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17/12/2009 | FRANCE | N°09NC00488

France | France, Cour administrative d'appel de Nancy, 1ère chambre - formation à 3, 17 décembre 2009, 09NC00488


Vu la requête, enregistrée les 23 juin 2005, complétée par un mémoire enregistré le 8 septembre 2006, présentée pour Mme Blanche A et M. Joseph A, demeurant ..., par Me Julia, avocat, substitué par la SCP d'avocats Michel - Frey-Michel - Bauer - Berna ;

M. et Mme A demandent à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0202932 du 19 avril 2005 par lequel le Tribunal administratif de Strasbourg a rejeté leur demande tendant à ce que les Hôpitaux universitaires de Strasbourg soient condamnés à réparer leurs préjudices consécutifs à l'intervention chirurgicale dont

a fait l'objet Mme A le 8 février 2000 ;

2°) de condamner les Hôpitaux univers...

Vu la requête, enregistrée les 23 juin 2005, complétée par un mémoire enregistré le 8 septembre 2006, présentée pour Mme Blanche A et M. Joseph A, demeurant ..., par Me Julia, avocat, substitué par la SCP d'avocats Michel - Frey-Michel - Bauer - Berna ;

M. et Mme A demandent à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0202932 du 19 avril 2005 par lequel le Tribunal administratif de Strasbourg a rejeté leur demande tendant à ce que les Hôpitaux universitaires de Strasbourg soient condamnés à réparer leurs préjudices consécutifs à l'intervention chirurgicale dont a fait l'objet Mme A le 8 février 2000 ;

2°) de condamner les Hôpitaux universitaires de Strasbourg à verser à Mme A les sommes de 111 745,16 euros au titre de son préjudice économique et 106 714,30 euros au titre de son préjudice personnel, et à M. A la somme de 45 734,70 euros au titre de ses préjudices confondus, sommes augmentées des intérêts de droit à compter du recours préalable, avec capitalisation des intérêts ;

3°) de condamner les Hôpitaux universitaires de Strasbourg à verser à Mme A et à M. A respectivement les sommes de 7 000 euros et de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code justice administrative ;

Ils soutiennent que :

- contrairement à ce qu'a jugé le Tribunal administratif, l'hôpital a commis une faute en n'informant pas Mme A des risques que comportait l'opération subie le 8 février 2000 ;

- l'uretère ayant été sectionnée au cours de l'opération, il y a eu, nécessairement, une faute commise par le chirurgien qui a opéré ;

- Mme A a perdu son emploi, son incapacité permanente partielle est de l'ordre de 15%, ses préjudices personnels sont importants et M. A subit incontestablement un préjudice moral et un préjudice d'agrément ;

Vu le jugement attaqué ;

Vu, enregistrés les 14 août et 9 novembre 2006, les mémoires en défense présentés pour les Hôpitaux universitaires de Strasbourg, par Me Le Prado ; les Hôpitaux universitaires de Strasbourg concluent au rejet de la requête de M. et Mme A ;

Ils soutiennent que :

- Mme A n'est pas fondée à se prévaloir d'un préjudice indemnisable résultant d'un défaut d'information ayant entraîné une perte de chance de se soustraire à un risque d'invalidité qui s'est réalisé, dès lors que l'opération du 8 février 2000 n'a été à l'origine d'aucune séquelle constitutive d'une invalidité pour elle ;

- le Tribunal a, clairement et à juste titre, écarté l'existence d'une faute médicale ;

Vu, enregistré le 3 novembre 2006, le mémoire présenté pour la CAISSE PRIMAIRE D'ASSURANCE MALADIE DE SARREGUEMINES, prise en la personne de son représentant légal, par Me Laluet ; la caisse conclut à la condamnation des Hôpitaux universitaires de Strasbourg à hauteur d'une somme de 33 004,69 euros au titre de ses débours et à hauteur d'une somme de 1 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Elle soutient que la responsabilité des Hôpitaux universitaires de Strasbourg est engagée pour défaut d'information de Mme A et pour faute médicale ;

