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30/05/2005 | FRANCE | N°03NC01059

France | France, Cour administrative d'appel de Nancy, 4eme chambre - formation a 3, 30 mai 2005, 03NC01059


Vu 1° le recours enregistré au greffe de la Cour le 24 octobre 2003 sous le n° 03NC01059, présenté par le MINISTRE DE L'INTERIEUR, de la SECURITE INTERIEURE et des LIBERTES LOCALES ; le ministre demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement en date du 8 juillet 2003 par lequel le Tribunal administratif de Châlons-en-Champagne a annulé, à la demande de M. X, sa décision du 4 janvier 2002 notifiant à l'intéressé la perte de validité de son permis de conduire ;

2°) de confirmer les retraits de points intervenus sur le permis de conduire ;

Il soutient que :


- s'il n'a pu être apporté la preuve que M. X a été informé du retrait de points de...

Vu 1° le recours enregistré au greffe de la Cour le 24 octobre 2003 sous le n° 03NC01059, présenté par le MINISTRE DE L'INTERIEUR, de la SECURITE INTERIEURE et des LIBERTES LOCALES ; le ministre demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement en date du 8 juillet 2003 par lequel le Tribunal administratif de Châlons-en-Champagne a annulé, à la demande de M. X, sa décision du 4 janvier 2002 notifiant à l'intéressé la perte de validité de son permis de conduire ;

2°) de confirmer les retraits de points intervenus sur le permis de conduire ;

Il soutient que :

- s'il n'a pu être apporté la preuve que M. X a été informé du retrait de points de son permis, lors de l'infraction du 10 août 1999, il a été satisfait, en revanche, à l'obligation d'information prévue par les articles L.223-1, L.223-3 et R.223-3 du code de la route s'agissant des cinq autres infractions commises postérieurement à cette date ;

- les premiers juges ayant commis une erreur de fait concernant ces cinq dernières infractions, les décisions retirant les points sont valables et doivent être soustraites du capital de points affectés au permis de conduire de M. X ;

Vu le jugement et la décision attaqués ;

Vu le mémoire en défense, enregistré le 5 février 2004, présenté pour M. X, par Me Rio, avocat ; M. X conclut :

- au rejet de la requête,

- à la condamnation de l'Etat à lui verser la somme de 1.854 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Il soutient que :

- la notification globale de retrait de l'intégralité des points formant le capital de son permis de conduire est illégale dès lors que l'administration n'a pas procédé à la notification régulière de chacun des retraits de points ; ces retraits successifs de points ne lui sont pas opposables et ne peuvent, dès lors, fonder la décision du 4 janvier 2002 ;

- l'administration ne rapporte pas la preuve qu'une information préalable régulière et complète ait été faite lors de la constatation de chacune des infractions ; la réalité des infractions commises le 13 octobre et le 30 décembre 2000 n'est pas établie en l'absence de paiement d'une amende forfaitaire ;

Vu 2° le recours enregistré au greffe de la Cour le 20 janvier 2004 sous le n° 04NC00044, présenté par le MINISTRE DE L'INTERIEUR, de la SECURITE INTERIEURE et des LIBERTES LOCALES ;

Le ministre demande à la Cour de prononcer le sursis à l'exécution du jugement susmentionné du 8 juillet 2003 en tant qu'il lui ordonne de procéder à la reconstitution des points du permis de conduire de M. X et de rapporter sa décision ordonnant à l'intéressé de remettre son permis de conduire au préfet du département de l'Aube ;

Il soutient que M. X a été régulièrement informé du retrait de points qu'il était susceptible d'encourir ; compte tenu du comportement de l'intéressé, il y a urgence à surseoir à l'annulation des décisions de retraits de points ordonnés par le Tribunal administratif de Châlons en Champagne ;

Vu le mémoire en défense, enregistré le 5 février 2004, présenté pour M. X, par Me Rio, avocat ; M. X conclut, par les mêmes moyens que ceux exposés sous la requête enregistrée sous le numéro 03 NC 01059 :

- au rejet de la requête,

- à la condamnation de l'Etat à lui verser la somme de 1.854 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Vu, en date du 20 décembre 2004, les ordonnances fixant, pour chacune des deux requêtes, la clôture de l'instruction au 28 janvier 2005 à 16 h 00 ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code de la route ;

Vu le code de procédure pénale ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 9 mai 2005 :

- le rapport de Mme Guichaoua, premier conseiller,

- et les conclusions de M. Tréand, commissaire du gouvernement ;

