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12/11/2015 | FRANCE | N°15NC00366

France | France, Cour administrative d'appel de Nancy, 3ème chambre - formation à 3, 12 novembre 2015, 15NC00366


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. C...D...B...a demandé au tribunal administratif de Strasbourg d'annuler l'arrêté du 8 août 2014 par lequel le préfet de la Moselle a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays à destination duquel il pourrait être éloigné.

Par un jugement n° 1404848 du 21 janvier 2015, le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregist

rée le 19 février 2015, M. C...D...B..., représenté par MeA..., demande à la cour :

1°) d'annuler le...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. C...D...B...a demandé au tribunal administratif de Strasbourg d'annuler l'arrêté du 8 août 2014 par lequel le préfet de la Moselle a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays à destination duquel il pourrait être éloigné.

Par un jugement n° 1404848 du 21 janvier 2015, le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 19 février 2015, M. C...D...B..., représenté par MeA..., demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de Strasbourg du 21 janvier 2015 ;

2°) d'annuler l'arrêté du 8 août 2014 ;

3°) d'enjoindre au préfet de la Moselle de réexaminer sa situation, sous astreinte de trente euros par jour de retard à compter de la notification de l'arrêt à intervenir, et de lui délivrer, dans les meilleurs délais, une autorisation provisoire de séjour ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 1 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, à verser à son conseil en application de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 modifiée relative à l'aide juridique.

Il soutient que :

- l'arrêté attaqué est entaché d'une incompétence ;

- il porte atteinte à sa vie privée et familiale, en méconnaissance des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- la mesure d'éloignement méconnaît le principe général du droit de l'Union européenne que constitue le droit à une bonne administration et l'article 41 de la charte des droits fondamentaux de l'Union européenne obligeant le préfet à l'entendre préalablement à l'édiction de la mesure litigieuse ;

- le préfet n'a pas procédé à un examen de sa situation personnelle, omettant de prendre en compte sa situation médicale ;

- il a également méconnu les stipulations de l'article 9 de la convention franco-camerounaise.

Par un mémoire en défense enregistré le 25 juin 2015, le préfet de la Moselle conclut au rejet de la requête au motif qu'aucun des moyens invoqués n'est fondé.

Par une décision du 28 mai 2015, le président du bureau d'aide juridictionnelle a admis M. B...au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- la charte des droits fondamentaux de l'Union européenne ;

- la convention entre la République française et la République du Cameroun relative à la circulation et au séjour des personnes signée à Yaoundé le 24 janvier 1994 ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le code de justice administrative.

Le rapporteur public a été dispensé, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience par une décision du président de la formation de jugement.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le rapport de M. Guérin-Lebacq a été entendu à l'audience publique.

1. Considérant que M.B..., ressortissant camerounais né le 2 mai 1988, déclare être entré irrégulièrement en France le 11 juillet 2013, après avoir séjourné aux Pays-Bas et au Luxembourg ; que suite à son mariage le 11 janvier 2014 avec une ressortissante française, l'intéressé a sollicité auprès du préfet de la Moselle la délivrance d'un titre de séjour sur le fondement des dispositions du 4° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; que, par un arrêté du 8 août 2014, le préfet lui a refusé le titre demandé, l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays à destination duquel il pourrait être éloigné ; que par un jugement du 21 janvier 2015 dont M. B... relève appel, le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté ;

2. Considérant, en premier lieu, que M. B...reprend en appel, sans apporter d'éléments nouveaux, les moyens tirés de l'incompétence de l'auteur de l'arrêté attaqué et de la méconnaissance des stipulations de l'article 9 de la convention franco-camerounaise ; qu'il y a lieu d'écarter ces moyens par adoption des motifs retenus par les premiers juges ;

3. Considérant, en deuxième lieu, qu'aux termes du paragraphe 1 de l'article 41 de la charte des droits fondamentaux de l'Union européenne : " Toute personne a le droit de voir ses affaires traitées impartialement, équitablement et dans un délai raisonnable par les institutions et organes de l'Union " ; qu'aux termes du paragraphe 2 de ce même article : " Ce droit comporte notamment : / - le droit de toute personne d'être entendue avant qu'une mesure individuelle qui l'affecterait défavorablement ne soit prise à son encontre ; (...) " ; qu'aux termes du paragraphe 1 de l'article 51 de la charte : " Les dispositions de la présente Charte s'adressent aux institutions, organes et organismes de l'Union dans le respect du principe de subsidiarité, ainsi qu'aux États membres uniquement lorsqu'ils mettent en oeuvre le droit de l'Union. (...) " ;

