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12/11/2009 | FRANCE | N°08NC01625

France | France, Cour administrative d'appel de Nancy, 3ème chambre - formation à 3, 12 novembre 2009, 08NC01625


Vu, enregistrée au greffe de la Cour le 13 novembre 2008, la décision

n° 311567 du Conseil d'Etat statuant au contentieux, en date du 5 novembre 2008, qui, après avoir annulé l'arrêt n° 06NC00266 du 19 novembre 2007 de la Cour administrative d'appel de Nancy, a renvoyé à cette dernière le jugement de l'affaire ;

Vu le recours, enregistré au greffe de la Cour le 20 février 2006, complété par mémoires enregistrés les 12 avril 2007 et 8 octobre 2009, présenté par le MINISTRE DE l'ECONOMIE, DES FINANCES ET DE L'INDUSTRIE ;

Le MINISTRE DE l'ECONOMIE, DES FI

NANCES ET DE L'INDUSTRIE demande à la Cour :

1°) d'annuler l'article 1er du jugeme...

Vu, enregistrée au greffe de la Cour le 13 novembre 2008, la décision

n° 311567 du Conseil d'Etat statuant au contentieux, en date du 5 novembre 2008, qui, après avoir annulé l'arrêt n° 06NC00266 du 19 novembre 2007 de la Cour administrative d'appel de Nancy, a renvoyé à cette dernière le jugement de l'affaire ;

Vu le recours, enregistré au greffe de la Cour le 20 février 2006, complété par mémoires enregistrés les 12 avril 2007 et 8 octobre 2009, présenté par le MINISTRE DE l'ECONOMIE, DES FINANCES ET DE L'INDUSTRIE ;

Le MINISTRE DE l'ECONOMIE, DES FINANCES ET DE L'INDUSTRIE demande à la Cour :

1°) d'annuler l'article 1er du jugement n° 0200029 du 20 octobre 2005 par lequel le Tribunal administratif de Besançon a accordé à la société Euro Sérum la décharge de la taxe professionnelle à laquelle elle a été assujettie au titre de l'année 2000, à concurrence d'un montant de 49 193,01 euros ;

2°) de remettre la somme susmentionnée à la charge de la société Euro Sérum ;

Il soutient que :

- les dépenses exposées initialement par la société Euro Sérum puis refacturées à des entités tierces ne peuvent être regardées comme supportées dès l'origine pour le compte d'une société déterminée ; la retranscription de ces refacturations au compte 791 n'est pas conforme au plan comptable ;

- la circonstance que des sommes soient inscrites au compte de transferts de charges n'interdit pas de les prendre en compte pour la détermination de la valeur ajoutée servant de base au calcul du plafonnement de la cotisation due ; il faut analyser l'objet économique de l'opération ; la solution retenue par le tribunal méconnaît le principe de symétrie nécessaire entre produits et charges ; il faut tenir compte des produits quand parallèlement les charges ont été comptabilisées dans des comptes de charges ; le service a limité les rectifications aux seules sommes ayant déjà affecté la détermination de la valeur ajoutée ; la société Euro Sérum n'apporte pas la preuve que des charges n'auraient pas été comptabilisées en contrepartie des indemnités d'assurance inscrites au compte transferts de charges ;

- à titre subsidiaire, le tribunal s'est trompé sur l'ampleur de la décharge accordée ; celle-ci devait se limiter à 42.708,16 euros ;

Vu le jugement attaqué ;

Vu les mémoires, enregistrés les 22 mars 2007 et 25 septembre 2009, présentés pour la société Euro Sérum par Me Augé, avocat, qui conclut au rejet du recours du ministre et à ce qu'une somme de 3 000 € soit mise à la charge de l'Etat au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Elle soutient que :

- l'article 1647 B sexies du code général des impôts n'a pas prévu la prise en compte des dépenses engagées pour le compte de tiers dans le chiffrage de la valeur ajoutée servant de base de calcul pour déterminer le montant du plafonnement de la cotisation de taxe professionnelle ; l'administration commet une erreur de droit en réintégrant dans les produits les sommes figurant au compte transferts de charges ; la liste des rubriques composant la valeur ajoutée et énumérée à l'article 1647 B sexies du code général des impôts est limitative ;

- pendant des années, la direction des services fiscaux de la Haute-Saône a admis le calcul qu'elle effectuait et lui a accordé en totalité les dégrèvements sollicités ;

- le service ne peut écarter une écriture comptable sans contester sa régularité et sa pertinence, les choix comptables constituant des décisions de gestion ; la doctrine administrative 6 E-4334 du 1er juin 1995 a été méconnue ;

