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14/09/2023 | FRANCE | N°21MA03449

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 1ère chambre, 14 septembre 2023, 21MA03449


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. C... D... a demandé au tribunal administratif de Toulon d'annuler l'arrêté du 21 novembre 2018 par lequel le maire de Fréjus a retiré sa décision de non-opposition à déclaration préalable en date du 11 août 2016 portant sur l'extension d'une construction existante et la réalisation d'une piscine, de clôtures et d'un accès sur une parcelle cadastrée section CD n° 382 située 527 rue Roger Martin du Gard, sur le territoire de la commune.

Par un jugement n° 1900012 du 15 juin 2021, le tribun

al administratif de Toulon a rejeté cette demande.

Procédure devant la Cour :

Par u...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. C... D... a demandé au tribunal administratif de Toulon d'annuler l'arrêté du 21 novembre 2018 par lequel le maire de Fréjus a retiré sa décision de non-opposition à déclaration préalable en date du 11 août 2016 portant sur l'extension d'une construction existante et la réalisation d'une piscine, de clôtures et d'un accès sur une parcelle cadastrée section CD n° 382 située 527 rue Roger Martin du Gard, sur le territoire de la commune.

Par un jugement n° 1900012 du 15 juin 2021, le tribunal administratif de Toulon a rejeté cette demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête, enregistrée le 11 août 2021, M. C... D..., représenté par Me Bizarri, demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de Toulon du 15 juin 2021 ;

2°) d'annuler l'arrêté du 21 novembre 2018 par lequel le maire de Fréjus a retiré sa décision de non-opposition à déclaration préalable en date du 11 août 2016 ;

3°) de mettre à la charge de la commune de Fréjus, la somme de 5 000 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- le jugement attaqué est irrégulier dès lors qu'il n'est pas établi qu'il a été signé conformément à l'article R. 741-7 du code de justice administrative ;

- le délai de 7 jours qui lui a été accordé pour présenter des observations préalablement à la décision de retrait litigieuse était insuffisant, il n'a pas été mis en mesure de présenter des observations orales malgré sa demande en ce sens, et il n'a pas été informé de la possibilité d'être assisté par un conseil à cette fin ;

- l'absence d'indication sur le plan masse des constructions existantes sur le terrain de son voisin ne résulte pas d'une intention frauduleuse, et le maire ne pouvait donc procéder au retrait de la décision de non-opposition à sa déclaration préalable au-delà du délai de trois mois fixé par l'article L. 424-5 du code de l'urbanisme ;

- le tribunal a commis une erreur de droit en appliquant la règle d'emprise au sol fixée par le règlement du plan local d'urbanisme sur la totalité de l'unité foncière constituée par son terrain et celui de son voisin, et non terrain par terrain ;

- les constructions de son voisin qui n'ont pas été signalées sur le plan masse joint à sa déclaration préalable ont été édifiées irrégulièrement.

Par un mémoire en défense, enregistré le 8 décembre 2021, la commune de Fréjus, représentée par Me Valette-Berthelsen, conclut au rejet de la requête et à la mise à la charge de M. D... de la somme de 2 000 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle fait valoir qu'aucun des moyens de la requête n'est fondé.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code de l'urbanisme ;

- le code des relations entre le public et l'administration ;

- la loi n° 65-557 du 10 juillet 1965 fixant le statut de la copropriété ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Claudé-Mougel,

- et les conclusions de M. Quenette, rapporteur public.

