La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

02/04/2015 | FRANCE | N°14NC01555

France | France, Cour administrative d'appel de Nancy, 1ère chambre - formation à 3, 02 avril 2015, 14NC01555


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. D...F...a demandé au tribunal administratif de Strasbourg d'annuler la décision du 15 juin 2010 par laquelle la commission d'appel des règlements et discipline de la Ligue d'Alsace de football association l'a suspendu de ses fonctions officielles pour une durée de cinq ans.

Par un jugement n° 1100678 du 26 janvier 2012, le tribunal administratif de Strasbourg a annulé la décision contestée.

Par un arrêt n° 12NC00510 du 22 octobre 2012, la cour administrative d'appel de Nancy a rejeté l'a

ppel formé par la Ligue d'Alsace de football association contre le jugement du tribun...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. D...F...a demandé au tribunal administratif de Strasbourg d'annuler la décision du 15 juin 2010 par laquelle la commission d'appel des règlements et discipline de la Ligue d'Alsace de football association l'a suspendu de ses fonctions officielles pour une durée de cinq ans.

Par un jugement n° 1100678 du 26 janvier 2012, le tribunal administratif de Strasbourg a annulé la décision contestée.

Par un arrêt n° 12NC00510 du 22 octobre 2012, la cour administrative d'appel de Nancy a rejeté l'appel formé par la Ligue d'Alsace de football association contre le jugement du tribunal administratif de Strasbourg.

Par une décision n° 364772 du 23 juillet 2014, le Conseil d'Etat a annulé l'arrêt n° 12NC00510 et a renvoyé l'affaire à la cour administrative d'appel de Nancy.

Procédure devant la cour :

Par une requête et des mémoires enregistrés le 21 mars 2012, le 7 juin 2012 et le 5 novembre 2014, la Ligue d'Alsace de football association, représentée par MeE..., demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1100678 du 26 janvier 2012 du tribunal administratif de Strasbourg ;

2°) de rejeter la demande de première instance de M.F... ;

3°) de mettre à la charge de M. F...une somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- la demande de première instance de M. F...était irrecevable ;

- la décision contestée n'est pas entachée d'erreur manifeste d'appréciation.

Par des mémoires en défense enregistrés le 29 mai 2012 et le 31 décembre 2014, M. F..., représenté par la SCP Monod-Colin-Stoclet et par Me B..., conclut au rejet de la requête et à ce qu'une somme de 5 000 euros soit mise à la charge de la Ligue d'Alsace de football association au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- sa demande de première instance était recevable ;

- la décision contestée est entachée d'erreur manifeste d'appréciation.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- les règlements de la Fédération française de football ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Stefanski, président,

- les conclusions de M. Favret, rapporteur public,

- et les observations de MeA..., pour la Ligue d'Alsace de football association.

Une note en délibéré présentée pour la Ligue d'Alsace de football association a été enregistrée le 12 mars 2015.

Considérant ce qui suit :

1. Le club de football de Drusenheim disposait dans son effectif de quatre joueurs ayant obtenu leur qualification en dehors de la période de mutation et sur la licence desquels devait figurer expressément la mention " mutation hors période ", seuls deux joueurs de cette catégorie pouvant participer à chaque rencontre. A l'occasion d'un match disputé le 18 avril 2010 entre les équipes de Weyersheim et de Drusenheim dans le cadre du championnat départemental de promotion d'excellence, le capitaine de l'équipe de Weyersheim a, avant le début de la partie, formé des réserves au motif qu'un des joueurs de l'équipe de Drusenheim ne pouvait, compte tenu de sa date de mutation dans le club, figurer régulièrement sur la feuille de match. L'équipe de Drusenheim a alors retiré le joueur de la feuille de match. Le 17 mai 2010, la commission des règlements et discipline du Bas-Rhin, saisie en première instance en application des règlements généraux de la Fédération française de football, a prononcé diverses sanctions contre le club de Drusenheim et certains de ses membres. M. F..., entraîneur de l'équipe de Drusenheim a été sanctionné de cinq ans de suspension de ses fonctions officielles pour falsification de licence et tentative de fraude sur la qualification d'un joueur. Saisie par la Ligue d'Alsace de football association, qui demandait une aggravation des sanctions, ainsi que par le club de Drusenheim et son président, la commission d'appel des règlements et discipline s'est prononcée le 15 juin 2010 et a notamment réexaminé, pour la confirmer, la sanction infligée à M.F.... Sur demande de M.F..., le tribunal administratif de Strasbourg a annulé la sanction prononcée à l'encontre de l'intéressé. La Ligue d'Alsace de football association forme appel de ce jugement.

Sur la fin de non-recevoir opposée par la Ligue d'Alsace de football association :

2. Aux termes de l'alinéa 2 de l'article 2 des règlements généraux susvisés de la Fédération française de football : " Toute personne physique ou morale ou tout membre de la fédération qui conteste une décision a l'obligation d'épuiser les voies de recours internes avant tout recours juridictionnel ".