- en l'occurrence, les sommes comptabilisées au compte transferts de charges sont soit des indemnités d'assurance perçues ou à percevoir, suite à un sinistre, soit des dépenses supportées dès l'origine pour le compte de tiers, en l'espèce des sociétés du groupe (énergies, achats de matériel et de matières premières) ; ces sommes ne contribuent pas à la production de la valeur ajoutée d'Euro Sérum ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 15 octobre 2009 :

- le rapport de M. Tréand, premier conseiller,

- les conclusions de M. Collier, rapporteur public,

- et les observations de Me Chatelain, avocat de la société Euro Sérum ;

Considérant qu'il résulte de l'instruction que la société Euro Sérum a demandé, par application du plafonnement en fonction de la valeur ajoutée prévu par l'article 1647 B sexies du code général des impôts, un dégrèvement partiel de la cotisation de taxe professionnelle à laquelle elle a été assujettie au titre de l'année 2000 dans les rôles de la commune de Port-sur-Saône (Haute-Saône) ; que l'administration, par décision du 12 novembre 2001, n'a accueilli que partiellement sa demande ; que, par jugement du 20 octobre 2005, le Tribunal administratif de Besançon a prononcé en faveur de la société une décharge de la taxe professionnelle due au titre de l'année 2000, à concurrence de 49 193,01 euros ;

Considérant qu'aux termes de l'article 1647 B sexies du code général des impôts : I - Sur demande du redevable, la cotisation de taxe professionnelle de chaque entreprise est plafonnée en fonction de la valeur ajoutée produite au cours de l'année au titre de laquelle l'imposition est établie ou au cours du dernier exercice de douze mois clos au cours de cette même année lorsque cet exercice ne coïncide pas avec l'année civile. La valeur ajoutée est définie selon les modalités prévues au II. (..) / II. 1. La valeur ajoutée mentionnée au I est égale à l'excédent hors taxe de la production sur les consommations de biens et services en provenance de tiers constaté pour la période définie au I. / 2. Pour la généralité des entreprises, la production de l'exercice est égale à la différence entre : / D'une part, les ventes, les travaux, les prestations de services ou les recettes ; les produits accessoires ; les subventions d'exploitation ; les ristournes, rabais et remises obtenus ; les travaux faits par l'entreprise elle-même ; les stocks à la fin de l'exercice. / Et, d'autre part, les achats de matières et de marchandises, droits de douane compris ; les réductions sur ventes ; les stocks au début de l'exercice. / Les consommations en provenance de tiers comprennent : les travaux, fournitures et services extérieurs, à l'exception des loyers afférents aux biens pris en crédit-bail, ou des loyers afférents à des biens, visés au a du 1° de l'article 1467, pris en location par un assujetti à la taxe professionnelle pour une durée de plus de six mois ou des redevances afférentes à ces biens résultant d'une convention de location-gérance, les frais de transports et déplacements, les frais divers de gestion (..) ;

Considérant que ces dispositions fixent la liste limitative des catégories d'éléments comptables qui doivent être pris en compte dans le calcul de la valeur ajoutée en fonction de laquelle sont plafonnées les cotisations de taxe professionnelle ; que, pour déterminer si une charge ou un produit se rattache à l'une de ces catégories, il y a lieu de se reporter aux dispositions du plan comptable général dans leur rédaction en vigueur lors de l'année d'imposition concernée ; qu'aux termes de l'article 38 quater de l'annexe III au code général des impôts : Les entreprises doivent respecter les définitions édictées par le plan comptable général, sous réserve que celles-ci ne soient pas incompatibles avec les règles applicables pour l'assiette de l'impôt ;

Considérant que la circonstance que des sommes aient été enregistrées au compte transfert de charges ne fait pas, par elle-même, obstacle à ce que, sans méconnaître les dispositions combinées de l'article 1647 B sexies du code général des impôts et de l'article 38 quater de l'annexe III à ce code, ces sommes soient prises en compte pour le calcul de la valeur ajoutée servant au plafonnement des cotisations de taxe professionnelle ; que, par suite, c'est à tort que, pour faire droit aux conclusions de la Société Euro Sérum, le tribunal s'est fondé sur le seul fait que ce compte ne pouvait être rattaché à aucune des rubriques prévues par l'article 1647 B sexies pour le calcul de la valeur ajoutée et qu'ainsi l'administration ne pouvait légalement majorer la valeur ajoutée calculée par la société Euro Sérum des sommes inscrites par celle-ci à un tel compte ;

Considérant toutefois qu'il appartient à la cour, saisie de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les autres moyens soulevés par la société Euro Sérum devant le Tribunal administratif de Besançon ;

