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28/02/2008 | FRANCE | N°06NC01167

France | France, Cour administrative d'appel de Nancy, 2ème chambre - formation à 3, 28 février 2008, 06NC01167


Vu la requête, enregistrée le 11 août 2006, présentée pour M. et Mme Yves X, demeurant ..., par Me Kadri, avocat ; M. et Mme X demandent à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0405630 en date du 3 juillet 2006 par lequel le Tribunal administratif de Strasbourg a rejeté leur demande tendant à obtenir la décharge des suppléments d'impôt sur le revenu et de l'amende fiscale mis à leur charge au titre des années 2000 et 2001 ;

2°) de leur accorder la décharge demandée ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat, une somme de 1 500 €, p

our le remboursement des frais exposés, conformément à l'article L. 761-1 du code de ju...

Vu la requête, enregistrée le 11 août 2006, présentée pour M. et Mme Yves X, demeurant ..., par Me Kadri, avocat ; M. et Mme X demandent à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0405630 en date du 3 juillet 2006 par lequel le Tribunal administratif de Strasbourg a rejeté leur demande tendant à obtenir la décharge des suppléments d'impôt sur le revenu et de l'amende fiscale mis à leur charge au titre des années 2000 et 2001 ;

2°) de leur accorder la décharge demandée ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat, une somme de 1 500 €, pour le remboursement des frais exposés, conformément à l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

M. et Mme X soutiennent que :

- la procédure d'examen contradictoire de situation fiscale personnelle (E.C.S.F.P) engagée par le service a excédé la durée limite d'un an prévue par l'article L. 52 du livre des procédures fiscales, même en tenant compte de la prorogation autorisée par la loi, qui n'a pu excéder 1 mois et 15 jours en l'espèce ;

- c'est à tort que le tribunal administratif refuse d'admettre la déduction des frais de déplacement allégués, inhérents aux activités de M. X, et pour lesquels il a fourni les renseignements essentiels ;

- les frais afférents à des salaires versés au Luxembourg ont été indûment réintégrés dans les bases de l'impôt dû en France, en violation de l'article 14-1 de la convention fiscale franco-luxembourgeoise ;

- la somme de 8 537 € imposée en tant que revenus d'origine indéterminée correspond à un prêt de la société Arcania, obtenu et remboursé en espèces, en juin 2001 ;

- l'amende appliquée en vertu de l'article 1649 A du code général des impôts n'est pas justifiée dès lors que M. X a volontairement indiqué ses comptes tenus à l'étranger ;


Vu le jugement attaqué ;


Vu le mémoire en défense, enregistré le 16 mars 2007, présenté par le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie ; il conclut au rejet de la requête ; il soutient que :

- le délai d'un an, prorogé en fonction des productions tardives de relevés de comptes bancaires à l'étranger, régi par l'article L. 12 du livre des procédures fiscales, a été respecté en l'espèce ;

- la contribuable ne pouvait déduire ses indemnités kilométriques de déplacement, évaluées de manière forfaitaire, et non déductibles de ce fait, en vertu de l'article 80 ter du code général des impôts ;

- il ne pouvait davantage, sur le fondement de l'article 81-1e, déduire des allocations spéciales dont il n'établit pas qu'elles correspondent à une activité exercée au Luxembourg ni, par suite, invoquer l'article 14 de la convention fiscale franco-luxembourgeoise ;

- la somme de 8 537 € perçue de la société Arcania a été, à bon droit, intégrée dans les revenus d'origine indéterminée, par application des articles L. 16 et L. 69 du livre des procédures fiscales, en l'absence de véritable preuve du prêt allégué ;

- l'amende prévue par l'article 1768 bis 2 du code général des impôts a été, à bon droit, appliquée au contribuable qui avait omis de déclarer un compte ouvert au Luxembourg ;


Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code général des impôts ;

Vu le livre des procédures fiscales ;

Vu la convention fiscale franco-luxembourgeoise du 1er avril 1958 modifiée ;

Vu le code de justice administrative ;



Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 31 janvier 2008 :

- le rapport de M. Bathie, premier conseiller,

- et les conclusions de M. Lion, commissaire du gouvernement ;



Sur la régularité de la procédure de redressement :

