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22/12/2005 | FRANCE | N°05NC00057

France | France, Cour administrative d'appel de Nancy, 3eme chambre - formation a 3, 22 décembre 2005, 05NC00057


Vu la requête, enregistrée au greffe le 20 janvier 2005, présentée pour l'EURL PIZZERIA LA SIESTA, ayant son siège ..., (67000), par Me A..., avocat ;

La société PIZZERIA LA SIESTA demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement en date du 23 novembre 2004 par lequel le Tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa demande tendant à la condamnation solidaire de la communauté urbaine de Strasbourg et de la compagnie des transports strasbourgeois à lui verser la somme de 12 536 euros en réparation du préjudice subi à raison des travaux de réalisation de la ligne

B du tramway ;

2°) de condamner solidairement la communauté urbaine de Stra...

Vu la requête, enregistrée au greffe le 20 janvier 2005, présentée pour l'EURL PIZZERIA LA SIESTA, ayant son siège ..., (67000), par Me A..., avocat ;

La société PIZZERIA LA SIESTA demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement en date du 23 novembre 2004 par lequel le Tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa demande tendant à la condamnation solidaire de la communauté urbaine de Strasbourg et de la compagnie des transports strasbourgeois à lui verser la somme de 12 536 euros en réparation du préjudice subi à raison des travaux de réalisation de la ligne B du tramway ;

2°) de condamner solidairement la communauté urbaine de Strasbourg et la compagnie des transports strasbourgeois à lui verser la somme susvisée, avec les intérêts au taux légal à compter du dépôt du rapport d'expertise et jusqu'au paiement complet, ainsi que les intérêts des intérêts ;

3°) de condamner solidairement la communauté urbaine de Strasbourg et la compagnie des transports strasbourgeois à supporter la charge définitive des frais d'expertise ;

4°) de condamner solidairement la compagnie des transports strasbourgeois et la communauté urbaine de Strasbourg à lui verser une somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Elle soutient que :

- le tribunal a fait une inexacte appréciation des faits alors que les conclusions de l'expert, étayées de documents comptables, et les photographies attestent le caractère anormal et spécial des nuisances supportées par la société du fait des travaux au droit de son commerce ; les travaux ont généré des nuisances visuelles et sonores, des coupures d'approvisionnement en fluides et des difficultés d'accès à l'origine de graves troubles dans l'exploitation ; en outre, l'interdiction totale de la circulation des véhicules sur le boulevard de la Victoire pendant la durée des travaux excède également les sujétions normales des riverains de la voie publique ;

- ces nombreux désagréments ont entraîné une baisse du chiffre d'affaires de l'entreprise ; le préjudice doit tenir compte également des frais de publicité rendus nécessaires pour limiter la baisse du chiffre d'affaires et permettre le redémarrage du restaurant à l'issue des travaux ; le préjudice doit être évalué à 12 536 euros, étant précisé qu'en référé, la société avait obtenu une provision de 9 000 euros ;

Vu le mémoire en défense, enregistré le 14 mars 2005, présenté pour la communauté urbaine de Strasbourg, représentée par son président en exercice, par Me Bourgun, avocat ;

La communauté urbaine de Strasbourg conclut :

1°) au rejet de la requête ;

2°) à la condamnation de la société PIZZERIA LA SIESTA à lui verser la somme de 2 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Elle soutient que :

- la requête est irrecevable car elle ne contient pas une motivation suffisante dès lors qu'elle se borne à reprendre les moyens de première instance sans démontrer l'erreur commise par les premiers juges ;

- la requérante ne démontre pas le caractère anormal du préjudice et le lien de causalité avec les travaux ; l'accès au restaurant n'a jamais été impossible ; les nuisances sonores doivent être relativisées alors que la clientèle arrive le soir après 19 heures ; la requérante ne fournit aucun détail sur les durées et les causes des ruptures d'alimentation en eau et électricité ;

- les frais de publicité résultent d'une décision de gestion et ne sont pas la conséquence d'un dommage de travaux publics ;