Considérant qu'en vertu de l'article L. 223-1, alors applicable, du code de la route, le nombre de points affecté au permis de conduire est réduit de plein droit lorsqu'est établie, par le paiement d'une amende forfaitaire ou par une condamnation définitive, la réalité de l'infraction donnant lieu à retrait de points ; que le premier alinéa de l'article L. 223-3 de ce code, dispose : Lorsque l'intéressé est avisé qu'une des infractions mentionnées à l'article L. 223-1 a été relevée à son encontre, il est informé de la perte de points qu'il est susceptible d'encourir, de l'existence d'un traitement automatisé de ses points et de la possibilité pour lui d'exercer le droit d'accès. Ces mentions figurent sur le formulaire qui lui est communiqué ; que les dispositions législatives précitées sont reprises et précisées par celles de l'article R. 223-3 de ce code, selon lesquelles : Lors de la constatation d'une infraction, l'auteur de celle-ci est informé que cette infraction est susceptible d'entraîner la perte d'un certain nombre de points si elle est constatée par le paiement d'une amende forfaitaire ou par une condamnation devenue définitive./ Il est informé également de l'existence d'un traitement automatisé des pertes et reconstitutions de points et de la possibilité pour lui d'accéder aux informations le concernant. Ces mentions figurent sur le document qui lui est remis par l'agent verbalisateur ou communiqué par les services de police ou de gendarmerie ;

Considérant qu'il résulte des dispositions précitées que l'administration ne peut légalement prendre une décision retirant des points affectés à un permis de conduire à la suite d'une infraction dont la réalité a été établie, que si l'auteur de l'infraction s'est vu préalablement délivrer par elle un document contenant les informations prévues aux articles L. 223-3 et R. 223-3 de ce code, qui constituent une garantie essentielle lui permettant de contester la réalité de l'infraction et d'en mesurer les conséquences sur la validité de son permis ; qu'il appartient à l'administration d'apporter la preuve, par tout moyen, qu'elle a satisfait à cette obligation d'information ;

Considérant que, par décision du 8 janvier 2002, le ministre de l'intérieur a informé M. X que l'infraction au code de la route commise le 7 septembre 2001 à Gisy Les Nobles a entraîné la perte de quatre points du capital de points affecté à son permis de conduire et que, compte tenu des infractions, au nombre de 6, précédemment commises entre le 10 août 1999 et le 30 décembre 2000, le nombre de points de son permis de conduire avait un solde nul et qu'en conséquence, ledit permis ayant perdu sa validité, il serait à restituer au préfet de son département de résidence ; que, sur contestation de l'intéressé, le Tribunal administratif de Châlons en Champagne a, par le jugement attaqué, annulé la décision du ministre de l'intérieur ;

En ce qui concerne les infractions du 23 septembre 1999 et du 27 janvier 2000 :

Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que M. X a été verbalisé le 23 septembre 1999 pour excès de vitesse et le 27 janvier 2000 pour défaut de port de la ceinture de sécurité ; que le ministre produit le procès-verbal de contravention, relatif à chacune de ces infractions, portant la mention de la remise au contrevenant de l'imprimé Cerfa n° 90-0204 ; que M. X ne conteste pas avoir reçu ledit document ; qu'ainsi et alors même que M. X soutient que l'imprimé ne comportait pas l'ensemble des mentions prévues aux articles L.223-3 et R.223-3 précités du code de la route, l'administration doit être regardée comme apportant la preuve qu'elle a satisfait à l'obligation d'information ; que le ministre pouvait, dès lors, légalement procéder au retrait successif de trois points et d'un point du capital de points figurant au permis de conduire de M. X ;

En ce qui concerne l'infraction du 10 août 1999 :

Considérant que, s'agissant de l'infraction commise le 10 août 1999, le ministre admet être dans l'incapacité matérielle d'apporter la preuve que M X se serait vu délivrer un document contenant les informations prévues aux articles L.223-3 et R.223-3 du code de la route ; qu'ainsi, la décision retirant trois points du permis de conduire de M. X à raison de ladite infraction, doit être regardée comme intervenue à l'issue d'une procédure irrégulière ;

En ce qui concerne l'infraction du 23 août 2000 :

Considérant que si en vertu des dispositions des articles 429 et 537 du code de procédure pénale, les procès-verbaux établis par les officiers ou les agents de police judiciaire pour constater les infractions au code de la route, font foi jusqu'à preuve contraire en ce qui concerne la constatation des faits constitutifs des infractions, il n'en va pas de même de la mention portée sur les procès-verbaux relative à l'information prévue par les articles L.223-3 et R.223-3 du code de la route qui n'est pas revêtue de la même force probante ;

Considérant que le procès-verbal d'audition établi le 23 août 2000 à la suite de l'infraction commise le même jour pour non respect de la limitation de vitesse en agglomération mentionne que l'imprimé Cerfa 90-204 relatif au permis à point, a été remis à M. X et que l'intéressé a été informé que les faits commis sont susceptibles d'entraîner une mesure de suspension du permis de conduire ainsi qu'un éventuel retrait de quatre points ; que, cependant, M. X qui n'a pas reconnu la réalité de l'infraction et n'a pas signé le procès-verbal de contravention, soutient que l'information légale ne lui a pas été remise ; que si l'administration fait valoir que M. X a signé le carnet de déclarations, elle ne produit pas le feuillet permettant d'établir l'exactitude de cette affirmation ; qu'ainsi, dans les circonstances de l'espèce, la procédure suivie ne peut être tenue pour régulière ; que le retrait de quatre points dont a été affecté le permis de M. X à l'issue de l'infraction susmentionnée est, dès lors, illégal ;