Considérant qu'aux termes du 3e alinéa de l'article L. 12 du livre des procédures fiscales : Sous peine de nullité de l'imposition, un examen contradictoire de la situation fiscale personnelle ne peut s'étendre sur une période supérieure à un an à compter de la réception de l'avis de vérification .. ; que le 5e alinéa du même article précise que cette période est … prorogée … des délais nécessaires à l'administration pour obtenir les relevés de compte lorsque le contribuable n'a pas usé de sa faculté de les produire dans un délai de soixante jours à compter de la demande de l'administration ou pour recevoir les renseignements demandés aux autorités étrangères, lorsque le contribuable a pu disposer de revenus à l'étranger ou en provenance directe de l'étranger .. ; qu'aux termes de l'article L. 47 du même livre : Un examen contradictoire de l'ensemble de la situation fiscale personnelle d'une personne physique au regard de l'impôt sur le revenu ou une vérification de comptabilité ne peut être engagée sans que le contribuable en ait été informé par l'envoi ou la remise d'un avis de vérification. (…) L'avis envoyé ou remis au contribuable avant l'engagement d'un examen contradictoire de l'ensemble de la situation fiscale personnelle peut comporter une demande des relevés de compte. ; qu'il résulte de ces dispositions qu'un examen contradictoire de la situation fiscale personnelle (ESFP) ne peut normalement s'étendre sur une période supérieure à un an à compter de la réception de l'avis de vérification ; que, cependant, lorsque le contribuable n'a pas usé de sa faculté de produire les relevés sollicités, le délai légal est prorogé de la durée courant depuis le 61ème jour suivant la demande faite au contribuable par l'administration, jusqu'à ce que cette dernière ait reçu l'intégralité des relevés de comptes sollicités ;


Considérant qu'il résulte de l'instruction que M. et Mme X ont reçu le 1er août 2002, un avis d'examen contradictoire de situation fiscale personnelle concernant leurs revenus des années 1999, 2000 et 2001 ; que, par ce même avis, le vérificateur demandait aux contribuables de lui fournir, dans le délai de soixante jours prévu par la loi fiscale, la totalité de leurs relevés de comptes bancaires ; que les documents bancaires remis par M. X le 13 septembre 2002, ont été mentionnés sur un procès-verbal établi le même jour, et signé par l'intéressé ; qu'au cours de ses investigations ultérieures, le service a découvert l'existence d'un compte bancaire, ouvert auprès du Crédit européen au Luxembourg, au nom de M. X, et non signalé précédemment ; qu'en conséquence, le vérificateur, par un nouveau courrier reçu le 15 février 2003 par les contribuables, leur a demandé la copie des relevés afférents à ce compte bancaire ouvert à l'étranger ; que les documents sollicités ont été remis au service le 30 avril 2003 ; que l'administration a poursuivi ses investigations avant d'adresser à M. et Mme X une notification de redressement des revenus déclarés au titre des années 2000 et 2001, reçue le 23 octobre 2003 par ses destinataires ;


Considérant que, par application des dispositions de l'article L. 12 précité, le délai d'un an courant à compter de la réception de l'avis de contrôle, le 1er août 2002, a été prorogé de la période écoulée entre le soixante et unième jour suivant cette dernière date, et celle du 30 avril 2003, à laquelle le service a obtenu copie des relevés bancaires luxembourgeois, dont les contribuables avaient omis de révéler l'existence durant le délai de 60 jours qui leur était imparti initialement à cette fin ; qu'ainsi, l'administration a pu, au cas d'espèce, disposer d'un délai total de 1 an et 212 jours à partir du 1er août 2002, pour achever ses opérations de contrôle, conformément à l'article L. 12 précité ; que ce délai n'était pas expiré le 23 octobre 2003, lorsque les contribuables ont reçu la notification de redressement consécutive à l'examen contradictoire de situation fiscale personnelle engagé à leur encontre ; qu'il résulte de tous ces éléments que le moyen tiré de ce que l'administration aurait poursuivi ce contrôle au-delà de la durée limitée, régie par l'article L. 12 du livre des procédures fiscales, n'est pas fondé ;



Sur le bien-fondé des impositions :

Considérant, en premier lieu, qu'aux termes de l'article 80 ter du code général des impôts régissant les traitements et salaires : a Les indemnités, remboursements et allocations forfaitaires pour frais versés aux dirigeants de sociétés sont, quel que soit leur objet, soumis à l'impôt sur le revenu. b Ces dispositions sont applicables : … 2º Dans les sociétés à responsabilité limitée : aux gérants minoritaires … ; que, sur le fondement de ces dispositions, le vérificateur a réintégré, dans les salaires imposables de M. X, le montant de notes de frais, réputées correspondre à des déplacements effectués pour le compte des société ITE et Deltacom, dont il était gérant et associé minoritaire ; que ce chef de redressement est motivé par le caractère forfaitaire des sommes en cause, révélé par leurs montants approximatifs, déterminés par jour, ou selon un nombre de kilomètres parcourus évalué de manière globale ; que le contribuable ne justifie pas ces dépenses avec suffisamment de précisions, en produisant des factures de garagistes qui ne permettent pas, à elle seules, de confirmer le caractère professionnel des frais exposés, ni au moyen d'attestations de péages autoroutiers dont le débiteur demeure mal identifié, ni en produisant une liste des dates et lieux de visites à des clients, succincte et non corroborée par d'autres éléments ; que la part de frais personnellement assumée par le contribuable apparaît d'autant plus imprécise, qu'il résulte des constats, non utilement contestés, du vérificateur, que les sociétés employeuses prenaient en charge directement une partie de ces dépenses liées aux déplacements de leur gérant ; que, par suite, ce dernier ne peut être regardé comme ayant justifié les dépenses qu'il aurait réellement prises en charge ; que, compte tenu du caractère forfaitaire constaté des remboursements de ces frais, l'administration a pu, à bon droit, en réintégrer les montants dans les salaires imposables du contribuable, par application de l'article 80 ter précité ;