Considérant ce qui suit :

1. Par une décision du 11 août 2016, le maire de la commune de Fréjus ne s'est pas opposé à la déclaration préalable déposée le 29 juin 2016 par M. D... en vue de procéder à l'extension de la maison dont il est propriétaire au 527 rue Roger Martin du Gard, à la réalisation d'une piscine, de clôtures et la création d'un accès, sur une parcelle cadastrée section CD n° 382 dont il est copropriétaire avec ses voisins, M. et Mme A... B.... A la suite d'une visite sur les lieux le 12 septembre 2018, effectuée en application de l'article L. 461-1 du code de l'urbanisme, le maire de la commune de Fréjus a informé M. D... de ce que ses services avaient constaté la réalisation de travaux non prévus dans sa déclaration, ainsi que de la présence d'ouvrages existants au sein de la copropriété, qui n'étaient pas figurés sur le plan masse joint à cette déclaration, générant de l'emprise au sol, en lui demandant de lui faire parvenir un relevé topographique faisant apparaître l'implantation de l'ensemble des constructions réalisées sur cette parcelle, et le bilan complet de l'imperméabilisation et de l'emprise au sol générées par les ouvrages existants et ceux en cours de réalisation. Faute de réponse à cette demande, la commune a informé M. D..., par une lettre du 5 novembre 2018, que compte tenu des constructions qui n'ont pas été prises en compte dans l'instruction de sa demande, son projet conduisait à dépasser le seuil maximal d'emprise au sol autorisée, et entachait d'illégalité la décision de non-opposition du 11 août 2016, en sorte qu'il était dans l'obligation de la rapporter, tout en sollicitant ses observations dans un délai de sept jours. Par un arrêté du 21 novembre 2018, le maire a retiré cette décision de non-opposition. M. D... relève appel du jugement du 15 juin 2021 du tribunal administratif de Toulon qui a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté.

Sur la régularité du jugement :

2. Il ressort des pièces du dossier que le moyen tiré de ce que la minute du jugement attaqué ne comporterait pas l'ensemble des signatures requises en vertu de l'article R. 741-7 du code de justice administrative manque en fait.

Sur le bien-fondé du jugement :

En ce qui concerne la légalité externe :

3. Aux termes de l'article L. 122-1 du code des relations entre le public et l'administration : " Les décisions mentionnées à l'article L. 211-2 n'interviennent qu'après que la personne intéressée a été mise à même de présenter des observations écrites et, le cas échéant, sur sa demande, des observations orales. Cette personne peut se faire assister par un conseil ou représenter par un mandataire de son choix. " Aux termes de l'article L. 211-2 de ce code : " Les personnes physiques ou morales ont le droit d'être informées sans délai des motifs des décisions administratives individuelles défavorables qui les concernent. / A cet effet, doivent être motivées les décisions qui :/ (...) - Retirent ou abrogent une décision créatrice de droits (...) ".

4. Le retrait d'une décision tacite de non opposition à une déclaration préalable est au nombre de celles qui doivent être motivées en application de l'article L. 211-2 du code des relations entre le public et l'administration. Elle doit, par suite, être précédée d'une procédure contradictoire, permettant au titulaire de la décision de non opposition d'être informé de la mesure qu'il est envisagé de prendre, ainsi que des motifs sur lesquels elle se fonde, et de bénéficier d'un délai suffisant pour présenter ses observations. Le respect du caractère contradictoire de la procédure prévue par les dispositions de l'article L. 121-1 du code des relations entre le public et l'administration constitue une garantie pour le titulaire de la décision que l'autorité administrative entend rapporter.

5. En premier lieu, il ressort des pièces du dossier que par une lettre datée du 5 novembre 2018, notifiée à M. D... le 8 novembre suivant, le premier adjoint au maire de la commune de Fréjus, en charge notamment de l'urbanisme, l'a informé de ce que la décision de non-opposition du 11 août 2016 était entachée d'illégalité en raison de ce que son projet aboutissait à dépasser le plafond d'emprise au sol autorisée, compte tenu de l'emprise des constructions existantes à la date de cette déclaration sur la parcelle cadastrée section CD n° 382 dont la totalité n'avait pas été mentionnée sur le plan masse joint à sa déclaration préalable, et de ce qu'il était, en conséquence, dans l'obligation de la rapporter, en lui demandant de faire parvenir ses éventuelles observations dans un délai de sept jours à compter de la réception de cette lettre. Dans les circonstances de l'espèce, au regard de ce seul motif, ce délai peut être regardé comme suffisant pour permettre à M. D... de présenter des observations. Au demeurant, M. D... n'en a présenté aucune, n'établit pas, comme il l'affirme, avoir informé la commune de Fréjus qu'il souhaitait présenter des observations orales, ni même n'allègue qu'il aurait sollicité un délai supplémentaire. Dans ces conditions, alors que la décision attaquée a été prise le 21 novembre 2018, au-delà du délai accordé, et nonobstant la circonstance, qui n'est pas davantage établie, qu'il a reçu cette lettre à son domicile alors qu'il était à Fréjus pour réaliser des travaux dans sa maison et a dû se rapprocher d'un conseil, ce moyen doit être écarté.

