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03/11/2005 | FRANCE | N°02NC00611

France | France, Cour administrative d'appel de Nancy, 2eme chambre - formation a 3, 03 novembre 2005, 02NC00611


Vu le recours, enregistré le 5 juin 2002, présenté par le MINISTRE DE L'ECONOMIE, DES FINANCES ET DE L'INDUSTRIE ;

Il demande à la Cour :

1°) d'annuler l'article 2 du jugement n° 96-1388 - 96-1599 - 96-1600 - 96-1601 du 5 février 2002 du Tribunal administratif de Châlons-en-Champagne, en tant qu'il accorde à M. Marc X une réduction de l'impôt sur le revenu, auquel il a été assujetti au titre de l'année 1993 ;

2°) de remettre cette imposition à la charge du contribuable à concurrence de la décharge prononcée par les premiers juges ;

Il soutient que

:

- c'est à tort que le Tribunal administratif de Châlons-en-Champagne a estimé que le c...

Vu le recours, enregistré le 5 juin 2002, présenté par le MINISTRE DE L'ECONOMIE, DES FINANCES ET DE L'INDUSTRIE ;

Il demande à la Cour :

1°) d'annuler l'article 2 du jugement n° 96-1388 - 96-1599 - 96-1600 - 96-1601 du 5 février 2002 du Tribunal administratif de Châlons-en-Champagne, en tant qu'il accorde à M. Marc X une réduction de l'impôt sur le revenu, auquel il a été assujetti au titre de l'année 1993 ;

2°) de remettre cette imposition à la charge du contribuable à concurrence de la décharge prononcée par les premiers juges ;

Il soutient que :

- c'est à tort que le Tribunal administratif de Châlons-en-Champagne a estimé que le contribuable avait pu, pour le calcul forfaitaire de certains frais déductibles de ses bénéfices non commerciaux de médecin, opposer à l'administration, sur le fondement de l'article L. 80 A du livre des procédures fiscales, une instruction interne du 7 février 1972, non publiée ;

- le contribuable ne remplissait pas les conditions prévues pour ce calcul forfaitaire de frais, par l'instruction publiée 5 G 14-93 du 27 octobre 1993, applicable aux revenus de l'année 1993, contrairement à ce qu'ont estimé les premiers juges ;

Vu le jugement attaqué ;

Vu la note du 9 septembre 2004 par laquelle le président de la 2ème chambre de la Cour met en demeure M. X de produire un mémoire en défense, et l'absence de mémoire produit par le contribuable ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code général des impôts ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 6 octobre 2005 :

- le rapport de M. Bathie, premier conseiller,

- et les conclusions de Mme Rousselle, commissaire du gouvernement ;

Considérant qu'il résulte de l'instruction que M. X qui exerçait en 1993, la profession de médecin spécialiste à ... a déclaré les bénéfices non commerciaux générés par cette activité, en fonction de sa quote-part des résultats de la société civile professionnelle dont il était membre, et après avoir pratiqué une déduction forfaitaire de 2 % pour certains frais dont il assumait personnellement la charge ; que par une notification de redressement du 19 décembre 1995, l'administration a remis en cause cette déduction forfaitaire, au motif que le contribuable ne remplissait pas toutes les conditions fixées par une instruction publiée et applicable à l'année 1993, permettant de bénéficier de cette méthode de calcul simplifiée des frais professionnels ; que le ministre fait régulièrement appel du jugement du 5 février 2002 du Tribunal administratif de Châlons-en-Champagne, en tant que, par son article 2, il accorde à M. X la décharge du supplément d'impôt sur le revenu, auquel il avait été assujetti, au titre de l'année 1993, en conséquence du redressement sus-analysé ;

Considérant que pour accorder la décharge de l'imposition en litige, les premiers juges ont estimé que le contribuable, tout comme la S.C.P. dont il était membre, avaient respecté les conditions permettant de pratiquer une déduction forfaitaire de certains frais professionnels, prévues dans une instruction du 7 février 1972 publiée au bulletin officiel de la direction générale des impôts ; que d'une part, cette instruction ne saurait être utilement invoquée sur le fondement de l'article L. 80 A du livre des procédures fiscales, dès lors qu'il s'agit d'un document interne à l'administration qui, n'ayant pas fait, de la part de celle-ci, l'objet d'une diffusion destinée aux contribuables, ne peut être regardé comme comportant une interprétation formelle de la loi fiscale au sens desdites dispositions ; que d'autre part, contrairement à ce qu'ont également estimé les premiers juges, l'instruction 5 G 14-93 du 27 octobre 1993 relative aux frais professionnels litigieux, était applicable dans le cadre d'une déclaration des revenus de l'année 1993, dont la date limite de dépôt était postérieure à la publication de ladite instruction ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que c'est à tort que le Tribunal administratif de Châlons-en-Champagne s'est fondé sur l'instruction en date du 7 février 1972 sus-évoquée pour accorder à M. X la décharge du supplément d'impôt contesté au titre de l'année 1993 ;

Considérant toutefois qu'il appartient à la cour administrative d'appel, saisie de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les autres moyens soulevés par M. X devant le Tribunal administratif de Châlons-en-Champagne ;

Sur l'application de la loi fiscale :