4. Considérant que le droit d'être entendu implique que l'autorité préfectorale, avant de prendre à l'encontre d'un étranger une décision portant obligation de quitter le territoire français, mette l'intéressé à même de présenter ses observations écrites et lui permette, sur sa demande, de faire valoir des observations orales, de telle sorte qu'il puisse faire connaître, de manière utile et effective, son point de vue sur la mesure envisagée avant qu'elle n'intervienne ; que, toutefois, dans le cas prévu au 3° du I de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, où la décision faisant obligation de quitter le territoire français est prise concomitamment au refus de délivrance d'un titre de séjour, l'obligation de quitter le territoire français découle nécessairement du refus de titre de séjour ; que le droit d'être entendu n'implique alors pas que l'administration ait l'obligation de mettre l'intéressé à même de présenter ses observations de façon spécifique sur la décision l'obligeant à quitter le territoire français, dès lors qu'il a pu être entendu avant que n'intervienne la décision refusant de lui délivrer un titre de séjour ;

5. Considérant que lorsqu'il sollicite la délivrance ou le renouvellement d'un titre de séjour, l'étranger, en raison même de l'accomplissement de cette démarche qui tend à son maintien régulier sur le territoire français, ne saurait ignorer qu'en cas de refus, il pourra faire l'objet d'une mesure d'éloignement ; qu'à l'occasion du dépôt de sa demande, il est conduit à préciser à l'administration les motifs pour lesquels il demande que lui soit délivré un titre de séjour et à produire tous éléments susceptibles de venir au soutien de cette demande ; qu'il lui appartient, lors du dépôt de cette demande, lequel doit en principe faire l'objet d'une présentation personnelle du demandeur en préfecture, d'apporter à l'administration toutes les précisions qu'il juge utiles ; qu'il lui est loisible, au cours de l'instruction de sa demande, de faire valoir auprès de l'administration toute observation complémentaire utile, au besoin en faisant état d'éléments nouveaux ; que le droit de l'intéressé d'être entendu, ainsi satisfait avant que n'intervienne le refus de titre de séjour, n'impose pas à l'autorité administrative de mettre l'intéressé à même de réitérer ses observations ou de présenter de nouvelles observations, de façon spécifique, sur l'obligation de quitter le territoire français qui est prise concomitamment et en conséquence du refus de titre de séjour ;

6. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que la seule circonstance que le préfet de la Moselle n'aurait pas expressément informé M. B...qu'en cas de rejet de sa demande de titre de séjour, il serait susceptible d'être contraint de quitter le territoire français, en l'invitant à formuler ses observations sur cette éventualité, n'est pas de nature à permettre de regarder l'intéressé comme ayant été privé de son droit à être entendu énoncé au paragraphe 2 de l'article 41 de la charte des droits fondamentaux de l'Union européenne ;

7. Considérant, en troisième lieu, que, contrairement à ce que soutient M.B..., il ressort des termes mêmes de l'arrêté attaqué que le préfet de la Moselle a procédé à un examen particulier de sa situation personnelle avant de lui opposer un refus de séjour assorti d'une mesure d'éloignement ;

8. Considérant, enfin, qu'aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1- Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. 2- Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui " ;

9. Considérant que M. B...soutient qu'il est marié avec une ressortissante française ; que, toutefois, son mariage a été célébré le 11 janvier 2014, sept mois avant l'édiction de l'arrêté attaqué ; que les documents qu'il produit à l'appui de sa requête ne permettent pas d'établir l'ancienneté de sa relation, antérieurement au mariage ; que, dès lors, l'arrêté attaqué n'a pas porté une atteinte disproportionnée au droit de M. B...à mener une vie privée et familiale normale au regard des buts en vue desquels il a été pris ; que, par suite, il n'a pas méconnu les stipulations précitées de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

10. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que M. B...n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa demande ; que, par voie de conséquence, ses conclusions à fin d'injonction et d'astreinte, ainsi que celles présentées sur le fondement des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991, ne peuvent qu'être rejetées ;

D E C I D E :

Article 1er : La requête présentée par M. B...est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. C...D...B...et au ministre de l'intérieur.

Copie en sera adressée pour information au préfet de la Moselle.

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N° 15NC00366


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nancy
Formation : 3ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 15NC00366
Date de la décision : 12/11/2015
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

Étrangers - Séjour des étrangers.

Étrangers - Obligation de quitter le territoire français (OQTF) et reconduite à la frontière.


Composition du Tribunal
Président : Mme ROUSSELLE
Rapporteur ?: M. Jean-Marc GUERIN-LEBACQ
Rapporteur public ?: M. COLLIER
Avocat(s) : MERLL

Origine de la décision
Date de l'import : 05/12/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nancy;arret;2015-11-12;15nc00366 ?
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