6. En second lieu, ni les dispositions précitées de l'article L. 122-1 du code des relations entre le public et l'administration, ni aucune autre disposition, n'imposait à la commune de Fréjus d'informer M. D... de sa faculté de se faire assister par un conseil durant la procédure contradictoire préalable à la décision de retrait attaquée. Ce moyen doit donc également, en tout état de cause, être écarté.

En ce qui concerne la légalité interne :

7. En premier lieu, et d'une part, l'article UC 9 du règlement du plan local d'urbanisme de la commune de Fréjus en vigueur à la date de la décision de non-opposition objet du retrait litigieux fixe à 20 % l'emprise maximale au sol pouvant être autorisée dans le secteur Ucd au sein duquel se situe la parcelle cadastrée section CD n° 382, et prévoit que cette emprise doit être calculée sur chaque unité foncière, une unité foncière étant un ilôt de propriété d'un seul tenant, composé d'une parcelle ou d'un ensemble de parcelles appartenant à un même propriétaire ou à la même indivision. D'autre part, l'article 3 de la loi susvisée du 10 juillet 1965 fixant le statut de la copropriété dispose qu'est notamment réputé partie commune, dans le silence ou la contradiction des titres, " le sol ", et l'article 4 que " Les parties communes sont l'objet d'une propriété indivise entre l'ensemble des copropriétaires ou certains d'entre eux seulement (...) " M. D..., qui confirme dans sa requête que le régime de droit commun de la copropriété s'applique au terrain d'assiette, n'est donc pas fondé à soutenir qu'en appliquant la règle de densité fixée par l'article UC 9 du règlement du plan local d'urbanisme de la commune de Fréjus à la parcelle cadastrée section CD n° 382 qui comprend le terrain sur lequel est implantée sa maison et celui sur lequel est implantée la maison de ses voisins, et non terrain par terrain, le tribunal aurait commis une erreur de droit. A cet égard, s'il soutient également que les constructions édifiées par ses voisins seraient illégales, il ne l'établit pas, alors qu'il ressort du rapport de constat de l'un des agents assermentés de son service " application du droit des sols ", produit à l'instance par la commune de Fréjus, que l'emprise au sol des constructions existantes à la date du dépôt de la déclaration de M. D..., qui a fait l'objet du retrait litigieux, s'établit à 245 m, et atteignait donc déjà quasiment le plafond d'emprise maximale de 245,80 m résultant de l'application du taux d'emprise de 20 % à la surface de 1 229 m de la parcelle cadastrée section CD n° 382.

8. En second lieu, aux termes de l'article L. 424-5 du code de l'urbanisme dans sa version alors applicable : " La décision de non-opposition à une déclaration préalable ou le permis de construire ou d'aménager ou de démolir, tacite ou explicite, ne peuvent être retirés que s'ils sont illégaux et dans le délai de trois mois suivant la date de ces décisions. Passé ce délai, la décision de non-opposition et le permis ne peuvent être retirés que sur demande expresse de leur bénéficiaire. " Une décision de non-opposition à déclaration préalable ne peut faire l'objet d'un retrait, une fois devenu définitif, qu'au vu d'éléments, dont l'administration a connaissance postérieurement à la délivrance du permis, établissant l'existence d'une fraude à la date où il a été délivré. La caractérisation de la fraude résulte de ce que le pétitionnaire a procédé de manière intentionnelle à des manœuvres de nature à tromper l'administration sur la réalité du projet dans le but d'échapper à l'application d'une règle d'urbanisme. Une information erronée ne peut, à elle seule, faire regarder le pétitionnaire comme s'étant livré à l'occasion du dépôt de sa demande à des manœuvres destinées à tromper l'administration.

