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19/02/2015 | FRANCE | N°14NC00349

France | France, Cour administrative d'appel de Nancy, 1ère chambre - formation à 3, 19 février 2015, 14NC00349


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A...a demandé au tribunal administratif de Nancy d'annuler l'arrêté du 19 avril 2013 par lequel le préfet de Meurthe-et-Moselle lui a refusé la délivrance d'un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de départ volontaire de trente jours et a fixé le pays de destination.

Par un jugement n° 1301876-1301877 du 5 novembre 2013, le tribunal administratif de Nancy a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregist

rée le 28 février 2014, complétée par un mémoire du 14 janvier 2015, M. B...A..., représenté pa...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A...a demandé au tribunal administratif de Nancy d'annuler l'arrêté du 19 avril 2013 par lequel le préfet de Meurthe-et-Moselle lui a refusé la délivrance d'un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de départ volontaire de trente jours et a fixé le pays de destination.

Par un jugement n° 1301876-1301877 du 5 novembre 2013, le tribunal administratif de Nancy a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 28 février 2014, complétée par un mémoire du 14 janvier 2015, M. B...A..., représenté par Me Jeannot, demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1301876-1301877 du 5 novembre 2013 du tribunal administratif de Nancy ;

2°) d'annuler l'arrêté du 19 avril 2013 du préfet de Meurthe-et-Moselle ;

3°) d'enjoindre au préfet de Meurthe-et-Moselle de lui délivrer un titre de séjour portant la mention " vie privée et familiale " dans le délai d'un mois à compter de la notification de l'arrêt à intervenir, ou de réexaminer sa demande et de lui délivrer dans le délai d'un mois une autorisation provisoire de séjour ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat les entiers dépens de l'instance dont 13 euros au titre du droit de plaidoirie et la somme de 1 800 euros à verser à son conseil en application de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991.

M. A...soutient que :

S'agissant de la décision portant refus de titre de séjour :

- il n'a effectué aucune demande de titre de séjour ; le préfet devait le convoquer pour recueillir ses observations conformément aux dispositions de l'article 24 de la loi du 12 avril 2000 ;

- le préfet a méconnu les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et le 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; le préfet a porté atteinte à son droit à mener une vie privée et familiale ;

- le préfet a méconnu les lignes directrices de la circulaire du 28 novembre 2012 ;

S'agissant de la décision portant obligation de quitter le territoire français :

- la décision sera annulée par voie de conséquence de l'annulation de la décision portant refus de titre de séjour ;

- la décision méconnait l'article 41 § 2 de la charte des droits fondamentaux de l'Union européenne ;

- le préfet a méconnu les dispositions du I de l'article 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et l'article 6 de la directive 2008/115/CE du 16 décembre 2008 ; il s'est estimé en compétence liée ;

- le préfet a commis une erreur manifeste d'appréciation ;

- le préfet a porté atteinte à son droit à une vie privée et familiale et a méconnu les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.

Par un mémoire en défense, enregistré le 27 juin 2014, le préfet de Meurthe-et-Moselle conclut au rejet de la requête.

Il soutient que les moyens soulevés par le requérant ne sont pas fondés et s'en rapporte à ses écritures de première instance.

Un mémoire présenté par le préfet de Meurthe-et-Moselle a été enregistré le 19 janvier 2015, après clôture de l'instruction, et n'a pas été communiqué.

Par une décision du bureau d'aide juridictionnelle en date du 28 janvier 2014, M. A... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la Charte des droits fondamentaux de l'Union européenne ;

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la loi n° 79-587 du 11 juillet 1979 ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

- la loi n° 2000-321 du 12 avril 2000 ;

- la circulaire NOR INTK1229185C du ministre de l'intérieur du 28 novembre 2012 ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Steinmetz-Schies, premier conseiller,

- et les observations de Me Jeannot, avocat de M.A....

Considérant ce qui suit :

1. M. B...A..., de nationalité marocaine, né le 28 novembre 1990, est entré régulièrement en France le 18 mai 2007, muni d'un visa de long séjour portant la mention " regroupement familial ", pour y rejoindre son père, titulaire d'une carte de séjour temporaire. Le 23 février 2009 puis le 2 août 2010, il s'est vu opposer des refus de titre de séjour assortis d'obligation de quitter le territoire français. Le préfet de Meurthe-et-Moselle, par arrêté du 19 avril 2013, lui a à nouveau refusé le séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français et a fixé le pays de destination. Par le jugement dont M. A...fait appel, le tribunal administratif de Nancy a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 19 avril 2013.

Sur la légalité de l'arrêté du 19 avril 2013 :

En ce qui concerne la décision de refus de titre de séjour :

2. En premier lieu, aux termes de l'article 24 de la loi du 12 avril 2000 : " Exception faite des cas où il est statué sur une demande, les décisions individuelles qui doivent être motivées en application des articles 1er et 2 de la loi nº 79-587 du 11 juillet 1979 relative à la motivation des actes administratifs et à l'amélioration des relations entre l'administration et le public n'interviennent qu'après que la personne intéressée a été mise à même de présenter des observations écrites et, le cas échéant, sur sa demande, des observations orales (...) ". Il ressort de ces dispositions que la procédure contradictoire qu'elles instituent n'est pas applicable aux décisions intervenues sur demande des intéressés. Il ressort des pièces du dossier, et plus particulièrement de la fiche de salle signée le 17 janvier 2013, que M. A...a, contrairement à ce qu'il soutient, sollicité à nouveau en 2013 un titre de séjour et a été entendu en préfecture. Dès lors, M. A...n'est pas fondé à soutenir que le refus de titre litigieux serait intervenu en violation des dispositions de l'article 24 de la loi du 12 avril 2000.