Vu les mémoires en défense, enregistrés les 18 octobre et 24 novembre 2005, présentés pour la compagnie des transports strasbourgeois, ayant son siège, ... aux marchandises à Strasbourg (67000), par Me X..., avocat ;

1°) La compagnie des transports strasbourgeois conclut :

- à titre principal, au rejet de la requête de l'EURL PIZZERIA LA SIESTA ;

- à ce que la Cour prononce la mise hors de cause de la compagnie des transports strasbourgeois ;

Elle soutient à cet effet que :

- la requête est irrecevable car dépourvue de moyens d'appel au sens de l'article R. 411-1 du code de justice administrative ;

- les conclusions indemnitaires sont irrecevables en tant qu'elles sont dirigées contre la compagnie des transports strasbourgeois dès lors qu'il convient en l'espèce d'écarter le principe de la responsabilité subsidiaire de l'autorité concédante ; en effet, les parties à un contrat peuvent déroger à la règle prétorienne selon laquelle la responsabilité du concédant n'est que subsidiaire sauf insolvabilité du concessionnaire, s'agissant d'une règle qui n'est pas d'ordre public et ne revêt pas la nature d'un principe général du droit ; au cas particulier, la requérante pouvait mettre en cause la communauté urbaine de Strasbourg dès lors que l'article 22 alinéa 3 du traité de concession liant la communauté urbaine de Strasbourg à la compagnie des transports strasbourgeois prévoit que la communauté urbaine de Strasbourg doit indemniser le préjudice commercial lié à la baisse du chiffre d'affaires consécutif aux travaux litigieux ; d'ailleurs, la communauté urbaine de Strasbourg avait accepté le principe de sa responsabilité ;

- les tiers peuvent se prévaloir du fait que le conseil de communauté, par une délibération à caractère réglementaire, a mis en place une procédure d'indemnisation amiable des préjudices subis par les entreprises du fait des perturbations d'accès engendrées par les travaux et a ainsi rendu ladite clause opposable aux tiers ;

- de surcroît, la demande était dirigée contre la décision du 26 novembre 2002 par laquelle la communauté urbaine de Strasbourg a fait à la société une proposition d'indemnisation de 9 306 euros jugée insuffisante ;

- subsidiairement, aucun moyen de la requête n'est fondé ; les préjudices liés au déplacement des courants de circulation et à la modification de la circulation générale ne sont jamais susceptibles d'indemnisation ; la requérante n'établit pas avoir été victime d'une rupture d'égalité devant les charges publiques au titre des gênes liées aux travaux publics ;

2°) La compagnie des transports strasbourgeois conclut, à titre subsidiaire, à la condamnation de la communauté urbaine de Strasbourg à la garantir de toute condamnation qui pourrait être prononcée à son encontre ;

Elle fait valoir à cet effet que l'application de l'article 22 du traité de concession déroge à la règle de la responsabilité subsidiaire du concédant ;

Vu la lettre en date du 16 novembre 2005 par laquelle les parties ont été informées par la Cour, en application de l'article R. 611-7 du code de justice administrative, que l'arrêt paraissait susceptible d'être fondé sur un moyen soulevé d'office tiré de ce que les conclusions tendant à la condamnation de la communauté urbaine de Strasbourg sont mal dirigées ;

Vu le jugement attaqué ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la loi du 28 pluviôse an VII ;

Vu le code de justice administrative ;

Vu le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 1er décembre 2005 :

- le rapport de M. Martinez, premier conseiller,

- les observations de Me Y..., de la SCP Bourgun Dörr, avocat de la communauté urbaine de Strasbourg, et de Me Z... du cabinet A et C. Lex, avocat de la compagnie des transports strasbourgeois,

- et les conclusions de M. Tréand, commissaire du gouvernement ;

Considérant que la société PIZZERIA LA SIESTA demande l'annulation du jugement en date du 23 novembre 2004 par lequel le Tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa demande tendant à la condamnation solidaire de la communauté urbaine de Strasbourg et de la compagnie des transports strasbourgeois à lui verser une somme de 12 536 euros en réparation du préjudice subi à raison des travaux de réalisation de la ligne B du tramway ;