3. Il ressort des pièces du dossier que, bien que M. F...n'ait pas fait appel de la sanction prononcée contre lui par la commission des règlements et discipline du Bas-Rhin, la commission d'appel des règlements et discipline a estimé qu'en raison de l'appel formé par la Ligue d'Alsace de football association qui demandait l'aggravation de cette sanction, elle était tenue de statuer à nouveau sur cette sanction. Après avoir entendu M. F...qu'elle avait convoqué en lui indiquant qu'il pouvait se faire assister par un tiers et après avoir réexaminé l'ensemble de la situation, la commission d'appel des règlements et discipline a décidé de confirmer le quantum et les motifs de la sanction prononcée par la commission de première instance. Ainsi, et bien que M. F...n'ait pas lui-même fait appel, les voies de recours internes à la ligue ont été épuisées en ce qui concerne la sanction qui lui a été infligée et sur laquelle l'instance d'appel s'est prononcée. Dans ces conditions, M. F... était recevable à former, devant le tribunal administratif de Strasbourg, un recours juridictionnel tendant à l'annulation de la décision du 15 juin 2010 de la commission d'appel des règlements et discipline en tant qu'elle le concernait. Par suite, c'est à bon droit que les premiers juges ont écarté la fin de non-recevoir opposée par la Ligue d'Alsace de football association.

Sur les conclusions aux fins d'annulation :

4. D'une part, le b) du 2) de l'article 9 des règlements généraux de la Fédération française de football prévoit qu'en cas d'affaires soumises à instruction, l'intéressé est avisé " quinze jours au moins avant la date de la réunion de la Commission au cours de laquelle son cas sera examiné, qu'il est convoqué à cette séance pour les griefs énoncés dans la convocation, qu'il peut présenter des observations écrites ou orales, se faire assister ou représenter pas tout conseil ou avocat de son choix, consulter l'ensemble des pièces du dossier, dont le rapport d'instruction, avant la séance et indiquer huit jours au moins avant la réunion le nom des personnes dont il demande la convocation ". L'article 10 des mêmes règlements prévoit que ces dispositions de l'article 9 sont applicables en cas d'appel.

5. Il résulte de l'instruction et il n'est pas contesté que M. F...n'a été convoqué que par lettre du 4 juin 2010, reçue le lendemain, à la réunion du 15 juin 2010 de la commission d'appel des règlements et discipline et que la convocation ne comportait pas les griefs sur lesquels la commission entendait se prononcer. Il n'est pas davantage contesté que la brièveté du délai n'était pas imposée par l'urgence permettant une convocation dans un délai inférieur à quinze jours en application de l'article 9 des règlements généraux. Cependant, M. F... a pu se présenter devant la commission, assisté d'un tiers, et il n'indique pas en quoi la brièveté du délai de convocation ne l'a pas mis à même de présenter sa défense. En conséquence, l'irrégularité dont est entachée la procédure n'a pas privé M. F... d'une garantie et n'a pas eu d'incidence sur la décision contestée de la commission d'appel des règlements et discipline

6. D'autre part, l'article 207 des règlements généraux de la Fédération française de football prévoit qu'est passible des sanctions prévues à l'article 200 des règlements tout licencié qui a " fraudé ou tenté de frauder, a produit un faux ou dissimulé une information concernant l'obtention ou l'utilisation des licences ". Parmi les sanctions mentionnées par l'article 200 figure notamment l'interdiction de toutes fonctions officielles.

7. La sanction contestée de suspension de toutes fonctions officielles de M. F... pour une durée de cinq ans a été prononcée le 1er juillet 2010 par la commission d'appel des règlements et discipline pour "falsification de licence et tentative de fraude sur la qualification d'un joueur". La Ligue d'Alsace de football association fait valoir que M. F...a été l'instigateur ou le complice de la falsification de la licence d'un joueur, M.C..., et qu'en sa qualité d'entraîneur et d'éducateur, il ne pouvait ignorer la tentative de fraude et s'abstenir de dénoncer la falsification.

8. Il résulte de l'instruction qu'avant le match opposant le 18 avril 2010 les clubs de Drusenheim et de Weyersheim, le capitaine de l'équipe de Weyersheim, dont les dirigeants avaient été informés anonymement la veille que l'équipe de Drusenheim aurait l'intention de faire participer irrégulièrement M. C...au match, a émis des réserves à ce propos. Avant le début de la compétition, M. F...a retiré ce joueur de la feuille de match pour raisons de santé. La licence du joueur, alors remise à l'arbitre avec les autres licences, a ensuite disparu dans des conditions inconnues.

