qu'il n'est pas légalement possible, au vu du dossier et de l'instruction de la demande de permis, d'accorder le permis en l'assortissant de prescriptions spéciales qui, sans apporter au projet de modifications substantielles nécessitant la présentation d'une nouvelle demande, permettraient d'assurer la conformité de la construction aux dispositions législatives et réglementaires dont l'administration est chargée d'assurer le respect.

6. Par son jugement avant dire droit du 8 février 2022, le tribunal administratif de Toulon a jugé que le permis de construire délivré à la SARL Piersogest par le maire du Rayol-Canadel-sur-Mer le 15 septembre 2020 méconnaissait les dispositions de l'article UB 3 du règlement du plan local d'urbanisme et était entaché d'une erreur manifeste d'appréciation au regard de celles de l'article R. 111-2 du code de l'urbanisme eu égard aux modalités d'accès en virage à la route départementale n° 559 définies par le projet.

7. Il ressort des pièces du dossier que la notice du projet, non modifiée par le permis de construire modificatif délivré le 11 mai 2022, précise que les voies d'entrée, à l'est, et de sortie, à l'ouest, du projet vers la route départementale n° 559 seront séparées de façon à optimiser les distances de vue des usagers. Un tourne-à-gauche doit être aménagé sur cette route départementale pour accéder au projet alors que les véhicules sortants seront tenus de tourner à droite vers le centre-ville afin d'y faire demi-tour le cas échéant dans de bonnes conditions de sécurité. Le département du Var, consulté par le service instructeur en application de l'article R. 423-53 du code de l'urbanisme, a émis un avis favorable le 14 avril 2020 assorti de deux réserves portant sur la diminution de la largeur des voies d'entrée et de sortie, de façon à permettre le passage d'un seul véhicule, et sur les caractéristiques du tourne-à-gauche prévu sur cette route départementale, à savoir la longueur et la largeur de l'îlot séparateur, le stockage des véhicules en attente, la présignalisation et son caractère infranchissable. Les plans annexés au dossier de permis de construire modificatif, notamment les plans PC3a et A3 modifiés, représentent une largeur réduite des voies d'entrée et de sortie du projet, excluant le passage de deux véhicules, cette largeur étant déterminable dès lors que l'échelle des plans y est indiquée. En outre, le plan PC3a modifié a été établi en fonction du nouveau plan d'aménagement de la voirie, dont le principe a été approuvé le 30 mars 2022 par le service compétent du département du Var et qui, outre la largeur de ces accès, concerne le positionnement et le profil en travers des îlots, l'emplacement et la typologie des panneaux de signalisation ainsi que le sens des circulations. Le 10 mai 2022, le département du Var a émis un nouvel avis favorable aux aménagements projetés, sous réserve expresse d'obtenir auprès du gestionnaire de la voirie départementale une permission de voirie autorisant ces aménagements. Par son arrêté du 11 mai 2022, le maire du Rayol-Canadel-sur-Mer a délivré à la SARL Piersogest le permis de construire modificatif demandé en l'assortissant d'une prescription consistant en l'obtention d'une permission de voirie ayant cet objet.

8. Si la notice indique que les accès font l'objet d'un projet commun de réaménagement de la route départementale n° 559 présenté par le dossier, d'une part, les plans à l'échelle joints au dossier de permis permettent de calculer les dimensions des aménagements prévus sur le terrain d'assiette, d'autre part, en ce qui concerne ceux qui doivent être réalisés sur la voirie départementale après délivrance d'une permission de voirie, l'arrêté du 11 mai 2022 se réfère, pour définir la prescription mentionnée au point précédent, à l'avis du département du Var émis le 10 mai 2022 et au plan qui y est joint, cet avis se référant lui-même au plan approuvé par la lettre du 30 mars 2022. Par suite, les requérants ne sont pas fondés à soutenir que les caractéristiques des aménagements à réaliser permettant de garantir la sécurité des accès et les modalités de leur réalisation ne sont pas suffisamment précisées.