9. D'une part, il ressort clairement de l'arrêté attaqué que le maire a entendu invoquer la fraude pour retirer le permis, en faisant référence à l'existence de constructions non mentionnées dans les documents graphiques annexés à la déclaration préalable, avant de souligner que ces constructions n'avaient pas pu être prises en compte lors de l'instruction de la demande.

10. D'autre part, il ressort du rapport de constat cité au point 7 du présent arrêt que M. D... a joint à sa déclaration préalable déposée le 29 juin 2016 un plan masse, dont l'origine est indéterminée, figurant les constructions existantes sur la parcelle cadastrée section CD n° 382 regroupant son terrain et celui de ses voisins, et non uniquement son terrain. Il ne peut dès lors sérieusement soutenir avoir conçu de bonne foi que la règle de densité fixée à l'article UC 9 du règlement du plan local d'urbanisme de la commune de Fréjus, rappelée au point 7 du présent arrêt, s'appliquait terrain par terrain, et non à la totalité de cette parcelle qui constitue, ainsi que cela a été dit au dit point 7, une unité foncière au sens de cette règle. Il ressort également de ce rapport que les constructions objets de cette déclaration ont pour effet de dépasser le plafond de 20 % de la surface de l'unité foncière fixé par cette règle d'une surface qui correspond quasi exactement à celle qui a été éludée sur ce plan masse joint à sa déclaration préalable. Alors que M. D... ne peut davantage soutenir sérieusement qu'il ignorait la consistance des constructions édifiées sur le terrain de ses voisins, notamment l'abri voiture et l'abri à bois accolés au mur de leur maison jouxtant le mur de séparation d'avec son terrain, ces circonstances caractérisent l'existence de manœuvres intentionnelles de nature à tromper l'administration, suivant l'objectif d'échapper à cette règle de densité. Le moyen tiré de la méconnaissance des dispositions de l'article L. 424-5 du code de l'urbanisme ne peut, par suite, qu'être écarté.

11. Il résulte de tout ce qui précède que M. D... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Toulon a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision du 21 novembre 2018.

Sur les frais liés au litige :

12. La commune de Fréjus n'étant pas la partie perdante dans la présente instance, les conclusions présentées par le requérant sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative doivent être rejetées. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de M. D... la somme de 2 000 euros à verser à la commune de Fréjus au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

D É C I D E

Article 1er : La requête de M. D... est rejetée.

Articlé 2 : M. D... versera la somme de 2 000 euros à la commune de Fréjus en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. C... D... et à la commune de Fréjus.

Délibéré après l'audience du 31 août 2023, où siégeaient :

- M. Portail, président,

- M. E... de F..., vice-président,

- M. Claudé-Mougel, premier conseiller.

Rendu public par mise à disposition au greffe, le 14 septembre 2023.

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N° 21MA03449


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Marseille
Formation : 1ère chambre
Numéro d'arrêt : 21MA03449
Date de la décision : 14/09/2023
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

Urbanisme et aménagement du territoire - Plans d'aménagement et d'urbanisme - Plans d`occupation des sols (POS) et plans locaux d’urbanisme (PLU) - Application des règles fixées par les POS ou les PLU - Règles de fond - Emprise au sol.

Urbanisme et aménagement du territoire - Autorisations d`utilisation des sols diverses - Régimes de déclaration préalable - Déclaration de travaux exemptés de permis de construire.


Composition du Tribunal
Président : M. PORTAIL
Rapporteur ?: M. Arnaud CLAUDÉ-MOUGEL
Rapporteur public ?: M. QUENETTE
Avocat(s) : BERARD-JEMOLI-SANTELLI-BURKATZKI-BIZZARRI

Origine de la décision
Date de l'import : 24/09/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.marseille;arret;2023-09-14;21ma03449 ?
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