9. En premier lieu, pour soutenir que la licence de M. C...était falsifiée en ce qu'elle ne comportait pas la mention "mutation hors période fin 11/08/2010" qui aurait pu empêcher le joueur concerné de participer au match du 18 avril 2010 et qu'elle comportait une fausse signature, la Ligue d'Alsace de football association soutient qu'un des dirigeants du club de Weyersheim en avait pris une photographie avant la rencontre. La ligue produit un constat d'huissier du 12 mai 2000 attestant que cette photographie se trouvait dans une carte numérique extraite d'un appareil photographique et remise à l'huissier par un membre de la commission de discipline de la Ligue d'Alsace de football association et que le fichier correspondant portait la mention "créé le dimanche 18 avril 2010". Cependant, ce constat ne suffit pas à établir que ce document électronique était établi et conservé dans des conditions de nature à en garantir l'intégrité, ainsi que l'exige l'article 1316-1 du code civil pour admettre en preuve des documents électroniques. En tout état de cause, à supposer même établie la falsification de la licence, il ne ressort d'aucune des pièces du dossier que cette falsification serait imputable à M.F.... La seule circonstance que M. F...a retiré le joueur de la feuille de match après les réserves émises par les représentants du club de Weyersheim ne le démontre pas davantage, ni n'établit que M. F...avait eu connaissance de cette éventuelle falsification.

10. En second lieu, la Ligue d'Alsace de football association fait valoir qu'en sa qualité d'entraîneur et d'éducateur, M. F...ne pouvait ignorer la tentative de fraude consistant à faire irrégulièrement participer au match un joueur et qu'il devait dénoncer la falsification. La ligue s'appuie notamment sur la proposition de conciliation du 8 décembre 2010 faite par le conciliateur du Comité national olympique français, qui constatait qu'il ne résultait pas avec certitude des éléments du dossier et des débats que M. D... F...avait participé à la falsification de la licence du joueur, mais qu'en revanche, une forte présomption pesait sur lui, du fait qu'il ne pouvait ignorer, en sa qualité d'éducateur, le nombre de joueurs mutés portés sur la feuille de match. Toutefois, il résulte de ce qui est dit ci-dessus que la falsification n'étant pas certaine, il ne peut être reproché à M. F... de ne pas l'avoir dénoncée. Si la circonstance que M.F..., qui a refusé de signer la proposition de conciliation, n'a retiré le joueur de la feuille de match qu'après les protestations du club adverse et en invoquant des raisons de santé peut, comme le mentionne la proposition de conciliation créer une "forte présomption", elle ne démontre pas avec certitude la volonté de M. F...de procéder à une tentative de fraude, ni de faire participer au match plus de deux joueurs ayant obtenu leur qualification en dehors de la période de mutation, dès lors qu'il pouvait estimer après l'échauffement, comme il l'a constamment soutenu, que M.C..., relevant de blessure, n'était pas le plus indiqué, parmi ceux ayant obtenu leur qualification en dehors de la période de mutation, pour participer à la rencontre et que l'inscription de l'intéressé sur la feuille de match n'impliquait pas que le joueur participât effectivement à la rencontre, ce qui n'est pas contesté. Dans ces conditions, la tentative de fraude n'est pas davantage établie que la faute consistant à ne pas dénoncer une falsification de licence.

11. Ainsi, c'est à tort que la commission d'appel des règlements et discipline a prononcé une sanction contre M.F....

12. Il résulte de ce qui précède que la Ligue d'Alsace de football association n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Strasbourg a annulé la décision de la commission d'appel des règlements et discipline du 15 juin 2010 en tant qu'elle suspendait M. F... de ses fonctions officielles pour une durée de cinq ans.

Sur l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

13. Ces dispositions font obstacle à ce que M.F..., qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, soit condamné à payer à la Ligue d'Alsace de football association la somme que celle-ci demande au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens. En revanche, il y a lieu de mettre à la charge de la Ligue d'Alsace de football association le paiement d'une somme de 1 500 euros à M. F...à ce titre.

D E C I D E :

Article 1er : La requête de la Ligue d'Alsace de football association est rejetée.

Article 2 : La Ligue d'Alsace de football association versera à M. F...une somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à la Ligue d'Alsace de football association et à M. D... F....

''

''

''

''

2

N° 14NC01555


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nancy
Formation : 1ère chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 14NC01555
Date de la décision : 02/04/2015
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

65-05-01 Transports. Politique et coordination des transports. Planification.


Composition du Tribunal
Président : Mme PELLISSIER
Rapporteur ?: Mme Colette STEFANSKI
Rapporteur public ?: M. FAVRET
Avocat(s) : SCP MONOD, COLIN ; SCP MONOD, COLIN ; SCP ROTH-PIGNON LEPAROUX ROSENSTIEHL ET ANDREINI

Origine de la décision
Date de l'import : 06/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nancy;arret;2015-04-02;14nc01555 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award