Considérant, en deuxième lieu, qu'aux termes de l'article 81 du code général des impôts : Sont affranchis de l'impôt : 1º Les allocations spéciales destinées à couvrir les frais inhérents à la fonction ou à l'emploi et effectivement utilisées conformément à leur objet … ; que le service a également réintégré dans les salaires imposables de M. X des sommes versées par des sociétés au service desquelles il exerçait des fonctions d'attaché commercial, au motif que leur montant, fixé de manière forfaitaire, ne permettait pas leur déduction par application de l'article 81-1e précité ; que le requérant soutient que ces remboursements de frais concernent des activités exercées au Luxembourg qui sont, en conséquence, imposables dans cet Etat, conformément à l'article 14-1 de la convention fiscale franco-luxembourgeoise du 1er avril 1958 modifiée ;


Considérant, d'une part, qu'il est constant qu'au cours des années vérifiées, M. X avait son domicile fiscal à Talange, en France ; qu'il était, par suite, imposable en principe dans cet Etat, sur l'ensemble de ses revenus, conformément à l'article 4 A du code général des impôts ; que, d'autre part, le requérant pouvait éventuellement se prévaloir de la Convention fiscale franco-luxembourgeoise pour échapper à l'imposition en France, à condition d'établir, comme le prévoient les stipulations de l'article 14-1 que les rémunérations en cause étaient … imposables … dans l'Etat sur le territoire duquel s'exerce l'activité personnelle source de ces revenus … ; que, toutefois, la seule circonstance que les sociétés débitrices des remboursements de frais étaient domiciliées au Luxembourg ne suffit pas à établir que l'activité du requérant s'exerçait exclusivement sur le territoire de cet Etat ; que les autres éléments du dossier font d'ailleurs ressortir que les déplacements professionnels du contribuable se situaient principalement sur le territoire français ; qu'il suit de là que le requérant ne peut se prévaloir des stipulations de cette convention ; que, sur ce point, il ne peut utilement invoquer une note du 23 mai 1959, qui ne donne pas desdites stipulations une interprétation différente de celle rappelée ci-dessus ;


Considérant, en troisième lieu, que, pour contester la base des revenus d'origine indéterminée de l'année 2001, les requérants se bornent à reprendre l'argumentation soumise au tribunal administratif, selon laquelle la somme de 8 537 € perçue le 12 juin 2001 correspondrait au remboursement d'un prêt à la société Arcania, sans apporter d'élément nouveau ; qu'ainsi, ils n'établissent pas que les premiers juges auraient, par les motifs qu'ils ont retenus et qu'il y a lieu d'adopter, commis une erreur en écartant ce moyen ;



Sur l'amende fiscale :

Considérant que, pour contester le bien-fondé de l'amende de 750 € appliquée à deux reprises par le service, au titre des années 2000 et 2001, sur le fondement des dispositions combinées des articles 1649 A et 1768 bis du code général des impôts, pour omission de déclaration de comptes bancaires ouverts à l'étranger, les requérants reprennent leur argumentation présentée en première instance, sans apporter d'élément nouveau ; que, sur ce point également, ils n'établissent pas que les premiers juges auraient, par les motifs qu'ils ont retenus et qu'il y a lieu d'adopter, commis une erreur en écartant ce moyen ;


Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que M. et Mme X ne sont pas fondés à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Strasbourg a rejeté leur demande ;



Sur les conclusions des requérants tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de l'Etat, qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, la somme que M. et Mme X demandent à au titre des frais exposés par eux et non compris dans les dépens ;



DÉCIDE :



Article 1er : La requête de M. et Mme X est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. et Mme Yves X et au ministre du budget, des comptes publics et de la fonction publique.

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N° 06NC01167


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nancy
Formation : 2ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 06NC01167
Date de la décision : 28/02/2008
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Autres

Composition du Tribunal
Président : M. COMMENVILLE
Rapporteur ?: M. Henri BATHIE
Rapporteur public ?: M. LION
Avocat(s) : RICHARD - MERTZ - POITIERES - QUERE - AUBRY et RENOUX

Origine de la décision
Date de l'import : 06/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nancy;arret;2008-02-28;06nc01167 ?
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