Vu l'arrêt n° 301082 du 30 mars 2009 par lequel le Conseil d'Etat a, d'une part, annulé l'arrêt n° 05NC00785 du 30 novembre 2006 par lequel la Cour a rejeté la requête de M. et Mme A et les conclusions de la CAISSE PRIMAIRE D'ASSURANCE MALADIE DE SARREGUEMINES et, d'autre part, a renvoyé l'affaire devant la Cour ;

Vu le mémoire, enregistré le 29 avril 2009, présenté pour M. et Mme A, qui persistent dans leurs précédentes conclusions, par les mêmes moyens ;

Vu le mémoire, enregistré le 24 août 2009, présenté pour la CAISSE PRIMAIRE D'ASSURANCE MALADIE DE SARREGUEMINES, qui persiste dans ses précédentes conclusions, par les mêmes moyens, en portant à 2 000 euros ses conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Vu le mémoire en défense, enregistré le 27 août 2009, présenté pour les Hôpitaux universitaires de Strasbourg, qui persistent dans leurs conclusions tendant au rejet de la requête ;

Ils soutiennent que :

- si le Conseil d'Etat a jugé dans sa décision du 30 mars 2009 que le manquement des Hôpitaux universitaires de Strasbourg à leur obligation d'information était constitutif d'une faute, il ne s'est pas prononcé sur le point de savoir si cette faute était ou non de nature à ouvrir droit à réparation ; or, en l'espèce, il n'est pas contesté que l'indication opératoire consistant en l'ablation de l'utérus ainsi que de l'ovaire droit et au traitement d'une incontinence urinaire était pleinement justifié, de même que le choix de recourir à la technique de la coelioscopie, de sorte que, même si elle avait été pleinement informée des risques de l'intervention, Mme A n'y aurait pas renoncé, si bien que l'absence d'information ne lui a en l'espèce fait perdre aucune chance d'éviter le risque qui s'est réalisé ;

- subsidiairement, si une perte de chance devait être retenue, celle-ci devrait être regardée comme très limitée ;

- en tout état de cause, les indemnités demandées sont disproportionnées ;

Vu la lettre en date du 17 septembre 2009 informant les parties, conformément à l'article R. 611-7 du code de justice administrative, que la Cour était susceptible de soulever d'office un moyen d'ordre public ;

Vu, enregistrés le 8 octobre 2009 et le 10 novembre 2009, les mémoires présentés pour la CAISSE PRIMAIRE D'ASSURANCE MALADIE DE SARREGUEMINES, qui persiste dans ses précédentes conclusions, par les mêmes moyens et en outre que ses conclusions à fin d'indemnisation ne sont pas irrecevables, lesdites conclusions ne pouvant être regardées comme un appel présenté tardivement ;

Vu le mémoire, enregistré le 20 novembre 2009, présenté pour les Hôpitaux universitaires de Strasbourg, qui persistent dans leurs précédentes conclusions et concluent en outre au rejet des conclusions présentées par la CAISSE PRIMAIRE D'ASSURANCE MALADIE DE SARREGUEMINES ;

Ils soutiennent que ces dernières conclusions ont été présentées tardivement, après l'expiration du délai d'appel, et que, en tout état de cause, la caisse n'établit pas que les débours dont elle réclame le remboursement sont la conséquence directe de la faute alléguée ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code de la sécurité sociale ;

Vu le code civil ;

Vu la loi n° 2006-1640 du 21 décembre 2006 ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 26 novembre 2009 :

- le rapport de M. Couvert-Castéra, président,

- et les conclusions de Mme Steinmetz-Schies, rapporteur public ;

Sur la fin de non recevoir opposée par les Hôpitaux universitaires de Strasbourg aux conclusions de la CAISSE PRIMAIRE D'ASSURANCE MALADIE DE SARREGUEMINES :