9. Le projet litigieux porte sur la construction d'un ensemble immobilier accueillant des bureaux, des commerces, des activités artisanales ainsi que 25 logements. Eu égard à cette destination, aux aménagements de voirie prévus et au trafic s'écoulant sur la route départementale n° 559, il ne ressort pas des pièces du dossier que la longueur du tourne-à-gauche à créer sur cette voie soit insuffisante pour permettre l'attente des véhicules souhaitant accéder au projet. De même, les difficultés alléguées pour un poids lourd venant de l'est de s'engager sur la voie d'entrée du fait de sa largeur réduite et des possibilités limitées de déport sur la gauche de la voie en raison de la présence de l'îlot ne sont pas établies eu égard au positionnement reculé de cet îlot et de la surlargeur de l'accès au débouché sur la route, d'autant que les services techniques du département du Var ont donné un avis favorable au projet. Enfin, M. et Mme A... ne peuvent utilement faire valoir que les véhicules sortants souhaitant aller vers l'est ne respecteront pas l'interdiction de tourner à gauche, des aménagements supplémentaires pouvant d'ailleurs être prescrits par l'autorité titulaire du pouvoir de police en fonction de l'évolution de la situation. Dans ces conditions, le permis de construire modificatif du 11 mai 2022 a régularisé les vices affectant le permis du 15 septembre 2020 retenus par le tribunal administratif de Toulon dans son jugement du 8 février 2022.

10. Il résulte de tout ce qui précède que, sans qu'il soit besoin de statuer sur la fin de non-recevoir opposée à la demande de première instance par la SARL Piersogest et la commune du Rayol-Canadel-sur-Mer, M. et Mme A... ne sont pas fondés à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Toulon a rejeté leur demande.

Sur les frais liés au litige :

11. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de la commune du Rayol-Canadel-sur-Mer qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, la somme que M. et Mme A... demandent au titre des frais exposés par eux et non compris dans les dépens. Dans les circonstances de l'espèce, il n'y a pas lieu de faire droit aux conclusions de la commune du Rayol-Canadel-sur-Mer et de la SARL Piersogest présentées sur ce même fondement.

D É C I D E :

Article 1er : La requête de M. et Mme A... est rejetée.

Article 2 : Les conclusions de la commune du Rayol-Canadel-sur-Mer et de la SARL Piersogest au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. C... A..., à Mme B... A..., à la société à responsabilité limitée Piersogest et à la commune du Rayol-Canadel-sur-Mer.

Délibéré après l'audience du 22 juin 2023, où siégeaient :

-M. Portail, président,

-M. d'Izarn de Villefort, président assesseur,

-M. Quenette, premier conseiller.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 6 juillet 2023.

Le rapporteur,

Signé

P. D'IZARN DE VILLEFORTLe président,

Signé

P. PORTAILLa greffière,

Signé

N. JUAREZ

La République mande et ordonne au préfet du Var en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

Pour expédition conforme,

La greffière,

N° 22MA02527 2


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Marseille
Formation : 1ère chambre
Numéro d'arrêt : 22MA02527
Date de la décision : 06/07/2023
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

68-03-025-02-02-01-04 Urbanisme et aménagement du territoire. - Permis de construire. - Nature de la décision. - Octroi du permis. - Permis assorti de réserves ou de conditions. - Objet des réserves ou conditions. - Conditions de circulation et de stationnement.


Composition du Tribunal
Président : M. PORTAIL
Rapporteur ?: M. Philippe D'IZARN DE VILLEFORT
Rapporteur public ?: M. ROUX
Avocat(s) : SCP D'AVOCATS CGCB et ASSOCIES TOULOUSE

Origine de la décision
Date de l'import : 10/08/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.marseille;arret;2023-07-06;22ma02527 ?
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