Sans qu'il soit besoin de statuer sur la fin de non-recevoir opposée par la communauté urbaine de Strasbourg et la compagnie des transports strasbourgeois et tirée de l'insuffisante motivation de la requête :

Sur les conclusions à fin d'indemnité :

Considérant que pour rechercher la responsabilité de la communauté urbaine de Strasbourg et de la compagnie des transports strasbourgeois, la société PIZZERIA LA SIESTA, qui exploite un restaurant au ..., fait valoir qu'elle a subi un préjudice commercial consécutif, d'une part, à l'exécution des travaux de réalisation de la ligne B du tramway et, d'autre part, aux conditions de circulation et de stationnement dans le secteur où elle exerce son activité ;

Considérant, en premier lieu, qu'il résulte de l'instruction, et qu'il n'est d'ailleurs pas contesté, que si les travaux dont s'agit ont rendu plus difficiles les conditions de circulation et de stationnement au droit de l'immeuble où est exercée l'activité commerciale de la requérante, l'accès de la clientèle à son restaurant a toujours été possible durant lesdits travaux ; qu'il ne résulte pas de l'instruction que les nuisances sonores et visuelles et les poussières provoquées par les engins de chantier ainsi que les coupures ayant affecté, lors desdits travaux, les réseaux d'eau et d'électricité, aient en l'espèce revêtu le caractère d'un préjudice anormal et spécial ; que, dès lors, les gênes subies par la requérante dans l'exploitation de son commerce n'ont pas excédé les sujétions normales qui peuvent être imposées aux riverains dans l'intérêt de la voirie ;

Considérant en second lieu, que les modifications apportées à la circulation générale et résultant des changements effectués dans l'assiette, la direction et les conditions d'utilisation des voies publiques ne sont pas de nature à ouvrir droit à indemnité dès lors que l'accès aux riverains reste, comme en l'espèce, assuré ; qu'ainsi, en admettant même que les travaux litigieux aient eu pour conséquence de priver temporairement la requérante d'une partie de sa clientèle à raison des difficultés de stationnement liées à la modification de la circulation générale au sein du quartier considéré, la requérante ne saurait prétendre à une indemnité de ce chef ;

Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède, et sans même qu'il soit besoin d'examiner le moyen tiré de ce que les conclusions indemnitaires formées à l'encontre de la communauté urbaine de Strasbourg et de la compagnie des transports strasbourgeois sont mal dirigées, la société PIZZERIA LA SIESTA n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa demande ;

Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que la compagnie des transports strasbourgeois et la communauté urbaine de Strasbourg, qui ne sont pas, dans la présente instance, les parties perdantes, soient condamnées à payer à la société PIZZERIA LA SIESTA la somme qu'elle demande au titre des frais exposés en appel et non compris dans les dépens ;

Considérant qu'il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire droit aux conclusions de la communauté urbaine de Strasbourg et de la compagnie des transports strasbourgeois tendant à la condamnation de la société PIZZERIA LA SIESTA sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

DÉCIDE :

Article 1er : La requête susvisée de la société PIZZERIA LA SIESTA est rejetée.

Article 2 : Les conclusions de la communauté urbaine de Strasbourg et de la compagnie des transports strasbourgeois tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à la société PIZZERIA LA SIESTA, à la communauté urbaine de Strasbourg et à la compagnie des transports strasbourgeois.

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N° 05NC00057


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nancy
Formation : 3eme chambre - formation a 3
Numéro d'arrêt : 05NC00057
Date de la décision : 22/12/2005
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Composition du Tribunal
Président : M. LEDUCQ
Rapporteur ?: M. José MARTINEZ
Rapporteur public ?: M. TREAND
Avocat(s) : STORCK - PAULUS et ASSOCIES

Origine de la décision
Date de l'import : 05/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nancy;arret;2005-12-22;05nc00057 ?
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