Considérant qu'eu égard au lien qu'établissent les dispositions de l'article L. 376-1 du code de la sécurité sociale entre la détermination des droits de la victime d'un accident et celle des droits de la caisse de sécurité sociale à laquelle elle est affiliée, quand un jugement ayant statué sur des conclusions indemnitaires de la victime et de la caisse dirigées contre l'auteur de l'accident a fait l'objet d'un appel de la victime introduit dans le délai légal, la caisse peut former appel à tout moment, en reprenant sa demande de première instance, augmentée le cas échéant pour tenir compte des prestations nouvelles servies depuis l'intervention du jugement, quel que soit le sens de la décision de première instance ; que les conclusions introduites par la CAISSE PRIMAIRE D'ASSURANCE MALADIE DE SARREGUEMINES sont ainsi recevables malgré l'expiration du délai d'appel ; qu'il s'ensuit que doit être écartée la fin de non recevoir tirée par les Hôpitaux universitaires de Strasbourg de la tardiveté desdites conclusions ;

Sur la responsabilité :

Considérant que Mme A a été victime, le 8 février 2000, d'un sectionnement de l'uretère reliant le rein droit à la vessie au cours d'une intervention chirurgicale pratiquée aux Hôpitaux universitaires de Strasbourg, consistant en l'ablation de l'utérus ainsi que de l'ovaire droit et au traitement, en outre, d'une incontinence urinaire ;

En ce qui concerne la responsabilité pour faute médicale :

Considérant qu'il résulte de l'instruction et, notamment, du rapport de l'expertise ordonnée par le président du Tribunal administratif de Strasbourg, d'une part, que l'intervention chirurgicale pratiquée le 8 février 2000 était justifiée par la présence d'un utérus fibromateux et d'un kyste de l'ovaire droit et, d'autre part, que Mme A présentait une corpulence qui justifiait son opération par coelioscopie ; que cette intervention a été réalisée dans le respect des règles de l'art, la lésion de l'uretère, lors de la ligature ou de la coagulation des vaisseaux utérins, constituant une complication connue, en chirurgie, de l'ablation de l'utérus, compte tenu de l'extrême proximité de l'artère utérine et de l'uretère du rein à l'emplacement dit croisement de l'utérine ; que le sectionnement de l'uretère est ainsi, en l'espèce, imputable non à un geste médical fautif qui aurait été commis lors de l'intervention chirurgicale, mais à l'une des complications exceptionnelles et connues de l'hystérectomie ;

En ce qui concerne la responsabilité pour manquement à une obligation d'information :

Considérant que, lorsque l'acte médical envisagé, même accompli conformément aux règles de l'art, comporte des risques connus de décès ou d'invalidité, le patient doit en être informé dans des conditions qui permettent de recueillir son consentement éclairé ; que, si cette information n'est pas requise en cas d'urgence, d'impossibilité ou de refus du patient d'être informé, la seule circonstance que les risques ne se réalisent qu'exceptionnellement ne dispense pas les praticiens de leur obligation ; que le défaut d'information peut ouvrir droit à réparation alors même qu'il portait sur un risque, finalement réalisé, qui a entraîné une invalidité temporaire réparée par une autre intervention ;

Considérant que les Hôpitaux universitaires de Strasbourg ne contestent pas que Mme A n'a pas été informée de l'existence de risques de lésions de l'uretère à l'occasion de l'ablation de l'utérus ; que, par suite, en l'absence d'urgence rendant impossible l'information préalable de la patiente, ce défaut d'information a constitué une faute engageant la responsabilité de cet établissement public hospitalier ; que M. et Mme A sont, dès lors, fondés à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Strasbourg a rejeté leur action en responsabilité dirigée contre cet établissement ;

Sur le préjudice :

Considérant que la réparation du préjudice résultant pour Mme A de la perte de chance de se soustraire au risque dont elle n'a pas été informée et qui s'est réalisé doit être fixée à une fraction des différents chefs de préjudice subis, compte tenu du rapprochement entre, d'une part, les risques inhérents à l'intervention et, d'autre part, les risques encourus par elle en cas de renonciation à celle-ci ;

