La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

26/11/2015 | FRANCE | N°15NC00532

France | France, Cour administrative d'appel de Nancy, 1ère chambre - formation à 3, 26 novembre 2015, 15NC00532


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B...D..., d'une part, Mme C...D..., d'autre part, ont demandé au tribunal administratif de Strasbourg d'annuler les décisions du 27 mars 2014 par lesquelles le préfet de la Moselle a refusé de leur délivrer un titre de séjour, les a obligés à quitter le territoire français et a fixé le pays de destination.

Par un jugement n° 1403589-1403590 du 2 octobre 2014, le tribunal administratif de Strasbourg a joint et rejeté les demandes de M. et MmeD....

Procédure devant la cour :

Par

une requête enregistrée le 20 mars 2015, M. et MmeD..., représentés par Me A..., demandent à ...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B...D..., d'une part, Mme C...D..., d'autre part, ont demandé au tribunal administratif de Strasbourg d'annuler les décisions du 27 mars 2014 par lesquelles le préfet de la Moselle a refusé de leur délivrer un titre de séjour, les a obligés à quitter le territoire français et a fixé le pays de destination.

Par un jugement n° 1403589-1403590 du 2 octobre 2014, le tribunal administratif de Strasbourg a joint et rejeté les demandes de M. et MmeD....

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 20 mars 2015, M. et MmeD..., représentés par Me A..., demandent à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1403589-1403590 du 2 octobre 2014 du tribunal administratif de Strasbourg ;

2°) d'annuler les décisions du préfet de la Moselle du 27 mars 2014 les concernant ;

3°) d'enjoindre au préfet de la Moselle de leur délivrer un titre de séjour, subsidiairement, de procéder au réexamen de leurs demandes, dans un délai d'un mois à compter de la notification de l'arrêt à intervenir sous astreinte de 100 euros par jour de retard ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat le paiement à Me A... d'une somme de 1 500 euros en application de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique.

M. et Mme D...soutiennent que :

En ce qui concerne les décisions leur refusant un titre de séjour :

- elles sont insuffisamment motivées, démontrant ainsi que le préfet n'a pas procédé à un examen particulier de leur situation ;

- les refus de titre de séjour portent une atteinte disproportionnée à leur droit au respect de la vie privée et familiale et méconnaissent les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ainsi que les dispositions du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- elles sont entachées d'une erreur manifeste d'appréciation quant à leurs conséquences sur leur situation personnelle ;

En ce qui concerne les obligations de quitter le territoire français :

- elles sont illégales en raison de l'illégalité des décisions portant refus de titre de séjour ;

- elles sont entachées d'une erreur manifeste d'appréciation quant à leurs conséquences sur leur situation personnelle au regard des soins qu'ils requièrent et dont ils ne bénéficieront pas au Monténégro ;

En ce qui concerne les décisions relatives au délai de départ volontaire :

- les décisions fixant le délai de départ volontaire à 30 jours sont illégales en raison de l'illégalité des obligations de quitter le territoire français ;

- la durée de trente jours est inappropriée ;

En ce qui concerne les décisions fixant le pays de renvoi :

- elles sont illégales en raison de l'illégalité des décisions de refus de séjour sur lesquelles elles se fondent ;

- elles sont entachées d'une erreur manifeste d'appréciation quant à leurs conséquences sur leur situation personnelle ;

- elles méconnaissent les stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.

Par un mémoire en défense enregistré le 11 août 2015, le préfet de la Moselle conclut au rejet de la requête.

Il soutient que les moyens soulevés par M. et Mme D...ne sont pas fondés.

M. et Mme D...ont été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par des décisions du 29 janvier 2015.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la loi n° 79-587 du 11 juillet 1979 ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer ses conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le rapport de M. Richard, premier conseiller, a été entendu au cours de l'audience publique.

Considérant ce qui suit :

1. M.D..., né le 14 juillet 1979, et MmeD..., née le 30 août 1984, ressortissants monténégrins, sont entrés irrégulièrement en France le 9 juillet 2012, selon leurs déclarations. Leurs demandes d'asile ont été rejetées par deux décisions de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides du 18 octobre 2012, confirmées le 10 juillet 2013 par la Cour nationale du droit d'asile. Par deux arrêtés du 27 mars 2014, le préfet de la Moselle a refusé de leur délivrer un titre de séjour, leur a fait obligation de quitter le territoire français et a fixé le pays à destination duquel ils pourront être éloignés. M. et Mme D...relèvent appel du jugement du 2 octobre 2014 par lequel le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté leurs demandes tendant à l'annulation des arrêtés du 27 mars 2014.

Sur la légalité des refus de titre de séjour :

2. En premier lieu, en vertu des articles 1er et 3 de la loi du 11 juillet 1979 relative à la motivation des actes administratifs, les décisions individuelles défavorables doivent comporter l'énoncé des considérations de droit et de fait qui constituent leur fondement. Les refus de titre de séjour contestés visent les textes dont il fait application et mentionnent les faits qui en constituent le fondement en comprenant des éléments propres à la situation de M. et MmeD..., notamment les conditions du rejet de leurs demandes d'asile, la référence à la situation de leur conjoint et l'absence de tout élément permettant de leur délivrer un titre de séjour à titre exceptionnel. Ainsi, et alors même que ces motifs ne reprennent pas l'ensemble des éléments caractérisant la situation des intéressés, ces décisions par lesquelles le préfet a procédé à un examen suffisant de leur situation personnelle, répondent aux exigences de motivation posées par la loi susvisée du 11 juillet 1979.