Considérant qu'aux termes de l'article 93 du code général des impôts, applicable aux revenus imposables dans la catégorie des bénéfices non commerciaux : I - Le bénéfice à retenir dans les bases de l'impôt sur le revenu est constitué par l'excédent des recettes totales sur les dépenses nécessitées par l'exercice de la profession ... ; que l'article 99 du même code précise que : Les contribuables soumis ... au régime de la déclaration contrôlée ... sont tenus d'avoir un livre-journal ... présentant le détail de leurs recettes et de leurs dépenses professionnelles ... que ces dispositions impliquent que le contribuable doit apporter la preuve que les dépenses qu'il entend déduire de son bénéfice sont réelles et nécessitées par l'exercice de sa profession ; que les déductions forfaitaires de frais professionnels, dont se prévaut le requérant n'ont pas été instituées par la loi fiscale, mais par des instructions administratives ; que, par suite, en l'absence de justifications des dépenses réellement supportées par le contribuable, celui-ci ne peut prétendre à aucune déduction forfaitaire, sur le fondement des dispositions de l'article 93-1 précité ;

Sur le bénéfice de l'interprétation de la loi fiscale donnée par l'administration :

Considérant qu'aux termes de l'article L. 80 A du livre des procédures fiscales : Il ne sera procédé à aucun rehaussement d'impositions antérieures si la cause du rehaussement poursuivi par l'administration est un différend sur l'interprétation par le redevable de bonne foi du texte fiscal et s'il est démontré que l'interprétation sur laquelle est fondée la première décision a été, à l'époque, formellement admise par l'administration ... ; que, sur le fondement de ces dernières dispositions, le contribuable a la possibilité de se prévaloir des instructions publiées du service, notamment celles prévoyant une méthode différente de détermination des frais sus-évoqués, à condition d'entrer dans les prévisions de la doctrine, appliquée littéralement, résultant de ses énonciations ;

Considérant que, contrairement à ce qu'allègue le requérant, l'instruction 5 G 14-93 du 27 octobre 1993 pouvait seule être invoquée par les contribuables concernés à l'occasion de leur déclaration de revenus de l'année 1993, pour les motifs sus-indiqués ; que cette instruction, applicable aux médecins, concerne également les contribuables percevant leur quote-part de bénéfices établis initialement au niveau de la société civile professionnelle dont ils sont membres ;

Considérant qu'aux termes de cette instruction publiée à l'intention des contribuables : Les médecins ... placés sous le régime de la déclaration contrôlée ... peuvent, s'ils le désirent, ne pas tenir la comptabilité réelle de certains frais professionnels. Ces frais sont déduits, dans ce cas, sous forme d'un abattement ... les deux modes de déduction, frais réels ou abattement, sont exclusifs l'un de l'autre. Ils ne peuvent ni coexister, ni être utilisés successivement au cours d'une même année ... Il s'ensuit que l'abattement n'est applicable qu'en l'absence de comptabilisation à un poste de charges des dépenses couvertes par la déduction forfaitaire de 2 % ... L'option pour la déduction forfaitaire doit être exercée à priori au 1er janvier de l'année ..., l'inscription de ces frais au compte de charges emporte option pour la déduction de leur montant réel ;

Considérant que la S.C.P. dont le requérant était membre, n'établit pas avoir opté expressément au 1er janvier 1993 pour la déduction forfaitaire de 2 % des frais en cause, et qu'elle a d'ailleurs procédé à une déduction, en charges, des frais réels de ses associés ; qu'ainsi, elle ne remplissait pas les conditions prévues par l'instruction précitée, pour autoriser ses membres à pratiquer l'abattement forfaitaire sus-évoqué ; que la circonstance que la société a régularisé ensuite ses écritures comptables, de façon à les coordonner avec la déclaration des bénéfices non commerciaux du requérant comportant un calcul forfaitaire des frais litigieux, demeure sans conséquence sur l'option pour la déduction des frais réels, qu'elle est réputée avoir exercée pour l'année 1993 ;

Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que le MINISTRE DE L'ECONOMIE, DES FINANCES ET DE L'INDUSTRIE est fondé à soutenir que c'est à tort que par l'article 2 du jugement attaqué, le Tribunal administratif de Châlons-en-Champagne a accordé à M. X la décharge du supplément d'impôt sur le revenu contesté au titre de l'année 1993, et à obtenir que cette imposition soit remise à la charge du contribuable ;

DECIDE :

Article 1er : L'article 2 du jugement du 5 février 2002 du Tribunal administratif de Châlons-en-Champagne est annulé.

Article 2 : L'impôt sur le revenu auquel M. X a été assujetti au titre de l'année 1993 est remis à sa charge, à concurrence de la décharge prononcée par les premier juges.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié au MINISTRE DE L'ECONOMIE, DES FINANCES ET DE L'INDUSTRIE et à M. Marc X.

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N° 02NC0611


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nancy
Formation : 2eme chambre - formation a 3
Numéro d'arrêt : 02NC00611
Date de la décision : 03/11/2005
Sens de l'arrêt : Satisfaction totale
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Autres

Composition du Tribunal
Président : Mme FELMY
Rapporteur ?: M. Henri BATHIE
Rapporteur public ?: Mme ROUSSELLE

Origine de la décision
Date de l'import : 05/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nancy;arret;2005-11-03;02nc00611 ?
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