Considérant qu'il résulte de l'instruction que Mme A présentait un utérus fibromateux à l'origine d'hémorragies ayant entraîné une anémie, ainsi qu'un kyste de l'ovaire droit, conduisant son gynécologue à lui recommander, le 15 janvier 2000, une hystérectomie avec annexectomie ; que le chirurgien urologue auquel elle a été adressée par ce gynécologue pour cette intervention connaissait bien l'intéressée pour l'avoir prise en charge dans le service d'urologie de l'hôpital civil de Strasbourg et lui a proposé de traiter également son incontinence urinaire à l'occasion de la même intervention chirurgicale ; que l'expert relève que : Mme A connaissait bien le chirurgien, qu'elle était sans doute tout à fait en confiance et qu'il est probable que, même prévenue des risques ... elle aurait donné son accord pour être débarrassée de toutes ses pathologies en une seule intervention ; que l'expert relève également que la lésion de l'uretère lors d'une hystérectomie est une complication d'une fréquence estimée en chirurgie ouverte à environ 1% et qui n'est pas encore précisément estimée en coelioscopie ; que, dans ces circonstances, il y a lieu de fixer à un quart des différents chefs de préjudice subis la réparation du préjudice résultant pour Mme A de la perte de chance de se soustraire au risque de sectionnement de l'uretère survenu le 8 février 2000 et, par suite, aux interventions chirurgicales qu'elle a subies les 20 février et 24 février 2000 ainsi que le 22 mars 2001 pour y remédier ;

Sur les droits à réparation de Mme A et le recours subrogatoire de la CAISSE PRIMAIRE D'ASSURANCE MALADIE DE SARREGUEMINES :

Considérant qu'aux termes de l'article L. 376-1 du code de la sécurité sociale, dans sa rédaction résultant du III de l'article 25 de la loi du 21 décembre 2006 : Lorsque, sans entrer dans les cas régis par les dispositions législatives applicables aux accidents du travail, la lésion dont l'assuré social ou son ayant droit est atteint est imputable à un tiers, l'assuré ou ses ayants droits conservent contre l'auteur de l'accident le droit de demander la réparation du préjudice causé, conformément aux règles du droit commun, dans la mesure où ce préjudice n'est pas réparé par application du présent livre. / Les caisses de sécurité sociale sont tenues de servir à l'assuré ou à ses ayants droits les prestations prévues par le présent livre, sauf recours de leur part contre l'auteur responsable de l'accident dans les conditions ci-après. / Les recours subrogatoires des caisses contre les tiers s'exercent poste par poste sur les seules indemnités qui réparent les préjudices qu'elles ont pris en charge, à l'exclusion des préjudices à caractère personnel. / Conformément à l'article 1152 du code civil, la subrogation ne peut nuire à la victime subrogeante, créancière de l'indemnisation, lorsqu'elle n'a été prise en charge que partiellement par les prestations sociales ; en ce cas, l'assuré social peut exercer ses droits contre le responsable, par préférence à la caisse subrogée. / Cependant, si le tiers payeur établit qu'il a effectivement et préalablement versé à la victime une prestation indemnisant de manière incontestable un poste de préjudice personnel, son recours peut s'exercer sur ce poste de préjudice (...) ;

Considérant que la CAISSE PRIMAIRE D'ASSURANCE MALADIE DE SARREGUEMINES exerce sur les réparations dues au titre du préjudice subi par Mme A le recours subrogatoire prévu à l'article L. 376-1 du code de la sécurité sociale ; qu'il y a lieu de statuer poste par poste sur ce préjudice et sur les droits respectifs de la victime et de la caisse, en application des dispositions de cet article, telles qu'elles ont été modifiées par la loi n° 2006-1640 du 21 décembre 2006, qui s'appliquent à la réparation des dommages résultant d'évènements antérieurs à la date d'entrée en vigueur de cette loi dès lors que, comme en l'espèce, le montant de l'indemnité due à la victime n'a pas été définitivement fixé avant cette date ;