Considérant, d'une part, que la société Euro Sérum soutient que les sommes comptabilisées au compte n° 791 transferts de charges au titre de l'exercice 2000 étaient soit des indemnités d'assurance perçues ou à percevoir, suite à un sinistre, soit des dépenses supportées dès l'origine pour le compte de tiers, en l'espèce des sociétés du groupe, correspondant à des achats d'énergie, de matériel et de matières premières et qu'elles ne contribuaient pas à la production de sa valeur ajoutée; que, toutefois, il ne résulte pas de l'instruction que les refacturations des achats qu'elle a effectués pour le compte des sociétés du groupe n'avaient pas fait antérieurement l'objet d'une inscription dans un compte de charges ; que, par ailleurs, il ne résulte pas davantage de l'instruction que les indemnités d'assurance n'ont pas eu pour objet de compenser soit les charges d'exploitation entraînées par les sinistres intervenus, soit les primes d'assurances acquittées, qui les unes et les autres ont été prises en compte pour la détermination de la valeur ajoutée de l'exercice ; qu'ainsi, le service a pu, à bon droit, et sans qu'il n'ait eu à modifier l'imputation comptable desdites sommes, considérer que la circonstance que ces dernières avaient été enregistrées dans ses écritures au compte transferts de charges ne faisait pas obstacle à ce qu'elles fussent, sans méconnaitre les dispositions combinées des article 1647 B sexies du code général des impôts et 38 quater de l'annexe III à ce code, prises en compte pour le calcul de la valeur ajouté de l'entreprise, au nombre des produits d'exploitation ;

Considérant, d'autre part, que si la Société Euro Sérum invoque les dispositions combinées des instructions administratives E-10-85 du 18 décembre 1985 et 6 E-4334 du 1er juin 1995, qui prévoient que le calcul de la valeur ajoutée servant de base au plafonnement de la cotisation de taxe professionnelle tient compte des imprimés n° 2052 et n° 2053 élaborés par l'administration, qui sont adaptés au plan comptable général révisé, leurs énonciations ne font, par elles-mêmes, pas obstacle à ce que des sommes inscrites au compte de transferts de charges soient regardées comme concourant à la détermination de la production de l'exercice au sens des dispositions de l'article 1647 B sexies du code général des impôts ; qu'ainsi, ces instructions ne contiennent aucune interprétation formelle de la loi fiscale dont la société intimée puisse se prévaloir sur le fondement des dispositions de l'article L. 80 A du livre des procédures fiscales ;

Considérant, enfin, que les dégrèvements de taxe professionnelle non motivés, prononcés par le service au titre d'années antérieures à l'année en litige à la suite de demandes de plafonnement de cette taxe en fonction de la valeur ajoutée déposées par la société requérante, ne constituent pas une prise de position formelle, par le service, sur une situation de fait, dont la société Euro Sérum pourrait se prévaloir sur le fondement des dispositions combinées des articles L. 80 A et L. 80 B du livre des procédures fiscales ;

Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que le MINISTRE DE l'ECONOMIE, DES FINANCES ET DE L'INDUSTRIE est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Besançon a accordé à la société Euro Sérum la décharge de la taxe professionnelle à laquelle elle a été assujettie au titre de l'année 2000, à concurrence d'un montant de 49 193,01 euros ; que, par voie de conséquence, les conclusions de la société Euro Sérum tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative doivent être rejetées ;

DECIDE :

Article 1er : Le jugement susvisé du Tribunal administratif de Besançon en date du 20 octobre 2005 est annulé.

Article 2 : La société Euro Sérum est rétablie au rôle de la taxe professionnelle au titre de l'année 2000 à concurrence de la décharge prononcée par le Tribunal administratif de Besançon.

Article 3 : Les conclusions de la société Euro-Sérum tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 4 : Le présent arrêt sera notifié au MINISTRE DU BUDGET, DES COMPTES PUBLICS, DE LA FONCTION PUBLIQUE ET DE LA REFORME DE L'ETAT et à la Société Euro Sérum.

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08NC01625

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Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nancy
Formation : 3ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 08NC01625
Date de la décision : 12/11/2009
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Autres

Composition du Tribunal
Président : M. VINCENT
Rapporteur ?: M. Olivier TREAND
Rapporteur public ?: M. COLLIER
Avocat(s) : SOCIETE D'AVOCATS FIDAL ; SOCIETE D'AVOCATS FIDAL ; SOCIETE D'AVOCATS FIDAL

Origine de la décision
Date de l'import : 04/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nancy;arret;2009-11-12;08nc01625 ?
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