3. En deuxième lieu, M. A..., qui s'est borné à produire une promesse d'embauche à l'appui de sa demande de titre de séjour, ne s'est pas prévalu des dispositions de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Dès lors, le préfet n'était pas tenu d'examiner d'office s'il pouvait prétendre au bénéfice d'une autorisation de séjour à ce titre. En tout état de cause, il ressort des termes mêmes de la décision contestée que le préfet a estimé qu'il n'y avait pas lieu d'admettre exceptionnellement l'intéressé au séjour.

4. En troisième lieu, aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui ". Aux termes de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention "vie privée et familiale" est délivrée de plein droit : (...) 7° A l'étranger ne vivant pas en état de polygamie, qui n'entre pas dans les catégories précédentes ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial, dont les liens personnels et familiaux en France, appréciés notamment au regard de leur intensité, de leur ancienneté et de leur stabilité, des conditions d'existence de l'intéressé, de son insertion dans la société française ainsi que de la nature de ses liens avec la famille restée dans le pays d'origine, sont tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus, sans que la condition prévue à l'article L. 311-7 soit exigée. L'insertion de l'étranger dans la société française est évaluée en tenant compte notamment de sa connaissance des valeurs de la République ".

5. M. A...fait valoir la présence en France de son père, de ses grands-parents maternels de nationalité française et de plusieurs membres de sa famille en situation régulière, ainsi que sa scolarisation depuis son arrivée sur le territoire national, l'absence d'attaches au Maroc et sa volonté de travailler en France. Toutefois, compte tenu de la durée et des conditions de séjour en France de l'intéressé, qui a vécu jusqu'à l'âge de 17 ans au Maroc et qui n'a été scolarisé qu'une année en France, et de la circonstance que son père fait lui aussi l'objet d'un refus de séjour, il ne ressort pas des pièces du dossier que le préfet de Meurthe-et-Moselle, en refusant de lui délivrer un titre de séjour, aurait porté une atteinte disproportionnée au droit au respect de sa vie privée et familiale. Le préfet n'a donc pas méconnu les dispositions du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ni les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales. Il n'a pas davantage entaché sa décision d'une erreur manifeste d'appréciation quant à ses conséquences sur la situation personnelle de l'intéressé.

6. Le requérant soutient, dans sa requête d'appel, que le préfet n'a pas examiné sa demande au regard des lignes directrices de la circulaire du 28 novembre 2012 relative aux conditions d'examen des demandes d'admission au séjour déposées par des ressortissants étrangers en situation irrégulière. Toutefois, il n'établit pas avoir demandé la régularisation de sa situation dans ce cadre.

En ce qui concerne la décision portant obligation de quitter le territoire français :

7. En premier lieu, les moyens dirigés contre la décision portant refus de titre de séjour étant écartés, M. A...n'est pas fondé à soutenir que la décision lui faisant obligation de quitter le territoire français doit être annulée par voie de conséquence de l'annulation dudit refus.

8. En deuxième lieu, aux termes de l'article 41 de la Charte des droits fondamentaux de l'Union européenne : " 1. Toute personne a le droit de voir ses affaires traitées impartialement, équitablement et dans un délai raisonnable par les institutions et organes de l'Union. / 2. Ce droit comporte notamment : / - le droit de toute personne d'être entendue avant qu'une mesure individuelle qui l'affecterait défavorablement ne soit prise à son encontre (...) ".

9. M.A..., qui a sollicité la délivrance d'un titre de séjour " salarié ", pouvait faire valoir à tout moment auprès de la préfecture de Meurthe-et-Moselle les éléments pertinents relatifs à son séjour en France avant que n'intervienne l'obligation de quitter le territoire français litigieuse. Il n'est ainsi pas fondé à soutenir qu'il a été privé du droit d'être entendu qu'il tient notamment de l'article 41 de la Charte des droits fondamentaux de l'Union européenne.

10. En troisième lieu, le requérant soutient que le préfet s'est à tort cru en situation de compétence liée en l'obligeant à quitter le territoire français. Toutefois, il résulte des motifs de la décision contestée que l'autorité administrative s'est livrée à un examen complet de la situation personnelle de M. A...avant de l'obliger à quitter le territoire français et a expressément renoncé à son pouvoir de ne pas assortir le refus de titre de séjour d'une obligation de quitter le territoire français.

11. Enfin, il ne ressort pas des pièces du dossier que l'exécution de l'obligation de quitter le territoire français aurait des conséquences d'une exceptionnelle gravité sur la situation personnelle de M. A...ni qu'elle porterait une atteinte disproportionnée à sa vie privée et familiale en méconnaissance des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.

12. Il résulte de tout ce qui précède que M. A...n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement contesté, qui est suffisamment motivé, le tribunal administratif de Nancy a rejeté sa demande. Il y a lieu de rejeter, par voie de conséquence, ses conclusions à fin d'injonction et de versement de sommes au titre de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991.

D E C I D E :

Article 1er : La requête de M. A...est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. B...A...et au ministre de l'intérieur.

Copie en sera adressée au préfet de Meurthe-et-Moselle.

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14NC00349


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nancy
Formation : 1ère chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 14NC00349
Date de la décision : 19/02/2015
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-01-03 Étrangers. Séjour des étrangers. Refus de séjour.


Composition du Tribunal
Président : Mme PELLISSIER
Rapporteur ?: Mme Marie-Pierre STEINMETZ-SCHIES
Rapporteur public ?: M. FAVRET
Avocat(s) : JEANNOT

Origine de la décision
Date de l'import : 06/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nancy;arret;2015-02-19;14nc00349 ?
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