Considérant que, ainsi qu'il a été dit ci-dessus, le préjudice indemnisable est constitué par la perte de chance, évaluée à 25 %, d'éviter la réalisation de l'ensemble des dommages résultant de l'intervention chirurgicale ; que les Hôpitaux universitaires de Strasbourg doivent dès lors être condamnés à indemniser cette fraction des préjudices subis ;

En ce qui concerne les préjudices à caractère patrimonial :

S'agissant des dépenses de santé :

Considérant, en premier lieu, que, à l'appui de ses conclusions tendant au remboursement des frais exposés par elle pour le traitement de Mme A, comprenant des frais médicaux et pharmaceutiques, des frais pour soins infirmiers, actes de radiologie, transport, massage et appareillage, pour un montant total de 17 580,95 euros, la CAISSE PRIMAIRE D'ASSURANCE MALADIE DE SARREGUEMINES se borne à produire un document intitulé notification des débours , établi par son département juridique, précisant les périodes au cours desquelles ces différents frais ont été exposés, sans produire une attestation d'imputabilité établie par son médecin conseil ou tout autre document permettant d'établir que ces frais sont la conséquence directe du sectionnement de l'uretère dont Mme A a été victime le 8 février 2000 ou des interventions chirurgicales qu'elle a subies pour y remédier, et n'incluent pas des dépenses de santé inhérentes aux suites normales de l'hystérectomie avec annexectomie subie par l'intéressée à cette même date ou des dépenses résultant de la pathologie rhumatismale ainsi que de l'incontinence urinaire dont elle était atteinte avant cette date, dépenses qui ne sont pas la conséquence de la faute commise par les Hôpitaux universitaires de Strasbourg ; que, dès lors, la caisse, qui n'établit pas que les dépenses de santé précitées dont elle demande le remboursement ont été en rapport avec cette faute, n'est pas en droit d'obtenir le remboursement d'une fraction de ces débours ;

Considérant, en second lieu, que le document intitulé notification des débours mentionne également des frais d'hospitalisation pour un montant de 3 485,90 euros qui se rapportent à la période du 21 au 27 mars 2001, laquelle coïncide avec la période mentionnée dans le rapport d'expertise comme étant la période d'hospitalisation liée à l'intervention chirurgicale pratiquée le 22 mars 2001 pour remédier à l'éventration consécutive à l'opération de réimplantation de l'uretère pratiquée le 24 février 2000, opération qui, selon l'expert, a nécessairement fragilisé la musculature ; qu'il y a lieu d'admettre que ces frais d'hospitalisation sont la conséquence du sectionnement de l'uretère survenu lors de l'opération pratiquée le 8 février 2000 ; que, ces frais ayant été intégralement pris en charge par l'assurance maladie, il y a lieu, compte tenu de la fraction du préjudice mise à la charge des Hôpitaux universitaires de Strasbourg, de condamner ces derniers à verser à la CAISSE PRIMAIRE D'ASSURANCE MALADIE DE SARREGUEMINES la somme de 871,47 euros ;

S'agissant des pertes de revenus :