3. En second lieu, aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. / 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui ".

4. M. et Mme D...soutiennent qu'ils font de nombreux efforts d'intégration par le biais de leur investissement associatif et le suivi de cours de français. Les requérants se prévalent également de la naissance de leur enfant en France en 2012 qui n'a pas été prise en compte par le préfet de la Moselle. Il ressort toutefois des pièces du dossier que les intéressés ont résidé habituellement en dehors du territoire français jusqu'à l'âge de 33 et 28 ans et ne justifient pas de l'absence d'attaches familiales dans leur pays d'origine. Par ailleurs, les décisions litigieuses n'ont ni pour objet, ni pour effet de mettre fin à leur vie familiale commune. Dans ces conditions, M. et Mme D...ne sont pas fondés à soutenir qu'en leur refusant la délivrance d'un titre de séjour, le préfet de la Moselle a porté une atteinte disproportionnée à leur droit au respect de la vie privée et familiale en méconnaissance des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales. Il ne ressort pas plus des pièces du dossier que ces décisions seraient entachées d'une erreur manifeste d'appréciation quant à leurs conséquences sur la situation personnelle des intéressés.

Sur la légalité des obligations de quitter le territoire français :

5. Il résulte de ce qui précède aux points 2 à 4 que le moyen tiré de l'exception d'illégalité des décisions portant refus de titre de séjour ne peut qu'être écarté.

6. Les requérants ne produisent aucune précision ni aucun élément probant à l'appui de leurs allégations relatives à leurs problèmes de santé. Ils ne justifient donc pas que leur état de santé nécessite une prise en charge médicale ni que le défaut de celle-ci est susceptible d'entraîner pour eux des conséquences d'une exceptionnelle gravité. M. et Mme D...ne sont donc pas fondés à soutenir que le préfet de la Moselle ne pouvait les obliger à quitter le territoire français sans commettre d'erreur manifeste d'appréciation.

Sur la légalité des décisions fixant le délai de départ volontaire :

7. Il résulte de ce qui précède aux points 2 à 6 que le moyen tiré de l'exception d'illégalité des décisions portant refus de titre de séjour et obligation de quitter le territoire français ne peut qu'être écarté.

8. Il ne ressort pas des pièces du dossier que le préfet se soit cru lié par le délai de trente jours mentionné à l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et n'aurait pas examiné, au vu des pièces dont il disposait, la possibilité de prolonger le délai de départ volontaire octroyé à M. et Mme D...avant de le fixer à trente jours. Si les requérants soutiennent que la durée est insuffisante, ils ne démontrent pas se trouver dans une situation imposant qu'un délai de départ supérieur à trente jours leur soit accordé. Par suite, M. et Mme D...ne sont pas fondés à soutenir que le préfet a entaché ses décisions d'une illégalité en ne leur accordant pas un délai plus long.

Sur la légalité des décisions fixant le pays de destination :

9. Aux termes de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " Nul ne peut être soumis à la torture ni à des peines ou traitements inhumains ou dégradants ". Aux termes de l'article L. 513-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " (...) Un étranger ne peut être éloigné à destination d'un pays s'il établit que sa vie ou sa liberté y sont menacées ou qu'il y est exposé à des traitements contraires aux stipulations de l'article 3 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales du 4 novembre 1950 ".

10. M. et Mme D...soutiennent qu'ils sont exposés à des menaces au Monténégro dès lors que M. D...a été plongé dans le coma après avoir été agressé alors qu'il exerçait son activité de chauffeur de taxi et que l'Etat n'est pas en mesure d'assurer sa sécurité. Les requérants, qui se bornent à reproduire les éléments de première instance, notamment par le récit produit à l'appui de leur demande d'asile, ne font toutefois valoir aucun élément suffisamment précis et probant de nature à établir le bien fondé de leurs allégations relatives aux risques personnellement encourus dans l'hypothèse d'un retour dans leur pays d'origine. Dès lors, le moyen tiré de ce que les décisions attaquées auraient été prises en méconnaissance des stipulations précitées ne peut qu'être écarté. Il en va de même, pour les mêmes motifs, du moyen tiré de l'erreur manifeste d'appréciation.

11. Il résulte de tout ce qui précède que M. et Mme D...ne sont pas fondés à soutenir que c'est à tort que, par le jugement contesté, le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté leurs demandes tendant à l'annulation des arrêtés du préfet de la Moselle du 27 mars 2014. Il y a lieu de rejeter, par voie de conséquence, les conclusions aux fins d'injonction et celles tendant à l'application des dispositions de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991.

D E C I D E :

Article 1er : Les requêtes de M. et Mme D...sont rejetées.

Article 2: Le présent arrêt sera notifié à M. B...D..., à Mme C...D...et au ministre de l'intérieur.

Copie en sera adressée au préfet de la Moselle.

''

''

''

''

23

2

N° 15NC00532


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nancy
Formation : 1ère chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 15NC00532
Date de la décision : 26/11/2015
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-01 Étrangers. Séjour des étrangers.


Composition du Tribunal
Président : Mme MONCHAMBERT
Rapporteur ?: M. Michel RICHARD
Rapporteur public ?: M. FAVRET
Avocat(s) : CONTI

Origine de la décision
Date de l'import : 30/01/2016
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nancy;arret;2015-11-26;15nc00532 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award