En ce qui concerne les infractions du 13 octobre 2000 et du 30 décembre 2000 :

Considérant qu'il résulte des pièces du dossier que M. X a fait l'objet le 13 octobre 2000 d'un procès-verbal de contravention pour avoir circulé sans ceinture de sécurité et le 30 décembre 2000 pour avoir excédé de 20 à 30 km/h la vitesse légalement autorisée ; que M. X soutient, sans être contredit, qu'il n'a pas réglé l'amende forfaitaire correspondant à ces deux infractions ; qu'en l'absence du paiement de ladite amende et dès lors qu'il n'est pas soutenu que les faits commis aient donné lieu à une quelconque condamnation, la réalité des infractions ayant entraîné le retrait de trois points du permis de conduire de M. X, ne peut être tenue, en application de l'article L.223-1 susévoqué du code de la route, pour établie ; que le retrait de points auquel il a été ainsi procédé se trouve, dès lors, entaché d'illégalité ;

Considérant qu'il résulte de ce tout ce qui précède que le MINISTRE de L'INTERIEUR, de la SECURITE INTERIEURE et des LIBERTES LOCALES n'est fondé à demander l'annulation du jugement attaqué qu'en tant qu'il annule ses décisions portant retrait des points correspondant aux infractions commises par M. X le 23 septembre 1999 et le 27 janvier 2000 ;

Sur les conclusions relatives à l'injonction :

Considérant que le Tribunal administratif de Châlons en Champagne a enjoint au ministre de rapporter la décision ordonnant à M. X de remettre son permis de conduire au préfet et de lui reconnaître le bénéfice des points illégalement retirés, en le rétablissant dans le traitement automatisé mentionné à l'article L. 223-3 du code de la route, dans le délai de quinze jours à compter de la notification du jugement ; qu'eu égard aux motifs du présent arrêt qui confirme l'illégalité des retraits de points mentionnés sur la décision du 8 janvier 2002, à l'exception de quatre d'entre eux, l'injonction faite par les premiers juges conserve, dans les limites sus-indiquées, son bien-fondé ;

Sur les conclusions à fin de sursis à exécution :

Considérant que, par requête distincte enregistrée sous le n° 04 NC 00044, le MINISTRE de L'INTERIEUR, de la SECURITE INTERIEURE et des LIBERTES LOCALES a demandé le sursis à exécution de l'article 2 du jugement attaqué qui lui enjoint de reconstituer le capital de points du permis de conduire de M. X et la validité de ce permis, dans le délai de quinze jours à compter de la notification du jugement ; que le présent arrêt statuant sur le bien fondé desdites mesures, les conclusions susmentionnées de la requête sont devenues sans objet ;

Sur les conclusions incidentes de M. X :

Considérant que M. X n'articule aucun moyen à l'appui de ses conclusions tendant à l'annulation de la décision du préfet de l'Aube du 10 octobre 2002 lui enjoignant la restitution de son permis de conduire ; que de telles conclusions ne peuvent qu'être rejetées ;

Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de condamner l'Etat à payer à M. X la somme de 1000 euros au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens

DECIDE

Article 1er : Il n'y a plus lieu de statuer sur les conclusions de la requête n° 04NC00044.

Article 2 : Le jugement du Tribunal administratif de Châlons-en-Champagne est annulé en tant qu'il annule les décisions du ministre de l'intérieur portant retrait des points correspondant aux infractions commises par M. X le 23 septembre 1999 et le 27 janvier 2000.

Article 3 : Le surplus des conclusions de la requête n° 03NC01059 du ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales est rejeté.

Article 4 : Les conclusions incidentes de M. X sont rejetées.

Article 5 : L'Etat versera à M. X la somme de 1.000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative .

Article 6 : Le présent arrêt sera notifié au MINISTRE de L'INTERIEUR, de la SECURITE INTERIEURE et des LIBERTES LOCALES et à M. Philippe X.

2

N°03NC01059/04NC00044


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nancy
Formation : 4eme chambre - formation a 3
Numéro d'arrêt : 03NC01059
Date de la décision : 30/05/2005
Sens de l'arrêt : Satisfaction partielle
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. JOB
Rapporteur ?: Mme Marie GUICHAOUA
Rapporteur public ?: M. TREAND
Avocat(s) : RIO

Origine de la décision
Date de l'import : 05/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nancy;arret;2005-05-30;03nc01059 ?
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