Considérant que l'expert estime que la période d'incapacité temporaire totale s'étend du 8 février 2000 au 22 mai 2001 ; que, toutefois, le début de cette période correspond à l'intervention initiale pratiquée le 8 février 2000, alors que les Hôpitaux universitaires de Strasbourg sont seulement responsables de la perte de chance pour Mme A d'éviter le risque de sectionnement de l'uretère et les interventions chirurgicales ultérieures nécessaires pour y remédier ; que, compte tenu de la période d'incapacité temporaire totale habituellement entraînée par une hystérectomie, il y a lieu de fixer du 8 avril 2000 au 22 mai 2001, soit 13 mois et demi, la période d'incapacité temporaire totale à prendre en compte pour l'appréciation de la perte de revenus ; qu'il résulte de l'instruction que, compte tenu du salaire net d'un montant de 6 181,33 francs, soit 942,34 euros, perçu par Mme A en janvier 2000, la perte de revenus au cours de la période en cause s'élève à 12 721,59 euros, dont 5 289,06 euros sont restés à la charge de l'intéressée, compte tenu du versement à celle-ci par la CAISSE PRIMAIRE D'ASSURANCE MALADIE DE SARREGUEMINES d'indemnités journalières pour un montant de 7 432,53 euros ; que, par suite, le préjudice indemnisable, compte tenu de la fraction de 25 % retenue ci-dessus, s'élève à 3 180,40 euros ; que, cette somme devant être attribuée par préférence à la victime conformément aux dispositions de l'article L. 376-1 du code de la sécurité sociale et la somme de 5 289,06 euros restée à la charge de la victime étant supérieure à celle de 3 180,40 euros correspondant au préjudice indemnisable, il y a lieu d'attribuer l'intégralité de la somme de 3 180,40 euros à Mme A et de ne rien allouer à la CAISSE PRIMAIRE D'ASSURANCE MALADIE DE SARREGUEMINES au titre de la perte de revenus ;

S'agissant du préjudice professionnel :

Considérant qu'il résulte de l'instruction que Mme A, qui exerçait l'activité de chauffeur de bus, a été licenciée le 22 décembre 2001 pour inaptitude physique, à l'âge de 49 ans ; que l'expert évalue à 5% l'incapacité permanente partielle de l'intéressée résultant d'une pathologie rhumatismale ancienne, dont il estime qu'elle a nécessairement été aggravée par le décubitus prolongé, les différentes laparotomies abdominales et l'éventration ; que cette incapacité permanente partielle résulte donc en partie des conséquences du sectionnement de l'uretère survenu lors de l'opération du 8 février 2000 et des suites de cette complication ; que l'aggravation de la pathologie rhumatismale dont elle souffrait a réduit les chances de Mme A de retrouver un emploi ; qu'il sera fait, dans les circonstances de l'espèce, une juste appréciation de ce préjudice en l'évaluant à la somme de 15 000 euros ; que, la perte de chance de subir le préjudice étant fixée à 25 %, il y a lieu d'accorder une somme de 3 750 euros à Mme A à ce titre ;

En ce qui concerne les préjudices à caractère personnel :

Considérant, en premier lieu, qu'il sera fait une juste appréciation des souffrances physiques et morales de Mme A, de son préjudice esthétique et des troubles dans ses conditions d'existence en les évaluant à 16 000 euros ; que, la perte de chance de subir ces préjudices étant fixée à 25%, les préjudices indemnisables s'élèvent à 4 000 euros ; que cette somme doit être allouée à Mme A ;

Considérant, en second lieu, qu'il sera fait une juste appréciation du préjudice moral et des troubles subis par M. A dans ses conditions d'existence, du fait de la dégradation de l'état de santé de son épouse, en les évaluant à 1 500 euros ; que, la perte de chance de subir ces préjudices étant fixée à 25%, les préjudices indemnisables s'élèvent à 375 euros ; que cette somme doit être allouée à M. A ;

Sur le total des indemnités dues par les Hôpitaux universitaires de Strasbourg :

Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que les Hôpitaux universitaires de Strasbourg doivent verser à la CAISSE PRIMAIRE D'ASSURANCE MALADIE DE SARREGUEMINES la somme de 871,47 euros, à Mme A la somme de 10 930,40 euros et à M. A la somme de 375 euros ;

Sur les intérêts et les intérêts des intérêts :

Considérant, d'une part, que lorsqu'ils ont été demandés, et quelle que soit la date de cette demande, les intérêts moratoires dus en application de l'article 1153 du code civil courent à compter de la réception par la partie débitrice de la réclamation de la somme principale ; que M. et Mme A ont droit à ce que les sommes qui leur sont accordées portent intérêts à compter du 29 mai 2002, date de réception de leur demande préalable d'indemnité adressée aux Hôpitaux universitaires de Strasbourg ;

Considérant, d'autre part, qu'aux termes de l'article 1154 du code civil : Les intérêts échus des capitaux peuvent produire des intérêts, ou par une demande judiciaire, ou par une convention spéciale, pourvu que, soit dans la demande, soit dans la convention, il s'agisse d'intérêts dus au moins pour une année entière ; que, pour l'application de ces dispositions, la capitalisation des intérêts peut être demandée à tout moment devant le juge du fond ; que cette demande ne peut toutefois prendre effet que lorsque les intérêts sont dus au moins pour une année entière ; que, le cas échéant, la capitalisation s'accomplit à nouveau à l'expiration de chaque échéance annuelle ultérieure sans qu'il soit besoin de formuler une nouvelle demande ; que M. et Mme A ont demandé la capitalisation des intérêts dans leur requête enregistrée au Tribunal administratif le 13 août 2002 ; que cette demande prend effet à compter du 29 mai 2003, date à laquelle les intérêts étaient dus pour une année entière ;

Sur les dépens :

Considérant que les frais d'expertise exposés en première instance, liquidés et taxés à la somme de 956 euros par ordonnance du président du Tribunal administratif de Strasbourg du 5 juillet 2002, doivent être mis à la charge des Hôpitaux universitaires de Strasbourg ;

Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge des Hôpitaux universitaires de Strasbourg, d'une part, une somme de 2 000 euros au titre des frais exposés par M. et Mme A et non compris dans les dépens et, d'autre part, une somme de 1 000 euros à verser à la CAISSE PRIMAIRE D'ASSURANCE MALADIE DE SARREGUEMINES au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ;

DÉCIDE :

Article 1er : Le jugement n°0202932 rendu le 19 avril 2005 par le Tribunal administratif de Strasbourg est annulé.

Article 2 : Les Hôpitaux universitaires de Strasbourg sont condamnés à verser une somme de 871,47 € (huit cent soixante et onze euros quarante sept centimes) à la CAISSE PRIMAIRE D'ASSURANCE MALADIE DE SARREGUEMINES.

Article 3 : Les Hôpitaux universitaires de Strasbourg sont condamnés à verser respectivement à M. et Mme A les sommes de 375 € (trois cent soixante quinze euros) et 10 930,40 € (dix mille neuf cent trente euros quarante centimes) avec intérêts au taux légal à compter du 29 mai 2002. Les intérêts échus le 29 mai 2003 seront capitalisés à cette date pour produire eux-mêmes intérêts, puis à chaque échéance annuelle à compter de cette date.

Article 4 : Les frais d'expertise exposés en première instance, d'un montant de 956 € (neuf cent cinquante six euros), sont mis à la charge des Hôpitaux universitaires de Strasbourg.

Article 5 : Les Hôpitaux universitaires de Strasbourg verseront à M. et Mme A une somme de 2 000 € (deux mille euros) et à la CAISSE PRIMAIRE D'ASSURANCE MALADIE DE SARREGUEMINES une somme de 1 000 € (mille euros) au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 6 : Le présent arrêt sera notifié à M. et Mme Joseph A, à la CAISSE PRIMAIRE D'ASSURANCE MALADIE DE SARREGUEMINES et aux Hôpitaux universitaires de Strasbourg.

Copie en sera adressée pour information à la ministre de la santé et des sports.

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N° 09NC00488


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nancy
Formation : 1ère chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 09NC00488
Date de la décision : 17/12/2009
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Composition du Tribunal
Président : M. SOUMET
Rapporteur ?: M. Olivier COUVERT-CASTERA
Rapporteur public ?: Mme STEINMETZ-SCHIES
Avocat(s) : LE PRADO ; LE PRADO ; CABINET JEAN-BENOIT JULIA

Origine de la décision
Date de l'import : 04/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nancy;arret;2009-12-17;09nc00488 ?
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